- Mondafrique https://mondafrique.com/decryptage/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Thu, 24 Jul 2025 08:02:46 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.2 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg - Mondafrique https://mondafrique.com/decryptage/ 32 32 Vers une dangereuse escalade régionale au Sahel https://mondafrique.com/a-la-une/vers-une-dangereuse-escalade-regionale-au-sahel/ https://mondafrique.com/a-la-une/vers-une-dangereuse-escalade-regionale-au-sahel/#respond Thu, 24 Jul 2025 08:00:59 +0000 https://mondafrique.com/?p=136869 Le conflit entre l’État central malien et le territoire de l’Azawad, qui dure depuis plus de soixante ans, semble entrer dans une phase critique. Les mois à venir pourraient marquer un tournant décisif dans cette crise persistante, qui fragilise la stabilité du Sahel central depuis les premières années postindépendance. Abdoulahi ATTAYOUB, consultant, Président de l’Organisation […]

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Le conflit entre l’État central malien et le territoire de l’Azawad, qui dure depuis plus de soixante ans, semble entrer dans une phase critique. Les mois à venir pourraient marquer un tournant décisif dans cette crise persistante, qui fragilise la stabilité du Sahel central depuis les premières années postindépendance.

Abdoulahi ATTAYOUB, consultant, Président de l’Organisation de la Diaspora Touarègue en Europe (ODTE)

Les revendications de l’Azawad, antérieures à la création du Mali moderne, demeurent l’un des nœuds fondamentaux à résoudre pour espérer une paix durable dans la région. Or, les dynamiques actuelles sur le terrain indiquent une inquiétante tendance à la généralisation du conflit, ainsi qu’à l’émergence de nouveaux foyers de tensions longtemps restés contenus.

Dans les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), la lutte contre le terrorisme sert trop souvent de prétexte à des opérations ciblant certaines communautés de manière transfrontalière. Cette dérive révèle non seulement des agendas cachés, mais aussi l’évolution de certaines armées nationales vers des comportements de milices communautaires. Ce glissement traduit une conception réductrice de la nation, où la sécurité devient un alibi pour stigmatiser des groupes entiers, qui, au lieu de bénéficier de la protection de l’État, subissent des exactions récurrentes.

Dans la pratique, les priorités sécuritaires semblent orientées non vers la neutralisation des menaces réelles, mais contre des populations perçues comme hostiles ou simplement marginalisées par les régimes issus de l’indépendance. L’implication croissante du Burkina Faso et du Niger dans le conflit malien, notamment face à la question de l’Azawad, fait planer le spectre d’un embrasement régional aux conséquences incontrôlables.

Cette tentative d’élargissement du conflit au niveau de l’AES, dans une logique de solidarité militaire, pourrait dépasser rapidement les frontières nationales et exacerber des tensions interethniques déjà vives. L’instrumentalisation de l’information, souvent relayée par des acteurs extérieurs peu ancrés dans la réalité sahélienne, ne suffit plus à masquer la nature profonde de la crise. Les récits guerriers, identitaires et exclusifs n’ont jusqu’ici apporté aucune réponse aux défis structurels des pays concernés.

De plus en plus isolés, certains régimes de l’AES tentent désormais d’élargir leur discours belliqueux à l’ensemble des communautés dites « nomades », dans une fuite en avant périlleuse. Le discours porté par certains idéologues, relayé par une frange extrême d’un pseudo-panafricanisme, alimente un patriotisme fermé, fondé sur l’exclusion, à rebours d’un véritable projet d’unité sahélienne.

L’obsession autour de l’Azawad et la répression brutale contre certaines communautés traduisent une lecture biaisée et dangereuse de la réalité géopolitique de la région. Le recours croissant à des milices communautaires ou à des mercenaires étrangers, sous couvert de lutte contre l’insécurité, ne fait qu’aggraver les fractures sociales, alors que l’État devrait incarner l’unité, la justice et la cohésion.

Un tournant est proche. La communauté internationale doit le reconnaître et s’y préparer, en se réengageant de manière responsable, notamment en renouant avec l’esprit des Accords d’Alger. Depuis les années 1990, l’armée malienne n’a jamais pu contrôler durablement la région de l’Azawad sans un appui extérieur. Aujourd’hui encore, elle n’y opère qu’à travers l’appui de forces partenaires, devenues de facto cobelligérantes.

