- Mondafrique https://mondafrique.com/decryptage/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Fri, 05 Dec 2025 06:59:19 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.3 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg - Mondafrique https://mondafrique.com/decryptage/ 32 32 Le Maghreb se mobilise pour sauver la Libye en crise https://mondafrique.com/a-la-une/le-maghreb-se-mobilise-pour-sauver-la-libye-en-crise/ https://mondafrique.com/a-la-une/le-maghreb-se-mobilise-pour-sauver-la-libye-en-crise/#respond Wed, 03 Dec 2025 08:11:41 +0000 https://mondafrique.com/?p=143708 L'événement n'était pas une simple conférence académique traditionnelle, mais un cri d'alarme transfrontalier, un pont de coopération maghrébin

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À Tunis, chercheurs, diplomates et citoyens unissent leurs forces contre le pillage, l’oubli et le dérèglement climatique qui menacent le patrimoine d’une nation en crise.

Rachid Khara (correspondance Tunis)

Libye, les menaces de Khalifa Haftar sur fond de corruption généralisée

Tunis – Dans la salle de l’hôtel « Africa », au cœur de l’avenue Habib Bourguiba à Tunis, là où le passé rencontre l’avenir, s’est tenu pendant trois jours (17-19 novembre 2025) un symposium international exceptionnel, intitulé « Le patrimoine matériel (archéologique et manuscrit) et immatériel en Libye et dans les pays voisins : situations contemporaines et perspectives ». L’événement n’était pas une simple conférence académique traditionnelle, mais un cri d’alarme transfrontalier, un pont de coopération maghrébin et une feuille de route pour sauver la mémoire d’une nation menacée de déchirure.

Organisé par l’Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain (IRMC), en partenariat stratégique avec l’Ambassade de France en Libye, avec la participation qualitative de plus de 60 chercheurs et experts de neuf pays, plus de la moitié d’entre eux (34 chercheurs) venant de Libye elle-même, affirmant ainsi clairement la volonté de donner la parole aux acteurs directs. La représentation de la Tunisie (8 chercheurs) et de l’Algérie (4 chercheurs) aux côtés de la Libye a esquissé les contours d’une coopération maghrébine prometteuse dans un espace longtemps dominé par les conflits politiques.

Le patrimoine archéologique sous le feu… Entre milices et changement climatique

La conférence s’est ouverte par des allocutions des organisateurs, soulignant la profondeur des relations franco-maghrébines dans le domaine de la recherche archéologique. Puis, Salah El-Agab, Délégué permanent de la Libye auprès de l’UNESCO, a prononcé une conférence inaugurale passionnante intitulée « La triade de la dégradation du patrimoine culturel en Libye », analysant la crise de la protection du patrimoine à travers une terrifiante trilogie : des interprétations idéologiques déformantes, une fragilité institutionnelle étouffante et une détérioration des pratiques de conservation. El-Agab a révélé les souffrances du patrimoine libyen face à des « menaces multiples à travers les âges, des fatwas au nom de la religion à la colonisation et aux guerres », critiquant sévèrement « des groupes liés à des missions étrangères (non précisées) ayant endommagé des antiquités libyennes par des méthodes de restauration non professionnelles ».

La première session a porté sur la situation catastrophique du patrimoine archéologique. Abdelkarim Ahmed Issa Faraj, de l’Office des Antiquités libyen, a dressé un diagnostic précis de l’impact de l’effondrement politique post-2011 sur le système de protection, tandis que l’experte juridique Mofida ESouidi a discuté des lacunes du cadre légal. Le jeune chercheur Khalifa El-Bashbash a soulevé l’idée d’« ingénierie institutionnelle » comme solution radicale pour faire face au chaos et à la gouvernance de la gestion patrimoniale.

Lors de la session « Le patrimoine face aux menaces », l’étendue du désastre est apparue dans toute son ampleur, des profondeurs de la mer aux sommets des montagnes. Ahmed Saad Amergez a alerté sur les risques sérieux de disparition du patrimoine maritime en Cyrénaïque si la situation actuelle persiste. Miftah Ahmed El-Haddad a révélé l’utilisation des techniques d’intelligence artificielle et de télédétection pour surveiller les atteintes aux sites archéologiques via satellite, une technologie devenue indispensable dans un pays en proie aux menaces sécuritaires et aux conflits armés. Amin Abdelati a, quant à lui, mis en lumière un danger silencieux tout aussi dévastateur : les changements climatiques et leur impact destructeur sur des sites du Fezzan, au sud de la Libye.

Mais la menace la plus pressante est apparue dans l’intervention des chercheurs français Camille Blanchet et Morgan Belzic, qui ont dévoilé l’ampleur des réseaux de pillage organisé et de trafic illicite des antiquités libyennes, devenus un commerce finançant les guerres. Khaled El-Haddar, intervenant à distance depuis Benghazi, a confirmé ce tableau tragique par une étude approfondie sur le trafic des antiquités de Cyrénaïque entre 1990 et 2025, s’appuyant sur des sources de terrain et des recherches documentées révélant un laisser-aller important et un trafic florissant depuis des décennies, malgré les tentatives de lutte via la coopération bilatérale et multilatérale.

Ici, la dimension maghrébine de solidarité est ressortie avec force. Yasser Djerad, de l’Institut National du Patrimoine tunisien, a présenté les leçons de l’expérience tunisienne en matière de lutte contre le trafic illicite, offrant un modèle adaptable pour le voisin libyen, tenant compte des réalités nationales et des différences de systèmes, à un moment où les frontières communes font face aux mêmes menaces, nécessitant un effort et une coordination au plus haut niveau.

 

Manuscrits… La guerre pour sauver la mémoire des chambres oubliées

Si le premier jour était dédié à la résistance face à la destruction, le second fut consacré au sauvetage de ce qui reste. Le deuxième axe portait un titre évocateur : « Manuscrits : des trésors de connaissances menacés par l’oubli et la déchirure ». Mohamed Tahar El-Jazaeri, directeur du Centre Libyen des Archives, a parlé de la bataille pour préserver la mémoire nationale au sein d’une institution pilier de l’identité, révélant qu’il a opposé un refus catégorique à toute offre susceptible de porter atteinte à la souveraineté nationale Ahmed Najm Mabrouk a dévoilé des trésors de manuscrits rares conservés à l’Université de Benghazi, mais attendant toujours d’être sauvés de la négligence.

Une fois encore, l’expertise a franchi les frontières. La chercheuse tuniso-allemande Khouloud Trad a présenté des leçons tirées des liens communs dans la protection du patrimoine de Tombouctou et Kairouan, tandis que Yahia Ben Yahoun d’Algérie a partagé l’expérience impressionnante de la société civile dans la vallée du M’zab pour la numérisation et la préservation des manuscrits. La coopération internationale-locale s’est incarnée dans le projet libyen « Bibliothèques Nafusa » supervisé par Ali Youssef El-Mezawi, et le projet « Archives en péril » (EAP) présenté par le Tunisien Ali Boujbidi pour la préservation des manuscrits familiaux de Djerba.

Le patrimoine immatériel… Quand l’identité est en jeu

Le troisième axe s’est concentré sur le patrimoine vivant, « la mémoire non écrite du peuple ». Les méthodologies de documentation ont été discutées, et Mofida Djebran, de l’Autorité Libyenne pour la Recherche Scientifique, a présenté une vision ambitieuse d’intégration du patrimoine dans les curricula éducatifs libyens, affirmant que la protection de l’avenir commence à l’école.

Les sessions ont révélé une richesse étonnante menacée : de la mémoire orale préservée par Ali El-Hazel, à la documentation du patrimoine oublié du sud libyen, en passant par l’étude des toponymes comme mémoire géographique vivante. L’intervention de Heba Chalbi sur l’artisanat textile libyen a constitué un modèle de revitalisation du patrimoine par des initiatives créatives modernes portées par la société civile, tandis que la chercheuse Najeh Ben Miftah a dévoilé la « Bouqala Tripolitaine » comme patrimoine poétique féminin négligé pendant des siècles.

 

Cartographie de la destruction et de l’espoir : et après Tunis ?

Hafedh Abdouli, membre du comité scientifique de la conférence, a résumé l’enjeu lors d’une intervention médiatique en déclarant : « Le capital patrimonial en Libye et dans les pays voisins a une spécificité locale mais présente des points communs reflétant le fait que les ancêtres ont coopéré pour le constituer ». Il a affirmé que l’objectif est de « le transmettre aux générations futures dans les meilleures conditions ».

Abdouli a révélé une situation tragique, indiquant que « cinq sites libyens sont inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO en péril : Leptis Magna, Sabratha, Shahat (Cyrène), les montagnes de l’Acacus et Ghadamès. La seule bonne nouvelle est peut-être que les efforts de la communauté locale à Ghadamès ont réussi à sortir leur ville de cette liste dangereuse, prouvant que les solutions commencent à la base ».

Les solutions proposées ont varié du local à l’international : du soutien à la mission archéologique française, qui célébrera bientôt un demi-siècle de travaux en Libye, aux projets d’urgence de l’Alliance Internationale pour la Protection du Patrimoine dans les Zones de Conflit (ALIPH), en passant par l’idée de créer un centre national de restauration en Libye formant des dizaines de jeunes, en coopération avec des experts tunisiens et internationaux.

Un symposium et un message

Ce symposium n’était pas seulement un état des lieux des crises. C’était un message clair en quatre points :

  1. Le patrimoine libyen est une cause humanitaire mondiale. Sa menace est une perte pour l’humanité tout entière, nécessitant de tous les partenaires des efforts redoublés pour sa protection, sa conservation et sa valorisation.
  2. Les solutions maghrébines communes ne sont pas un luxe, mais une nécessité existentielle. Le trafic d’antiquités, le changement climatique et l’oubli ne connaissent pas de frontières. L’hommage aux pères fondateurs de la coopération régionale exige de marcher dans leurs pas, de préserver et de développer leur héritage.
  3. Le rôle local et communautaire est la pierre angulaire. Les recommandations des conférences doivent dépasser les murs des salles. L’histoire du sauvetage de Ghadamès en est la meilleure preuve.
  4. La technologie et la coopération technique internationale sont les meilleures armes pour faire face aux réseaux de pillage et aux effets du climat.

Une question demeure en suspens dans les couloirs de l’hôtel « Africa » après la clôture des sessions : ces riches recommandations scientifiques et cet enthousiasme maghrébin évident se traduiront-ils en programmes d’action concrets, en financements réels et en une coopération institutionnelle durable ? La réponse ne dépendra pas seulement des travaux et recherches de haut niveau présentés, mais de la volonté des politiques à Tripoli, Tunis et Alger, de la pérennité du soutien des partenaires internationaux, et surtout, de la détermination des Libyens à maintenir vivante leur mémoire, témoin de la grandeur d’un passé et phare pour un avenir digne d’être construit.

