La paix n’est toujours pas revenue au sein de la filière cacao de la Côte d’Ivoire puisque les 700000 fermiers revendiquent une reprise en main de la filière, dominée par les amis de la Présidence, par leurs propres organisations
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Lorsque le 2 avril, le gouvernement ivoirien fixe le prix bord-champ du kilogramme de cacao à 1.500 FCFA (2,2 euros), soit une augmentation de 50%, le ministre en charge de l’agriculture, Adjoumani Kobenan, exulte : « c’est un niveau de prix jamais réalisé dans l’histoire de la filière », dit-il. Une association de planteurs lui emboite aussitôt le pas en affichant fièrement sa satisfaction devant un système de commercialisation devenu plus efficient.
Sauf que la Côte d’Ivoire n’est pas la seule à profiter de l’embellie des prix mondiaux de l’or brun. Ceux affichés par le Cameroun, Madagascar, le Ghana et maintenant la Guinée qui sont respectivement de 5.100 CFA (7,8 euros), 3.000FCFA (4,6 euros), 2.000FCFA (3 euros), 4.000FCFA (6,1 euros) sont si valorisants qu’ils ont fini par faire réfléchir les planteurs ivoiriens qui représentent, à eux seuls, 40% de la production mondiale de cacao.
du coup, le conseil national des syndicats agricoles de Côte d’Ivoirei avait menacé l’Etat d’une grève illimitée le 28 mars dernier.
Le nouveau prix de la discorde
C’est essentiellement pour empêcher ce débrayage que le gouvernement avait revu la hausse du prix d’achat du cacao. Mais le PDCI, parti d’opposition, l’a immédiatement rejeté en émettant de sérieux doutes sur les chiffres. « Le groupe parlementaire PDCI laisse le gouvernement ivoirien seul juge de ses chiffres sur le résultat des ventes par anticipation de la récolte pour la période d’avril à septembre 2024, qui donneraient le prix CAF moyen de 2.326 FCFA le kilogramme ». Car le producteur continue « de souffrir de la mauvaise gestion de cette spéculation dans le pays », a-t-il dénoncé.
Malgré les protestations régulières du gouvernement qui dénonce des tentatives de manipulation de l’opposition dès que celle-ci essaie de regarder de plus près la commercialisation du cacao, la filière est bel et bien contrôlée par les amis du président dont le dénommé Loïc Folleroux, gendre d’Alassane Ouattara et fils aîné de la première dame tire les marrons du feu de tous les bénéfices concédés aux amis du régime. Monsieur Folleroux qui dirige en effet Africa Sourcing, une société de négoce qui opère dans le secteur du cacao où elle bénéficie d’un quota quasi officiel de tonnage de cacao destiné à son autre entreprise, alors qu’Ivory Cashew Nuts, son autre entreprise vient de faire main basse sur la filière cajou
Les négociants de la filière cacao se procurent de faramineux bénéfices alors que les producteurs tirent le diable par la queue.