Malgré le constat largement partagé de l’impasse militaire, les partenaires du Mali peinent à favoriser une véritable solution politique. Il devient urgent que les institutions internationales, tout comme les puissances engagées dans la région, y compris la Russie et la Turquie, adoptent une lecture lucide de la crise et soutiennent une sortie réaliste, fondée sur la justice, l’inclusion et la représentativité.

La racine du mal ne réside pas dans une quelconque idéologie importée, mais dans le refus persistant des États postcoloniaux de bâtir des nations véritablement inclusives. Tant que ces systèmes chercheront à maintenir des déséquilibres hérités de l’ordre colonial, toute solution durable demeurera illusoire.

Dans ce contexte, le Burkina Faso et le Niger risquent, chacun à leur manière, de raviver des tensions intercommunautaires s’ils poursuivent leur soutien inconditionnel à la stratégie militaire de la junte malienne contre l’Azawad. L’instrumentalisation des clivages ethniques à des fins de survie politique ne fait que complexifier la crise. Dans certaines zones de l’AES, des dynamiques de nettoyage ethnique sont déjà à l’œuvre, posant une question fondamentale sur la nature même de ces États et leur capacité à garantir la paix et le vivre-ensemble.

Face à ce constat, la communauté internationale ne peut plus se permettre de rester passive ou complaisante. Elle doit favoriser un nouveau pacte de gouvernance, fondé sur le libre choix des peuples et une véritable inclusion politique. Il en va de la stabilité du Sahel, mais aussi de la crédibilité des partenaires extérieurs.

L’Europe, en particulier, doit rompre avec les logiques de coopération anciennes, qui ont souvent marginalisé les communautés pastorales. Elle ne peut continuer à soutenir des approches discriminatoires qui ignorent la complexité humaine du Sahel, un espace façonné par une mosaïque de peuples aux identités riches et à l’histoire profonde. Le décalage entre la politique européenne et cette réalité explique en grande partie les échecs répétés et l’érosion des acquis de l’après-indépendance.

Le statu quo est intenable. Seuls un projet politique commun, juste et équitable, porté par l’ensemble des composantes sociales sahéliennes, pourra offrir une issue durable. C’est à cette condition que le développement et la paix pourront enfin s’enraciner.

 

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Le projet minier de Tala Hamza, une militarisation de la Kabylie https://mondafrique.com/decryptage/le-projet-minier-de-tala-hamza-provoqura-une-militarisation-de-la-kabylie/ https://mondafrique.com/decryptage/le-projet-minier-de-tala-hamza-provoqura-une-militarisation-de-la-kabylie/#respond Fri, 18 Jul 2025 07:15:49 +0000 https://mondafrique.com/?p=136762 Tala Hamza, c’est une success-story annoncée, une priorité nationale, la fierté de l’Afrique gérant ses propres ressources, du moins dans la version officielle du gouvernement algérien. Le projet d’exploitation du gisement de zinc et de plomb de Tala Hamza-Amizour, dans la wilaya de Bejaia, a connu durant l’année 2024 une avancée significative, note la presse […]

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Tala Hamza, c’est une success-story annoncée, une priorité nationale, la fierté de l’Afrique gérant ses propres ressources, du moins dans la version officielle du gouvernement algérien. Le projet d’exploitation du gisement de zinc et de plomb de Tala Hamza-Amizour, dans la wilaya de Bejaia, a connu durant l’année 2024 une avancée significative, note la presse officielle algérienne,  marquée par l’achèvement de toutes les procédures légales et administratives et le lancement des travaux préparatoires.

Mais derrière les effets d’annonce accompagnant la mise en exploitation de la mine géante de zinc et de plomb près de Béjaïa se cache une réalité moins triomphale, entre désastre environnemental et militarisation de la Kabylie.

Charlotte Touati, chercheuse affiliée à l’université de Lausanne, spécialiste des sujets sureté-défense dans la Corne de l’Afrique et Afrique du Nord. Son prochain ouvrage analysera l’action de compagnies minières australiennes et canadiennes qui s’associent à l’armée régulière ou à la milice dominante pour capter les ressources d’une population indigène (Érythrée, Ethiopie, Soudan, Libye): https://www.bloomsbury.com/uk/eritreas-gold-rush-9781350513587/

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Le projet de la mine de zinc et de plomb de Tala Hamza, qui s’étale sur 134 km2 comprenant les communes de Tala Hamza, Amizour, Boukhelifa, El Kseur et Oued Ghir, wilaya de Béjaïa, a connu une trajectoire longue, heurtée et hautement stratégique depuis le milieu des années 2000. Il illustre les tensions entre exploitation des ressources nationales, souveraineté économique, dynamiques locales kabyles et influences étrangères.