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Libye, Khalifa Haftar mobilise ses forces dans le Sud du pays https://mondafrique.com/decryptage/escalade-politique-corruption-generalisee-et-crises-humanitaires-en-libye/ https://mondafrique.com/decryptage/escalade-politique-corruption-generalisee-et-crises-humanitaires-en-libye/#respond Mon, 01 Dec 2025 03:41:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=143129 Le 2 novembre, recevant une délégation de notables de la ville de Tarhouna– une localité stratégique de l'Ouest –, le maréchal Haftar a lancé son message le plus percutant : « Nous disons au peuple que l'heure est venue de son mouvement pacifique pour décider de son propre destin ».

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 Tandis que la guerre au Soudan s’enfonce dans un cahaos humanitaire, le clan du maréchal Haftar réorganise ses forces dans le sud du pays. La surenchère politique de l’homme fort de l’Est libyen est une tentative délibérée de reconfigurer les équilibres sociaux à son profit. Les scandales de corruption révèlent l’ampleur du pillage des ressources nationales. Face à ces menaces de reprise des conflits, le gouvernement de Tripoli tente de se maintenir par la promesse d’un renforcement sécuritaire. 

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1) La stratégie d’influence du maréchal Haftar 

Le maréchal Khalifa Haftar, commandant de l’Armée nationale libyenne (ANL) qui contrôle l’Est et une partie du Sud, a mené une offensive politique remarquée, visant à étendre son influence au-delà de son fief traditionnel.

  • L’appel à la rue comme levier politique :
    • Le 2 novembre, recevant une délégation de notables de la ville de Tarhouna– une localité stratégique de l’Ouest –, il a lancé son message le plus percutant : « Nous disons au peuple que l’heure est venue de son mouvement pacifique pour décider de son propre destin ». Il a assorti cette déclaration d’une promesse lourde de sens : ses forces « garantiraient tout accord rassemblant les Libyens », instrumentalisant clairement la force militaire comme garant d’une éventuelle transition.
    • Le 9 novembre, il a réitéré cet appel devant des tribus de Beni Walid, mettant en garde contre les « divisions qui ravagent le pays » et affirmant que « la solution véritable réside dans la voie que le peuple décidera lui-même ».
  • La conquête des coeurs et des allégeances :
    • Le 5 novembre, c’est une délégation de la ville de Zintan(Ouest) qui a été reçue à Benghazi, ses membres saluant le « projet de dignité » incarné par l’ANL.
    • Ces visites n’ont pas manqué de provoquer un tollé. Dès le 10 novembre, la municipalité de Beni Walid a officiellement désavoué la délégation l’ayant rencontré, menaçant de poursuites ceux qui « usurpent le titre de notables ». Le 17 novembre, la « Dar Al-Ifta » de Tripoli, institution religieuse alignée sur le pouvoir occidental, est allée jusqu’à qualifier ces visites de « complaisance envers les injustes ».
  • La réaction de Tripoli : le clientélisme comme parade :
    • Face à cette percée, le chef du gouvernement d’unité nationale (GUN), Abdelhamid Dbeibah, a réagi avec célérité. Le 19 novembre, il a courtisé les notables de Tarhouna, leur promettant l’achèvement de l’hôpital de la ville, la résolution de la crise de l’eau et la fourniture de 10 000 arbres, une tentative transparente d’étouffer dans l’œuf l’influence gagnée par Haftar.

2) Une corruption endémique

Les scandales de corruption ont dominé l’actualité, peignant le tableau d’un État pillé de l’intérieur, au bord du gouffre financier.

  • Le scandale du carburant : 20 milliards de dollars évaporés :
    • Le 20 novembre, un rapport de l’organisation d’enquête « The Sentry » a révélé une estimation vertigineuse : les pertes liées à la contrebande de carburant entre 2022 et 2024 s’élèveraient à près de 20 milliards de dollars. Le document pointait du doigt l’implication de « personnalités influentes, politiques et militaires », tant dans l’Est que l’Ouest, utilisant les revenus de ce trafic pour consolider leur emprise.
    • Un membre de la commission Défense et Sécurité du Parlement, Ali Al-Takbali, a confessé que ces chiffres avaient provoqué un « choc profond » dans la population.
  • L’état des finances libyennes : la banqueroute en ligne de mire :
    • Le 4 novembre, le gouverneur de la Banque centrale, Naji Issa, a tiré la sonnette d’alarme : les dépenses cumulées des deux gouvernements s’élèvent à 3 milliards de dollars par mois, pour des revenus pétroliers ne dépassant pas 1,5 milliard. Il a averti qu’une baisse des cours du pétrendrait l’État « incapable de payer les salaires ».
    • Le même jour, Abdelhamid Dbeibah a dévoilé une dette publique abyssale de 300 milliards de dinars libyens.
  • Une lueur d’espoir fragile :
    • Une lueur d’espoir, aussi ténue soit-elle, a pointé le 18 novembreavec l’annonce d’un accord entre les Chambres des Représentants et de l’État pour mettre fin aux « dépenses parallèles » et unifier la voie financière. Les Nations Unies et les États-Unis ont salué cette avancée.
  • Des arrestations qui font sensation :
    • Preuve que la justice tente, ponctuellement, de réagir, le 2 novembre, le ministère public a ordonné l’incarcération du ministre de l’Éducation, Ali Abed, et du directeur des Programmes scolaires, pour des « irrégularités financières et administratives » dans des contrats d’impression de manuels scolaires d’une valeur de plus de 11 millions de dinars, ayant retardé la distribution des livres à 2 millions d’élèves.

3) Crises humanitaires : la dignité en suspens

En marge des jeux de pouvoir, la tragédie humaine quotidienne se poursuit, implacable.

  • La route migratoire, un cimetière maritime :
    • Le 12 novembre, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a annoncé qu’au moins 42 migrantsavaient péri dans le naufrage de leur embarcation au large des côtes libyennes. Parti de Zouara le 3 novembre, le bateau transportait 49 personnes.
    • La veille, le 11 novembre, le chercheur en droits de l’homme Tarek Lamloum alertait sur le seul centre de détention de « Bir al-Ghanam », où 600 migrantsde 10 nationalités différentes étaient entassés dans des conditions décrites comme un « surpeuplement extrême et de la torture ».
  • Un système de santé à l’agonie :
    • Le 19 novembre, la commission Santé du Parlement a publié un communiqué virulent, dénonçant des « complexités administratives épuisantes » et des « violations financières et administratives » dans le secteur, réclamant une enquête urgente et globale du procureur général.
  • Liban : la libération d’Hannibal Kadhafi :
    • Le 6 novembre, la justice libanaise a ordonné la libération d’Hannibal Kadhafiaprès dix ans de détention, réduisant sa caution de 11 millions à 900 000 dollars. Cette décision est intervenue après qu’une délégation libyenne de haut rang eut remis aux autorités libanaises une copie des enquêtes libyennes sur la disparition de l’imam Moussa Sadr.
  • Les voisins tentent une médiation :
    • Le 6 novembre, les ministres des Affaires étrangères de l’Égypte, de l’Algérie et de la Tunisie se sont réunis à Alger, pressant les parties libyennes de « mettre fin à la division » et de rejeter les « ingérences extérieures », tout en réaffirmant leur soutien à une solution politique.

 

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Emmanuel Macron prépare les Français à la guerre!!! https://mondafrique.com/decryptage/la-france-de-macron-se-preparerait-a-faire-la-guerre/ https://mondafrique.com/decryptage/la-france-de-macron-se-preparerait-a-faire-la-guerre/#respond Sun, 30 Nov 2025 05:37:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=143276 Ce qui est plus dramatique, c'est de voir une grande partie de la classe politique et médiatique, le Président français en tète, distiller la peur d'un conflit mondial alors que l'heure est plutôt d'appeler à une paix juste et durable entre l'Ukraine et la Russie.

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Ce qui est cocasse dans la posture guerrière d’Emmanuel Macron c’est qu’il n’a pas effectué son service national en raison de la poursuite de ses études supérieures, qui reportent sa date d’incorporation. Ce qui est plus dramatique, c’est de voir une grande partie de la classe politique et médiatique, le Président français en tète, distiller la peur d’un conflit mondial alors que l’heure est plutôt d’appeler à une paix juste et durable entre l’Ukraine et la Russie.

Une charge d’une rare violence a fait vaciller le plateau de L’Heure des Pros ce jeudi 20 novembre. Ségolène Royal, ancienne candidate à la présidentielle et figure historique de la gauche, a littéralement incendié Emmanuel Macron en direct sur CNews, l’accusant d’orchestrer sciemment un « climat de terreur » pour paralyser le pays et, peut-être, esquiver le verdict des urnes en 2027.
D’une voix calme mais implacable, elle a ressorti Machiavel comme une lame : « Pour maintenir un peuple dans l’obéissance et le silence, inventez-lui un ennemi, faites-lui peur, et traitez ceux qui appellent à la paix d’antipatriotes. » Puis, sans trembler, elle a asséné :
« Si la France entre en guerre, il n’y aura pas d’élection présidentielle. Si c’est le fantasme caché d’Emmanuel Macron, qu’il vienne s’en expliquer devant l’Assemblée nationale et rende des comptes au peuple français ! »
Le plateau, d’ordinaire bruyant, s’est figé. Pascal Praud lui-même, rarement à court de mots, est resté sans voix quelques secondes. En une phrase, Ségolène Royal venait de poser la question que personne n’osait formuler publiquement : et si le bellicisme ambiant n’était qu’un moyen de suspendre la démocratie ?.

Avant de dramatiser la situation en Ukraine en diabolisant un Poutine qui serait prêt à déclarer la guerre à l’Europe, Emmanuel Macron aurait pu, durant toutes ces années, faire progresser l’organisation d’une défense européenne qu’il a appelé de ses voeux, évoquant même le partage du feu nucléaire fraançais dans le cadre de ce projet, mais sans faire avancer vraiment le dossier.

Des retournements diplomatiques spectaculaires

Des paroles aux actes, voici ce que les Français, particulièrement déçus par leur classe politique, demandent au Président de la République qui reste le chef de la diplomatie française, mais dans une solitude et une improvisation qui n’ont abouti pour l’instant, de l’Afrique et du Maghreb au Moyen Orient et au Liban, qu’à diminuer l’influence française dans le monde. Sur fond de changements de cap incessants.

