- Mondafrique https://mondafrique.com/decryptage/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Thu, 14 Aug 2025 19:40:33 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.2 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg - Mondafrique https://mondafrique.com/decryptage/ 32 32 L’ambassade de France devra payer un loyer à l’Algérie https://mondafrique.com/decryptage/lambassade-de-france-devra-payer-un-loyer-a-lalgerie/ https://mondafrique.com/decryptage/lambassade-de-france-devra-payer-un-loyer-a-lalgerie/#respond Thu, 14 Aug 2025 03:10:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=137586 L’Algérie a décidé de mettre fin ce jeudi à la location à titre gracieux  de biens immobiliers appartenant à l’Etat algérien au profit de l’ambassade de France en Algérie, d’après « le jeune indépendant ». C’est ce qu’a indiqué un communiqué du ministère des affaires étrangères. A cette occasion, deux notes verbales ont été remises au Chargé […]

Cet article L’ambassade de France devra payer un loyer à l’Algérie est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
L’Algérie a décidé de mettre fin ce jeudi à la location à titre gracieux  de biens immobiliers appartenant à l’Etat algérien au profit de l’ambassade de France en Algérie, d’après « le jeune indépendant ». C’est ce qu’a indiqué un communiqué du ministère des affaires étrangères.

A cette occasion, deux notes verbales ont été remises au Chargé d’Affaires de l’ambassade de la République française en Algérie qui a été convoqué au siège du ministère des Affaires Etrangères par le Directeur des Immunités et Privilèges,  précise la même source.

« La première note verbale a eu pour objet de notifier formellement la dénonciation par la partie algérienne de l’Accord algéro-français de 2013 relatif à l’exemption réciproque des visas pour les titulaires de passeports diplomatiques et de service. Cette dénonciation va plus loin que la simple suspension notifiée par la partie française et met définitivement un terme à l’existence même de cet accord », ajoute le communiqué.

« En conséquence, et sans préjudice des délais prévus dans l’accord, le Gouvernement algérien a décidé de soumettre, avec effet immédiat, les titulaires de passeports diplomatiques et de service français à l’obligation de visas. Il se réserve, par ailleurs, le droit de soumettre l’octroi de ces visas aux mêmes conditions que celles que le Gouvernement français arrêtera pour les ressortissants algériens. Il s’agit là d’une stricte application du principe de réciprocité qui exprime, avant tout, le rejet par l’Algérie des velléités françaises de provocation, d’intimidation et de marchandage ».*

La seconde note verbale vise, quant à elle, « à informer la partie française de la décision des autorités algériennes de mettre fin à la mise à disposition, à titre gracieux, de biens immobiliers appartenant à l’Etat algérien au profit de l’ambassade de France en Algérie. Cette note annonce, également, le réexamen des baux, considérablement avantageux, contractés par l’ambassade avec les OPGI d’Algérie et invite la partie française à dépêcher une délégation à Alger pour entamer les discussions à ce sujet », souligne le communiqué.

« Il y a lieu de rappeler que la représentation diplomatique algérienne en France ne bénéficie d’aucun avantage de cette même nature. En conséquence, l’action algérienne ainsi décidée vise là également à introduire l’équilibre et la réciprocité dans la relation algéro-française globale », conclut la même source.

Cet article L’ambassade de France devra payer un loyer à l’Algérie est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/decryptage/lambassade-de-france-devra-payer-un-loyer-a-lalgerie/feed/ 0
Le sacre d’Erdogan (volet 5), la diplomatie au secours du régime https://mondafrique.com/a-la-une/la-diplomatie-derdogan-au-secours-du-regime-turc/ https://mondafrique.com/a-la-une/la-diplomatie-derdogan-au-secours-du-regime-turc/#respond Mon, 11 Aug 2025 05:09:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=131993 Plus de mille personnes ont déjà été arrêtées pour avoir participé aux manifestations de protestation contre l’arrestation du maire d’Istanbul. Les derniers médias indépendants sont harcelés en Turquie, et le caractère répressif du régime ne cesse de se renforcer. Pour autant, les contestataires ne peuvent guère s’attendre à un soutien ferme en provenance de l’étranger […]

Cet article Le sacre d’Erdogan (volet 5), la diplomatie au secours du régime est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Plus de mille personnes ont déjà été arrêtées pour avoir participé aux manifestations de protestation contre l’arrestation du maire d’Istanbul. Les derniers médias indépendants sont harcelés en Turquie, et le caractère répressif du régime ne cesse de se renforcer. Pour autant, les contestataires ne peuvent guère s’attendre à un soutien ferme en provenance de l’étranger et spécialement d’Europe et des États-Unis : l’UE et l’administration Trump ont toutes deux besoin d’Erdogan pour des raisons géopolitiques.

Professeure à l’Institut français de géopolitique (Université Paris 8), ancienne directrice de l’Institut français d’études anatoliennes (Istanbul), rédactrice en chef du site observatoireturquie.fr, chercheuse associée à l’EHESS, École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS)


Le président turc Recep Tayyip Erdogan a fait emprisonner le 19 mars dernier. Ekrem Imamoglu, maire d’Istanbul et candidat de l’opposition en vue de la prochaine élection présidentielle. On peut sans doute inscrire ce geste dans le spectre de « l’effet Trump ». On l’imagine en effet se demandant, à l’instar du président des États-Unis, pourquoi il devrait s’embarrasser du droit et des libertés. Il a donc envoyé derrière les barreaux le maire élu d’une ville de près de vingt millions d’habitants. Il ne s’attendait peut-être pas à ce que cette mesure provoque immédiatement un vaste mouvement de protestation qui, près d’un mois plus tard, ne faiblit pas.

Aux manifestations massives, tenues dans de nombreuses villes du pays, s’est ajoutée une nouvelle forme d’action : le boycott des entreprises liées aux chaînes de télévision proches du pouvoir (c’est le cas de la quasi-totalité des chaînes autorisées dans le pays), qui ne diffusent aucune image de ce mouvement. Le mot d’ordre semble être suivi, malgré les arrestations et les licenciements parmi ceux qui relaient l’appel au boycott. La presse a pu diffuser les images de commerces fermés ou vides, et de rues populeuses d’Istanbul désertées.

On peut se demander si la participation des commerçants et des usagers de la ville n’est pas en train de changer la nature de ce mouvement, le faisant passer de protestation spontanée vouée à un pourrissement rapide à un soulèvement d’une partie conséquente de la population. Une situation qui peut faire penser, toutes choses égales par ailleurs, à la grève en Iran des commerçants du bazar, les bazari, qui a donné le coup de grâce au régime du chah lors de la révolution des mollahs en 1979. Mais la comparaison s’arrête là. Aujourd’hui, la géopolitique vient à la rescousse du régime d’Erdogan : les puissances internationales ne feront sans doute rien de concret pour soutenir le mouvement de contestation.

La Turquie et la nouvelle politique de défense européenne

L’urgence d’élaborer une nouvelle doctrine de la sécurité européenne a renouvelé l’intérêt de l’UE pour la Turquie et pour sa puissance militaire.

On le sait, la Turquie est réputée posséder la deuxième armée la plus puissante au sein de l’OTAN (800 000 hommes). Selon le site Globalfirepower elle est classée neuvième au monde en 2025, après l’armée japonaise et devant l’armée italienne. Elle doit en partie son succès à ses drones militaires, le TB2 Bayraktar, du nom du gendre du président turc. Elle produit et exporte ces drones dont elle a pu exhiber l’efficacité lors de ses interventions en Libye, contre le général Haftar en 2020, au Haut-Karabakh, la même année, contre les Arméniens et auprès des forces azerbaïdjanaises, et en Ukraine contre l’invasion russe en 2022.

Cette armée s’est professionnalisée et reconfigurée après le coup d’État manqué de juillet 2016. L’industrie turque de l’armement a connu un essor considérable ces vingt dernières années. Quelque 2 000 entreprises sont engagées dans ce secteur qui exporte ses produits dans 170 pays et dont la dépendance à des fournisseurs étrangers n’est plus que de 30 %.

En termes de puissance militaire, l’intérêt pour l’UE de pouvoir compter sur la Turquie pour l’élaboration d’une stratégie de défense est difficilement contestable. Cependant, cette élaboration vise in fine à défendre le modèle de démocratie européenne. Un paradoxe saute aux yeux : il est question de défendre les institutions et usages démocratiques européens en s’associant avec un régime qui n’en a cure. Depuis l’incarcération du maire d’Istanbul, la presse emploie à juste titre le vocable « autocratie » pour qualifier le régime turc, dont le président a achevé de détricoter l’État de droit et les contre-pouvoirs dans son pays.

Washington, arbitre des relations turco-israéliennes en Syrie

De l’autre côté de l’Atlantique, Donald Trump a plusieurs fois signifié publiquement son admiration pour le président turc et pour la poigne avec laquelle il dirige les affaires de son pays. Recep Tayyip Erdogan n’aurait peut-être pas eu l’audace d’incarcérer Ekrem Imamoglu sous une autre présidence que celle de Trump. Cela dit, au-delà des inclinaisons des hommes qui gouvernent, les intérêts stratégiques de Washington et d’Ankara sont fortement imbriqués, autant dans des relations transactionnelles complexes que dans ce qui subsiste de leur alliance pendant la guerre froide, au Proche-Orient comme en Europe.