En 2006, l’Entreprise nationale des produits miniers non ferreux (ENOF), relevant du groupe Manadjim El Djazaïr (Manal), conclut un partenariat avec la société Terramin Australia Ltd, cotée à la Bourse de Sydney. Une joint-venture est créée : Western Mediterranean Zinc (WMZ). Terramin en détient alors 65%, et la partie algérienne 35%. La ressource estimée dépasse les 60 millions de tonnes de minerai, avec des teneurs élevées en zinc et en plomb.

Malgré les études prometteuses, le projet est ralenti. Plusieurs facteurs convergent : une hostilité grandissante des populations locales inquiètes pour l’environnement et les terres agricoles, des désaccords sur le partage des bénéfices entre partenaires et une volonté de l’État algérien de reprendre le contrôle sur ses ressources stratégiques.

Dans ce contexte, les autorités demandent à rééquilibrer la répartition du capital de WMZ, ce que Terramin finit par accepter. En parallèle, le gisement reste sous surveillance, et les permis d’extraction sont retardés.

En 2022, le capital de WMZ est officiellement modifié : la partie algérienne (ENOF et ORGM) passe majoritaire avec 51%, tandis que Terramin est réduite à 49% et le projet s’oriente vers la construction d’une mine souterraine au lieu d’une exploitation à ciel ouvert.

Le 6 septembre 2023, l’État algérien publie le décret exécutif n° 23 320, déclarant officiellement le projet comme « opération d’utilité publique ». Cela permet le déclassement des terres agricoles concernées et la mise en œuvre des procédures d’expropriation, malgré l’opposition persistante de certaines familles et comités locaux.

En novembre 2024, la société publique chinoise Sinosteel Equipment & Engineering Co. Ltd signe un contrat EPC avec WMZ pour construire les installations minières. Ce contrat, d’une valeur d’environ 336 millions de dollars, inclut la mine, une usine de traitement, les routes d’accès, les systèmes de sécurité et la gestion des déchets industriels.

En 2025, les travaux de terrassement sont en cours. La mise en production est prévue pour juillet 2026, avec une capacité annuelle de 170 000 tonnes de concentré de zinc et 30 000 tonnes de plomb, sur une durée d’exploitation estimée à 19 ans.

« Une mine au cœur du paradis »

Mais Tala Hamza, c’est surtout le bassin versant de la Soummam, un site classé RAMSAR « zone humide protégée » à la faune exceptionnelle incluant des marais de montagne et une lagune côtière. La Soummam débouche dans la Méditerranée non loin de Bejaïa, mêlant ses eaux douces à celles salines dans l’estuaire des Eyragues servant de nurserie à plusieurs dizaines d’espèce de poissons. Tout cet écosystème est menacé par la mise en exploitation de la mine, même si le site est classé réserve naturelle. En effet, le gouvernement algérien est passé en force en instaurant Tala Hamza « opération d’utilité publique ». Ce statut est accordé compte tenu de son « caractère d’infrastructure d’intérêt général et d’envergure nationale et stratégique », ce qui fait sauter tous les verrous. Le décret autorise l’expropriation des terres privées nécessaires à la construction de la mine, des routes d’accès ou des infrastructures afférentes et limite fortement les voies de recours juridiques. Il n’y a eu aucune consultation populaire, et pour cause, car le rapport des Kabyles à leurs montagnes est extrêmement intense.

Les montagnes de Kabylie ont servi de bastion face au colonialisme depuis l’Empire romain et ont permis le particularisme kabyle. Cultivées en terrasses, elles sont certes des lieux de vie, mais aussi de mémoire. Chaque élément naturel y a son histoire, son usage, mais on y trouve également des cimetières perchés ce qui leur donne un caractère inviolable, à la fois sacré et politique. Chaque tombe fait l’objet de récits transmis oralement qui ancrent les lignées dans la terre. 

Toute atteinte à cet environnement — comme les projets miniers ou les feux de forêts — est donc vécue comme une violence culturelle et existentielle.

Désastre écologique et risques sanitaires majeurs

Les forages et l’extraction endommageront de manière durable et visible la zone, mais il faut également compter avec les 52 millions de tonnes de déchets miniers (stériles), qui doivent être stockés en surface, avec un risque de drainage acide. Face aux critiques, un enfouissement partiel a été proposé par Terramin. Ensuite se profile le traitement des minerais. Le plomb fait partie des métaux lourds et le processus de flottaison retenu pour le raffiner libérera des particules polluant directement la nappe des alluvions de la Soummam, la plus grande réserve d’eau potable de la Kabylie. Celle-ci se déverse directement dans la Méditerranée. Les ressources halieutiques seront affectées impactant les pécheurs kabyles, mais bien au-delà puisque les poissons nés dans la baie des Eyragues ne connaissent pas de frontières.

