Le lobbyist Jemal M.Taleb, est le meilleur propagandiste du régime mauritanien à Paris. A coup de fausses nouvelles et de fausses identités. Parfois, notre ami en fait un peu trop !
Voici le franco mauritanien, Jemal M.Taleb, dont l’étoile brille aujourd’hui au firmament. Cet ambitieux qui rève en privé de devenir le dauphin du président Aziz est en effet “l’ambassadeur” officieux à Paris du numéro un mauritanien dont il gère, dit-on, les missions les plus secrètes et les interventions discrètes auprès des parlementaires ou des sécuritaires français qu’il emmène, tous frais payés, à Nouakchott.
Du moins quand il n’approche pas les rédaction parisiennes, comme récemment le JDD, un journal peu familier des problématiques mauritaniennes, pour « vendre » des documents judiciaires provenant des procédures mauritaniennes internes (1).
Des fake news anonymes
Tout récemment, un site mauritanien proche du pouvoir, Mauritania Almalouma, et le magazine « Jeune Afrique », proche de tous les pouvoirs, viennent de publier un joli « fake news » sur les agissements de la bète noire du régime, Mohamed Bouamatou, ancien patron des patrons mauritanien et actionnaire minoritaire de « Mondafrique ». Dans les deux cas, les papiers anonyme -ce qui ne grandit pas les auteurs- accusent l’homme d’affaires d’avoir fait appel à l’agence Kroll pour révéler les détournements de quelques voleurs qui sévissent à Nouakchott.
L’idée n’est pas absurde, et au fond, tout est bon, notamment l’expertise de ces officines privées réputées, pour déstabiliser des régimes prédateurs. Seulement voila, aucune preuve, cette fois, ne démontre l’appel de Mohamed Bouamatou à l’agence Kroll. Il est rare que les boites de renseignement comme Kroll, qui cultivent la discrétion entre Paris, Londres et le Luxembourg, clament le nom de leurs clients! Face à de tels mensonges, tous les regards se sont tournés immanquablement vers Jemal M.Taleb dont on connait le mauvais génie à organiser des opérations de désinformation à Paris.
Des coups pendables
Parfois brillant, pour dénoncer lors d’un colloque en Belgique, la justice néo colonialiste de la CPI et ancien opposant à la dictature de l’ex-président Maaouiya Taya, l’ami Taleb s’est réfugié à Paris au début des années 2000 où il est devenu un militant socialiste en vue et un franc maçon respecté. Ce qui lui donne aujourd’hui de nombreux accès, y compris dans des titres français prestigieux.
Pour se faire plus convaincant, ce beau parleur n’hésite pas à inviter ses amis français dans les meilleurs restaurants français où il leur offre les meilleurs vins. A la charge du budget mauritanien qui lui verse de précieux dédommagements pour ces activités de lobbying.
Parfois il en fait trop. Comme le jour où en dissimulant sa véritable identité, ce « communicant » s’invitait à la table de l’auteur de cet article pour l’enregistrer- ce qu’il a nié par la suite-, tout en ne niant pas d’avoir dévoilé son nom. De même, il s’est toujours présenté à Paris comme un avocat qu’il n’a jamais été, même s’il a établi ses pénates au sein d’un cabinet reconnu(2).
Une rencontre imaginaire
L’ami Jemal M.Taleb n’en est pas à son premier fait d’armes. A la veille de l’expiration du contrat de la banque Lazard avec la Mauritanie en avril 2016, des tuyaux percés sont distillés dans la presse spécialisée à Paris. Ainsi « la Lettre du Continent », un média consacré aux coulisses des pouvoirs africains, a été visiblement abusé. Un article est en effet consacré à une hypothétique rencontre à Marrakech entre le patron de la Banque Lazard, Matthieu Pigasse et l’homme d’affaires mauritanien, Mohamed Ould Bouamatou, en rupture totale avec le régime du président Aziz.
A en croire les « informations » »publiées, l’ancien patron du FMI, Dominique Strauss-Kahn, qui réside souvent lui aussi à Marrakech, aurait été à l’origine de cette rencontre. Il aurait, apprend-on, conseillé à Matthieu Pigasse, qui fut son bras droit lorsqu’il était ministre des Finances du gouvernement de Lionel Jospin, « de se rapprocher de Mohamed Bouamatou, le principal opposant au chef de l’Etat mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz.» Or ces informations sont erronées. « La Lettre du Continent » a été trompée par des sources fallacieuses. « Si DSK connait effectivement l’homme d’affaires mauritanien, Bouamatou et Pigasse ne se sont jamais rencontrés », indique un banquier qui connaît les deux hommes.
A qui profite le crime?
Cette opération de désinformation ne profite pas à la Banque Lazard, une honorable institution qui ne s’abaisserait pas à balancer ainsi de pareils couacs. En revanche, le mystérieux intermédiaire mauritanien qui a favorisé le rapprochement entre la Banque Lazard et le gouvernement de Nouakchott a tout intérèt, en cette période de renouvellement, à agiter le spectre de Bouamatou, la bête noire du régime.
Ce sera, dès lors, un jeu d’enfants de convaincre le président mauritanine de poursuivre, au prix fort, sa coopération avec la Banque Lazard pour éviter qu’elle ne se tourne vers son ennemi politique préféré.
A force de jouer des coups à dix bandes, Jemal M.Taleb pourrait perdre jusqu’à la confiance de ses employeurs mauritaniens.
(1) Jemal Taleb devrait se voir notifier, dans les prochains jours, une plainte à Paris pour « recel de vol » et « violation du secret des correspondances », annonce nos confrères de la Lettre du Continent.« La plainte, écrivent-ils, émane de Mohamed Ould Debagh, vice-président du groupe de Mohamed Bouamatou ». .
Jemal Taleb est suspecté de détenir une copie des pièces personnelles (documents, blocs-notes, contenu d’ordinateur, etc.) de Mohamed Ould Debagh, directeur du groupe Bouamatou saisies par la police mauritanienne, au printemps 2017, lorsque ce dernier franchissait la frontière avec le Sénégal, en voiture.
(2) Jemal Taleb fait déjà l’objet d’une plainte à Paris déposée par maitre William Bourdon pour violation de la qualité d’avocat.