Selon l’hebdomadaire « le Point », le boycott de grandes marques marocaines (lait, essence…) était « téléguidé » par les islamistes
C’est un véritable coup de tonnerre qui risque d’avoir des répercussions très graves. Une enquête encore confidentielle d’un think tank français révèle que le boycott lancé en avril 2018 à l’encontre de trois grandes enseignes marocaines était, au fait, inspiré par des groupes islamistes ayant pour objectif de déstabiliser le système politique marocain, écrit vendredi 20 septembre le magazine hebdomadaire français Le Point.
En effet, c’est à partir du 20 avril 2019 que s’étaient multipliés de façon virale les appels au boycott des produits de trois sociétés implantées dans le royaume chérifien. Les publications souvent sponsorisées accusaient ces sociétés de faire indûment monter les prix, note Le Point, soulignant que « cet apparent mouvement de consommateurs mécontents prend rapidement un tour plus politique ».
Les législatives dans le viseur
« De fait, les protestations contre la vie chère vont rapidement faire place à de violentes attaques ad hominem visant en particulier le président du RNI ainsi que les autres partis de la coalition gouvernementale comme le Parti de la Justice et du Développement (PJD) – qui avait paru soutenir pourtant le boycott initialement », ajoute le magazine, faisant observer que toutes ces formations « fourbissent leurs armes en vue des élections législatives de 2021 ».
L’enquête de l’EPGE s’efforce de remonter aux sources de cette campagne, en commençant sans difficulté, à identifier des sites (comme Kifaa7) à l’origine des pages anonymes, des blogueurs producteurs d’articles – par exemple un rappeur islamiste Mohammed Ziani dit MC Talib – mais aussi des « hackers » susceptibles de multiplier les vues et les messages automatiques par des méthodes telles que « l’astrosurfing » ou via des dispositifs adaptés (« bots », « spams »…), relève le média français.
Des « likes » téléguidés
Et de poursuivre que parmi les hackers identifiés, l’EPGE cite Jawad Fadili, un contempteur des comportements déviants, adversaire résolu des festivals de musique, précise le médias français, notant que les enquêteurs du think thank, à force de scruter la viralité intense de la campagne (37.000 « likes » en moins d’une heure dans la nuit du 21 avril 2018), se rendent compte que les « vues » sponsorisées, l’achat de milliers de « followers » ou de « likes » engendrent des coûts importants et impliquent donc des financements conséquents se chiffrant à plusieurs centaines de milliers d’euros.
« Une partie de ces fonds pourrait provenir, souligne l’étude, de collectes de charité réalisées au nom de la « Zakat » (l’aumône légale des musulmans) et mises en scène sur des réseaux sociaux comme Faysbouki TV, détenue par le Berbère Imnir Amine, « youtubeur » querelleur partisan de l’indépendance du Rif (zone d’implantation berbère) mais également soutien majeur du boycott de 2018 », ajoute-t-on.
Et de noter qu’Imnir Amine est par ailleurs un soutien déclaré des Frères musulmans et de l’ancien président égyptien Mohammed Morsi tandis qu’il proclame son admiration pour le président pro-islamiste Turc Recep Tayyip Erdogan. « On s’aperçoit que cette vaste nébuleuse, très impliquée dans le boycott de 2018, est particulièrement en ligne avec le mouvement islamiste radical Al Adl Wal Ihsan (« justice et bienfaisance ») qui prône l’avènement du Califat au Maghreb et veut « délivrer de l’impiété la nation musulmane ». Depuis de longues années, c’est la bête noire de la monarchie marocaine », enchaîne-t-on.
« À travers l’analyse du boycott de 2018, l’enquête de l’EGPE démontre que cette idéologie de l’islamisme radical a, via l’utilisation très organisée et sophistiquée des réseaux sociaux, désormais les moyens de déclencher une guerre digitale d’envergure susceptible, à tout moment, de déstabiliser les pays du Maghreb et, en premier lieu, d’ébranler le système économique du Maroc et d’y créer le chaos politique », conclut l’auteur de l’analyse.