Mauritanie, le chouchou d’Aziz vise la présidence du patronat

Le président Ahmed Ould Abdel Aziz cherche à introniser Zeine Abidine, devenu son principal allié dans le pillage des ressources du pays, comme patron des patrons mauritanien.

Protégé depuis toujours par le Premier ministre mauritanien, Yahya Hadenine, et depuis deux ans par le Président de la République, Ahmed Ould Abdel Aziz, qui l’utilise comme intermédiaire dans de nombreux arrangements financiers, l’ancien responsable de la buvette de « Radio Mauritanie », Zeine Abidine, dont la fortune est tombée du ciel (présidentiel), a désormais la prétention de devenir le patron des patrons mauritanien.

Quitte, en l’absence de la légitimité que lui donnerait une véritable réussite comme industriel, à parvenir à ses fins par une Révolution de Palais inspirée par le pouvoir!

Campagnes de dénigrement

Ces deux dernières années, l’ensemble de l’appareil d’Etat mauritanien s’est mobilisée contre l’actuelle direction de l’Union Nationale du Patronat Mauritanien (UNPM). Le 21 juin 2016, le chef de gouvernement s’adressait aux Présidents des Fédérations Professionnelles en les sommant d’évincer l’actuel président de l’UNPM, Ahmed Baba Ould Azizi, un brillant homme d’affaires jugé trop indépendant du pouvoir.

Un mois plus tard, un dossier est monté contre le patron des patrons mauritanien et transmis aux autorités italiennes dont il est, depuis dix huit ans, le consul honoraire à Nouakchott. Peine perdue! Dans une réponse ciselée au gouvernement mauritanien, le ministre italien des Affaires Etrangères rendra hommage au bilan du président de l’UNPM.

Autant de pressions gouvernementales qui provoquèrent une ferme réaction, le 20 juillet 2016, de Lynda Kromjong, la secrétaire générale de l’Organisation Internationale des Employeurs (OIE), qui représente les patrons au sein de l’Organisation Internationale du Travail dont la Mauritanie a signé les conventions. « C’est avec une grande surprise, écrivait cette dernière à ses interlocuteurs à Nouakchott, que nus avons appris que le gouvernement de la Mauritanie cherche à s’immiscer dans le renouvellement des instances de l’Union Nationale du patronat Mauritanien ».

Aziz, le seul patron

Autant d’entorses à la vie normale des institutions internationales qui ne semble pas avoir tempéré les ardeurs du pouvoir mauritanien. Car ce serait sans comprendre que la Mauritanie ne compte qu’un seul patron, le général-président Aziz, qui est décidé à tuer dans l’oeuf toute organisation indépendante de la société civile. Et peu importe si l’actuel patron des patrons mauritanien, Ahmed Baba Ould Azizi, bénéficie d’une véritable aura internationale, en devenant en juillet 2017 le président de l’Union Maghrébine des Employeurs (UME).

En ce début d’automne 2017, le Premier ministre convoquait le président du comité éxécutf de l’organisation patronale et le sommait d’organiser, dans les quarante huit heures (!), un nouveau congrès afin d’éliminer l’actuelle direction. Et le chef de gouvernement, pour la première fois, ne cachait pas son soutien total à son ami et comparse, Zeine Abidine. Lequel ne manque pas de régler les cotisations de plusieurs grosses fédérations patronales pour mieux acheter, demain, leurs votes en sa faveur. La peur chez beaucoup de patrons de perdre les rares appels d’offre qui ne sont pas préemptés par la Présidence pourrait, hélas, rendre possible l’élection du chouchou du pouvoir.

Tout s’achète dans la Mauritanie d’aujourd’hui.

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)