Les minerais seront traités à El-Kseur dans une zone de développement agro-alimentaire. Les souffres extrêmement volatiles émis lors du raffinage du plomb et du zinc risquent de compromettre les denrées alimentaires traitées à proximité. Aucune étude d’impact environnemental ni sanitaire n’a été publiée. Selon une source interne, une étude a bien été commanditée, mais elle a été réalisée par universitaire proche du gouvernement algérien. Il aurait monté pour ce faire un cabinet d’étude, dont il est le seul employé.

En plus de la zone RAMSAR, les concessions accordées pour l’exploitation du gisement de Tala Hamza s’étendent sur des zones agricoles cruciales pour l’approvisionnement de la Kabylie. Le corridor de la Soummam entre El-Kseur et Béjaïa est densément peuplé avec 320’000 habitants. Une pollution de l’eau, de l’air ou des ressources alimentaires serait catastrophique.

Selon un expert en développement durable basé à Paris, la rentabilité de la mine et les potentielles créations d’emplois ne compensent pas les risques et dommages avérés. Les promoteurs de la mine mettent constamment en avant la proximité de l’aéroport de Béjaïa pour attirer les ingénieurs et techniciens étrangers. Les comités locaux dénoncent une forme de colonialisme, puisque seules les tâches pénibles et subalternes reviendront à la population, préalablement paupérisée par la perte des terres agricoles. « Des voix ont tenté de s’élever au début du projet, mais les gens ont peur. Toute opposition au pouvoir d’Alger est assimilée à de l’indépendantisme ».

Depuis 2021, le Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie est classé organisation terroriste. Tout contact avec ses membres, avéré ou supposé, est passible de lourdes peines de prison, comme l’affaire Christophe Gleizes, journaliste sportif condamné à sept ans de prison pour apologie du terrorisme, est venu le rappeler.

Béjaïa étant au cœur du mouvement indépendantiste kabyle, le projet minier de Tala Hamza pourrait être l’enjeu d’un bras de fer non pas pour les ressources qu’il renferme, mais pour l’emprise sur la Kabylie et l’accès au port de Bejaïa.

Opération « Zéro Kabyle »

Les relations entre Alger et la Kabylie ont été conflictuelles quelles que soient les époques. L’arabisation comme politique de décolonisation après l’indépendance a provoqué plusieurs soulèvements des populations non-arabes, Printemps Berbère (1980) et Printemps Noir (2001) ou encore la fameuse « grève du cartable » (1994) pour exiger l’enseignement du tamazight. A partir de 2001, la marginalisation de la Kabylie se fait sentir plus durement encore, précipitant la naissance du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK). La rupture est consommée et un discours de haine raciale contre les Kabyles s’installe dans les médias, repris par certains officiels. Entre le 18 et le 20 août 2019, une réunion dite « colloque de conscientisation » se déroule non loin de Mostaganem, ayant pour thème l’opération « Zéro Kabyle ». Les locaux ont été mis à disposition par la commune et l’événement est sécurisé par la gendarmerie. Rien ne se passe en Algérie sans que les autorités ne soient au courant et ne donnent leur blanc-seing.

L’événement est organisé par un ancien gendarme à la retraite et l’idéologue du mouvement présent au colloque se nomme Lakhdar Benkoula. Franco-algérien basé à Besançon, il défend l’idée qu’il n’y a pas eu d’arabisation, et partant, pas de colonisation arabe, mais que la langue parlée en Algérie descend du punique, c’est-à-dire du phénicien en lien direct avec le Proche-Orient. Par conséquent, il nie l’existence des Berbères et surtout des Kabyles.

Cette théorie va à l’encontre de toutes les preuves scientifiques (épigraphiques, linguistiques, anthropologiques). Largement ignorée à l’internationale, elle a été mise en lumière récemment par le coup d’éclat de Mohammed Lamine Belghit sur la chaîne Sky News. Celui qui se présente comme un historien défend l’idée que l’amazighité n’existe pas : « La question amazighe est un projet idéologique franco-sioniste par excellence, une création des services secrets français et sionistes visant à saper les piliers de l’unité du Maghreb arabe. […] Les Berbères, populations autochtones d’Afrique du Nord, sont d’origine arabe. » Les Kabyles, qui forment une fraction des peuples amazighs, mais la seule à être politiquement structurée, avec un droit spécifique et des institutions pérennes, sont en fait la cible de cette dénégation d’existence.

