Tous les secteurs de l’économie souffrent d’un favoritisme omniprésent, révèle un rapport assassin du site GAN Business anti-corruption.
Les licences, les permis et les contrats publics dans les industries extractives de Mauritanie sont trop souvent obtenus grâce à la corruption de réseaux clientélistes. Les infractions existent bien dans le code pénal du pays, mais les lois sont mal appliquées et les fonctionnaires du gouvernement eux même corrompus.
Une justice inefficace
Les chefs d’entreprise estiment que les tribunaux manquent d’indépendance et prétendent que les pots-de-vin sont fréquemment pour obtenir des décisions favorables des tribunaux. Les affaires de corruption sont rarement poursuivies en raison des niveaux élevés de corruption au sein des tribunaux. Et cela bien que la Mauritanie aie signé la Convention de New York de 1958 sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères.
Que fait la police?
Les entreprises font face à des risques élevés de corruption lorsqu’elles traitent avec la police. Les demandes de pots-de-vin sont fréquentes, en particulier lors des barrages routiers de nuit dans la capitale ou aux points de contrôle entre les villes. Comme la police mauritanienne n’est pas très fiable pour protéger les entreprises contre la criminalité, la grande majorité des entreprises en Mauritanie paient pour les services de sécurité privés.
Des services publics peu accessibles
Les pots-de-vin sont fréquemment exigés lors de l’obtention de permis et de licences. Près d’un tiers des entreprises s’attendent à donner des cadeaux pour «faire avancer les choses». Un grand nombre de monopoles et de cartels sont contrôlés par un petit nombre d’hommes d’affaires et leurs familles qui entretiennent habituellement des relations étroites avec le président Mohamed Ould Abdel Aziz.
La bureaucratie gouvernementale inefficace est également un obstacle pour les entreprises. Les règlements régissant les permis et les licences sont complexes. L’accès aux services administratifs de base varie d’une région à l’autre, plus présent dans la capitale de Nouakchott.
Un foncier soumis aux bakchichs
Plus d’un quart des entreprises interrogées s’attendent à donner des cadeaux aux fonctionnaires en échange d’un permis de construction. Le favoritisme pèse sur l’administration foncière. Même si les droits de propriété sont garantis par la constitution, les droits de propriété privée sont rarement enregistrés
Des impôts instrumentalisés
Les fonctionnaires du gouvernement abusent de leur pouvoir pour obtenir des exonérations fiscales non autorisées et les audits sont parfois utilisés comme des outils politiques pour sévir. Des contrôles ont même été lancés contre trois des plus grandes entreprises du pays détenues par Mohamed Ould Bouamatou, l’ancien patron des patrons mauritaniens devenu un des principaux opposants du régime.L’administration fiscale a prétendu devoir 10 millions d’euros d’impôts impayés.
Des douanes opaques
Les pots-de-vin sont fréquemment imposés lors de transactions transfrontalières, en particulier lors de l’importation. Les entreprises ayant des liens étroits avec l’élite dirigeante dominent les marchés d’importation. En outre, la contrebande de produits de contrefaçon implique souvent des réseaux complexes comprenant des fonctionnaires.
Des marchés publics accaparés
Les marchés publics constituent un secteur à haut risque. Près de 40% des entreprises interrogées s’attendent à donner des cadeaux aux fonctionnaires pour obtenir un contrat avec le gouvernement (ES 2014). Les grandes entreprises ayant des liens politiques de haut niveau dominent les marchés publics.
Des condamnations rares.
Parfois le couperet judiciaire tombe sur les corrompus, mais ce type de sanctions est rare. Le secrétaire général du ministère de l’Intérieur, Mohamed El Hadi Macina, a ainsi été arrêté pour corruption présumée entre 2006 et 2014, mis en cause pour ses liens avec les sociétés britanniques Smith et Ouzman alors qu’il travaillait sur les bulletins électoraux. L’Office de fraude britannique a confirmé que deux employés et l’entreprise avaient été condamnés pour avoir soudoyé des fonctionnaires pour des contrats commerciaux au Kenya et en Mauritanie à hauteur de 543000 dollars.
À la mi-2014, deux hauts fonctionnaires de la Commission nationale de sécurité alimentaire ont été condamnés à rembourser 52460 USD après avoir été reconnus coupables de détournement de fonds par la Banque mondiale.
Des ressources naturelles accaparées
Le secteur minier du pays et son commerce de la pêche sont ses industries les plus vulnérables. Les postes de responsabilité au sein des organisations minières du pays sont attribués aux membres de la propre tribu du Président.
Les autorités américaines enquêtent sur Kinross Gold Corporation pour corruption présumée en Mauritanie. Selon les informations recueillies, Kinross a attribué à la société mauritanienne Maurilog un contrat de transport et de logistique pour des opérations minières d’une valeur de 50 millions de dollars. Des documents divulgués montrent que Kinross a attribué le contrat compte tenu de «l’avantage politique» de la compagnie mauritanienne, qui appartenait à un ancien haut fonctionnaire du gouvernement et proche collaborateur du président.
Une législation ignorée
Le gouvernement mauritanien a mis en place un cadre légal de lutte contre la corruption, mais l’application en est médiocre. Le code pénal criminalise l’abus de pouvoir, le trafic d’influence, la corruption passive et active. La corruption est punie de deux à dix ans d’emprisonnement et d’une amende double du montant du pot-de-vin. Hélas, les autorités n’ont pas appliqué les lois anti-corruption de manière efficace.
Société civile
Les libertés d’expression et de presse sont prévues par la Constitution mauritanienne, mais ces libertés ne sont pas protégées dans la pratique. Les journalistes et les citoyens sont harcelés pour avoir exprimé publiquement leurs opinions, en particulier lorsqu’il s’agit de i
Sources
● World Bank & IFC: Doing Business 2016.
● Bertelsmann Foundation: Transformation Index – Mauritania 2016.
● Global Integrity: African Integrity Indicators – Mauritania 2016.
● World Economic Forum: Global Competitiveness Report 2015-2016 ● The Globe and Mail: “Mauritanian firm target of Kinross probe, document says”, 13 March 2016.
● The News Herald: “Mauritania arrests Interior Ministry official for corruption”, 12 February 2016.
● US Department of State: Investment Climate Statement – Mauritania 2015.
● World Economic Forum: Global Enabling Trade Report 2014.
● US Department of State: Human Rights Practices Report – Mauritania 2014.
● World Bank Group: Enterprise Surveys – Mauritania 2014.
● Risk Advisory: “Confronting Corruption in Mauritania’s mining industry,” 15 May 2013