Leurs actions ont été complémentaires en Ukraine où c’est avec les drones turcs que l’armée ukrainienne a arrêté la première attaque des chars russes. En Syrie, en revanche, les États-Unis maintiennent quelque 2 000 hommes déployés en soutien aux Forces démocratiques syriennes (FDS). Celles-ci, dominées par les Kurdes, sont combattues par la Turquie, qui bombarde régulièrement leurs positions dans le nord de la Syrie. Les troupes dont dispose Ankara dans le nord syrien ont soutenu les forces rebelles syriennes depuis le début de la guerre civile en 2011, et l’administration actuelle de Damas dépend énormément du soutien turc. Alors que Washington commence seulement à tenter de définir une position claire au sujet de la nouvelle administration syrienne, Ankara fait désormais pression sur l’administration Trump pour obtenir la levée des sanctions imposées à la Syrie sous Bachar Al-Assad.

Une rivalité militaire se joue entre Israël et la Turquie sur le territoire et dans les airs syriens. La protection d’Israël constituait jusqu’au 7 avril la priorité absolue à partir de laquelle Donald Trump allait choisir – pensait-on – une ligne stratégique dans cette région. Mais le 7 avril, le président américain a une fois de plus renversé la table en annonçant depuis la Maison Blanche et en présence de Benyamin Nétanyahou que les États-Unis entamaient des pourparlers directs avec l’Iran ! Or pour établir et maintenir un dialogue avec Téhéran, les États-Unis n’auront pas trop du concours de la Turquie.

Le flou de la politique américaine concernant la Syrie a vraisemblablement favorisé les forces turques qui ont commencé à construire une base militaire à l’intérieur de la base aérienne de Menagh, dans le nord d’Alep. Israël est déterminé à empêcher la Turquie d’accroître sa présence militaire, aérienne et terrestre en Syrie. Dans la nuit du 2 au 3 avril, son aviation a détruit plusieurs bases aériennes près de Homs et de Hama. L’État hébreu compte sur le couloir syrien pour que, le jour venu, ses avions puissent frapper l’Iran, et il craint que des connivences entre la Turquie et l’Iran n’autorisent les survols de la Syrie par des appareils iraniens apportant des équipements destinés au Hezbollah.

Dans ce face-à-face entre Turquie et Israël, sur les airs et le territoire syrien, Trump a assuré Nétanyahou de son soutien tandis qu’Erdogan a appelé, dans son prêche de fin de Ramadan, à la destruction totale de « l’État sioniste d’Israël ». Pour préserver l’État hébreu, les États-Unis devront contenir, sans la froisser, la Turquie où ils possèdent plusieurs bases militaires, dont une à Incirlik qui héberge 50 missiles nucléaires B-61.uWashington a néanmoins d’autres cartes dans son jeu. Ankara souhaite instamment réintégrer le programme de construction des avions furtifs F-35 et aussi, acquérir des avions F16. C’est pour cela que le ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan a récemment rencontré son homologue Marco Rubio à Washington. Il en est revenu bredouille. La visite, sur le point d’être programmée, d’Erdogan à la Maison Blanche a été renvoyée à une date indéterminée. Le temps sans doute de voir jusqu’où iront les retombées de l’emprisonnement d’Ekrem Imamoglu.

Washington a néanmoins d’autres cartes dans son jeu. Ankara souhaite instamment réintégrer le programme de construction des avions furtifs F-35 et aussi, acquérir des avions F16. C’est pour cela que le ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan a récemment rencontré son homologue Marco Rubio à Washington. Il en est revenu bredouille. La visite, sur le point d’être programmée, d’Erdogan à la Maison Blanche a été renvoyée à une date indéterminée. Le temps sans doute de voir jusqu’où iront les retombées de l’emprisonnement d’Ekrem Imamoglu.

Hakan Fidan a poursuivi sa tournée à Paris le 2 avril. Il y a rencontré des hauts responsables militaires et du renseignement. La visite a été très peu ébruitée dans l’Hexagone. Cela n’a pas empêché Fidan de déclarer que l’Europe devait reconsidérer sa politique de défense et que cela ne pouvait se faire sans la participation de la Turquie. Faut-il se résigner à penser que les exactions du président turc ont encore de beaux jours devant eux ?

 

Cet article Le sacre d’Erdogan (volet 5), la diplomatie au secours du régime est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/a-la-une/la-diplomatie-derdogan-au-secours-du-regime-turc/feed/ 0
Le sacre d’Erdogan (4), la conquète de l’Asie centrale  https://mondafrique.com/a-la-une/linfluence-derdogan-se-renforce-en-asie-centrale/ https://mondafrique.com/a-la-une/linfluence-derdogan-se-renforce-en-asie-centrale/#respond Sun, 10 Aug 2025 06:43:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=123368 Depuis la chute de l’URSS, Ankara mise sur une appartenance commune à l’islam sunnite hanéfite et à une parenté linguistique pour tenter de s’imposer en Asie centrale. Une région vaste comme l’Europe, sous-peuplée, et surtout riche en hydrocarbures. Mais la Russie et la Chine ne sont pas disposés à lui laisser les coudées franches.      Par […]

Cet article Le sacre d’Erdogan (4), la conquète de l’Asie centrale  est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Depuis la chute de l’URSS, Ankara mise sur une appartenance commune à l’islam sunnite hanéfite et à une parenté linguistique pour tenter de s’imposer en Asie centrale. Une région vaste comme l’Europe, sous-peuplée, et surtout riche en hydrocarbures. Mais la Russie et la Chine ne sont pas disposés à lui laisser les coudées franches.    

 Par Ian Hamel, de retour d’Asie centrale.          

Pour le Kirghizistan, “Manas” est un slogan national, une bannière, un code spirituel, un manifeste, une force sacrée qui pendant des siècles a présenté le peuple kirghize à son propre peuple kirghize et a uni les gens autour d’eux dans des périodes difficiles de l’histoire.

Il est difficile de circuler au Kirghizstan sans se demander qui est Manas. Il s’agit du héros national, celui qui a réuni les 40 tribus de ce peuple nomade, pour former le premier État kirghize. Manas a depuis donné son nom au plus haut sommet de la chaîne de Talas, à l’aéroport international, à un poème épique bien plus long que l’Iliade et l’Odyssée, et enfin à l’université de Bichkek, la capitale, financée par la Turquie, à la fin des années 90. Plusieurs centaines d’élèves kirghizes reçoivent chaque année des bourses pour partir étudier dans les écoles et les universités de Turquie. En revanche, Contrairement au Turkménistan et à l’Ouzbékistan, le Kirghizstan n’a toujours pas renoncé à l’écriture cyrillique au profit de l’alphabet latin, comme l’encouragent les autorités turques.

Ankara s’est dotée d’un Conseil turcique, rebaptisé en 2009 Organisation des États turciques, qui réunit les pays d’Asie centrale (à l’exception du Tadjikistan, dont la population parle une langue proche du persan). Il faut ajouter dans cette Organisation l’Azerbaïdjan et la République turque de Chypre du Nord. De quoi développer l’idée d’un grand monde turc, riche de près de 200 millions de locuteurs, et encourager une unité turcophone à travers l’Asie centrale et le Caucase. Relativisons tout de même cette belle unité. Notre fixeur au Kirghizstan parlait couramment le Russe mais il ne comprenait qu’à moitié l’ouzbek. A Samarkand, ville-phare de l’Ouzbékistan, la population s’exprime prioritairement en tadjik. Enfin, au Karakalpakstan, république autonome d’Ouzbékistan, les habitants parlent une langue différence de l’ouzbek, et assez proche du kazakh…  

Une grande mosquée à Bichkek (Kirghizstan)      

Nous sommes encore un peu loin d’une seule et même langue commune à l’ensemble du monde turc. Les spécialistes préfèrent parler des « Turciques d’Asie centrale ». Malgré tout, durant notre périple de deux semaines dans cette vaste région, nous pouvons témoigner que la culture turque rencontre presque partout un vif succès. Confirmant ce qu’écrit le chercheur Bayram Balci, ancien directeur de l’Institut français d’études sur l’Asie centrale à Tachkent : « Les chaînes de télévision, les soap operas turcs, la musique sont très appréciés dans toute la région » (1). Lorsque nous demandons aux téléspectateurs plongés devant leurs petits écrans s’ils comprenent parfaitement les programmes diffusés par les chaînes turques, invariablement, ils nous répondent « à 50 % ».

La direction des affaires religieuses, appelée Diyanet, créée en 1924 par Mustafa Kemal Atatürk, lors de la création de la République turque, s’est enrichie depuis la chute de l’URSS d’un Conseil islamique eurasien. En 2018, le président turc a inauguré la Grande Mosquée de Bichkek, devançant de deux ans celle construite par le Qatar à Douchanbé, la capitale du Tadjikistan. Bien évidemment, les ambitions de Recep Tayyip Erdogan ne sont pas que culturelles et spirituelles. Alors qu’en 1992, les échanges avec l’Asie centrale ne représentaient que 0,8 % du commerce extérieur de la Turquie, Ankara s’est vite rattrapée. « Les entreprises turques ont particulièrement bien pénétré les marchés centrasiatiques et créé un tissu de PME dense et pérenne », note encore le chercheur Bayram Balci. Parmi les grands chantiers confiés à des entreprises turques : la nouvelle capitale kazakhe d’Astana, les constructions « mégalomaniaques » des présidents turkmènes à Achkhabad. Ajoutez la modernisation du port de Turkmenbachy sur la mer Caspienne au Turkménistan. Sans oublier le « contrat du siècle », le pipeline Bakou-Tbilissi-Ceyhan.

lLa Turquie a œuvré à un rapprochement entre le Turkménistan et l’Azerbaïdjan

Le corridor médian contourne la Russie

Ajoutez que la Turquie a œuvré à un rapprochement entre le Turkménistan et l’Azerbaïdjan qui se disputaient un gisement d’hydrocarbures en mer Caspienne. « Cette coopération naissant pourrait être le prélude à la construction à terme d’un gazoduc transcaspien », relève un récent ouvrage intitulé « Asie centrale. Le réveil », rédigé par un chercheur à l’Institut français des relations internationales (2). La guerre en Ukraine et les sanctions contre la Russie ont donné des idées à la Turquie et aux pays d’Asie centrale : Pour relier la Chine à l’Europe, plutôt que d’utiliser le « corridor nord », passant par la Russie, proposons le « corridor médian », aussi appelé la route transcaspienne. Une alternative plus courte de 2 000 kilomètres, qui fait gagner au minimum six jours aux transports de marchandises. C’est l’un des principaux thèmes développés par les récents sommets de l’Organisation des États turciques : « la circulation des marchandises dans le cadre de l’itinéraire international de transport transcaspien », comme le raconte le site Novastan, l’un des très rares médias indépendants d’Asie centrale. Novastan propose des éditions en français, en anglais et en allemand (3). 