Nier l’antériorité voire l’existence des peuples amazighs vise à priver les Kabyles du statut de peuple autochtone alors qu’ils en remplissent tous les critères selon l’ONU (antériorité, identité distincte, auto-identification, rapport au territoire, marginalisation).

Benkoula et Belghit sont des experts autoproclamés. Le premier se présente sur son blog comme ancien professeur de français à l’Université d’Aden au Yémen et le second comme professeur chercheur à l’Université d’Alger, parfois cité comme « académicien ». Mais ni pour l’un ni pour l’autre on ne trouve de thèse de doctorat enregistrée ou des traces de leur parcours académique.

L’opération Zéro Kabyle s’est d’abord manifestée par une purge dans les instances gouvernementales, l’armée et les milieux d’affaire. La haine s’exprime ouvertement et sans aucun recadrage par les autorités. Petit florilège non-exhaustif : le 4 mars 2020, la députée et cheffe de parti Naima Salhi enjoint à exterminer les Kabyles qualifiés de « Juifs de la pire espèce ». Le 24 juillet 2020, Mohamed Larbi Zitout, lui aussi chef de parti, appelle à « prendre les armes contre les Kabyles séparatistes du MAK ». Le 20 avril 2021, jour du 20e anniversaire du Printemps Noir, Abdelouahab Benzaïm, sénateur, compare la Kabylie à un cancer et promet « un jour, qui n’est pas loin, nous allons éradiquer toutes ces tumeurs cancéreuses qui rongent le corps d’une nation unie ». La même journée, le journaliste et influenceur Said Bensdira,  basé en Angleterre, déclare « Si jamais j’ai du pouvoir, je lancerai un appel lors du JT de 20h et je dirai aux Kabyles, surtout ceux de Tizi Ouzou et de Béjaïa : les citoyens et les citoyennes qui se démarquent et rejettent les idées et l’idéologie des séparatistes du MAK, je leur demanderai de quitter la Kabylie durant 24h seulement en laissant les séparatistes et ceux qui les soutiennent […] Je vais par la suite faire exterminer tous ceux qui resteront en Kabylie ». Cinq jours plus tard, le ministère de la Défense publie un communiqué sur la découverte d’armes et d’explosifs destinés au MAK pour commettre des attentats. Le gouvernement s’empêtre dans ses déclarations et l’affaire dégénère en guerre médiatique. Quelques semaines plus tard, à l’été 2021, la Kabylie s’embrase. Des feux géants d’origine criminelles ravagent les montagnes et un jeune homme présenté comme pyromane est lynché par la foule alors qu’il devait être sécurisé dans un fourgon de gendarmerie. Le gouvernement algérien accuse le MAK qui est déclaré organisation terroriste et 49 cadres du mouvement sont condamnés à mort. Nombreux sont ceux qui doutent de la version officielle. Comme pour la mine de Tala Hamza, le lien entre les Kabyles et leur terre est sacré et « jamais les Kabyles ne mettraient feu à leurs propres oliviers ! ».

Depuis 2021 la répression se fait de plus en plus pressante en Kabylie, les libertés fondamentales ont été supprimées, toute manifestation de fierté (drapeau, usage exclusif du kabyle) est assimilée à du séparatisme. Les peines d’emprisonnement pleuvent.

Sous le minerai, la militarisation de la Kabylie

Le projet de Tala Hamza n’est pas aussi rentable que l’extraction pétrolière ou les mines d’or de Tamanrasset. Alors pourquoi faire passer Tala Hamza en « opération d’utilité publique » ? La clé est peut-être la militarisation de la Kabylie. Les infrastructures telles que les grandes mines sont toujours sécurisées. La mine de Tala Hamza est en fait opérée par Sinosteel l’une des entreprises étatiques chinoises. Dans les projets miniers qu’elles mènent en Afrique, celles-ci s’appuient soit sur l’armée régulière, soit sur des milices, avec de nombreux dérapages connus. Ainsi, Sinosteel qui exploite aussi la mine de Simandi (fer) en Guinée la fait directement garder par les militaire guinéens, Zijin en Erythrée dont l’armée sécurise la mine de Bisha (or, cuivre, zinc) depuis sa construction, Zijin encore en République Démocratique du Congo où les mines de Kamoa-Kakula (cuivre) et Kolwezi (cuivre, cobalt) sont protégées par des entreprises de services de sécurité et de défense (ESSD) chinoises ainsi que les forces armées officielles formées et encadrées par des consultants chinois, CNMC dont les mines de Luanshya et Chambishi sont sécurisées par des ESSD locales avec gestion stratégique chinoise, même configuration pour les champs pétrolifères du Soudan du Sud exploités par CNPC.