Comment l’Élysée a-t-il pu « en même temps » appeler à une force commune contre le terrorisme avec les Israéliens après le 7 octobre et soutenir au Liban le candidat du Hezbollah à la dernière élection présidentielle? Comment ;e chef de l’État français a-t-il pu envoyer moins d’armes à l’Ukraine que l’Allemagne, tout en traitant nos voisins et allié d’outre Rhin de « munichois » parceque sceptiques sur la possibilité d’envoyer des troupes à Kiev au secours de l’armée ukrainien?  

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Avec quelques 500000 visiteurs par mois pour le site fondé en 2014, 35000 abonnés sur Instagram et 5000 fidèles de nos pages WhatsApp , « Mondafrique » a imposé une vision pluraliste et originale en matière d’information sur le monde arabe et africain. Depuis le début des guerres en Ukraine et au Moyen Orient, nous ne nous interdisons pas d’accueillir des analyses sur les grands équilibres mondiaux qui ne peuvent pas manquer de se répercuter sur le mode africain et maghrébin. 

Notre positionnement critique vis à vis des pouvoirs en place, la diversité des contributeurs du site -journalistes, diplomates, universitaires ou simples citoyens-, la volonté enfin d’apporter des informations et des analyses qui tranchent avec la reste de la presse ont été nos seules lignes de conduite.  

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Madagascar, une justice sélective à l’oeuvre contre une seule ethnie https://mondafrique.com/politique/madagascar-une-justice-selective-a-loeuvre-contre-une-seule-ethnie-les-merinas/ https://mondafrique.com/politique/madagascar-une-justice-selective-a-loeuvre-contre-une-seule-ethnie-les-merinas/#respond Wed, 26 Nov 2025 07:29:48 +0000 https://mondafrique.com/?p=143269 Moins de deux mois après la mise en place d’un nouveau gouvernement, des inquiétudes surgissent face à des décisions qualifiées par certains observateurs comme relevant d’une « justice sélective », dirigée à l’encontre d’une catégorie particulière de la population malgache, les Merinas, une ethnie des Hauts plateaux qui fait les frais des arrestations, poursuites et […]

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Moins de deux mois après la mise en place d’un nouveau gouvernement, des inquiétudes surgissent face à des décisions qualifiées par certains observateurs comme relevant d’une « justice sélective », dirigée à l’encontre d’une catégorie particulière de la population malgache, les Merinas, une ethnie des Hauts plateaux qui fait les frais des arrestations, poursuites et détentions prolongées .

Dans une missive adressée au grand public, Zaza Ramandiambiarison ancien directeur de cabinet de Andry Rajoelina en 2010, partage ses appréhensions devant ce qu’il dénonce comme « une justice à géométrie ethnique », « des libérations arrangées entre gens de la même région », et des dossiers effacés en coulisses. Il déplore que le président de transition qui, au lieu d’apaiser, laisse planer l’idée d’une candidature future. Les statistiques montrent, estime-t-il, que ce sont les Merinas sont les premiers visés par les mesures de répression, tandis que les originaires d’autres régions, accusés de détournements massifs, se promènent librement, ou sont libérés en grande pompe grâce à des « réseaux régionaux, des alliances locales, et des loyautés ethniques ».

Le Journal de l’Ile Rouge (JIR) du 17 novembre confirme d’ailleurs ces faits en notant que Anthelme Raparany, l’ancien ministre en exil accusé de trafic de bois de rose à Singapour, est « rentré au pays sans coup férir ». Il en est de même pour l’ex premier ministre Ravelonarivo, mis en cause dans une des nombreuses affaires d’exactions au sein de la CNAPS (caisse nationale de prévoyance sociale) et qui a pu bénéficier de la protection de personnalités du régime de transition. L’ex-Directeur général de l’ACM (Aviation civile de Madagascar), impliqué dans l’affaire des Boeings livrés frauduleusement à l’Iran, est sorti de la prison sans procès. JIR présente la situation comme « une revanche des côtiers » et ne réfute pas l’existence d’une connotation politique dans la prise de ces différentes dispositions.

Et Zaza Ramandimbiarison de s’alerter : « C’est ainsi que naissent les purges. C’est ainsi qu’on fabrique le terreau du génocide. Et pourtant, aucun responsable socio- politique ne semble vouloir reconnaître la gravité du moment. On joue avec les nerfs du pays comme avec une allumette au-dessus d’un bidon d’essence ».

Madagascar semble donc atteindre, une fois de plus, un point critique.  Comme à chaque crise politique majeure que traverse le pays, le spectre du tribalisme et du conflit ethnique ressurgit. L’on se souvient que lors de la révolution de 1972, les Merinas ont été chassés de la ville de Tamatave, le grand port situé sur la Côte est de Madagascar.  En 1974, la rébellion des forces de police et des officiers côtiers conduits par le Colonel Bréchard Rajaonarison planifiait « la destruction de la ville de Tananarive », capitale historique du royaume merina et devenu capitale de Madagascar.  Dans un entretien accordé au journal Le Monde, en date du 19 février 2002, Didier Ratsiraka, Président sortant, accusait son rival Marc Ravalomanana de vouloir asseoir la domination de la haute bourgeoisie merina sur la Grand Ile. Il s’en est ensuivi l’érection par Ratsiraka et ses partisans d’un blocus meurtrier contre la capitale. En 2009, la mutinerie ayant conduit à l’éviction du président Marc Ravalomanana fut menée au départ par le C.O.C (« collectif des officiers côtiers »).   

C’est dire que le contentieux ethnique Merina-Côtier, bien que basé le plus souvent sur des représentations mentales floues et embrouillées, n’en reste pas moins vivace surtout en période de crise. Il est entretenu par les traditions orales, les coutumes et les fady (tabous), qui parfois se rattachent aux conflits issus de la tentative d’unification du pays par la royauté merina au XIXe siècle. Ainsi, dans le Nord de l’ile, il existe même de nos jours des endroits où les originaires des hauts plateaux ne peuvent visiter.

La dominance historique des Merinas a causé des tensions intérieures au pays, qui ont été plus tard utilisées par la puissance coloniale pour asseoir son emprise dans la grande ile et affaiblir en même temps la résistance. Dans son grand rapport de 1905, le général Gallieni (Gouverneur général de Madagascar) dépeignait ainsi l’une des facettes de la « politique des races » qui caractérisa sa gouvernance : « S’il y a des mœurs et des coutumes à respecter, il y a aussi des haines et des rivalités qu’il faut savoir démêler et utiliser à notre profit, en les opposant les unes aux autres, en nous appuyant sur les unes pour mieux vaincre les secondes ». Ainsi naquit la doctrine anti-Merina que les successeurs de Gallieni appliquèrent fidèlement, comme le relevaient Hanotaux et Martineau dans un livre sur l’empire colonial français en 1933 : en ce qui concerne Madagascar, il fut recommandé d’une manière générale aux commandants de cercle de toujours se laisser guider par deux principes, politique des races et destruction de l’hégémonie des Hova (une autre appellation donnée aux originaires des hauts-plateaux).

A l’indépendance, diverses politiques ont été mises en œuvre pour atténuer la dominance de Tananarive et combler le retard des provinces côtières. Sous la deuxième république, l’Etat a ainsi créé des centres universitaires régionaux dans tout Madagascar. Afin de réduire le déficit en personnels d’encadrement, faute de jeunes provinciaux en formation supérieure, le baccalauréat est octroyé, dans les provinces côtières au début des années 1980, à 8/20. A la même époque, à Tananarive il n’est obtenu qu’à partir de 12/20. Dans la même foulée, des quotas réservés aux cadres côtiers sont établis dans les différents concours administratifs et dans l’accession aux emplois publics (fonctionnariat et sociétés d’Etat).

En ce troisième millénaire, les mentalités commencent à changer et l’entente nationale est plus ou moins effective dans les relations au quotidien entre Malgaches.  Mais dans de nombreux cas,  l’instrumentalisation des tensions historiques peuvent provoquer aujourd’hui encore des dissonances sociales. Les clichés sont tenaces, à un point tel que dans certains milieux, les Merinas sont toujours dépeints négativement comme des individus « malins, rusés, indignes de confiance, lisses de cheveux mais aussi glissant d’esprit » ! Certains Côtiers reprochent par ailleurs  aux   Merinas d’exploiter les provinces périphériques par le truchement de la centralisation administrative à outrance. Mais force est de constater que la revendication de la décentralisation est devenue un simple slogan politique pour les élites régionales qui, une fois arrivées au pouvoir central se coupent de leurs bases et deviennent des centralisateurs invétérés. Devant cet état de fait, de plus en plus de voix réclament l’instauration du fédéralisme pour briser ce qu’ils estiment être un « comportement prédateur des tananariviens ». De leur côté, les Merinas adhèrent de plus en plus ouvertement à l’idée du fédéralisme, considéré comme le gage d’une plus grande liberté de manœuvre politique et économique pour la province de Tananarive. Il faut en effet savoir qu’à elle seule, la région d’Analamanga (la commune urbaine de Tananarive et les districts qui lui sont adjoints) produit les 48% du PIB national malgache : en d’autres termes, c’est Tananarive qui fait vivre bon nombre de régions périphériques et non l’inverse !

La menace de l’anarchie est latente, surtout en cette période de transition où les rivalités politiques et ethniques prennent le pas sur les considérations d’intérêt général. Zaza Ramandimbiarison veut ainsi tirer la sonnette d’alarme, et insiste sur l’urgence de la mise en branle d’une transition équitable, apaisée et réellement nationale. Aujourd’hui plus que jamais, Madagascar a besoin, affirme-t-il, d’une justice indépendante, d’une transition strictement limitée à son mandat, d’une société civile lucide et ferme, et d’un discours politique qui rassemble plutôt que de diviser.

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La minorité indo-pakistanaise domine la vie économique de Madagascar (volet 1) https://mondafrique.com/decryptage/la-minorite-indo-pakistanaise-domine-la-vie-economique-de-madagascar-volet-1/ Sat, 22 Nov 2025 19:52:53 +0000 https://mondafrique.com/?p=143112 Madagascar compte en son sein une importante communauté d’origine indienne, que la population désigne par deux dénominations : « indo-pakistanais » ou « karana ». Bien qu’assez peu nombreux, les Indopakistanais exercent une immense influence au sein de la société malgache grâce au rôle dominant qu’ils jouent dans la vie économique du pays.  Leur situation […]

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Madagascar compte en son sein une importante communauté d’origine indienne, que la population désigne par deux dénominations : « indo-pakistanais » ou « karana ». Bien qu’assez peu nombreux, les Indopakistanais exercent une immense influence au sein de la société malgache grâce au rôle dominant qu’ils jouent dans la vie économique du pays.  Leur situation se trouve d’autant plus confortée que les Malgaches ont une faible tradition d’entreprise et une capacité d’organisation peu développée. L’histoire de l’implantation de cette minorité nous aidera à comprendre la mauvaise réputation qu’is ont dans la population.