En 2021, 870 000 tonnes seulement transitaient par le « corridor médian ». Il devrait en passer quatre millions de tonnes cette année. Toutefois, le manque d’infrastructures et des tarifs douaniers différents selon les pays traversés freinent le développement du « corridor médian » si cher à Ankara. Selon les prévisions de la Banque mondiale, « d’ici à 2030, 10 millions de tonnes transiteront par le corridor médian, pesant peu face aux 34 millions de tonnes transportées annuellement via la Russie » (4). A Och, la deuxième ville du Kirghizstan, nous n’avons pas pu franchir en voiture la frontière avec l’Ouzbékistan. Il a fallu traverser à pied, perdant une partie de la matinée en raison de la multiplication des contrôles. Les relations étant tout simplement médiocres entre les deux pays. En revanche, impossible d’aller d’Ouzbékistan au Turkménistan, le pays le plus fermé d’Asie centrale.

L’Allemagne plutôt que la Turquie

Tout n’est donc pas radieux entre la Turquie et ses “cousins“ d’Asie centrale, comme le raconte l’ouvrage « Renouveau de l’islam en Asie centrale et dans le Caucase ». À peine libérée des griffes du “grand frère russe“, l’Asie centrale aspirait à voler de ses propres ailes plutôt que de s’enchaîner à un nouveau “grand frère“ ». La Russie, qui accueille des dizaines de milliers de travailleurs venant des républiques musulmanes, a toujours son mot à dire dans la région. Quant à la Chine, qui n’hésite pas à prêter de l’argent à ses petits voisins dans le besoin, elle veille au grain. Pas questions que ces derniers apportent le moindre soutien aux Ouïghours musulmans. 

Enfin, à regarder vers l’Ouest, pourquoi les habitants d’Asie centrale ne jetteraient-ils pas carrément un regard vers l’Union européenne ? « Beaucoup de jeunes ne sont pas très religieux. Personnellement, je suis plus attiré vers l’Allemagne ou la Grande-Bretagne que par la Turquie. J’ai suivi avec davantage d’attention la rencontre l’année dernière entre l’Union européenne et l’Asie centrale », reconnaît un étudiant de 24 ans, anglophone, rencontré à Noukous, la capitale du Karakalpakstan. Quoiqu’à la tête de pays musulmans, les dirigeants des pays d’Asie centrale – très hostiles aux islamistes – gardent une position plus réservée que la Turquie sur le conflit entre Israël et le Hamas. Ils n’ont pas non plus répondu à la demande d’Ankara de reconnaître la République turque de Chypre du Nord.

 À quoi bon se fâcher inutilement avec l’Union européenne quand on cherche près de 20 milliards d’euros d’investissements pour développer le « corridor médian » ?      

  • « Renouveau de l’islam en Asie centrale et dans le Caucase », préface Olivier Roy, CNRS Éditions.
  • Michaël Levystone, Armand Colin, mars 2024.
  • « Dixième sommet de l’Organisation des États turciques : à la recherche de nouveaux axes de coopération », 8 avril 2024.
  • Emma Collet, « Les nouvelles routes d’Asie centrale », L’Express, 22 août 2024.

Cet article Le sacre d’Erdogan (4), la conquète de l’Asie centrale  est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/a-la-une/linfluence-derdogan-se-renforce-en-asie-centrale/feed/ 0
Le sacre d’Erdogan (3), le grand gagnant de la chute d’Assad https://mondafrique.com/a-la-une/recep-tayyip-erdogan-le-grand-gagnant-de-la-chute-dassad/ https://mondafrique.com/a-la-une/recep-tayyip-erdogan-le-grand-gagnant-de-la-chute-dassad/#respond Sun, 10 Aug 2025 04:48:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=123155 La prise de Damas, le 8 décembre 2024, par les rebelles du HTS (Hayat Tahrir al-Sham, organistation de libération du Levant), après une folle course de douze jours, les ayant amenés, de la poche d’Idlib contrôlée par la Turquie, à Alep, puis Hama, puis Homs, puis la capitale syrienne, est un événement, au Moyen-Orient, comparable […]

Cet article Le sacre d’Erdogan (3), le grand gagnant de la chute d’Assad est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
La prise de Damas, le 8 décembre 2024, par les rebelles du HTS (Hayat Tahrir al-Sham, organistation de libération du Levant), après une folle course de douze jours, les ayant amenés, de la poche d’Idlib contrôlée par la Turquie, à Alep, puis Hama, puis Homs, puis la capitale syrienne, est un événement, au Moyen-Orient, comparable en importance géopolitique à ce que fut la chute du mur de Berlin de 1989 en Europe.

Mondafrique reproduit une chronique du « Figaro » signée Renaud Girard, qui nous a autorisés de façon très confraternelle à reprendre son texte. 

 Recep Tayyip Erdogan a cherché sincèrement une voie diplomatique

Le grand gagnant de cette affaire, ayant pris par surprise la totalité des observateurs du Proche-Orient, est le Frère musulman qui préside aux destinées de la Turquie depuis le début du XXIème siècle. Non seulement ses proxies (supplétifs étrangers) ont chassé ceux de l’Iran dans le contrôle de la Syrie voisine, mais il va pouvoir désormais s’adonner sans entraves à son sport favori : la répression des Kurdes, ce peuple bizarre, musulman mais non arabe, qui aspire à la liberté, à l’indépendance et à la laïcité.

Pour être honnête, il faut reconnaître que Recep Tayyip Erdogan a cherché sincèrement une voie diplomatique, avant de lancer la chevauchée fantastique de ses amis barbus,  kalachnikov en bandoulière. A l’été 2023, le dictateur turc a tendu la main à son ancien ami Bachar al-Assad. Il l’a même invité à venir passer des vacances le long du magnifique littoral méditerranéen d’Asie mineure, comme au bon vieux temps de l’ère antérieure aux « printemps » et guerre civiles arabes. 

Erdogan a proposé à Assad un pacte politique et économique qui avait l’avantage de sortir la Syrie de son isolement régional. La seule chose que le président turc avait demandée à son homologue syrien était qu’il accepte de reprendre progressivement chez lui ses réfugiés. Les quatre millions de réfugiés syriens en Turquie commençaient en effet à poser un sérieux problème de politique intérieure à Erdogan.

Bachar al-Assad, qui ne voulait pas de ces Syriens à la loyauté forcément douteuse à l’endroit du régime baasiste, s’est mis à atermoyer. Ce « brave » docteur en médecine s’est abusivement pris pour le renard politique que fut son officier de père, qui exerça en Syrie un pouvoir sans partage de 1970 à 2000, fascinant les présidents français Mitterrand et Chirac, même après qu’il eut fait assassiner, à Beyrouth en 1981, l’ambassadeur de France au Liban, Louis Delamare.

Bachar a-t-il cru que ses soldats, qu’il payait vingt dollars par mois, allaient vraiment se faire tuer pour les beaux yeux de la dictature alaouite ? Le président syrien a-t-il imaginé que le soutien de ses alliés russe et iranien était indéfectible et éternel ? Moscou et Téhéran l’avaient pourtant, discrètement, encouragé à accepter la proposition turque.

Le faux renard de l’Euphrate avait commis la faute de ne pas accepter une autre offre généreuse, quoique secrète, celle ourdie par Ron Dermer, le ministre des Affaires stratégiques d’Israël depuis 2022. Avec le soutien tacite de la Russie, Dermer avait organisé, avec l’aide de ses amis émiratis, un soutien massif à la reconstruction du territoire syrien, à la seule condition que Bachar accepte de tourner le dos à l’Iran. Notre bon docteur ne l’a pas fait. En géopolitique, une bonne action est souvent sévèrement punie. Téhéran n’a pas hésité une seule seconde à lâcher Bachar. L’Iran, dont le proxie libanais et les défenses aériennes ont été saccagés par Tsahal, n’avait plus les moyens de continuer à investir politiquement et financièrement sur un régime aussi vermoulu et indécis que celui de la famille Assad. Dans l’axe chiite, seul Nasrallah s’est montré plus mauvais que Bachar. C’est en commettant la gigantesque erreur de bombarder la Galilée le 8 octobre 2023 que le Hezbollah a déclenché le mouvement qui allait finir par la destruction de l’axe chiite entre l’Iran et la Méditerranée.