Des « formateurs », euphémisme pour désigner les opérateurs de ESSD venus superviser la sécurité et former les forces armées algériennes, sont déjà à l’œuvre à Béjaïa. Les minerais seront expédiés depuis ce port, ce qui nécessite de sécuriser tout le couloir de la Soummame, entre Tala Hamza et Bejaïa.

Dans un communiqué de presse daté du 14 août 2024, le ministère de la Défense algérien annonce avoir saisi le 4 août des armes destinées au mouvement indépendantiste, ce que les responsables du MAK nient formellement. Le scénario de 2021 se répète, la découverte d’armes et explosifs juste avant les incendies. Les opposants dénoncent une nouvelle machination. De fait, il n’y a pas de lutte armée en Kabylie, donc quand bien même ces armes seraient destinées aux indépendantistes, pour les mettre entre les mains de qui ? Personne n’est formé à cela. Si l’annonce du gouvernement algérien semble peu crédible, le prétexte, lui, est tout trouvé pour militariser le port quelque mois après l’adoption du décret exécutif classant Tala Hamza en « opération d’utilité publique ». Toute opposition de la population locale peut désormais être associée à de la subversion, du séparatisme, voire du terrorisme.

C’est cette mainmise sur Béjaïa qui pourrait intéresser le gouvernement algérien, bien plus que les ressources finalement. En effet, en tant que zone rurale ou périurbaine, la sécurité à Tala Hamza est du ressort de la gendarmerie, celle-là même qui est au cœur de l’opération Zéro Kabyle. Contrairement, à la police, la gendarmerie est un corps d’armée qui dépend du ministère de la Défense nationale. Elle est perçue par la population Kabyle comme le bras armé du gouvernement. En 2001, à la suite du Printemps Noir déclenché par la mort de Massinissa Guermah, abattu par la gendarmerie le 18 avril, des émeutes massives traversent la Kabylie à tel point que vingt-et-une brigades doivent fermer, dont sept à Béjaia. Des comités citoyens (aârch, arouch au pluriel) se forment et une grande marche s’organise en direction d’Alger. C’est le Mouvement des Aarchs. Un document en quinze points nommé « plateforme d’El-Kseur » est émis le 11 juin 2001 qui demande entre autres le départ immédiat des brigades de gendarmerie de toute la Kabylie et le placement des corps de sécurité sous l’autorité effective des instances démocratiquement élues. Le site de El-Kseur pour l’implantation de l’usine de traitement des minerais n’a donc pas été choisi par hasard. Il sera sous haute surveillance et avec la collaboration de la Chine. Il sera aussi cœur de la pollution. Difficile de ne pas y voir une mesure de rétorsion.

De surcroît, la destruction des zones pastorales et agricoles, ainsi que des réserves en eau, compromet la souveraineté alimentaire de la Kabylie. La population dépendra alors de denrées extérieures grevant toute velléité d’indépendance. En plus des expropriations directes permises par le décret exécutif n° 23 320 pour le développement de la mine et de l’usine, l’impact environnemental, social et économique sera tel qu’il va provoquer un déplacement de population. Sans doute est-ce l’effet recherché : ventiler la population kabyle, dissoudre la dynamique culturelle et linguistique, casser les foyers potentiels de révolte.

Un schéma récurrent

Dans Eritrea’s Gold Rush : Western Mining Companies, Local Wars, and Human Rights Abuses, j’expose comment des compagnies minières australiennes ou canadiennes montent des joint-ventures avec l’agence d’état dans des pays à risque. Lorsque la phase exploratoire est terminée, elles passent la main à des compagnies ou investisseurs chinois proches du Parti Communiste Chinois pour la phase extractive qui nécessite de lourds investissements. Les joint-ventures ainsi créées bénéficient des tensions locales et même participent à l’exacerbation de la haine contre la minorité locale pour la dépouiller de ses ressources avec l’assentiment du pouvoir central ou de la milice dominante. Pouvoir armé qui, à son tour, peut développer son emprise sur la région « rebelle ».