Daniel Sainte Roche

Dans un classement du magazine Forbes de 2015, sur les quatre plus grosses fortunes professionnelles malgaches figurant parmi les 25 plus importantes en Afrique, trois sont indiennes. Le seul Axian par exemple pèse 2,75 milliards USD de chiffre d’affaires total pour l’exercice clos en 2024, a investi 1 milliard de dollars US dans les opérations, et a généré 1,87 milliard USD de PIB.   

Les relations des indo-pakistanais avec la population ne dépassent guère les relations professionnelles : la communauté indo-pakistanaise forme un groupe impénétrable et fortement individualisé, réfractaire à toute forme d’assimilation.

La population semble observer vis à vis de cette composante de la société une attitude méfiante, et cela en dépit des efforts des dirigeants successifs du pays qui ont opté le plus souvent pour une politique conciliante. Ainsi, au lendemain de l’indépendance, un responsable du gouvernement a déclaré, le 17 avril 1964 lors de l’inauguration de la première réunion de l’association Indo-Malgache : « Се pays est le vôtre. Ne craignez ni d’investir, ni de créer des industries. Mais dites à vos compatriotes de ne pas se livrer à des commerces usuraires. » La recommandation du ministre fait référence à l’une des pratiques illicites dont sont coutumiers les commerçants indo-pakistanais, et qui les présente aux yeux de la population comme des capitalistes sans éthique.

L’immigration Indienne à Madagascar

Les commerçants indiens sont venus à Madagascar depuis une époque très reculée, les moussons permettant aux boutres de la côte de Malabar d’atteindre l’Afrique orientale. Cette immigration individuelle et spontanée s’étend du 8 au 19ème siècle, et peut être mis d’une part sur le compte d’un goût prononcé pour l’aventure et d’autre part par l’expansion de la religion islamique (la plupart des Indiens de Madagascar pratiquent cette religion). De plus, l`a Côte de Malabar a joué un rôle de premier plan dans le commerce de l’Océan Indien et en 1873, un voyageur britannique notait déjà qu’à travers tout le circuit de Zanzibar au Mozambique, de Madagascar au Cap de Gardafui, la quasi-totalité des commerçants étaient des Indiens. Etablis dans un premier temps dans l’Ocean indien ou sur la côte est africaine, certains de ces commerçants se sont finalement installés à Majunga, Nosy-Be, Diego-Suarez, Mahajanga, et Ambanja et travaillaient comme intermédiaires entre les Mascareignes (La Réunion, Maurice), l’ Inde, Mascate (capitale portuaire du sultanat d’Oman), et la Grande ile.

La dernière étape qui a couronné l’immigration indienne commence au début du XXe siècle quand Galliéni, gouverneur général de l’époque a recruté près de 100 travailleurs de Pondichéry pour effectuer les travaux de terrassement des chemins de fer de la ligne Tananarive Côte Est.

Bien que l’immigration ait été stoppée très tôt, la communauté indienne de Madagascar s’est développée par l’excédent de ses naissances sur ses décès. Actuellement, la minorité Indo-Pakistanaise de Madagascar compterait près de 20.000 membres (en l’absence de statistiques officielles). La quasi-totalité de ces indiens sont nés dans la grande ile et ne connaissent pas l’Inde. Quoi qu’il en soit, ils continuent d’adopter leur us et coutumes et professent toujours la religion de leurs ancêtres. C’est ainsi que l’on rencontre à Madagascar deux principales communautés indiennes, l’une hindoue et l’autre musulmane (subdivisée elle-même en quatre sectes Khodja, Bohra, Ismaéliens et Sounis).

Première puissance économique à Madagascar

 Bien que l’installation des colonies marchandes indiennes dans l’Océan Indien remonte à une époque très ancienne, elle ne connut un véritable essor que pendant la période coloniale. A l’arrivée des cоlonisateurs français, ces commerçants étaient déjà fort bien implantés. Ils accueillirent d’ailleurs fort bien la colonisation qui les favorisait En effet, à la différence des courtiers européens, ils parvenaient à ratisser la brousse. Parlant les dialectes locaux, ils se procuraient des produits spéculatifs qu’ils revendaient à des prix onéreux aux grandes compagnies. Des privilèges ont été octroyés aux commerçants indiens par l’administration coloniale, sous forme de facilitation de la délivrance d’autorisations, ou d’exemption au travail forcé auquel était assujetti les autochtones. Ils ont été explicitement favorisés pour affaiblir les élites et les réseaux marchands malgaches, et ont acquis de ce fait une position d’intermédiaire commercial solide (négociants, collecteurs…).  

 Les commerçants indo-pakistanais ont connu par la suite un enrichissement rapide, et sont même parvenus à supplanter les Européens dans le grand commerce. Il faut noter au passage que leurs fortunes se sont considérablement accrues grâce à la manipulation du marché noir pendant la deuxième guerre mondiale.

Dès les premières années de l’indépendance, de nombreuses critiques furent formulées à l’endroit de la minorité Indo- Pakistanaise qui se démarquait sensiblement de la majorité des Malgaches par son opulence. Cet état de fait amena les Indiens à amorcer une tentative de reconversion dans des secteurs considérés comme beaucoup plus productifs pour la collectivité et à progressivement s’implanter dans le secteur industriel, sans pour autant abandonner leurs activités traditionnelles dans la quincaillerie, le textile, la bijouterie.

Une grande capacite d’organisation

Le succès de la minorité indo-pakistanaise peut être expliqué par l’efficacité de leurs méthodes de commerce et de leurs organisations commerciales. Si la génération actuelle d’Indo-Pakistanaise pense que la règle d’or dans la pratique commerciale reste l’honnêteté, I ‘histoire de l’ère coloniale nous a enseigné que cette minorité s’est enrichie sur le dos des Malgaches, lesquels ont fait l’objet d’une véritable exploitation. En effet, il est ancré dans l’imagerie populaire que dans les tractations commerciales, les commerçants indo-pakistanais ne manquaient pas de frauder sur le prix, la qualité ou la quantité des marchandises.

Toutes sortes d’exactions étaient effectuées, el le troc lésionnaire réalisé au détriment des paysans dans les zones rurales. Chaque période de crise fut mise à profit par ces commerçants pour organiser et manipuler le marché noir. Ces comportements anti-économiques ont suscité des réactions très vives de la part des Malgaches.

Il faut cependant reconnaitre que les Indiens de Madagascar doivent leur réussite économique a des qualités qui sont spécifiques aux minorités ethniques étrangères établies dans un pays africain, tels les Libanais en Afrique de l’Ouest. Une solidarité communautaire très forte, alliée a un sens des affaires aiguisé au fil des générations et appuyée par des connexions familiales étendues à de nombreux pays leur conférent un atout non négligeable. C’est dans ce contexte que fut créé vers les années 50 la première industrie « Karana », une entreprise de confection et une usine de fabrication de bougies. Ces firmes furent suivies par une multitude de sociétés, axant dans un premier temps leurs activités dans l’industrie textile et la confection pour s’étendre ensuite dans tous les secteurs. Le résultat en est que les firmes indo-pakistanaises constituent actuellement l’essentiel du secteur industriel de Madagascar, d’autant plus qu’elles ont pris en main les entreprises abandonnées par les Européens.

Des solidarités communautaires

L’efficacité de l’organisation des Karana repose surtout sur la solidarité qui existe au sein de cette communauté. Leurs activités professionnelles forment une pyramide ayant à son sommet les diverses entreprises industrielles qui sont en relation directe avec les établissements de gros et de demi-gros. Ces derniers font fonction de distributeurs pour les nombreux magasins de détail dirigés par ies Indo-Pakistanais. Et comme il est fréquent que les membres d’une même famille exercent des activités très diverses, les problèmes de débouchés pour les produits ne se posent jamais. A l’attention de certains de  leurs membres dont l’envergure est assez modeste, la solidarité des Indo-Pakistanais se traduit par le recours à une véritable banque occulte, à laquelle peuvent recourir ceux qui ne peuvent obtenir entière satisfaction auprès des institutions financières locales. Cette possibilité de recourir à des sources de financement « souples » procurent a la minorité indo-pakistanaise un avantage sur leurs concurrents malgaches.

90 % des exploitations Indo-Pakistanaises sont des affaires individuelles. Il s’agit généralement de magasins tenus par le chef de famille, assisté de quelques employés malgaches ou des membres de la famille. Mais ce sont les grands groupes à succursales multiples qui défrayent le plus souvent les chroniques. Ces sociétés ont à leurs têtes des cadres émoulus des grandes écoles européennes et américaines. Il est fréquent que les actions sociales soient réparties entre les différents membres d’une même famille. Il en est ainsi de la multinationale Axian dirigée par Hassanein Hiridjee, un ancien de l’École supérieure de commerce de Paris. Au plus haut sommet du groupe trônent les progénitures des 3 frères Hiridjee Bashir, Raza-Aly et Rosanaly. La direction des différentes sociétés du groupe est confiée à des hauts-cadres internationaux, où les cadres malgaches brillent par leur absence :  sur une quinzaine de hauts-dirigeants d’Axian, ne figure qu’un employé malgache, au rang de simple « chef des ressources humaines ».  Le même schéma se retrouve dans les autres grands groupes indo-pakistanais, pour ne citer que les plus célèbres :  Filatex, avec Hasnaine Yavarhoussen et son père Abdoulrassoul Yavarhoussen ; le Groupe Basan avec la famille Barday ; le groupe Redland avec la Famille Akbaraly ; le groupe SOCOTA avec la famille Ismail…

Les Indo-Pakistanais, un poison pour l’indépendance de Madagascar (volet 2)

La Russie de Poutine en embuscade à Madagascar

 

 

 

 

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Les Indo-Pakistanais, un poison pour l’indépendance de Madagascar (volet 2) https://mondafrique.com/economie/les-indo-pakistanais-un-poison-pour-lindependance-du-pats-volet-2/ Sat, 22 Nov 2025 19:07:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=143115 Les indo-Pakistanais, dont les parents ont été de simples auxiliaires au service de la colonisation, sont devenus aujourd’hui des acteurs indispensables de la vie économique et des leviers essentiels au sein de la classe politique malgache. Sur l’image ci dessus, on découvre Ylias Akbaraly, Hassanein Hiridjee et Hasnaine Yavarhoussen, trois hommes d’affaires malgaches d’origine indo-pakistanaise […]

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Les indo-Pakistanais, dont les parents ont été de simples auxiliaires au service de la colonisation, sont devenus aujourd’hui des acteurs indispensables de la vie économique et des leviers essentiels au sein de la classe politique malgache. Sur l’image ci dessus, on découvre Ylias Akbaraly, Hassanein Hiridjee et Hasnaine Yavarhoussen, trois hommes d’affaires malgaches d’origine indo-pakistanaise et qui sont cités parmi les plus grandes fortunes d’Afrique francophone par le très respectable magazine « Forbes ». L’influence de ces oligarques est telle que malgré le changement de régime, la gendarmerie malgache qui avait montré cet automne une brutalité particulière face aux manidestations du camp démocrate, a interpellé ces jours ci un jeune influenceur français Dylan Silva , qu avait mis en cause cette oligarchie indo pakistanaise et qui n’a pù sortir de détention que grâce à la mobilisation massive de ses amis sur place (GenZ, etc.)

