Sommet Macron, le Covid-19 fait perdre 25 ans de croissance à l’Afrique

La France accueille ce mardi un sommet international sur les économies africaines dont les besoins immédiats en financement sont estimés à plus de 400 milliards de dollars. Aucune des pistes proposées lors du sommet de Paris ne semble à la hauteur des besoins de financement des économies du continent.

 

Il faudra 200 à 250 milliards de dollars de financements pour les seuls pays africains à faible revenu. Il en faudra 400 pour l’ensemble du continent, selon les estimations du Fonds monétaire international. Ces besoins en financement donnent l’ampleur du choc économique provoqué par la pandémie de Covid-19 sur le continent africain. Environ 130.000 personnes ont été tuées en Afrique par la maladie soit l’équivalent du nombre des victimes en Angleterre.

Derrière ce nombre relativement peu élevé de victimes, se cache le désastre économie causé par le Covid-19 en Afrique. Le continent a ainsi perdu 25 années de croissance économique, soit la plus grave récession de ce dernier quart de siècle. Outre les exportations des matières premières, contributeur clé des produits intérieur brut (PIB) des pays africains, le commerce informel qui nourrit 75% des ménages africains a été très sérieusement impacté par les conséquences de la pandémie. 

Chacun pour soi, Dieu pour l’Afrique 

Face au même choc sanitaire, l’Europe a injecté dans ses économies plus de 750 milliards d’euros à travers la Banque centrale européenne. Les Etats-Unis ont, quant eux, mis en place un plan massif de relance de près de 2000 milliards de dollars. L’Afrique n’a besoin que de 400 milliards de dollars. Une somme bien modique que rien n’indique aujourd’hui qu’elle sera réunie. Le Sommet international de Paris sur le financement des économies africaines travaille sur quatre pistes qui ne garantissent quasiment aucune chance de mobiliser les financements nécessaires à la relance post-Covid.

A l’initiative de la France, et avec le soutien de l’administration Biden, le Fonds monétaire international (FMI) travaille sur la possibilité de procéder en juin à la mise en place exceptionnelle de droits de tirage spéciaux (DTS) de 650 milliards de dollars. Sur ce montant, l’Afrique recevra, au prorata des quotes-parts de ses pays membres du FMI, seulement 34 milliards : 24 milliards pour l’Afrique subsaharienne et 10 milliards pour le Maghreb. En clair, une simple goutte d’eau dans le vase des besoins en financement. La seconde piste envisagée par le Sommet de Paris n’est guère bien plus prometteuse ni même plus efficace. Elle consiste à porter à 90 milliards de dollars les Fonds de l’Agence internationale de développement (AID), branche de la Banque mondiale dédiée aux prêts concessionnels aux pays les moins avancés. En plus de la procédure qui prend beaucoup de temps alors que les besoins sont immédiats, rien n’indique que les donateurs traditionnels ont encore assez d’argent pour procéder à cette augmentation de capital.  

Chine et Turquie, nouveaux acteurs 

L’augmentation du volume de l’aide publique au développement (APD) et le renforcement du rôle du secteur évoqué comme troisième et quatrième levier ne suscitent pas plus d’espoir que les deux premières pistes de financement. Par des calculs savants des donateurs, qui lui associent des réductions de dette, l’assistance technique et même des dons de matériel, l’APD ne libère plus de l’argent frais, ce dont les pays africains ont en ce moment le plus besoin pour relancer différents secteurs de leur économie impactés par la crise sanitaire. Le sommet de Paris compte par ailleurs sur le secteur privé africain et international pour apporter du financement additionnel aux économies du continent. En soi, l’idée semble séduisante. En revanche, son opérationnalisation apporte une douche froide. Les promoteurs d’un rôle plus éminent du secteur privé admettent eux-mêmes qu’il faudra pour cela réunir des conditions préalables dont l’assainissement du climat des affaires et la construction d’infrastructures minimales. Deux préalables à inscrire finalement dans le moyen terme.  

Sur la mobilisation du secteur privé comme sur l’allègement de la dette des Etats africains, le Sommet de Paris ne s’est pas assuré la participation de la Chine et de la Russie qui sont devenus deux acteurs partenaires majeurs des économies africaines. Ni le président chinois Xi Jinping ni son homologue turc Racep Tayyip Erdogan ne sont seront à Paris alors que la Chine est devenue le premier créancier de l’Afrique et que la Turquie est devenu le plus grand partenaire du continent en matière de construction d’infrastructures dans le cadre du partenariat public-privé (PPP).  

Dans ces conditions, il faudra sans doute d’autres initiatives bien plus courageuses que le Sommet de Paris pour résoudre la redoutable équation sur le financement les économies africaines. 

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