Lors des printemps arabes de 2011, le président Erdogan, dans une forte pulsion néo-ottomane, a essayé de mettre la main sur l’Egypte, la Libye, la Tunisie, en y encourageant les Frères musulmans. Sauf en Tripolitaine, cette stratégie a lamentablement échoué. Voilà qu’il a maintenant la chance inouïe d’offrir une troisième manche à sa stratégie néo-ottomane – la deuxième ayant été le succès de ses alliés azerbaïdjanais dans leur guerre d’agression de septembre 2020 contre les Arméniens.

Au Rojava (le territoire autonome kurde au nord-est de la Syrie), les Peshmergas des Forces démocratiques syriennes (FDS), jouissent du soutien de 900 soldats américains, basés notamment près de la ville de Deir-ez Zor. Ces bérets verts sont là pour aider les Kurdes des FDS ainsi que les Syriens non islamistes de l’ALS (armée libre syrienne) à combattre l’Etat islamique. Le 8 décembre 2024, les forces aériennes américaines et israéliennes, dans une coordination parfaite, ont bombardé ce qui reste des djihadistes de l’Etat islamique dans le désert syrien. Mais Trump a déjà prévenu qu’il souhaitait désengager l’Amérique de la région.

Joulani, le nouveau patron de la Syrie, se présente comme un nationaliste, respectueux des droits des minorités. Les naïfs ont le droit de le croire. Personnellement, j’ai du mal à croire qu’un homme qui a fait des allers et retours entre Al Qaïda et l’Etat islamique soit vraiment un militant de la tolérance religieuse. Il a peut-être changé, mais pas au-delà de l’idéologie des Frères musulmans, qui est aussi celle, depuis sa jeunesse, du président turc. 

Napoléon exigeait de ses généraux qu’ils aient de la chance. Incontestablement, Erdogan en a.

 Chronique internationale du Figaro du mardi 10 décembre 2024)

  

Cet article Le sacre d’Erdogan (3), le grand gagnant de la chute d’Assad est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/a-la-une/recep-tayyip-erdogan-le-grand-gagnant-de-la-chute-dassad/feed/ 0
Le sacre d’Erdogan (2), la stratégie gagnante en Afrique https://mondafrique.com/a-la-une/la-strategie-gagnante-derdogan-en-afrique-de-louest/ Sun, 10 Aug 2025 04:25:15 +0000 https://mondafrique.com/?p=109177 Proche des régimes renversés de Guinée, du Mali et du Niger, le président turc Racep Tayyip Erdogan a su préserver les intérêts de son pays en Afrique de l’Ouest, malgré la vague de coups d’Etat dans la région. Au prix d’une stratégie mêlant diplomatie des drônes et business. Offrir l’hospitalité, le gîte et le couvert […]

Cet article Le sacre d’Erdogan (2), la stratégie gagnante en Afrique est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>

Proche des régimes renversés de Guinée, du Mali et du Niger, le président turc Racep Tayyip Erdogan a su préserver les intérêts de son pays en Afrique de l’Ouest, malgré la vague de coups d’Etat dans la région. Au prix d’une stratégie mêlant diplomatie des drônes et business.

Offrir l’hospitalité, le gîte et le couvert à l’ancien président guinéen Alpha Condé et entretenir les meilleures relations avec les militaires qui l’ont renversé en septembre 2021 : c’est le grand écart réussi par le président turc Erdogan. Le chef de la transition guinéenne le général Mamadou Doubouya a séjourné en Turquie sans avoir eu à croiser l’ex-président Condé.

Ankara avant Moscou

Avant la Guinée, le président turc a utilisé avec succès la même recette pour le Mali après le renversement en août 2020 du régime du président Ibrahim Boubacar Keita (IBK) dont il était notoirement très proche. La Turquie a très vite retissé les fils avec les militaires au pouvoir à Bamako. En froid avec la France et l’Occident, le régime des colonels maliens a fait de la Turquie l’autre alternative, après la Russie. Le niveau de confiance est d’ailleurs tel que c’est en Turquie et non en Russie que le patron de l’Agence nationale pour la sécurité d’Etat (ANSE) le colonel Modibo Koné a été évacué récemment pour des raisons médicales. Comme si on ne changeait pas une stratégie qui porte ses fruits, Erdogan a eu le même agenda après le renversement à Niamey en juillet 2023 du président nigérien Mohamed Bazoum. Alors qu’il avait reçu chez lui en grandes pompes en mars 2022 le président Bazoum pour une visite d’Etat de cinq jours, Erdogan a trouvé l’intelligence de ne pas se fâcher avec les nouveaux maitres du Niger. Il a condamné le coup d’Etat militaire mais a pris très vite clairement position contre intervention militaire étrangère au Niger.

Diplomatie des drones

Derrière le maintien de la sauvegarde des intérêts turcs dans les pays du Sahel et en Guinée,  se cache une vraie stratégie mûrement réfléchie à Ankara. A la différence des pays Occidentaux, la diplomatie turque s’est abstenue de faire de grandes leçons de morale aux régimes militaires sahéliens et guinéens sur la démocratie, les droits de l’homme et la liberté de la presse.  S’y est ajoutée la décision, opposée à celles des pays occidentaux, de ne suspendre pour aucun des pays théâtre de coups d’Etat la coopération et l’aide bilatérale turque. Ce qui a été très fortement apprécié à Niamey, Bamako et Ouagadougou. Fait non négligeable, au moment où Air France était interdit de vol vers Bamako, Niamey et Ouagadougou Turkish Airlines renforçait la desserte des pays sahéliens, allant jusqu’à assurer le transport des pèlerins maliens, nigériens et burkinabé vers les liens saints musulmans d’Arabie saoudite.  Mais l’argument décisif du maintien des intérêts turcs au Sahel et en Afrique de l’Ouest, après la chute des régimes civils aura été la vente du matériel militaire, particulièrement les drones.

Dans le contexte sécuritaire où les régimes militaires ont besoin de résultats rapides dans la lutte contre les groupes terroristes, la décision d’Ankara de poursuivre et même d’accélérer la cadence dans la livraison des drones, des avions de surveillance et de transports des troupes a été très fortement appréciée dans les capitales du Sahel et à Conakry.

A l’examiner de près, le succès de l’offre turque tient surtout à son caractère très diversifié, mêlant construction des aérogares, des stades et des routes à la fourniture du matériel militaire, l’agro-alimentaire, l’import-export et les évacuations sanitaires.

Les juntes militaires du Sahel sont devenues incontournbales

 



[Message tronqué]  Afficher l’intégralité du message
 
 
 

Cet article Le sacre d’Erdogan (2), la stratégie gagnante en Afrique est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Le sacre d’Erdogan (volet 1), l’Empire ottoman rescussité https://mondafrique.com/a-la-une/recep-tayyip-erdogan-rouvre-les-portes-de-lempire-ottoman/ https://mondafrique.com/a-la-une/recep-tayyip-erdogan-rouvre-les-portes-de-lempire-ottoman/#respond Fri, 08 Aug 2025 02:06:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=93295 En  multipliant soudain les rencontres, les négociations et déjà les accords avec les principaux acteurs du Proche et du Moyen Orient, le président turc semble avoir tout simplement renoué avec l’Empire Ottoman. Ce n’est pas seulement un séisme politique – un grand fleuve retrouve son lit et bientôt son estuaire, qui est Sublime – il s’agit, […]

Cet article Le sacre d’Erdogan (volet 1), l’Empire ottoman rescussité est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
En  multipliant soudain les rencontres, les négociations et déjà les accords avec les principaux acteurs du Proche et du Moyen Orient, le président turc semble avoir tout simplement renoué avec l’Empire Ottoman. Ce n’est pas seulement un séisme politique – un grand fleuve retrouve son lit et bientôt son estuaire, qui est Sublime – il s’agit, ni plus ni moins, d’un tremblement de terre et de la renaissance d’une superpuissance.

Une chronique de Joelle Hazard

Trois jours après avoir reçu le président palestinien Mahmoud Abbas, c’est le Premier Ministre d’Israël, Benyamin Netanyahou en personne, que Recep Tayyip Erdogan, président de la République de Turquie, se prépare à accueillir, le 28 juillet 20243 à Ankara. En avril dernier, un mois avant une réélection problématique, ce dernier avait fermement condamné les affrontements de Jérusalem et le viol de la Mosquée al-Aqsa par la police israélienne ; il avait estimé qu’Israël franchissait alors la ligne rouge.

Erdogan se réconcilie spectaculairement avec le prince héritier d’Arabie saoudite
Le président turc en compagnie du président des Émirats arabes unis, Mohamed bin Zayed, dit MBZ

Le nouvel activisme du président turc impressionne. Dès le renouvellement pour cinq ans de son intronisation, le 29 mai dernier, il « imprime sa marque » sur les rives du Golfe Persique. Après plus de dix ans d’une brouille due au soutien de la Turquie à la confrérie des Frères musulmans dans la foulée des printemps arabes, il se réconcilie spectaculairement à la fois avec le prince héritier d’Arabie saoudite, le prince Mohammed Ben Salman, dit MBS, et avec le président des Émirats arabes unis, Mohamed bin Zayed, dit MBZ.

Ce faisant, il renonce à poursuivre le premier pour son rôle présumé dans le meurtre de Jamal Khashoggi : les milliards de Dollars qu’aussitôt il en retire (en plus de l’aide qu’il reçoit généreusement du Qatar), de même que les accords de défense qu’il obtient de surcroît auprès des deux grands États pétroliers (et les ventes d’armes qu’il fait à l’Arabie), en disent long sur l’opportunité de sa démarche et sur la justesse de son choix.