Daniel Saine Roche

La puissance économique de la minorité indo-pakistanaise est désormais telle qu’elle peut étaler sans complexe ses influences politiques. Si jusqu’à une certaine époque, la neutralité était de règle au sein de la communauté, tout a changé avec le coup d’Etat sanglant de 2009 lors duquel des personnalités indo-pakistanaises ont agi directement sur la scène politique malgache. Selon la déclaration d’un des principaux auteurs du coup, le Colonel Charles Andrianasoavina (propos recueillis par Philippe Divay et publiés dans le Club de Mediapart en 2012 et 2013), des hommes d’affaires indiens ont apporté un financement substantiel au « double coup d’Etat commandité par Andry Rajoelina ». Ont été ainsi cités des quincaillers en la personne de MM Said et Galib, mais aussi des patrons de grandes entreprises comme Ylias Akbaraly du Groupe SIPROMAD et Amir Rajabali du Groupe Rajabali.

Par ailleurs, la saga de la crise énergétique a Madagascar constitue aussi une illustration de cette influence politique.  Fidèle Razarapiera, Vice-président de l’Assemblée nationale, clame que le problème auquel est confronté aujourd’hui la société nationale d’eau et électricité (Jirama) est dû à la dépendance de cette entreprise aux Groupes Filatex de  Hasnaine Yavarhoussen et à la Jovena de Hassanein Hiridjee.  Selon lui, ces deux entités ont pu mettre en place un réseau occulte permettant de protéger leurs intérêts, capable de dicter les décisions de la JIRAMA, de l’État malgache, et même de son partenaire international, la Banque mondiale.

Hassanein Hiridjee, propriétaire du groupe Axian et Jovena contrôle en effet l’énergie qui alimente la JIRAMA (le gazole, le fioul, le fioul lourd) tandis que Hasnaine Yavarhoussen (Filatex) contrôle la fourniture des groupes photovoltaïque et thermique, ainsi que la production énergétique, rendant l’État totalement dépendant de lui. La dépendance commence dès la phase de production, et s’étend sur les infrastructures logistiques, les stocks de carburant, les systèmes de maintenance. Et ce sont ces mêmes groupes qui bénéficient des marchés de construction, des garanties de paiement, et d’un cadre fiscal peu contraignant. Le contrôle étatique est difficile à mettre en œuvre car celui qui vend du carburant à l’État lui-même incapable de payer, qui construit ses centrales, qui impose ses clauses contractuelles, peut imposer sa propre règle du jeu. Dans cet optique, le vice-président de l’assemblée nationale affirme que Hassanein Hiridjee et Hasnaine Yavarhoussen ont des hommes de main dans l’administration malgache, au sein des Institutions, et dans les différents syndicats. Le nouveau Premier ministre est par exemple l’ancien Président d’une banque appartenant à la famille Hiridjee, et des ministres nouvellement nommés ont été avant leur nomination au gouvernement des cadres dirigeants d’entreprises locales du groupe Filatex de Yavarhoussen ou du Groupe Basan de la famille Barday.   

Un autre fait qui distingue la minorité indo-pakistanaise à Madagascar se trouve dans sa réputation d’ « accapareur » de terrains. Le placement immobilier effectué par cette communauté témoigne de son intelligence dans la pratique des affaires, quand bien même les méthodes utilisées suscitent l’animosité du public.  Ainsi, à Morondava (Sud-Ouest), 90% des maisons appartiennent à des indiens. A Majunga (Ouest), ils seraient en possession de près de 50% des immeubles en dur. A Diégo-Suarez (Nord), une bonne partie des locaux leur appartiendrait. Enfin à Tananarive, il est de notoriété publique que des groupes comme Filatex disposent d’un important patrimoine immobilier (200 000 m2 bâtis) accumulé au fil des ans. Amir Rajabali, président d’un autre groupe familial, est présenté par une certaine presse comme un « richissime industriel accapareur de terrains fonciers », bénéficiant de la « complicité des responsables fonciers dans l’acquisition douteuse et abusive de nombreux terrains ».

Une intégration sociale difficile 

Il existe un sentiment de méfiance réciproque entre la communauté indo-pakistanaise et les Malgaches. Le premier et principal motif de suspicion réside dans la domination économique d’une partie importante du groupe, qui compte parmi les principaux hommes d’affaires et investisseurs du pays. On dit que leur richesse et leur réussite suscitent jalousie et convoitise, et que le reproche principal qui leur est adressé, c’est leur « réussite dans les affaires ».  C’est dire que les indo-pakistanais constituent facilement des boucs émissaires qui cristallisent le mécontentement populaire, souvent sur l’instigation de politiciens populistes.

D’un autre côté, les observateurs même les moins avertis notent qu’il ne s’agit aucunement d’une jalousie gratuite, mais d’un ressentiment alimenté au fil des générations par un sentiment d’injustice. Dès le départ, la communauté indo-pakistanaise a été favorisée par les colons et l’administration française, puis par les différents régimes qui se sont succédés à Madagascar. Au sein de la population, il est très fréquent d’entendre que les Indiens sont fourbes, malhonnêtes, intolérants, fermés sur eux-mêmes, méprisants envers les Malgaches, et qu’ils s’enrichissent à leur détriment. Cette dernière assertion part de la simple constatation du fait que les Malgaches figurent parmi les trois populations les plus pauvres de la planète, alors que certains hommes d’affaires indo-pakistanais ayant démarré leurs activités depuis la Grande ile sont devenus parmi les hommes les plus riches d’Afrique francophone. 

Il est vrai que les indopakistanais ne sont pas responsables de la pauvreté des Malgaches. Mais on ne peut pas nier qu’ils ont toujours mis à profit l’existence de dysfonctionnement et de mauvaise gouvernance politique pour s’enrichir encore plus grâce à de multiples subterfuges : corruption étatique, alimentation du circuit des économies informelles pour pouvoir effectuer des évasions fiscales, etc…Il est a noter que plusieurs noms indo-pakistanais très connus ont été cités dans le scandale du « panama papers ».

Quel futur pour la communauté indopakistanaise ?

En définitive, le principal frein à l’intégration sociale de la communauté indo-pakistanaise tient à son attachement au particularisme dans un contexte où même la construction d’un Etat-nation malgache n’est pas en elle-même achevée.  La Constitution garantit pour les citoyens malgaches un traitement égal sans considération de races ni de religions. En théorie, les « Karana » de nationalité malgache ne devraient donc rencontrer aucun problème. Mais il ne faut pas passer sous silence le fait que la politique de l’Etat en matière de minorités consiste à « sauvegarder la substance nationale ». Cette politique a amené l’Etat à porter un coup d’arrêt aux immigrations nouvelles, et à restreindre l’attribution de la nationalité malgache. Cette politique de restriction favorise l’apatridie au sein de la Communauté indo-pakistanaise.

Les plus riches Karana sont de nationalité française, ou au moins ont la double nationalité franco-malgache. A leur égard, la question se pose de savoir si l’atmosphère délétère qui prévaut à Madagascar ne les acculerait pas à terme à partir. Ils suivraient en cela l’exemple de nombreux Indiens qui ont en 1973 et 1975 plié bagages pour des horizons plus propices à leurs affaires comme La Réunion, l’ile Maurice, la France ou le Canada. D’autre part, les riches familles qui ont envoyé leurs enfants étudier en Europe ou ailleurs sont déçus par le fait que de nombreux jeunes ont pour la plupart épousé des étrangers et n’envisagent plus de retourner à Madagascar. Cette situation justifie l’angoisse des parents qui risquent ainsi de finir leurs jours sans héritiers.

D’autres membres de la communauté ont d’ores et déjà adopté une position intermédiaire, avec la psychose du kidnapping qui a envahi les riches hommes d’affaires indo-pakistanais ces dernières années. Ils dirigent leurs entreprises depuis l’extérieur, comme Sameer Rajabali du groupe éponyme (BTP, immobilier, hôtellerie) installé à Maurice ou Mathias Ismaïl et Gauthier Ismaïl du groupe Socota (textile, crevettes, immobilier) qui résident respectivement à Paris et à Maurice. Il en est de même des deux enfants d’Iqbal Rahim, le président fondateur de Galana (produits pétroliers), Rizwan Rahim et sa sœur Naila Shirazee née Rahim, qui vivent, comme leur père, à Dubaï.

On peut aussi s’attendre à des transferts de l’actif de leurs patrimoines à l’étranger. L’internalisation des activités de ces groupes constitue une prémisse a ce mouvement. C’est ainsi que nombre de ces entreprises sont tournées vers l’Europe ou les Etats-Unis pour leurs ventes (cas de la vanille de Trimeta ou les haricots verts de Basan), la recherche de partenaires ou l’importation de biens d’équipements (le groupe Rajabali en France). Certains sont devenus des multinationales qui ont essaimé à l’étranger, tel Axian qui est aujourd’hui présent dans les secteurs des télécoms, de l’énergie, de l’immobilier et des services financiers en Tanzanie, au Togo, au Sénégal, en Zambie. De même pour Filatex qui se positionne sur des pays comme le Ghana, la Guinée et la Cote -d’Ivoire depuis 2020. La société Galana est bien arrimée à Maurice, au Mozambique, en Afrique du Sud, et au Kenya, tandis que Socota de la famille Ismail développent leurs activités immobilières   à Maurice, et la branche « produits de la mer » en France, Ou encore Ylias Akbaraly, avec sa holding Redland, qui est présent dans de nombreux pays dont les États-Unis, la France, en Inde et au Moyen-Orient.

