Dans le collimateur des enquêteurs du DRS, Ali Touati et Choaib El Hassar, les deux vice-gouverneurs de la Banque d’Algérie sont soupçonnés d’alimenter le marché parallèle de devises
Qu’il pleuve ou qu’il fasse beau, presque chaque fin de semaine, Ali Touati et Choaib El Hassar, les deux vice-gouverneurs de la Banque d’Algérie, la Banque centrale du pays, sont abonnés aux vols d’Air Algérie qui les emmènent en France pour passer des week-ends agréables. Des week-ends loin du brouhaha algérois et du tumulte bureaucratique de leur institution. Des week-ends qui commencent à agacer les enquêteurs du DRS algérien.
Et pour cause, à chaque fin de semaine, ces deux hauts responsables d’une institution bancaire chargée de veiller au respect des lois qui régissent le contrôle des flux de devises en Algérie, se rendent chez les caïds du marché parallèle des devises, le fameux square Port-Saïd d’Alger, pour acheter des Euros qu’ils vont dépenser, par la suite, en France. Une opération illégale qu’ils sont censés, eux-mêmes, combattre.
L’ombre du général-major Mohamed Touati
En plus, ces deux hauts responsables qui occupent depuis de longues années leurs fonctions dans la très stratégique banque centrale algérienne n’ont jamais œuvré pour l’ouverture des bureaux de changes afin de permettre à la vente des devises de s’opérer en toute légalité. Pis encore, l’un de ses deux vice-gouverneurs a pondu en 2014 une note spéciale pour obliger la succursale d’une banque française à Alger de ne pas contrôler vigoureusement les origines de ses devises que les clients algériens veulent dissimuler dans leurs comptes bancaires. Pourquoi ? Parce que lui-même dispose d’un compte bancaire en devise qu’il alimente avec l’argent des squares et des placettes spécialisées dans le trafic des Euros et des Dollars.
Même au sein de la Banque d’Algérie, des voix s’élèvent pour réclamer du changement et des mesures à l’encontre des caciques Ali Touati et Choaib El Hassar. Ali Touati, un proche et membre de la famille de l’ancien général-major Mohamed Touati, l’un des généraux les plus influents de l’armée algérienne durant les années 90, est au cœur d’une vive polémique en raison de ses «amitiés» avec de nombreux hommes d’affaires puissants en Algérie, Issad Rebrab, le patron du premier groupe privé algérien, CEVITAL.
L’étrange amitié avec Issad Rebrab
Les neveux d’Ali Touati travaillent chez Cevital. Le fils d’Ali Touati qui poursuit des études à Aix-en-Provence en France aurait bénéficié d’une prise en charge financière conséquente de la part d’Issad Rebrab. Et en contrepartie ? Ali Touati a exercé un incroyable lobbying pour pondre la fameuse Instruction N° 05 – 2011 du 19 octobre 2011 fixant le pourcentage des recettes d’exportation hors hydrocarbures et produits miniers ouvrant droit à l’inscription au ( x ) compte ( s ) devises des personnes morales. Cette instruction a fixé un montant en devises limité à 40% des recettes rapatriés de l’étranger que l’exportateur algérien peut utiliser à sa guise à travers son compte bancaire personnel.
Une loi taillée sur mesure pour Issad Rebrab qui avait besoin d’une telle disposition pour sortir des devises du territoire algérien afin de financer ses investissements internationaux et autres acquisitions personnelles en France ou ailleurs. Et pourtant, cette loi permet à un opérateur algérien d’exploiter ce montant en devises uniquement «dans le cadre de la promotion de ses exportations». Mais personne n’a demandé des comptes à Issad Rebrab étant donné que son ami Ali Touati protège ses «arrières». Et pendant ce temps-là, la Banque d’Algérie continue d’assister aux multiples scandales banquiers, scandale Khalifa, Tonic Emballages, Union Bank et d’autres encore, sans bouger le petit doigt. Ali Touati et El Hassar vont-ils rester intouchables pendant longtemps encore ? Pas si sûr…