En Éthiopie et en Érythrée, la course aux ressources minières et aux ports de la mer Rouge ont permis la campagne de haine connue sous le nom de « No More » et a débouché sur le génocide des Tigréens causant au moins 800000 morts. Les similitudes avec Tala Hamza et l’opération Zéro Kabyle (la même expression de tumeur cancéreuse qu’il faut éliminer a été utilisée par le pouvoir central dans les deux cas) est pour le moins inquiétante.

L’intérêt d’Alger à refuser aux Kabyles le statut de peuple autochtone converge donc avec celui des compagnies minières. Mais en vertu du droit international, les peuples autochtones possèdent des droits de propriété spécifiques sur les gisements de ressources minérales situés sur leurs terres. Ainsi la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP), adoptée en 2007, affirme que les communautés autochtones ont le droit à l’autodétermination, qui comprend le droit de contrôler leurs terres, leurs territoires et leurs ressources et l’article 26 spécifie que les peuples autochtones ont le droit inhérent de posséder, d’utiliser et de gérer les ressources de leurs terres traditionnelles.

En outre, le principe du consentement libre, préalable et éclairé (FPIC) est essentiel en droit international, car il oblige les états et les entreprises à obtenir le consentement des communautés autochtones avant de lancer des projets qui affectent leurs ressources. Ce principe repose sur la reconnaissance des liens spirituels, culturels et économiques uniques que les peuples autochtones entretiennent avec leurs terres et que ces relations doivent être respectées dans toutes les activités d’extraction des ressources.

Plusieurs traités internationaux signées par l’Algérie, tels que la Convention sur les droits des peuples autochtones (C169) de l’Organisation internationale du travail et la Déclaration américaine sur les droits des peuples autochtones, renforcent les droits de ces communautés sur les terres physiques, mais aussi sur les ressources qui s’y trouvent (minéraux, forêts, eau) et l’obligation de les impliquer dans tous les processus décisionnels qui affectent leurs terres et leurs moyens de subsistance.

 

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Ces gourous américains nostalgiques de l’empire! https://mondafrique.com/decryptage/un-monde-multipolaire-1-ces-gourous-nostalgiques-de-lempire-americain/ https://mondafrique.com/decryptage/un-monde-multipolaire-1-ces-gourous-nostalgiques-de-lempire-americain/#comments Thu, 10 Jul 2025 01:56:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=87126 Les États-Unis occupent des dizaines de milliers d’agents à s’informer, supputer, analyser, manipuler, en somme à réfléchir. La CIA, qui compte au total 220.000 agents, dispose d’une conséquente section « d’analystes ». La Maison Blanche, le Département d’État et le Pentagone emploient les spécialistes des meilleurs cabinets privés de conseil en stratégie[i], Une chronique de […]

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Les États-Unis occupent des dizaines de milliers d’agents à s’informer, supputer, analyser, manipuler, en somme à réfléchir. La CIA, qui compte au total 220.000 agents, dispose d’une conséquente section « d’analystes ». La Maison Blanche, le Département d’État et le Pentagone emploient les spécialistes des meilleurs cabinets privés de conseil en stratégie[i],

Une chronique de Xavier Houzel

Les présidents américains successifs ne se lassent pas non plus d’écouter des dizaines de gourous. Les plus célèbres et les plus doctrinaires d’entre eux ont été leurs secrétaires d’État Henry Kissinger et Hillary Clinton. Les deux conseillers ont été les plus assidus à la sécurité nationale américaine furent Zbigniew Brzezinski et son successeur Anthony Lake. Des professeurs comme John Ikenberry de l’Université de Princeton et les inépuisables chroniqueurs de la revue Foreign Affairs complètent ce lot d’influenceurs

Dans les écrits de chacun de ces conseilleurs, nous découvrons ce qui mène le monde jusqu’au conflit russo-ukrainien qui n’échappe point à cette règle.

Henry Kissinger, la volte face

Le plus prestigieux des glossateurs américains, tel le Zadig de Voltaire, est allé de désillusion en désillusion. Il a fait, le 18 janvier 2023, une volte-face qui n’en est pas une en déclarant : Avant cette guerre, j’étais opposé à l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN parce que je craignais que cela ne provoque exactement le processus que nous connaissons maintenant , a-t-il répété dans une vidéo. Maintenant que le processus a atteint ce niveau, l’idée d’un Kiev neutre n’a plus de sens.

