Pour faire face à la crise sanitaire, le Premier ministre marocain, Saad Eddine El Othmani (vois sa photo ci contre), a ouvert les vannes de l’endettement extérieur qui atteint des records. Passage en revue des principaux tirages réalisés par le Maroc qui s’est vu retirer son « investment grade » par les agences de notation internationales.
En avril 2020, les responsables des finances publiques du Royaume se réjouissait que le Maroc ait été l’unique pays de la région à avoir conservé son « investment grade ». L’appartenance à cette catégorie – qui correspond à un rating des agences de notation – permet théoriquement d’accéder au marché international de la dette dans les meilleures conditions. Une année plus tard, la crise sanitaire est passée par là et le Royaume a fini par perdre à son tour sa place dans cette catégorie de pays où il fait bon investir.
Rating en baisse
Début avril, la réputée agence de rating Standard & Poor’s a abaissé la note de la dette souveraine du Maroc à long terme, libellée en devises et en monnaie locale. Celle-ci passe de BBB- à BB+, soit un cran en moins que l’investment grade. Pour motiver sa décision, l’agence américaine invoque la contraction de l’économie marocaine et le déficit budgétaire croissant. Dans sa fiche Maroc, S&P déclare être préoccupée par une augmentation des garanties de l’Etat, qui « pourrait exacerber davantage la pression budgétaire ». Elle estime que « la consolidation budgétaire entre 2021 et 2024 sera probablement lente ».
Quelques mois auparavant, c’est Fitch rating qui avait dégradé la notation souveraine du « papier Maroc ». Les analystes de l’agence new-yorkaise dressaient un tableau plutôt sombre de la situation de l’économie du Royaume. «Bien que les autorités marocaines visent à limiter la détérioration des finances publiques, l’impact persistant de la pandémie sur le budget et les projets d’extension des services sociaux, dans un contexte de recrudescence du chômage, compliqueront les efforts de stabilisation de la dette», indiquaient-ils.
Et pas plus tard que cette semaine, c’est Moody’s qui dégaine à son tour en maintenant la notation BA1 du Maroc, mais avec une perspective jugée « négative ». Pour elle, cette notation reflète les défis croissants posés au Maroc par un niveau d’endettement élevé, et des perspectives de croissance post-pandémie « modérées ». Ce n’est qu’en 2023 que les principaux moteurs de croissance de l’économie, soit le tourisme et l’industrie, retrouveront leur niveau d’avant-pandémie, estiment les analystes de Moody’s.
Flambée de l’endettement
Bien avant de subir les foudres de ces agences de notation, le Royaume avait pris les devants en empruntant à tour de bras sur le marché international. « Jamais le Maroc n’a été aussi actif au niveau du recours à la dette extérieure », confirme un expert à Mondafrique.
Mohamed Benchaâboun, ministre des Finances, a habilement choisi le timing pour opérer à deux reprises des levées sur le marché international : un milliard d’euros en eurobonds émis en septembre, puis 3 milliards de dollars pour un emprunt obligataires lancé en décembre. « Ces deux sorties ont permis de bénéficier de bonnes conditions de marché, marqué par une surliquidité », souligne notre expert. Quelques mois auparavant, le Maroc s’est également servi pour la première fois de la Ligne de précaution de liquidités (LPL) souscrite auprès du Fonds monétaire international (FMI) pour 3 milliards de dollars depuis des années, mais jusque-là jamais mobilisée.
L’ensemble de ces tirages, en plus de certains emprunts bilatéraux ou multilatéraux, a totalisé en 2020, la bagatelle de 63 milliards mobilisés selon les dernières statistiques de la direction du Trésor. Une partie a servi au remboursement d’anciennes lignes de crédit, mais l’encours de la dette extérieure du Trésor a augmenté pour flirter désormais avec la barre des 200 milliards de dirhams. En ajoutant les emprunts intérieurs, la dette du Trésor représente désormais 77% du PIB. Un niveau affolant que le Royaume mettra des années avant de pouvoir atténuer. Sauf qu’en ces temps de crise, aucun pays ne regarde vraiment à la dépense…