Une géo politique favorable

Le terrain diplomatiqye a été balayé, pour ne pas dire balisé, par quatre évènements inattendus : les accords d’Abraham d’abord, deux traités de paix signés entre Israël et les Émirats arabes unis d’une part et entre Israël et Bahreïn d’autre part (annoncés le 13 août 2020 par le président américain Donald Trump),  puis la décision officialisée le 10 mars 2023 par l’Arabie saoudite et de l’Iran de rétablir leurs relations diplomatiques dans les deux mois; et enfin la réintégration de la Syrie dans la Ligue Arabe et un retour au calme au Yémen.

Le président turc, réintronisé sur une corde raide, devrait songer à redresser l’économie turque secouée par le séisme dévastateur et une forte inflation. « L’intendance suivra », semble-t-il penser parfois dans une posture à la de Gaulle. La priorité pour lui de rendre à l’Orient son lustre  d’antan.

À Vilnius, le 10 juillet, au sommet de l’OTAN où il est convié, il tente un baroud d’honneur, en réalité un appel au Jihad, en jetant sur la table une carte tronquée avec un immense rire : « Ankara soutiendra l’adhésion de la Suède à l’OTAN si l’Union européenne rouvre les négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne » … Ses dernières illusions ont été perdues depuis qu’en juin dernier, un certain Salwan Momika, réfugié irakien de religion chrétienne, a brûlé en Suède un exemplaire du Coran sans que l’Europe ne s’en indigne.

OTAN en emporte l’Orient

Ainsi, la Turquie pourrait opérer un virage à 180 degrés, en tournant le dos à l’Europe qui l’a dédaignée. La Turquie, qui n’est pas signataire de la Convention de Montego Bay (en vigueur depuis 1994) sur le partage de la Mer Méditerranée, bouscule l’échiquier mondial grâce à la Guerre d’Ukraine. Le pays, en tenant le Bosphore, sait qu’il est le maître des horloges russes et, dans une certaine mesure, de l’Europe. Et cela depuis la nuit des temps… Depuis Alexandre le Grand, ancien roi de Macédoine, depuis les empereurs d’Orient, puis de Byzance et de Soliman le Magnifique à Atatürk

C’est pourquoi l’enjeu de ce qui vient de se passer est d’une dimension universelle, parce que d’ordre spirituel et culturel  et de caractère sécuritaire. Les répercussions de ce cataclysme géopolitique ne se feront pas attendre. 

L’élargissement de l’OTAN à la Finlande et à la Suède a fait pencher une balance à laquelle il ne fallait pas toucher. Pour Ankara, la perspective de voir l’Ukraine rejoindre demain l’Union Européenne a mis en cause la position d’équilibre quelle tentait d’adopter. La France en porte sa part de responsabilité pour avoir toujours refusé à la Turquie la place qu’elle sollicitait avec une totale constance. Qui faut-il en remercier ou en blâmer ? La Turquie ira-t-elle jusqu’à quitter l’OTAN ou restera-t-elle polygame ?

Les éléments déclencheurs et amplificateurs de la secousse sismique à laquelle on assiste sont multiples:

* Le veto réitéré de pays membres et fondateurs de l’Union Européenne (de la France, en particulier) de l’offre d’adhésion turque

* L’injure faite à l’Islam par la Suède

* Avec ou sans la Guerre d’Ukraine, l’importance du Bosphore, sachant « qu’une porte peut être ouverte ou fermée » aux céréales et aux engrais comme au pétrole et au gaz du Nord

* Le cordon ombilical entre la Russie et la Syrie est vital pour les deux pays. La Turquie ne peut pas là encore être ignorée par ses deux voisins 

De l’acheminement des hydrocarbures d’Asie centrale à ceux du Proche et Moyen-Orient, Ankara dispose d’atouts considérables.

En regardant vers le Sud !

On découvre l’importance de la Turquie dans l’espace musulman qu’elle surplombe. Le maître d’Ankara tient la Paix au bout de son stylo :

1) Le territoire turc abrite les « routes » terrestres du pétrole arabe vers l’Europe  

2) L’eau de la Turquie est plus stratégique encore pour ses voisins : l’Euphrate et le Tigre, nés dans les montagnes d’Anatolie apportent l’eau aux plaines de Syrie et d’Irak   

3) D’importants réservoirs de Gaz et de Pétrole existent en Mer Méditerranée orientale, la Turquie réclame sa part

 4)  La Route de la Soie arrive par la terre : l’Irak vient de signer un contrat de 16 milliards de Dollars pour la prolongation du rail et de la route vers l’Europe via la Turquie

 5) Israël est en voie de banalisation et la Palestine en passe d’anémie

6) La dichotomie Sunnisme-Chiisme s’estompe : l’ère des printemps arabes est terminée et avec elle ,la lutte frontale des régimes autoritaires contre la mouvance des Frères Musulmans.

La Chine aux portes

À l’Est, la Chine embusquée jusqu’à hier, sortie de « l’extrême », est aux portes de « l’Orient » musulman, et la Turquie devient le fédérateur de « dernière minute » d’une supernova. Cet épilogue prévisible confirme le « départage » du monde entre plusieurs ensembles culturels et spirituels, en particulier l’Orient musulman, disloqué à San Remo après la Première Guerre mondiale, et avec lequel l’Occident va devoir réapprendre à composer.

À ceci s’ajoute la paralysie latente d’une Europe engoncée dans le mammouth bruxellois, et la fatuité immanente de l’Occident – face à l’essor de l’Inde et de la Chine, nonobstant le changement climatique, l’explosion démographique, l’innovation galopante et le risque d’un effondrement moral.

Le président Erdogan peut se frotter les mains.

 

 

 

Cet article Le sacre d’Erdogan (volet 1), l’Empire ottoman rescussité est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/a-la-une/recep-tayyip-erdogan-rouvre-les-portes-de-lempire-ottoman/feed/ 0
Rejoignez la nouvelle chaine Whatsapp de Mondafrique https://mondafrique.com/confidentiels/rejoignez-la-nouvelle-chaine-whattsapp-de-mondafrique/ Mon, 04 Aug 2025 02:18:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=107637 REJOIGNEZ LA CHAINE WHATTSAPP DE MONDAFRIQUE Mondafrique qui rentre dans sa onzième année d’existence le doit à ses fidèles lecteurs qui résident pour moitié en Europe (majoritairement en France, beaucoup au Canada) et pour moitié dans les pays du Maghreb (surtout en Algérie) , du Sahel (le Niger et le Mali en tète)  et du Moyen […]

Cet article Rejoignez la nouvelle chaine Whatsapp de Mondafrique est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
REJOIGNEZ LA CHAINE WHATTSAPP DE MONDAFRIQUE

Mondafrique qui rentre dans sa onzième année d’existence le doit à ses fidèles lecteurs qui résident pour moitié en Europe (majoritairement en France, beaucoup au Canada) et pour moitié dans les pays du Maghreb (surtout en Algérie) , du Sahel (le Niger et le Mali en tète)  et du Moyen Orient (notamment le Liban).

Avec quelques 500000 visiteurs par mois pour le site fondé en 2014, 35000 abonnés sur Instagram et 5000 fidèles de nos pages WhatsApp , « Mondafrique » a imposé une vision pluraliste et originale en matière d’information sur le monde arabe et africain. Depuis le début des guerres en Ukraine et au Moyen Orient, nous ne nous interdisons pas d’accueillir des analyses sur les grands équilibres mondiaux qui ne peuvent pas manquer de se répercuter sur le mode africain et maghrébin. 

Notre positionnement critique vis à vis des pouvoirs en place, la diversité des contributeurs du site -journalistes, diplomates, universitaires ou simples citoyens-, la volonté enfin d’apporter des informations et des analyses qui tranchent avec la reste de la presse ont été nos seules lignes de conduite.  

Notre indépendance est totale.

Nous revendiquons une totale transparence. Deux hommes d’affaires et actionnaires du site, l’un mauritanien et l’autre libanais,  nous permettent de disposer de ressources pour faire vivre le site. Qu’ils en soient remerciés.

La seule publicité dont nous disposons est celle de Google

Le fondateur de Mondafrique, Nicolas Beau, contrôle l’actionnariat, ce qui place notre media à l’abri de toutes les pressions.

Cet article Rejoignez la nouvelle chaine Whatsapp de Mondafrique est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
La Suisse cherche à se débarrasser de la famille Biya    https://mondafrique.com/decryptage/la-suisse-cherche-a-se-debarrasser-de-la-famille-biya/ https://mondafrique.com/decryptage/la-suisse-cherche-a-se-debarrasser-de-la-famille-biya/#respond Sat, 02 Aug 2025 04:00:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=137348 Pour la Confédération helvétique, le président du Cameroun qui séjourne l’essentiel de son temps à Genève, est un peu comme le sparadrap du capitaine Haddock dans « L’affaire Tournesol ». Elle veut s’en débarrasser, mais il revient périodiquement dans son palace favori à Genève pendant des semaines. En condamnant sa fille Brenda pour « injure », les […]

Cet article La Suisse cherche à se débarrasser de la famille Biya    est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Pour la Confédération helvétique, le président du Cameroun qui séjourne l’essentiel de son temps à Genève, est un peu comme le sparadrap du capitaine Haddock dans « L’affaire Tournesol ». Elle veut s’en débarrasser, mais il revient périodiquement dans son palace favori à Genève pendant des semaines.

En condamnant sa fille Brenda pour « injure », les magistrats suisses espèrent précipiter le départ de toute la famille     

Ian Hamel, à Genève

Contrairement à son grand frère Franck Biya, pressenti pour succéder à leur père Paul Biya (au pouvoir depuis 1982) à la tête du Cameroun, Brenda Biya est certainement, de tous les enfants de Paul Biya (et même des autres chefs d’États de la sous-région), la plus iconoclaste.

