Le président du Niger, Mohamed Bazoum, a la réputation d’être plutôt très direct. Est-ce le costume de président qui l’a transformé? Il aura été patient, pédagogue et courtois avec les deux journalistes de TV5Monde qui, lors d’un entretien exclusif diffusé le 2 avril, l’ont fort mal traité.
Le lien vers l’émission: https://www.youtube.com/watch?
Françoise Joly, directrice de l’information de TV5Monde, et Christophe Chatelot, journaliste au « Monde » et spécialiste de l’Afrique, se sont montrés bien désinvoltes face au président nigérien, Mohamed Bazoum. Chacun, à sa manière, ignore la marque des grands de ce métier : « respect, rigueur et irrévérence ». On a vu Françoise Joly couper la parole à Mohamed Bazoum à plusieurs reprises et répondre à sa place lors d’une question de son confrère. Sans parler de cette tendance fâcheuse de la directrice de l’information de TV5Monde à terminer les phrases de son interlocuteur…
-« Je suis très pratique », lance Bazoum
-« Vous voulez dire pragmatique », le reprend François Joly.
Peu de rigueur journalistique…
Plus grave, la journaliste française a interrogé le chef de l’Etat nigérien sur l’état des négociations avec Boko Haram. Or il n’a jamais été question à Niamey, où on admet avoir tenté de jeter des passerelles avec certains groupes armés, de dialoguer précisément avec ce groupe djihadiste ! « Boko Haram, a précisé le président Bazoum, est un phénomène nigérian. Nous n’avons pas perçu dans cette mouvance des profils d’acteurs dignes d’un dialogue ».
De son coté, Christophe Chatelot qui a découvert qu’il y avait « beaucoup de gens à nourrir au Niger », a cru bon de citer Achille Mbembe, le désormais très médiatique BHL africain! En une phrase, le président nigérien a renvoyé le philosophe et le journaliste du Monde dans leurs cordes : « Achille Mbembe est un professeur qui travaille dans un laboratoire et moi je suis un président de la République et j’agis concrètement (…) je n’ai pas le luxe d’aller porter ce genre de questionnements et trouver des explications ».
G5, « du plomb dans l’aile »
Hormis la sensation de malaise procurée par la prestation des deux journalistes, on ne retiendra pas grand-chose de ce long entretien de 56 minutes. Le président nigérien a esquivé toutes les questions concernant la Russie, alors que le Niger fait partie des qui ont voté la résolution des Nations Unies condamnant Moscou.
Concernant l’installation d’une partie des forces de Barkhane sur son territoire pour « muscler » Niamey, selon les termes d’Emmanuel Macron, le Président nigérien a ménagé la chèvre et le chou. Sans se dire hostile à une présence militaire française dans son pays, Mohamed Bazoum précise que rien n’est encore tranché. « Le G5 Sahel a du plomb dans l’aile, a-t-il expliqué. Peut-être a-t-il été mal conçu? »