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RDC, le président congolais Félix Tshisekedi très courtisé à Washington

Arrivé le 17 septembre à New York, le président congolais Félix Tshisekedi multiplie les rendez-vous pour accélérer le retrait de la Monusco, évoquer les élections présidentielles à venir et surtout entretenir ses liens d’affaires avec les pétroliers américains. Le jeudi 21 septembre, le président congolais doit prendre part à une table ronde à Washington avec des élus du Cogrès et des patrons des géants pétroliers américains après s’être exprimé, ce mercredi, à la tribune de l’ONU. Une façon d’oublier l’été meurtrier qu’il a vécu en RDC avec des opposants emprisonnés et une cinquantaine de manifestants tués. 

 

Félix Tshisekedi va participer, aux côtés de ses pairs des pays membres des Nations-Unies, à la 78ème session de l’Assemblée générale de cette organisation. Il prendra la parole du haut de la tribune des Nations Unies le 20 septembre.

La pluie de critiques qui s’abat sur Félix Tshisekedi en cette fin de mandat controversée ne l’empêche pas d’être reçu en grande pompe aux États-Unis lors de cette 78ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies. L’agenda du président congolais est plein à craquer. Une rencontre aura lieu notamment avec le Secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres. On y évoquera la situation sécuritaire dans l’est du pays, le futur de la Monusco, le forum sur les objectifs de développement durable. 

Pourtant, à Kinshasa et dans le Nord-Kivu, les violences se multiplient. Cet été meurtrier a vu le massacre d’une cinquantaine de manifestants à Goma et l’arrestation arbitraire du correspondant de « Jeune Afrique » Stanis Bujakera Tshiamala. Interrogé à ce sujet, le président congolais devait répondre qu’il tenait à la séparation des pouvoirs, tout en étant le premier magistrat du pays !

 

L’opposant et ancien chef du parti présidentiel Jean-Marc Kabund
À trois mois des élections générales, le régime durcit le ton. C’est aujourd’hui un climat de peur et d’insécurité qui règne sur le pays.La condamnation à sept ans de prison de l’opposant et ancien chef du parti présidentiel Jean-Marc Kabund en témoigne.
Pas de quoi décourager ses amis de la Congressional Black Caucus Foundation, une organisation constituée exclusivement de parlementaires afro-américains, dont il sera l’invité d’honneur lors de leur conférence annuelle pour la deuxième année consécutive.
Pétro-dollars et bons amis
Le jeudi 21 septembre, le président congolais doit par ailleurs prendre part à une table ronde à Washington intitulée « Partenariat États-Unis – Afrique pour une transition énergétique juste et équitable en Afrique : créer un lien entre les capitales mondiales de l’énergie, de la Côte du Golfe à la côte africaine ».

L’invitation et les honneurs rendus au président Félix Tshisekedi s’expliquent peut-être par la présence à la même table ronde d’Albert « Al » Williams, vice-président chargé des affaires commerciales de Chevron. Le géant pétrolier américain a finalisé en juillet dernier un accord d’étape avec les gouvernements angolais et congolais pour le développement du bloc 14, un gisement offshore que les deux pays se disputent depuis 50 ans.

 

 Sheila Jackson Lee, ardente porte-parole de l’industrie du « oil and gas »
Plusieurs autres participants à la réunion sont également impliqués dans le secteur pétrolier américain, à commencer par l’organisatrice de la conférence, l’élue texane à la Chambre des représentants, Sheila Jackson Lee, ardente porte-parole de l’industrie du « oil and gas » au Congrès américain. Pour ces entreprises à la recherche de nouveaux marchés, le président congolais est un hôte qu’il faut courtiser. Depuis quelques années, Félix Tshisekedi multiplie les initiatives pour sortir l’économie congolaise du « tout minier » et faire des hydrocarbures le nouvel axe du développement économique du pays

En 2022, ce dernier avait pris part à la première édition du Houston-Africa Energy Summit, avant d’être invité à un panel lors de la conférence annuelle du Congressional Black Caucus dédié à la place de l’Afrique dans les marchés mondiaux de l’énergie.

Des investissements peu sécurisés

Mais les promesses du gouvernement congolais – qui assure que l’exploitation des blocs pourrait générer plus de 30 milliards de dollars par an – suffiront-elles à convaincre les investisseurs ?

Les récentes décisions du gouvernement visant les entreprises étrangères présentes en RDC pourraient refroidir les ardeurs de ses nouveaux amis, dans un pays où la sécurité des investissements n’est pas garantie et où les titres de propriétés changent de main au gré des amitiés politiques du moment. Fin août, le gouvernement congolais a ainsi brutalement suspendu les droits d’exploitations d’une trentaine de compagnies minières. La décision, qui a provoqué de fortes inquiétudes des populations locales, vaut au pays une mauvaise réputation chez les majors étrangères.
Le géant minier australien compte lancer ses activités d’extraction de lithium à Manono, dans la province du Tanganyika à l’est de la RDC


Plusieurs d’entre elles se sont d’ailleurs lancées dans de coûteuses procédures d’arbitrage, à l’instar de la société minière australienne AVZ Minerals Ltd, qui a initié une procédure juridique contre le gouvernement congolais, lequel lui aurait refusé à tort un permis pour l’exploitation du gisement de Manono, où reposent des réserves de lithium estimées à 132 millions de tonnes.

Plus récemment, Centurion Law Group, un conglomérat panafricain de cabinets d’avocats, a lancé une procédure contre la République démocratique du Congo, qu’ils accusent de ne pas avoir respecté les termes d’un contrant les liant à l’Agence de prévention et de lutte contre la corruption dans sa lutte contre Glencore. Des signaux qui devraient inciter ses hôtes à la prudence, la mue démocratique du pays étant loin d’être achevée.
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