Âgée de 26 ans, la jeune femme, qui a suivi une scolarité en Suisse dans un collège prestigieux à Versoix avant de poursuivre ses études aux États-Unis, puis d’être admise à l’École nationale d’administration et de magistrature (ENAM) du Cameroun, n’a pas suivi le chemin qui semblait lui être tracé.

Jet-setteuse et rappeuse

La jeune femme est très active sur les réseaux sociaux, où elle affiche un train de vie particulièrement luxueux. Un train de vie qui peut paraître indécent au regard de la situation dans laquelle vit l’écrasante majorité de ses compatriotes au Cameroun, et qui a été très abondamment critiqué dans la presse. C’est sur ces réseaux sociaux qu’elle s’était plainte d’être victime de racisme de la part d’un chauffeur de taxi à Los Angeles, qu’elle avait pris pour une course à 400 dollars (alors que le revenu mensuel brut d’un Camerounais en 2022 était de 138 dollars). Des courses de ce montant, qu’elle affirme prendre tout le temps.

Brenda Biya Dans un jet privé . Instagram de Brenda Biya.

Après s’être lancée dans la mode sans grand succès, Brenda Biya s’est tournée vers la musique, particulièrement dans le rap. Si son choix n’est pas une première pour un enfant de chef d’État africain (Ali Bongo a bien tenté une carrière musicale avant elle, et plus récemment, la princesse d’Eswatini s’est lancée dans le rap), ce choix a particulièrement surpris et embarrassé le pouvoir camerounais. King Nasty, son nom de scène, n’a pas encore, pour l’heure, conquis le haut des classements musicaux.

Brenda Biya et Reprudencia Sonkey, surnommée la « Lady Gaga africaine », chanteuse et créatrice de mode, étaient les meilleures amies du monde. Puis elles se sont fâchées et la fille du président Biya a traité son ex-copine de « dealeuse de drogue » et de « petite pute cocaïnomane ». Reprudencia Sonkey a déposé plainte à Genève car les messages insultants ont été envoyés depuis les bords du lac Léman. La chanteuse assurait que la fille du président camerounais résidait « depuis plusieurs années à l’hôtel intercontinental à Genève (…) Elle poste régulièrement sur les réseaux sociaux des photographies d’elles prises à Genève », écrit le site suisse Gotham City (1).

Brenda condamnée pour « injure »

Pour pousser son père, Paul Biya, hors de Genève où il séjourne la plupart du temps, la justice suisse vient de condamner sa fille, Brenda Biya, pour « diffamation », « calomnie » et « injure ». Brenda Biya a été condamnée à une amende de 2 400 francs suisses (2 570 euros) et à 60 jours-amendes à 200 francs avec un sursis de trois ans. Une bagatelle pour la dernière fille du président camerounais, née en 1997 quand son papa était déjà au pouvoir depuis quinze ans. Reprudencia Sonkey avait tout de même réclamé 100 millions de dollars de dommages et intérêts ! Le procureur général Olivier Jornot a surtout voulu insister sur le train de vie de la famille Biya qui réserve des chambres à l’année à l’Intercontinental alors que la majorité de la population camerounaise vit dans une grande pauvreté. C’est une petite épine dans le pied de Paul Biya, 92 ans depuis le 13 février dernier, qui se représente une nouvelle fois à la présidence de la République cet automne (2).       

« Haine, violence et tribalisme »  

En 2019 un consortium d’investigation Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) avait calculé que Paul Biya avait déjà passé quatre ans et demi à l’hôtel Continental, un palace planté à proximité du palais des Nations. Au sixième étage, il y occuperait une suite facturée autour de 150 00 euros par mois. Le problème, c’est que ses allées et venues en jet privé sont suivies sur des sites de tracking d’avions avant d’être relayés par la communauté camerounaise sur les réseaux sociaux. Résultat, les Camerounais, venus parfois de toute l’Europe, se relaient alors devant (et parfois dedans) l’hôtel pour tenter de lui rendre la vie impossible. En juin 2019, une quarantaine d’opposants ont ainsi forcé la porte d’entrée de l’établissement et se sont battus avec le service de sécurité du chef de l’État camerounais.

 

Cela fait désordre en perturbant le séjour de la clientèle fortunée qui fréquente habituellement l’Intercontinental. L’ambassade du Cameroun en Suisse avait aussitôt parlé de « bandits » venus « perturber le séjour de notre grand camarade », et de « projet barbare », expression de « la haine, de la violence et du tribalisme »… La même année, cinq membres de la garde rapprochée du maître de Yaoundé avait molesté un journaliste de la radio-télévision suisse. Ils se sont emparés de son matériel professionnel et de ses effets personnels et ils lui ont cassé ses lunettes. Les gardes du corps s’étaient prévalus d’une immunité diplomatique, que le tribunal a écarté. Aux yeux d’Olivier Jornot, le procureur général de Genève, « des représentants d’un État étranger se sont permis de faire la chasse à un journaliste qui ne représentait aucun danger, mais également à des opposants ». Ils se sont comportés comme « un État dans l’État ». Le pire, c’est que ce jour-là, Paul Biya, loin d’être en danger, n’était même pas sur place au moment des faits.  

 

« Ce n’est pas aux Genevois de payer »

 

En 2021, une centaine d’opposants camerounais avait occupé la place des Nations, devant le siège européen de l’ONU, criant « Paul Biya assassin, la Suisse complice ». Tandis que des activistes forçaient l’entrée de l’Intercontinental. Un député socialiste, Sylvain Thévoz, avait alors estimé que la Suisse pouvait accueillir Paul Biya dans le cadre de négociations politiques. « Mais là, il vient à des fins privés. Ce n’est pas à nous, Genevois, de payer pour un déploiement policier afin que monsieur Biya puisse aller faire les boutiques à la rue du Rhône ». Une artère réputée pour ses banques, ses bijouteries et des boutiques de luxe.  

 

Bref, la Cité de Calvin en a marre de ce chef d’État qui passe plus de temps au bord du lac Léman que dans son pays. Mais comment convaincre Paul Biya et sa famille de ne plus remettre les pieds dans un pays qui vit depuis si longtemps des riches touristes et surtout de leurs économies ?

 

  • « Le procureur Jornot condamne la fille du président du Cameroun ».
  • « Les Camerounais face au rendez-vous historique de la Présidentielle », Mondafrique, 30 juillet 20225            

 

 

 

Cet article La Suisse cherche à se débarrasser de la famille Biya    est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/decryptage/la-suisse-cherche-a-se-debarrasser-de-la-famille-biya/feed/ 0
Le Gazoduc Afrique Atlantique, 13 pays et 25 milliards de dollars https://mondafrique.com/decryptage/le-gazoduc-afrique-atlantique-13-pays-et-25-milliards-de-dollars/ https://mondafrique.com/decryptage/le-gazoduc-afrique-atlantique-13-pays-et-25-milliards-de-dollars/#respond Sat, 02 Aug 2025 03:25:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=131564 Le Gazoduc Afrique Atlantique (Nigéria – Maroc) a été initié par le Maroc, en décembre 2016, à l’occasion d’une visite du Roi Mohamed VI au Nigéria. Evalué à 25 milliards de dollars, ce méga projet reliera le Maroc au Nigéria par la façade Atlantique, traversant 13 pays avant d’atteindre l’Europe. Paul AMARA, Consultant, Centre4s Long […]

Cet article Le Gazoduc Afrique Atlantique, 13 pays et 25 milliards de dollars est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Le Gazoduc Afrique Atlantique (Nigéria – Maroc) a été initié par le Maroc, en décembre 2016, à l’occasion d’une visite du Roi Mohamed VI au Nigéria. Evalué à 25 milliards de dollars, ce méga projet reliera le Maroc au Nigéria par la façade Atlantique, traversant 13 pays avant d’atteindre l’Europe.

Paul AMARA, Consultant, Centre4s

Le tracé prévisionnel du projet de gazoduc Nigeria-Maroc, qui traversera 13 pays de la côte ouest-africaine.

Long d’environ 5600 – 6800 km, ce Gazoduc assurera aussi la sécurité énergétique de ces pays côtiers et de l’Alliances des États Sahéliens (AES). A titre d’exemple l’un des pipelines les plus connus est le North – Stream 2 reliant la Russie à l’Allemagne sur 1234 km et large de 48 inches. A travers le monde il existe  3.859.000 km de pipelines transportant 5 billions de tonnes de gaz.

Le pipeline GAA aura une capacité de 30 milliards de mètres cube de gaz par an. Les premières cargaisons seront acheminées, dès 2029. Modèle de coopération Sud-Sud, il offrira à l’Union européenne une alternative ou un complément au gaz russe. Il s’intègre à l’Initiative Atlantique, autre chantier marocain, destinée à favoriser l’accès du Burkina Faso, du Mali, du Niger et du Tchad à l’Océan Atlantique.

 « Le gazoduc transsaharien » concurrent

                      

Le Projet a un ainé, ou un concurrent régional immédiat: le gazoduc transsaharien, le NIGAL, Nigéria-Algérie. Dans certains documents, il est aussi désigné Trans-Saharan Gas-Pipeline (TSGP), et devrait relier le Nigéria à l’Algérie, à partir de 2027 avec du gaz naturel vers l’Europe. L’idée date des années 1980. Cependant, pour diverses raisons, l’accord sur sa mise en œuvre a été signé seulement le 3 juillet 2009, par les gouvernements du Nigeria, de l’Algérie et du Niger, 30 ans plus tard. L’Union européenne y était favorable, espérant diversifier ses sources d’approvisionnement en gaz. 