La véritable problématique invoquée par la faiblesse de l’intégration sociale de la communauté indo-pakistanaise se pose donc d’une façon plus cruciale pour les apatrides et les membres dont les conditions sociales sont moyennes, et qui ne peuvent envisager un avenir autre qu’à Madagascar.  Un mouvement à double sens est souhaitable pour parvenir à des relations saines et apaisées : d’une part, l’évolution des mentalités des Malgaches qui doivent désormais appréhender le concept de la « malgachitude » dans une acception plus large, non limitée aux seuls éléments austronésiens et africains qui ont caractérisé jusqu’ici la « substance nationale » malgache.  D’autre part est requis de la part de la minorité indopakistanaise un effort vers une volonté d’assimilation, a l’instar de la minorité d’origine chinoise a qui le Malgache confère sans problème la qualité de « sinoa gasy » (chinois-malgache)

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Le groupe « Starlink » d’Elon Musk, un outil de pouvoir au coeur du Sahel https://mondafrique.com/decryptage/le-groupe-starlink-delon-musk-un-outil-de-pouvoir-au-sahel/ Tue, 18 Nov 2025 14:07:36 +0000 https://mondafrique.com/?p=138860 En l’espace de quelques années, Starlink est parvenu à mettre en place une stratégie d’expansion méthodique sur le continent africain. Déjà actif dans 24 pays africains en 2025, l’entreprise ambitionne d’étendre sa toile sur  20 nouveaux marchés avant la fin de l’année. Une enquète de Qemal Affagnon, responsable Afrique de l’Ouest de l’ONG de défense […]

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En l’espace de quelques années, Starlink est parvenu à mettre en place une stratégie d’expansion méthodique sur le continent africain. Déjà actif dans 24 pays africains en 2025, l’entreprise ambitionne d’étendre sa toile sur  20 nouveaux marchés avant la fin de l’année.

Une enquète de Qemal Affagnon, responsable Afrique de l’Ouest de l’ONG de défense des droits numériques, Internet Sans Frontières, co-auteur du livre Internet « Shutdowns in Africa, Technology, Rights and Power », paru aux éditions Bloomsbury et expert électoral en RDC, en Afrique du Sud, au Mozambique et en Russie. 

Malgré de multiples tentatives pour joindre le groupe Starlink, aucune réponse ne nous est parvenue.

Dans au moins cinq des 16 pays africains où le service est disponible, l’abonnement mensuel à Starlink reviens  moins cher que celui du principal fournisseur d’accès à Internet fixe. D’ici 2026, cinq nouveaux pays sont par ailleurs susceptibles d’être intéressés par le service. L’acquisition de ces nouveaux marchés devrait permettre au fournisseur d’accès à Internet par satellite , de couvrir  potentiellement la quasi-totalité du continent.

Dans la bande sahélo-saharienne, une région qui s’étend de l’Afrique de l’Ouest à l’Afrique centrale, ce constat se fait déjà. Dans ce vaste territoire, le réseau de plusieurs milliers de satellites de Starlink permet aux groupes terroristes de communiquer dans les endroits qu’ils occupent. Confrontés à un fort déploiement du terrorisme djihadiste, à l’insécurité, mais aussi à l’instabilité politique et économique, ces zones, sont caractérisé par un faible accès à Internet. On  y trouve encore par exemple, de nombreux coins non couverts par les infrastructures de communication terrestres. Cette situation représente une opportunité exceptionnelle pour Starlink, le service Internet par satellite d’Elon Musk. Dans cette région en proie à une crise sécuritaire sans précédent, la technologie du milliardaire d’origine sud-africaine est de plus en plus utilisée par les populations civiles, mais également par les groupes armés . Avant la parution de cet article, plusieurs demandes d’entretien ont été adressé  à Starlink, mais ces demandes sont restées sans suite. 

Internet à des fins terroristes

Ces dernières années, la disponibilité d’Internet dans des zones occupées par des hommes armés qui tentent d’imposer leurs dictats, permet à ces derniers de diffuser de nombreux éléments de propagande via X, Facebook, TikTok et d’autres plateformes en ligne. De fait, certains groupes terroristes se servent d’Internet afin de promouvoir leurs idéologies, ou encore dans le but de proférer des menaces ou de renforcer leurs capacités opérationnelles.

En Afrique où le taux de pénétration d’Internet reste inférieur (43 %) à la moyenne mondiale (68 %), un véritable marché noir prospère ainsi grâce à la force des réseaux Starlink. Des kits Starlink sont ainsi vendus et se retrouvent parfois dans des régions très reculées ou inaccessibles au grand public. Parmi les facteurs qui facilitent la vente frauduleuse des kits Starlink, il faut citer le fait que ces kits soient faciles à transporter. Dans certains pays où l’utilisation de Starlink est approuvée, des revendeurs locaux font préalablement enregistrer ces appareils pour ensuite les expédier à l’étranger dans des zones insoupçonnées.

Cette chaîne d’approvisionnement illicite permet ainsi aux groupes extrémistes, notamment le Jama’at Nasr al Islam wal Muslimin et la Province de l’État islamique en Afrique de l’Ouest de coordonner leurs activités dans des endroits où l’accès à Internet classique est inexistant.

À titre d’exemple, le groupe Province de l’État islamique en Afrique de l’Ouest s’appuie sur l’internet par satellite pour communiquer avec le groupe djihadiste d’idéologie salafiste État islamique et d’autres organisations extrémistes dans la région. Le réseau Internet par satellite permet à ces groupes armés non seulement de diffuser de la propagande, notamment en publiant des messages directement sur les médias sociaux et sur certains sites web. Dès lors , ces groupes extrémistes bénéficient d’un certain nombre davantage. Tout d’abord, ils parviennent à tirer parti de l’anonymisation sur Internet. Ensuite, en se passant de la barrière spatiale, ils profitent largement de la non-réglementation des publications en ligne.Dans cette partie de l’Afrique, les forces de sécurité gouvernementales signalent par ailleurs que l’utilisation de Starlink pour les communications sécurisées rend plus difficile l’interception des plans des groupes armés.

La haine en ligne permise

Or, le réseau social X, propriété de Musk a récemment intenté une action en justice contre l’État de New York, dans le but de contester une loi qui régule les contenus des plateformes.Dans sa plainte, la société X Corp, estime que la loi, promulguée fin 2024 et qui oblige les entreprises de réseaux sociaux à révéler des informations sensibles sur la manière dont elles modèrent les discours de haine et la désinformation, porte atteinte à la liberté d’expression.

Malgré l’usage que certains groupes armés font de Starlink au Sahel et dans les pays du golfe de Guinée, on peut en déduire que Musk pourrait combattre toute législation qui obligerait les plateformes à dévoiler leurs coulisses, notamment sur la gestion des discours haineux et la désinformation dans cette vaste zone.

En guise de réponse à l’utilisation du système d’Internet du milliardaire excentrique, par ces groupes rebelles, des pays de la région ont été contraints d’introduire certaines restrictions aux communications satellitaires. Il s’agit entre autres de la Libye et du Soudan. Le Tchad, le Mali et le Nigéria ont emboîté le pas aux deux autres, car ils sont particulièrement touchés par l’utilisation clandestine de Starlink par des acteurs criminels et violents.

Des vidéos circulant fréquemment sur les réseaux sociaux montrent des groupes extrémistes et violents qui utilisent des kits Starlink dans différentes régions.

Les vidéos de djihadistes 

Dans la guerre qu’il mène au Sahel, le Jamaat Nusrat al-Islam wal-Muslimin (JNIM) , a publié certaines vidéos en ligne. Ces vidéos montrent comment certaines branches terroristes se déchirent entre elles. De plus, ces images montrent également le butin de guerre que certaines branches terroristes parviennent à arracher chez des groupes rivaux. Le visionnage de ces vidéos révèle par exemple la présence de kits Starlink que le JNIM a pu saisir chez l’État Islamique au Sahel. 

Cette organisation terroriste est particulièrement active dans la zone des trois frontières à savoir le sud-ouest du Niger, le sud-est du Mali, et le nord du Burkina Faso. Comme le montre de nombreuses vidéos de décapitations qu’il poste en ligne grâce à Starlink, l’État islamique a une prédilection pour la violence graphique extrême. Pour l’État Islamique au Sahel, le recours aux vidéos en ligne représente un moyen de communication puissant qui peut atteindre un large public et générer des réactions fortes.À travers les vidéos qu’ils postent en ligne, Al-Qaïda et ses mouvements affiliés cherchent par contre à gagner le soutien des populations locales qui ont perdu confiance en leurs gouvernements ou envers les forces de l’ordre. Grâce à l’Internet de Starlink, les contenus diffusés par Al-Qaïda et ses mouvements associés, exploitent également les griefs régionaux et ethniques afin d’être plus convaincants. Qu’il s’agisse de vidéos courtes, de vidéos explicatives, ou de confessions en direction du grand public, les possibilités qui s’offrent à ses groupes armés sont infinies. Sur les réseaux sociaux, les vidéos courtes de ces groupes de combattants sont converties sous des formats engageants comme les reels, shorts, lives et stories. Ces différents formats permettent de capter l’attention des internautes, ce qui permet de maximiser leur visibilité de façon naturelle. En général, il peut arriver que ces vidéos courtes génèrent un engagement plus élevé que les autres formats vidéos. Cette situation incite parfois les algorithmes de YouTube, X, Facebook, Instagram, et TikTok à leur donner une plus grande visibilité dans les fils d’actualité et les suggestions de contenu. C’est ainsi que ces vidéos parviennent à influencer idéologiquement de nombreuses populations. Toutefois, il arrive aussi que les groupes armés fassent usage de la force pour atteindre cet objectif ou en mettant en avant des avantages économiques dont bénéficient leurs membres. Toutefois, il arrive aussi que les groupes armés fassent usage de la force pour atteindre cet objectif ou en mettant en avant des avantages économiques dont bénéficient leurs membres.

La vague Starlink 

L’année dernière, les autorités maliennes avaient indiqué, s’être rendu compte de l’emploi sans autorisation des kits Starlink dans les zones du nord et de l’est du pays. Ces deux régions sont particulièrement en proie aux activités des groupes séparatistes et jihadistes.

Fin juillet 2024, le réseau Starlink a joué un important rôle, lors de la bataille de trois jours à Tinzaouaten. Lors de cette bataille qui a opposé, les Forces Armées Maliennes et les mercenaires de Wagner à l’alliance des groupes armés majoritairement touaregs qui opèrent au nord du Mali, les rebelles ont utilisé Starlink pour maintenir une communication sécurisée entre leurs unités d’une part. D’autre part, Starlink a également permis de diffuser les dernières actualités sur les réseaux sociaux, amplifiant ainsi les efforts de communication de cette coalition de groupes rebelles séparatistes du Mali. Le matériel de Starlink arrive donc à se retrouver dans des profondeurs du territoire Malien où, son utilité n’est plus à démontrer dans les conflits armés.

