Nous débutons ce « Best Of Niger » de l’été par le retour surprise à Niamey de l’opposant Hama Amadou, bien décidé à se présenter à l’élection présidentielle de 2020. Sous le coup d’une condamnation à un an d’emprisonnement, le chef de file de l’opposition est rentré chez lui sans prévenir, prenant de court les autorités nigériennes, pour s’incliner sur la tombe de sa mère et purger sa peine à la prison de Filingué, au nord-ouest de Niamey.
C’est un scénario que le pouvoir nigérien n’avait jamais envisagé. L’opposant et ancien Premier ministre nigérien Hama Amadou est rentré à Niamey le 14 novembre 2019 après trois années et demie d’exil entre la France et l’Afrique. Contrairement aux apparences, ce retour n’a fait l’objet d’aucun deal avec les autorités nigériennes. Ce n’est qu’après avoir embarqué sur un vol commercial à partir d’Abidjan, en Côte d’Ivoire, que Hama (comme l’appellent les Nigériens) a fait prévenir de son arrivée le Premier ministre Brigi Rafini.
Des égards remarqués
Le coup de téléphone de Tahirou Saidou, président par intérim du Mouvement démocratique nigérien (MODEN-Lumana Africa), au chef du gouvernement, a provoqué un branle-bas de combat dans les allées du pouvoir. Brigi a immédiatement référé au président Mahamadou Issoufou. Et après intense concertation, il a été convenu de laisser arriver tranquillement l’ex-allié du président Issoufou à la présidentielle de 2011.
Conscient du fait que Hama revient à Niamey pour la première fois depuis le décès sa mère en octobre 2019, le pouvoir a poussé la bienveillance jusqu’à autoriser un véhicule particulier à venir le chercher à la passerelle de l’avion.
Hama n’a donc pas été arrêté à son retour bien qu’étant sous le coup d’un mandat d’arrêt émis par le pouvoir. Mais plus surprenant encore fut le défilé du tout-Niamey politique à son domicile pour lui présenter les condoléances. De Malika Issoufou, l’épouse du chef de l’Etat, au président du Mouvement national pour la société de développement (MNSD) Seyni Oumarou, ex-proche de Hama, en passant par Hassoumi Massaoudou, son plus virulent pourfendeur au parti rose, ils sont tous venus lui serrer la main et faire acte de contrition.
Un coup de poker
Depuis plusieurs mois, l’ex-PM mijotait sa stratégie. Après le rejet en octobre dernier de son recours par la Cour de justice de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), il a pris la décision d’accélérer son retour. En prenant surtout soin de caler son agenda personnel avec la prochaine présidentielle à laquelle il dit toujours être candidat.
En rentrant à Niamey le 14 novembre, Hama a bien calculé qu’il lui resterait un reliquat de huit mois de prison à purger, suite à sa condamnation pour « supposition d’enfants ». Il devrait donc sortir de prison en juillet 2020. Quelques mois seulement avant le premier tour de la présidentielle prévu le 27 décembre 2020.
En ordre de bataille
Les cinq mois séparant sa libération du scrutin devraient permettre à l’opposant de préparer un dossier de candidature, une équipe de campagne et la mobilisation des militants.
Reste toutefois une grande inconnue : le code électoral précise que toute personne condamnée à plus d’un an de prison ne pourra pas être candidat à la présidentielle. Dans le décret de grâce que le président Issoufou vient de signer en début d’année, le nom de Hama ne figure pas.