Les deux pays, riches en ressources naturelles, affirmaient alors disposer des fonds nécessaires pour son financement. Lors du 27è sommet extraordinaire de l’Union africaine, des 17et 18 juillet 2016, à Kigali, Rwanda, le Nigéria annonçait que le capital du Gazoduc sera détenu, à 90%, par la Sonatrach (Société nationale pour la recherche, la production, le transport, la transformation et la commercialisation des hydrocarbures de l’Algérie) et la Nigerian National Petroleum Corporation (NNPC), son homologue nigérian, et à 10% par la Compagnie nationale du pétrole du Niger. Présentement, son lancement est pour le moins gelé.

Un retard de trente ans.

Problème: au Nigeria même, le delta du Niger est infesté de groupes terroristes et autres qui sabotent régulièrement les installations de l’énergie, siphonnant le pétrole. Au Niger, le nord est sous la menace permanente de diverses rebellions. En Algérie, le sud désertique est également à portée de fusil de groupes terroristes. Les dernières nouvelles de ce projet remontent au 28 juillet 2022, lors de la troisième réunion Algérie, Niger et Nigéria à Alger. À cette occasion, un protocole d’accord est signé. Le contexte géopolitique et énergétique d’alors, marqué par la hausse des prix des hydrocarbures, provoquée par le déclenchement de la guerre Russie – l’Ukraine, le 24 février 2022, a favorisé cette action. L’Algérie fournissait alors 11% du gaz naturel européen contre 47% pour la Russie. Le coup d’État, survenu au Niger, les 26 et 27 juillet 2023, a mis ce pays sur la liste des états sous sanctions, fragilisant alors le projet.

Constatant dès 2016 ces différents retards, le Roi du Maroc proposa le projet du Gazoduc Africain Atlantique. Un premier accord est alors paraphé fin 2016. Le gouvernement fédéral du Nigéria donna son accord pour la signature d’un protocole entre la NNPC et la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Ce pipeline serait aussi une extension d’un gazoduc acheminant déjà le gaz du sud du Nigéria vers le Bénin, le Ghana et le Togo, depuis 2010.

Le Nigéria et l’Algérie possèdent les plus grandes réserves de gaz naturel d’Afrique. En 2024, le premier comptait 210 trillions de pieds cubes, l’Algérie (159) et le Maroc (39 milliards). Dans le domaine du pétrole, le Nigéria arrive en deuxième position en Afrique, avec 36,9 milliards de barils – 35% des réserves de brut du continent – et près de 80% de celles de l’Afrique subsaharienne. L’Algérie se classe troisième avec 12,2 milliards de barils.

Quelques enjeux du gazoduc.

Les enjeux du gazoduc sont à la fois politiques, économiques et géostratégiques. Plusieurs pays africains connaissent un taux d’électrification inférieur à 40%. Le géant Nigéria y est compris : souffrant de coupures et amenant les populations, qui le peuvent, à s’équiper en générateurs, qui engendrent pollution et autres nuisances, sans compter le prix du fuel. Le gazoduc permettrait à ces pays de produire plus d’électricité à base de centrales thermiques fonctionnant au gaz naturel. Avec l’énergie en continu, leurs économies gagneraient en productivité et rentabilité. Le secteur agricole devrait aussi prospérer en ce sens que le gaz permet de fabriquer des engrais essentiels. Avec la guerre Russie – Ukraine, leurs prix ont explosé.

Le Maroc et le Nigeria ont présenté le gazoduc comme un facteur d’intégration économique en Afrique de l’Ouest. Il s’ajouterait au réseau de gazoducs de moindre envergure qui approvisionnent déjà l’Europe via la mer Méditerranée. La Chine, qui a investi dans l’industrie pétrolière nigériane, souhaite croiser ce pipeline avec son initiative ‘’ La Ceinture et la Route’’. Lancée en 2013 cette initiative se veut une plateforme internationale destinée à renforcer les liens économiques, diplomatiques, politiques et culturels entre pays. La Russie est aussi intéressée par ce Gazoduc Africain Atlantique, y voyant un moyen de contourner les sanctions imposées par les pays occidentaux, en réorientant certains investissements vers l’Afrique.

Les défis du financement.

Cependant le projet fait face à un déficit de financement. Avec moins de ressources financières que l’Algérie, le Maroc tente toutefois de se hisser au rang de leader dans ce domaine. Cette ambition amène le Royaume à soutenir les investissements extérieurs dans ce secteur dans l’objectif de dépasser le cadre national au profit du régional. Simultanément, il renforce ses relations interétatiques, visant la satisfaction des besoins des consommateurs. Ces efforts ont été loués par une plateforme spécialisée dans le secteur énergétique, ‘’TAQA’’ (Arabic for Energy), un Holding des Émirats Arabes Unis opérant dans le pétrole, le gaz, les pipelines, l’énergie et la désalinisation. Cette plateforme a braqué ses phares sur le Gazoduc, le classant parmi les sept projets énergétiques les plus importants du continent africain. Ceux-ci englobent des pipelines pétroliers, des gazoducs, des raccordements électriques et des exploitations minières. Ce soutien de TAQA ira-t-il jusqu’à une prise de participation dans le Gazoduc ? Ça serait un succès diplomatique et financier. Évalué à 25 milliards de dollars, le GAA devrait aboutir à un accord budgétaire cette année. Le franchissement de cette étape de la décision finale d’investissement est indispensable au lancement des travaux de construction proprement dits. Le capital du Gazoduc accueillerait une palette d’investisseurs : des fonds souverains, des banques de développement ou commerciales et des géants pétroliers.

En mars 2024, Mme Amina Benkhadra directrice générale de l’Office national marocain des hydrocarbures et des mines (ONHYM) a annoncé la création d’une entreprise pour superviser le financement, la construction et l’exploitation du projet. Le mégaprojet y gagne en substance. Pilote de l‘initiative, côté marocain, Ms Amina Benkhadra, a confirmé que les études de faisabilité et d’ingénierie détaillée en deux phases sont achevées. En outre, les études d’impact environnemental, indispensables au montage financier et la conformité aux exigences des bailleurs de fonds, ont été entamées en 2024.

Le Gazoduc empruntera essentiellement un tracé Offshore jusqu’à Dakhla, Sahara occidental, avant de longer la côte Atlantique en On shore, pour se raccorder au Gazoduc Maghreb – Europe (GME) fermé depuis des décennies. Il traversera plusieurs pays ouest-africains: Bénin, Togo, Ghana,  Côte-d’Ivoire, Liberia, Sierra Leone,  Guinée, Guinée-Bissau, Gambie,  Sénégal et  Mauritanie. Les pays de l’AES bénéficieront de cette infrastructure via des extensions. Le projet est aussi la continuation de celui de Lagos – Takarosli  (Ghana) via le Benin et le Togo avant de se diriger vers Abidjan et Tanger à travers la côte atlantique.

A partir de Tanger il passe par le détroit de Gibraltar pour aboutir à Cadix en Espagne où il rejoindra l’ex pipeline Algérie Maroc Espagne. Une étude de faisabilité datant de 2017 et 2019 a été réalisée par les Sociétés en charge du projet actuel: le Nigeria National Oil Company et l’Office Chérifien des Phosphates.

 Selon Mme Benkhadra, les données collectées démontrent la compétitivité du projet en comparaison au gaz naturel liquéfié en termes de coût et capacité et transport. Ce premier tronçon partira du Sénégal – Mauritanie jusqu’au Maroc puis l’Europe. Parallèlement, avancera la seconde phase reliant le Nigéria à la Côte-d’Ivoire. Ces deux premières phases seront mises en service en 2029. La troisième étape consistera à procéder au raccordement central, avec la liaison des segments secondaires. Concrétisant la construction de ces deux premières phases, le Maroc annonçait le lancement d’un appel d’offres en novembre en 2024 affichant ainsi sa volonté d’accélérer la réalisation de cette infrastructure qui va transformer le marché énergétique de la région.

Le 12 novembre 1984, le Maroc quittait l’Organisation de l’Unité africaine protestant contre la reconnaissance par celle-ci d’un état sahraouie. Au cours du 28e sommet de l’Union Africaine tenu à Addis-Abeba, les 30 et 31 janvier 2017, le Roi Mohammed VI a constaté ‘’la flamme éteinte de l’Union du Maghreb Arabe (UMA)’’ dont sont ou étaient membres l’Algérie, la Libye, le Maroc justement, la Mauritanie et la Tunisie. Le 12 février de la même année, le Maroc déposait, officiellement, sa candidature à l’adhésion à la CEDEAO. Le Royaume est à la recherche d’une vaste zone pour stimuler et étendre son économie. Jusque-là, il avait obtenu un ‘’accord de principe’’ et un ‘’statut d’observateur’’. 

À l’exception de la Mauritanie et du trio de l’AES, les autres pays intéressés par le Gazoduc sont membres de la CEDEAO. Le Maroc va-t-il forcer la main à l’institution par le ceinturage stratégique de ses membres ?

Au large des côtes, loin des zones terroristes du Sahel, le Gazoduc Afrique Atlantique  devrait constituer un facteur de développement exceptionnel et à ce titre méritant soutiens diplomatiques et financiers et de tous.  