Toujours dans la même période, les soldats nigérians ont également mis la main sur un terminal Starlink lors d’un raid de l’armée dans la forêt de Sambisa, une localité du nord-est du pays.  Lors de l’acheminement du matériel, Les kits Starlink sont souvent stockés dans des entrepôts ou dans des complexes résidentiels avant d’être envoyés vers d’autres destinations dans le but de brouiller les pistes. Les kits Starlink se composent de petits éléments à savoir la parabole, une alimentation électrique, des câbles, une base et un routeur Wi-Fi. Pour éviter d’être détectés, les trafiquants démontent les kits avant de les mélanger à des produits agricoles par exemple. Ce qui ne permet pas toujours aux douaniers de les détecter lors des passages aux postes de frontières. Afin d’éviter les contrôles douaniers, il arrive également que le transport des kits Starlink s’organise après la tombée de la nuit. Au coucher du soleil , il devient plus aisé aux trafiquants d’utiliser des routes secondaires, des pistes non asphaltées ou de préférer l’usage des motos plutôt que des voitures afin de se déplacer plus rapidement. 

Parmi les clients finaux, beaucoup ne disposent pas de compte bancaire. Les trafiquants exploitent donc le faible taux de pénétration bancaire dans des pays comme le Burkina Faso, Mali, et le Niger pour générer un flux continu de revenus illicites.Ces opérations leur permettent de tirer profit des frais d’abonnement liés au fonctionnement de Starlink.

Ces dernières années, la diffusion d’Internet par satellite aide à mieux appréhender les enjeux qui gouvernent des endroits comme le Sahel, qui regorge d’importantes richesses naturelles et énergétiques. Dans un pareil contexte, la donnée spatiale pourrait favoriser l’émergence de nouveaux protagonistes particulièrement redoutables. Au nombre des joueurs qui se démarquent, la force de pénétration du réseau Starlink, montre qu’il faudra désormais composer avec Elon Musk.

 

 

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Mali, Iyad Ag Ghali serait bien le commanditaire de l’assassinat des journalistes de RFI https://mondafrique.com/decryptage/mali-iyad-ag-ghali-serait-bien-le-commanditaire-de-lassassinat-des-journalistes-de-rfi/ Mon, 17 Nov 2025 08:28:41 +0000 https://mondafrique.com/?p=142098 Malgré douze années écoulées depuis l’enlèvement et l’assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, le 2 novembre 2013 à Kidal, dans le nord du Mali, l’enquête continue de progresser, à petits pas. Une certitude, le commando qui commet le crime contre les deux journalistes est aux ordre de Seidane Ag Hita, l’actuel bras droit d’Iyad […]

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Malgré douze années écoulées depuis l’enlèvement et l’assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, le 2 novembre 2013 à Kidal, dans le nord du Mali, l’enquête continue de progresser, à petits pas. Une certitude, le commando qui commet le crime contre les deux journalistes est aux ordre de Seidane Ag Hita, l’actuel bras droit d’Iyad Ag Ghali, le chef du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Gsim) et l’homme fort du djihadisme malien qui tient tète aujourd’hui à la junte militaire au pouvoir à Bamako.

Nathalie Prevost

au centre Iyad Ag Ghali, chef militaire et spirituel des plus de 200 prisonniers djihadistes libérés en échange des 4 otages de la photo précédente (Sophie, deux Italiens et l'opposant malien Soumaïla Cissé).
Lors de la libération de Sophie Pétronin en octobre 2020, Seidane Ag Hita est le premier des ravisseurs en partant de la gauche, avec lunettes noires, chèche ocre et chemise blanche. 

Les quatre membres du commando qui a enlevé les deux membres de l’équipe de RFI à la sortie d’une interview, à 13h05 locales, puis les a assassinés à une dizaine de kilomètres à l’est de la bourgade sont bien identifiés: leurs chefs, tous des collaborateurs de premier plan d’Iyad Ag Ghali, ainsi que certains complices de l’enlèvement et, sans doute, de la fuite des exécutants du crime dans le désert.

Si une grande partie des protagonistes (trois des quatre membres du commando, à commencer par son chef et chauffeur Baye Ag Bakabo, le chef de katiba Abdelkrim Taleb, qui a revendiqué l’enlèvement, et d’autres acteurs secondaires) sont morts après 2013, tués par l’armée française, dans des combats entre factions touareg ou dans des accidents de voiture, il reste toutefois plusieurs auteurs en vie plus actifs que jamais dans la région : le dernier membre du commando, Hamadi Ag Mohamed, Iyad Ag Ghali, le commanditaire présumé de l’opération, et son désormais numéro deux  Seidane Ag Hita, ainsi que des complices venus tirer d’affaire le  commando en panne de véhicule avant l’arrivée sur place – une grosse heure plus tard – du détachement français de liaison d’appui.

Des témoignages recueillis à distance ainsi que les résultats très tardifs (2021) mais fructueux de l’enquête sur la téléphonie offrent de nouvelles perspectives sur les vivants et les morts, qui éclairent les liens étroits entre les protagonistes de l’opération, qui dépendent tous, directement ou non, d’Iyad Ag Ghali, maître espion, chef de guerre et grand maître du business des otages à la tête de la galaxie Al Qaida au Sahel.

Des auteurs et complices issus de Kidal

Une réunion des chefs coutumiers du nord Mali à l’invitation de Mahamat Saleh Annadif, le patron de la MINUSMA. Cheikh Ag Haoussa (6e à partir de la gauche) est à la droite d’Annadif (7e) et Bilal Ag Acherif (8e) à sa gauche

On sait presque tout, désormais, sur l’enlèvement lui-même. Les recoupements téléphoniques prouvent que l’équipe de RFI a été suivie et espionnée dès son arrivée à Kidal, le 29 octobre. L’enlèvement était donc bien programmé avant l’arrivée sur place du tandem, déjà venu en juillet précédent pour couvrir l’élection présidentielle. Cette fois, Ghislaine Dupont et Claude Verlon étaient là pour documenter la réconciliation dans la région, dans le sillage de l’intervention Serval qui avait, en janvier 2013, dispersé et défait les groupes djihadistes et placé Kidal sous l’autorité conjuguée de l’armée française et de ses alliés locaux du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA).

Le lendemain de son arrivée, Ghislaine avait interviewé un personnage sombre, désormais disparu (tué le 8 octobre 2016 dans un attentat à la voiture piégée en sortant du camp de la MINUSMA), dont l’ombre écrase le dossier : Cheikh ag Haoussa, un vétéran des rébellions touareg et homme fort de la région, ancien collaborateur militaire et grand ami d’Iyad Ag Ghali depuis la rébellion des années 1990. Elle avait, comme un pressentiment, confié à sa rédaction le lendemain, l’avoir trouvé «glaçant.» 

Le 2 novembre, le duo interviewe à son domicile un notable touareg de Kidal, Ambery Ag Ghissa, cadre du MNLA, tout à fait étranger au crime. Celui qui donne le «top», sur place, aux ravisseurs s’appelle Hamadi Ag Ma. C’est un ancien garde du corps de Bilal Ag Acherif, le leader indépendantiste du nord, chef du MNLA, dont les hommes quadrillent le bastion rebelle depuis la défaite militaire des djihadistes en janvier. Hamadi Ag Ma a combattu en 2012 aux côtés de ses frères d’armes, à Gao, contre les djihadistes du MUJAO, et il mourra en 2017 dans des combats contre le groupe loyaliste touareg du GATIA.

Mais en ce 2 novembre 2013, il sert un autre patron : Seidane Ag Hita, l’actuel bras droit d’Iyad Ag Ghali, son cousin. «Leurs deux grands-pères étaient frères», a indiqué une source kidaloise dont le témoignage a été rapporté au juge. Les deux hommes ont grandi dans la même maison, celle de Seidane Ag Hita. En 2013, dans la vie courante, Hamadi Ag Ma est inséparable du petit frère de Seidane, Cheikh Ag Hita, et d’un autre cousin commun, Madou Ag Baye, actuel garde du corps de Seidane. Ensemble, ils trafiquent de la drogue.

Le double jeu du Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad

Baye Ag Bakabo, le chef du commando, est aussi proche, mais depuis beaucoup moins longtemps, de Seidane Ag Hita. A l’orée des années 2000, alors en prison pour une affaire de drogue après une courte carrière de chauffeur d’un commandant rebelle, Bakabo a rencontré l’un des neveux d’Ag Hita, Agmad Ghali Ag Ouadossan, poursuivi dans le cadre de l’enlèvement d’otages occidentaux près de Gao. Baye sympathise avec son camarade d’infortune et il est libéré grâce à l’intervention de Seidane Ag Hita et Abdelkrim Taleb, celui qui revendiquera plus tard l’enlèvement des deux journalistes. A sa sortie de prison, désormais rallié aux idées djihadistes, il intègre la katiba du Touareg.

Lorsqu’il revient à Kidal, après l’intervention de l’armée française en janvier 2013, comme beaucoup d’autres combattants djihadistes affiliés à Iyad Ag Ghali (soit sous l’étiquette d’Ansar Dine, le groupe créé en 2012 par Iyad Ag Ghali pour faire pièce au MNLA rebelle, soit sous celle d’Al Qaida, au sein de la katiba de son cousin Abdelkrim Taleb/le Touareg), Bakabo se revendique du Haut Conseil pour l’Unité de l’Azawad (HCUA), le tout jeune mouvement créé début mai pour «blanchir» les djihadistes touareg. «Quand ils sont revenus en ville, ils ont officiellement déposé les armes et des gens du MNLA se sont portés garants pour eux», a raconté un ancien combattant local du MNLA à Mondafrique. Bakabo ne fait pas exception : il s’enregistre en tant que HCUA avec son pick-up, qui appartient, en réalité, à Al Qaida, et qui sera utilisé pour l’enlèvement.

Cheikh Ag Haoussa
Cheikh Ag Haoussa

Les jours précédant le rapt, Bakabo est vu en compagnie de Cheikh Ag Haoussa – lui-même officiellement chef d’état-major du HCUA (après avoir été l’un des commandants d’Ansar Dine quelques mois plus tôt) – dans le véhicule du second. Ils passent un moment tous les deux devant le camp de la MINUSMA, le matin de l’enlèvement. Cheikh Ag Haoussa entre dans le camp, où il figure parmi les interlocuteurs privilégiés de la force de maintien de la paix, pendant que le chef du groupe qui s’apprête à enlever l’équipe de RFI reste dans la voiture.

