Une enquête menée par +972 Magazine (1) et Local Call (2) révèle plusieurs facteurs qui auraient contribué au caractère particulièrement destructeur des premières étapes de la guerre actuelle menée par Israël dans la bande de Gaza : l’autorisation élargie donnée à l’armée israélienne pour bombarder des cibles non-militaires, l’assouplissement des contraintes concernant les pertes civiles attendues, et l’utilisation d’un système d’intelligence artificielle pour générer toujours plus de cibles potentielles; (Source Media Palestine)
Comparée aux précédentes attaques israéliennes contre Gaza, la guerre actuelle – qu’Israël a baptisée « Operation Iron Sword » et qui a débuté à la suite de l’attaque menée par le Hamas contre le sud d’Israël le 7 octobre – a vu l’armée étendre considérablement ses bombardements sur Gaza aux cibles qui ne sont pas clairement de nature militaire. Il s’agit notamment de résidences privées ainsi que de bâtiments publics, d’infrastructures et d’immeubles de grande hauteur, que l’armée définit, selon des sources, comme des « cibles de pouvoir » (« matarot otzem »).
15000 cibles depuis deux mois
Le bombardement de tels « cibles de pouvoir », selon des sources du renseignement qui ont eu une expérience directe de son application à Gaza dans le passé, vise principalement à nuire à la société civile palestinienne : à « créer un choc » qui, entre autres, comme l’a spécifié une source, aura une forte résonance susceptible « d’amener les civils à faire pression sur le Hamas ».
Plusieurs sources, qui ont parlé au +972 et à Local Call sous couvert d’anonymat, ont confirmé que l’armée israélienne dispose de fichiers sur la grande majorité des cibles potentielles à Gaza – y compris les maisons d’habitation – qui stipulent le nombre de civils susceptibles d’être tués lors d’une attaque contre une cible particulière. Ce nombre est calculé et connu à l’avance des unités de renseignement de l’armée, qui savent donc, peu avant de lancer une attaque, combien de civils sont susceptibles d’être tués (…).
« Habsora » (« L’Évangile »)
Selon l’enquête, une autre raison expliquant le grand nombre de cibles et les dommages considérables causés à la vie civile à Gaza est l’utilisation généralisée d’un système appelé Habsora (« L’Évangile »), qui repose en grande partie sur l’intelligence artificielle et peut « générer » des cibles presque automatiquement à un rythme qui dépasse de loin ce qui était auparavant possible.
Ce système d’IA, tel que décrit par un ancien officier du renseignement, facilite rien moins qu’une « usine d’assassinats de masse ».
Toujours selon ces sources, l’utilisation croissante de systèmes basés sur l’IA comme Habsora permet à l’armée de mener des frappes massives contre des résidences où vit un seul membre du Hamas, même s’il s’agit de jeunes membres de l’organisation.
(1) +972 est un magazine d’information et blogue communautaire de gauche indépendant créé en août 2010 par un groupe d’écrivains établis en Israël et en Palestine, bien que le magazine inclut également des écrivains nord-américains.
(2) Local Call (Sikha Mekomit in Hebrew) is a Hebrew-language news site advancing citizen journalism and an independent media.