L’ambassadrice de l’Union européenne à Madagascar persona non grata

Agacé par une sortie de la diplomate Isabelle Delattre-Burger, le président Andry Rajoelina a demandé à Bruxelles son remplacement, révèle le site « Africa Intelligence », dont nous reprenons les informations.

« Le président Andry Rajoelina ne souhaite plus qu’Isabelle Delattre-Burger représente l’Union européenne à Antananarivo. Sa ministre des affaires étrangères, Rafaravavitafika Luciana Rasata, a envoyé début mars un courrier confidentiel à Josep Borrell, le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères. Elle lui enjoint de procéder au « remplacement » de l’ambassadrice, arrivée dans la Grande Île en septembre 2022.

À l’origine de l’agacement du chef de l’État : une conférence de presse qu’Isabelle Delattre-Burger a tenue le 26 février. Elle y a déclaré que la loi sur la castration chimique et chirurgicale des violeurs, qui venait d’être validée par la Haute Cour constitutionnelle (HCC), était contraire à la convention des Nations unies sur les traitements cruels, inhumains et dégradants. Ce commentaire lui avait valu, trois jours après, une convocation express par la ministre Rafaravavitafika Luciana Rasata – sans que son départ soit évoqué à ce moment.

Contacté par « Africa Intelligence », le siège de l’UE a confirmé que le Service européen d’action extérieure (SEAE), en consultation avec le gouvernement malgache, était en train d’examiner la demande de remplacement émise par Antananarivo. S’il était acté, ce mouvement pourrait intervenir lors de l’exercice annuel de rotation des chefs de délégation, qui se tiendra en septembre.

Davantage qu’une expulsion, le scénario d’un remplacement de la diplomate à l’été pourrait permettre à Rajoelina de ménager Bruxelles, sachant que l’UE est le premier partenaire commercial de l’île. Le président malgache ne souhaite en outre pas relancer le cycle de tensions avec les bailleurs internationaux, qui avait largement ponctué son premier mandat.

Cette séquence diplomatique à bas bruit intervient après que Christine Razanamahasoa a été déchue fin mars de son mandat de députée par les juges de la HCC, et par ricochet de la présidence de la chambre basse. Elle était à ce jour la seule cheffe élue d’une institution malgache qui ait osé s’élever contre le chef de l’État, en montant une plateforme de médiation pendant la période électorale. À cette époque, Isabelle Delattre-Burger avait contribué, avec d’autres membres de la communauté internationale, à empêcher une première tentative de destitution de la présidente de l’Assemblée nationale, de la part des députés IRD (Isika Rehetra Miaraka amin’i Andry Rajoelina, Nous tous ensemble avec Rajoelina), le parti majoritaire (AI du 10/11/23). Les élections législatives doivent se tenir le 29 mai.