Cheikh Ag Haussa fait mine de collaborer avec le MNLA mais il le combat souterrainement de toutes ses forces. C’est aussi dans l’ADN d’Iyad Ag Ghali qui voit, depuis toujours, dans l’organisation créée par ses jeunes frères kidalois une menace pour sa propre autorité dans la région. Bien qu’affaibli par l’entrée en guerre de la France, Iyad Ag Ghali et ses nombreux camarades et soldats sur place sapent méthodiquement leurs rivaux indépendantistes dont ils jalousent l’influence locale en tant qu’alliés de l’armée française et de la MINUSMA. L’enlèvement de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, à cet égard, est non seulement une promesse de belle rançon mais aussi un coup porté à la réputation du MNLA, supposé «tenir» Kidal pour le compte de la France. Le dossier d’instruction révélera que Cheikh Ag Haoussa, au comble de la duplicité, a été mis à contribution par l’armée française pour identifier le véhicule des ravisseurs (dont le numéro de châssis figure, par ailleurs, dans les registres du MNLA depuis son entrée en ville.)

Scénario mortel

Des combattants recrutés par Iyad Ag Ghali

A 13h05, dès l’enlèvement des deux journalistes, l’alerte est lancée. Mais à 12 km de Kidal en direction de l’est, le pick-up subit une panne moteur irréparable. Le temps presse pour les quatre ravisseurs, qui savent pertinemment que l’armée française est déjà alertée et sans doute à leurs trousses. Craignant l’arrivée imminente d’hélicoptères français et dans l’incapacité d’emmener leurs otages dans leur fuite, Bakabo et ses hommes les tuent à bout portant (comme avant eux, dans des circonstances voisines, Antoine de Léocour, le 8 janvier 2011 et Philippe Verdon, dont la mort a été annoncée en mars 2013).

D’après le même témoignage cité plus haut et versé au dossier, les ravisseurs font appel, par talkie-walkie, à des complices d’un campement voisin pour venir les chercher.  L’avocate de la partie civile, Marie Dosé, a déclaré, lors d’une conférence de presse le 29 octobre, qu’elle avait officiellement demandé au juge d’enquêter sur Mohamed Ag Hellah,  dont le campement se trouvait à 12 km du lieu de l’assassinat. Ag Hellah, lui aussi cadre d’Ansar Dine, aurait envoyé deux motos aux ravisseurs partis à pied dans le désert. Cet homme évoluait dans l’entourage proche d’un autre djihadiste très connu au début des années 2010, Nabil, un ancien officier de la sécurité militaire algérienne qui avait joint son destin à celui d’Iyad Ag Ghali et qui dirigeait Al Qaida à Aguelhoc jusqu’à sa mort en 2012.

Le dernier membre vivant du commando, Hamada Ag Mohamed (ou Hamadine Mohamedine dans les milieux djihadistes) est devenu chef de section de la katiba Ansar Dine, sous le commandement de Seidan Ag Hita, dans la région d’Abeibera et Boghassa, le fief d’Iyad Ag Ghali. Ce fils d’éleveur a grandi auprès de la tribu du chef d’état-major du HCUA, une tribu imghad de l’Adrar. Il a participé encore tout récemment, le 14 juillet dernier, à une embuscade contre les forces armées maliennes à 40 km de Kidal.

Tous les fils remontent à Iyad Ag Ghali

Les trois commandants opérationnels et politiques de l’enlèvement, de son vieux complice de rébellion cheikh Ag Haoussa à son jeune lieutenant Seidane Ag Hita, en passant par son cousin chef de katiba Abdelkrim Taleb, sont tous des très proches du Vieux, le surnom d’Iyad Ag Ghali dans ces milieux. Ils sont tous, évidemment, Touareg et natifs du nord.

Sur le pare-soleil du pick-up en panne conduit par Baye Ag Bakabo figuraient les coordonnées GPS d’un lieu à la frontière entre l’Algérie et le Mali, écrites à la main. Sans doute là où les deux otages de RFI auraient dû, selon le plan initial, être livrés au commanditaire du rapt. Le téléphone d’Ag Bakabo a gardé la trace, entre le 29 et le 31 octobre 2013, de deux échanges assez longs avec un numéro algérien. Abdelkrim Taleb ? Seidane Ag Hita? Un autre proche d’Iyad Ag Ghali basé en Algérie, comme la famille du chef touareg ? Le juge d’instruction Jean-Marc Herbaut a sollicité les autorités algériennes pour tenter d’approfondir ces pistes. Il n’a jamais reçu la moindre réponse. 

 

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Sahel, l’exode tous azimuts https://mondafrique.com/decryptage/sahel-lexode-tous-azimuts/ Sat, 15 Nov 2025 22:57:55 +0000 https://mondafrique.com/?p=142734 L’insécurité chronique au Mali poursuit son essor, avec l’apparition simultanée de deux foyers de déplacement massifs de populations, hors du territoire, respectivement vers la Côte d’Ivoire et la Mauritanie, deux espaces bientôt submergés, qui hébergent, déjà des dizaines de milliers d’infortunés, au risque d’y compromettre une part de leur stabilité. D’ailleurs, paradoxe tragique, le Mali […]

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L’insécurité chronique au Mali poursuit son essor, avec l’apparition simultanée de deux foyers de déplacement massifs de populations, hors du territoire, respectivement vers la Côte d’Ivoire et la Mauritanie, deux espaces bientôt submergés, qui hébergent, déjà des dizaines de milliers d’infortunés, au risque d’y compromettre une part de leur stabilité. D’ailleurs, paradoxe tragique, le Mali continue d’abrite les vagues de rescapés des affrontements au Burkina Faso.

https://t.me/veillesah/576

Au sud du Mali, de nombreux résidents des villages autour de Loulouni cherchent, en catastrophe, un havre de répit d’abord dans la ville de Sikasso, avant d’envisager l’exil. Ils tentent d’échapper à la virulence et à l’imprévisibilité de la belligérance sans arbitrage entre les milices de chasseurs Donzos acquises à Bamako et les combattants du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Gsim-Alqaïda). Les deux disposent désormais d’équipements létaux en abondance d’où le choc tempétueux de leur dissentiment. Hier munis de pétoires et d’amulettes magiques, les partisans du pouvoir central, dotés par lui, ont pu obtenir les outils de l’autodéfense, longtemps réclamés, sans succès. Néanmoins, le rapport des forces ne tourne à leur avantage. Souvent seuls à essayer de contenir l’insurrection islamiste, les Donzos, protègent une identité, une culture et un mode de vie, afin de conjurer la menace, non exagérée, de l’extermination. Ils se battent contre d’autres autochtones plus résolus à la victoire, sous la bannière de Dieu et mieux aguerris à l’exercice de l’asymétrie. Ceux-là manient le talkie-walkie, l’internet satellitaire, le drone kamikaze, l’engin explosif improvisé (iee) et le lance-roquette. Que nul ne s’y trompe, à présent, il s’agit d’un conflit civil, à l’abri du droit. Se déroule, dans la savane, une lutte à mort dont la polémologie résume les excès et le degré de mobilisation par l’expression « guerre totale ».  Ici, loin du scrupule et de la retenue que suscite le regard extérieur, les bavures sont la règle, les représailles un moteur d’agressivité et la paix un non-sens.

 

Au sommet de l’hospitalière terre de Côte d’Ivoire, le Conseil national de sécurité (Cns) commence à comprendre la portée de l’afflux en cours. Le pays devient la destination du salut. Au terme de sa réunion du 13 novembre, en présence du Président Alassane Ouattara, l’instance décide de « prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de l’enregistrement de ces demandeurs d’asile ». Depuis deux ans, la Côte, convient-il de le souligner, accorde secours et dignité, sur fonds propres, à environ 100 000 personnes ayant déserté le périmètre des affrontements. A Niornigué, bourgade naguère d’à peine quelques habitants, sise à la périphérie du poste-frontière de Ouangolodougou, un centre d’accueil, construit en dur, sert de point de chute à des centaines de familles burkinabè et leur nombre ne cesse de croître. Le chiffre global devrait connaître des pics de hausse soudaine durant les semaines à venir.

Léré, fuir la barbarie

De l’ensemble des points de passage en provenance du Mali, afflue une procession ininterrompue de femmes, d’enfants et surtout de vieux, pas toujours natifs de Léré. Ils échouent, là, à partir du grand Ouest, comme repus de fatigue et à bout de volonté. Ils arrivent à Gorgui Zemal, Fassala Néré, Bassiknou, Adel Bagrou et Bousteila, surchargé de ballots informes où l’on devine, couvertures, vivres et quantité d’ustensiles de cuisine. Or, le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (Hcr), en état d’asphyxie au camp de Mberra, n’a plus les moyens de sa vocation. Il s’appuie sur le Croissant rouge mauritanien (Crm), lequel ne dissimule la modicité de ses ressources. Quant à l’effectif des arrivants, les informations disponibles tiennent encore de l’approximation. Certes, les services en charge ne manquent d’expérience après le précédent de 2012 mais la mesure comptable butte sur le déficit de personnel motivé et de matériel informatique en capacité d’adaptation aux aléas du désert. Les besoins immédiats demeurent l’approvisionnement en eau, les compléments alimentaires et les soins d’urgence. Quant à l’assistance psychologique, le sujet fait sourire les correspondants de Veille sahélienne tant il paraît luxe de l’hémisphère nord. Pourtant, parmi les nouveaux venus, une majorité relate le traumatisme de la terreur. Presqu’en chœur, certains disent craindre, davantage, les exactions des Forces armées maliennes (Fama) et de leurs supplétifs russes, que la justice expéditive des jihadistes. La comparaison, embarrassante, témoigne de la difficulté à rendre compte d’une explication sans observateurs ni caméras où le soldat, le milicien, le militant armé, l’assaillant et la victime, racontent, chacun, une bribe de vérité.

« Le Mali, un pays frère »

Pressé par ses compatriotes qui se plaignent de tracasseries au Mali, le Président Mauritanien, lors d’une visite de proximité dans les régions proches de la frontière Est tint, le 10 novembre, à rappeler le principe du voisinage : « Le Mali restera un pays frère, on doit les aider autant que faire se peut, nous devons supporter au maximum leurs agissements qui sont souvent tributaires de cette situation. Nous devons rester compréhensifs à leur égard. Le voisinage est une réalité géographique qu’on ne peut pas changer, les crises passent et disparaissent. On ne peut en aucun cas oublier ce que nous accordaient nos frères maliens en temps de paix, ils nous ont toujours traités avec beaucoup d’amitié et de générosité. Aucun citoyen mauritanien n’a été inquiété ni maltraité avant cette crise que nous espérons passagère ». Et d’ajouter, en guise d’avertissement : « Nous devons rester compréhensifs. Les pays voisins ne peuvent pas déménager. Les crises apparaissent et disparaissent. Mais les pays restent »

Références

Carte Afrique de l’Ouest : https://t.me/veillesah/579

1 Communiqué du Cns Côte d’Ivoire : https://t.me/veillesah/580

1 Vidéo oraison du Président mauritanien, doublée en Bambara et sous-titrage Français : https://t.me/veillesah/581

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