Cet article Le Gazoduc Afrique Atlantique, 13 pays et 25 milliards de dollars est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/decryptage/le-gazoduc-afrique-atlantique-13-pays-et-25-milliards-de-dollars/feed/ 0
Les Eglises évangéliques, porte d’entrée de Trump en Afrique centrale https://mondafrique.com/decryptage/les-eglises-evangeliques-porte-dentree-de-trump-en-afrique-centrale/ Thu, 31 Jul 2025 03:51:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=40442 Aux Etats-Unis d’Amérique, le président Trump et son Administration s’appuient ouvertement et sans retenue sur les Églises évangéliques, notamment Pentecôtistes, qui lui fournissent d’importants bataillons d’électeurs. et représentent un accès privilégié vers l’Afrique centrale Cet électorat populaire, sensible aux discours primaires et plutôt défavorisé par la nouvelle économie, se réfugie avec une foi inébranlable dans […]

Cet article Les Eglises évangéliques, porte d’entrée de Trump en Afrique centrale est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Aux Etats-Unis d’Amérique, le président Trump et son Administration s’appuient ouvertement et sans retenue sur les Églises évangéliques, notamment Pentecôtistes, qui lui fournissent d’importants bataillons d’électeurs. et représentent un accès privilégié vers l’Afrique centrale

Cet électorat populaire, sensible aux discours primaires et plutôt défavorisé par la nouvelle économie, se réfugie avec une foi inébranlable dans un christianisme de combat contre les  » forces du mal ». Parmi ces chrétiens fondamentalistes, il y a de nombreux Afro–Américains, généralement originaires d’Afrique centrale, dont la ferveur est popularisée par les Gospels et les sermons interminables de pasteurs qui électrisent les foules de fidèles. Le président Trump a vite saisi tout l’avantage qu’il pourrait tirer en Afrique de ce renouveau religieux messianique.

L’ intérêt de la diplomatie américaine 

 La diplomatie américaine encourage l’osmose entre ces Églises évangéliques américaines et leurs homologues africaines pour en faire un vecteur de leur politique d’influence dans certains pays où l’État est en décomposition et où les populations sont de plus en plus laissées à elles-mêmes, comme en RDC, au Burundi, au Congo, au Gabon et surtout en Centrafrique.

En ces terres, où le christianisme s’est développé sur un fond d’animisme ambiant, l’islam n’irradie pas la société comme en Afrique de l’ouest. Le Département d’État trouve donc là une carte politique bien plus efficace que les ONG internationales de défense des droits de l’homme ou de lutte contre la corruption, non seulement pour contrer les offensives économico-financières de la Chine et davantage politiques de la Russie, mais aussi pour se rapprocher de chefs d’Etat et de leur entourage qui avaient pourtant pris leur distance avec les pratiques démocratiques et l’Etat de droit. Le retour des Etats-Unis d’Amérique en Afrique centrale passe aussi par la religion.

Les atouts des Églises américaines 

Depuis plusieurs décennies, les Églises américaines pentecôtistes ont noué des liens fraternels avec les Églises dite du réveil d’Afrique. Ces Églises du courant baptiste sont en plein essor, sur les terres jadis christianisées par des pasteurs européens ou évangélisées par des missionnaires catholiques venus de l’étranger. Les  » envoyés de Dieu » de ces Églises américaines ne manquent pas de rappeler à leurs ouailles africaines qu’il était temps de consolider l’indépendance religieuse, en mettant un terme au clergé non national qui était encore trop lié à la période coloniale. L’Église catholique romaine est surtout en ligne de mire.

De surcroît, par ses prélats, l’Église catholique n’hésite pas à condamner les dérives antidémocratiques des régimes  autocratiques, ce qui est très rarement le cas des Eglises évangéliques qui se sont glissées dans cet environnement politique de plus en plus éloigné du droit et de la démocratie. Les Églises évangéliques prônent le salut personnel par la prière, le mysticisme, les exercices de contrition physique. Elles encouragent la réussite financière et l’accumulation de richesses qui est  » un don de Dieu », ce qui n’est pas pour déplaire aux prédateurs et corrompus et, en particulier, aux chefs de l’Etat qui ont vu tout l’intérêt de rejoindre ces Églises du réveil et au-delà le soutien qu’ils pourraient attendre des Églises évangéliques américaines, influentes près de l’Administration de Trump.

La religion au service de la politique

En Afrique centrale, les politiciens ont vite compris l’intérêt qu’ils pourraient avoir en devenant pasteur ou diacre d’une Église qui serait à leur dévotion. Après tant de malheurs subis, les populations s’en remettent à Dieu pour obtenir la résolution de tous leurs problèmes. On ne s’étonnera donc pas de voir de nombreux hauts fonctionnaires, de parlementaires, des ministres et même des chefs de l’État s’investir dans un christianisme aux couleurs locales pour jouer aux intercesseurs auprès de Dieu. Ce faisant, les mécontentements grandissants pourront être anesthésiés et de nouvelles sources de revenus pourront être développées. Ces Églises seront aussi un vivier électoral irremplaçable, alors que les partis politiques sont largement discrédités. 

L’exemple centrafricain

En Centrafrique, le général-président François Bozizé avait bien compris l’intérêt électoral qu’il pouvait tirer de son Église  » du christianisme céleste- Nouvelle Jérusalem » mais, contrairement à son successeur, il n’avait pas vu l’aspect international des liens évangéliques dont il aurait pu tirer avantage avec les Églises américaines. Tout en se mettant sous la protection de la Russie et du groupe Wagner, le président Touadera a réussi à obtenir les bonnes grâces du Département d’État, par l’intermédiaire des Églises d’obédience baptiste américaines. Lui-même diacre, il participe aux offices banguissois, plein de ferveur mystique, en mettant de côté sa fonction de chef d’un Etat laïc. Il s’entoure de pasteurs qui lui servent plus ou moins d’oracles et ponctue, de plus en plus, ses discours de chef de l’Etat par des références à Dieu. A chaque séjour aux États-Unis d’Amérique, il ne manque pas de faire fructifier les liens avec l’Alliance internationale baptiste, ce qui facilite ses contacts avec le Département d’État. Lors de sa dernière tournée en Afrique, le Sous Sous-secrétaire d’État pour l’Afrique, Tibor Nagy, avait fait une escale de deux jours à Bangui afin de prodiguer des encouragements pour la tenue d’élections fin décembre 2020, sans s’appesantir sur la situation catastrophique du pays. Une nouvelle ambassadrice US a été nommée. Elle fait preuve de bonnes dispositions à l’égard du président Touadera, notamment en présidant le G5 Centrafrique, en apportant un soutien financier et technique conséquent, via l’Usaid, pour lutter contre le Covid-19 et les échéances électorales, pourtant de plus en plus improbables en 2020. La pression des Églises évangéliques américaines pour aider  » un élu de Dieu », fut-il polygame, n’est peut-être pas étrangère à ce regain d’attention du Département d’État pour un pays ou les États-Unis d’Amérique n’ont aucun intérêt.

L’absence de soutien aux positions catholiques

Dans plusieurs États, où elle est bien implantée, l’Église catholique est beaucoup moins accommodante que les Églises évangéliques dont les pasteurs sont souvent des relais du pouvoir. L’Église catholique, par son centralisme, son universalisme et par son organisation hiérarchique, avec ses prêtres répartis sur l’ensemble du territoire, ses évêques dirigeant des diocèses, ses cardinaux, directement reliés au Pape, et les nonces apostoliques, ambassadeur du Saint-Siège, constitue une sorte d’État dans l’État. Alors que les Églises évangéliques interviennent rarement  contre les pouvoirs établis, les admonestations des cardinaux et évêques  à l’égard des Chefs de l’Etat ne manquent pas.

Citons les derniers exemples : 
En RDC, les cardinaux, Laurent Monsengwo et Fridolin Ambogo étaient les plus virulents détracteurs de Joseph Kabila. Ils ont également dénoncé l’élection suspecte de Félix Tshisekedi, mais celle-ci, en revanche, fut curieusement très vite validée par les États-Unis d’Amérique.

En Côte d’Ivoire, le cardinal d’Abidjan, Jean-Pierre Kutwa n’hésita pas à faire remarquer à Alassane Drame Ouattara qu’un troisième mandat présidentiel « n’était pas nécessaire ».

Au Togo, la Conférence épiscopale du Togo a stigmatisé le manque de transparence, d’équité, de crédibilité de la quatrième réélection de Faure Gnassimgbé. L’ancien archevêque de Lome vit quasiment en liberté surveillée.

En Centrafrique, le cardinal Dieudonné Nzapalainga s’associe, de moins en moins, à la plateforme religieuse, initialement constituée avec un pasteur et un imam, pour stigmatiser les violences des groupes armés et mettre en cause l’inertie du président Touadera. Que ce soit en RDC, en Côte d’Ivoire, au Togo et en Centrafrique, on ne verra pas la diplomatie de Donald Trump soutenir ces positions de l’Église catholique.

Dans la plupart des États d’Afrique centrale avec la disparition de l’Etat de droit, l’effondrement du système scolaire, les mirages de la démocratie que constituent les élections, les crises se succédant aux crises accélérant la décomposition de l’Etat, la résilience atteint ses limites. Dans de nombreuses parties de l’Afrique, l’islam dans sa diversité apporte ses solutions. Dans les régions christianisées, la religion catholique marque le pas face aux Eglises évangéliques qui offrent une adaptabilité incontestable au contexte africain. Les Etats-Unis d’Amérique ont bien vu tous les avantages qu’ils avaient sur les autres Puissances pour accompagner voire diriger l’essor de ces Églises du réveil.

Cet article Les Eglises évangéliques, porte d’entrée de Trump en Afrique centrale est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>