Dans l’équipe du président Richard Nixon, Kissinger avait une profonde connaissance du vieux continent et de ses tiraillements[iii]. Il a participé à la mise en œuvre de la politique de détente avec l’Union soviétique. Il a négocié le Traité SALT I, qui limitait le nombre de bombes nucléaires des deux superpuissances. En vertu de la Doctrine Nixon, dite « triangulaire », qu’il a contribué à formuler, les États-Unis laissent chaque pays se charger de sa propre sécurité, mais peuvent apporter une défense grâce à leur parapluie nucléaire si cela est demandé ou nécessaire.

Pour Henry Kissinger, cette posture est toujours restée « la bonne », parce que la seule possible, mais à condition que l’arme nucléaire ne prolifère pas.

Hillary Clinton, « la smart diplomacy »

L’émergence de la Chine a généré des inquiétudes telles qu’il était difficile de ne pas découvrir, le 13 janvier 2009, dans le discours d’investiture de la secrétaire d’État Hillary Clinton inaugurant « la smart diplomacy »[iv], des signaux inquiétants. La marge de manœuvre politique des États-Unis, disait-elle, est devenue d’autant plus réduite que la Chine est maintenant une puissance commerciale qui impose le respect, et dont les consommateurs américains ne peuvent plus se passer[v].

Un rapport de 2008 (Global Trends 2025) du National Intelligence Council(NIC) notait alors que les États-Unis ne seront plus que l’un des principaux acteurs sur la scène internationale, même s’ils resteront le plus puissant.

L’unipolarité ,née de l’après-guerre froide, était-elle dèja menacée ?

Portrait

Zbigniew Brzeziński, l’encerclement de la Russie

Après les attentats du 11 septembre 2001, Znigniew Brzezenski a actualisé (en 2004) son ouvrage « Le Vrai Choix » (The Choice : global domination or global leadership, paru chez Basic Books). Il y défendit le dogme selon lequel l’amélioration du monde et sa stabilité dépendaient du maintien de l’hégémonie américaineToute puissance concurrente était dès lors considérée comme une menace pour la stabilité mondiale

Contrairement à l’avis du président George W. Bush, qui professait un « hégémonisme unilatéral exclusif», un « leadership américain » pouvait seul sauver le monde du chaos, mais un tel objectif ne pouvait être atteint que sous réserve d’une coopération avec l’Europe ! La phrase culte de Brzezenski est la suivante : Sans l’Europe, l’Amérique est encore prépondérante mais pas omnipotente, alors que sans l’Amérique, l’Europe est riche mais impuissante.

Lui-même et son successeur Anthony Lake parviendront à convaincre le président Clinton d’étendre l’OTAN vers l’Est pour refouler et encercler la Russie, l’objectif étant de prévenir la collusion et de maintenir la dépendance sécuritaire parmi les vassaux, de garder les tributaires dociles et protégés, et d’empêcher les barbares de se regrouper. Whaoooh ! Le verdict était sans appel. Mais il était indécent.

Encore  que le Dollar devait conserver, dans une telle perspective, sa position de première monnaie de réserve mondiale, ne serait-ce que par rapport à l’Euro. C’est ainsi que que les États-Unis garantissaient la valeur de leur monnaie par un usage modéré de la planche à billet.

Cela impliquait aussi que la Diplomatie américaine s’abstienne de l’usage systématique des sanctions comme mesure de rétorsion de dissuasion. Or elle fit exactement le contraire.

Dès 2014 face aux sanctions internationales, la Russie entreprit un processus de dé-dollarisation[vi] de son économie.

La fin du monde unipolaire

Pour John Ikenberry et d’autres universitaires peu convaincus de la politique étrangère menée sous l’Administration Bush, le “moment unipolaire” des États-Unis allait inévitablement vers sa fin. Si l’affrontement du XXIe siècle devait avoir lieu entre les États-Unis et la Chine, la Chine aurait l’avantage. Si cet affrontement se produisait entre la Chine et un système occidental ravivé, ce dernier triompherait[vii].

 

« Un souverain ne saurait lever une armée sous le coup d’un mouvement d’humeur et de sentiments de colère ou d’exaspération (… ) Entreprendre une telle action ne doit être que le fait d’intérêts sereinement calculés et partagés par les intéressés. 

Le général Sun Tzu dans le douzième chapitre de « L’art de la guerre »

 

Fort heureusement, note Joshua Cooper Ramo : l’objectif de la Chine n’est  pas de provoquer un conflit, mais de l’éviter[viii]. En l’évitant, Pékin a « tout à gagner » Le général Sun Tzu l’avait noté (voir ci dessus)

Imaginons le pire !

La présidence d’Obama  intervenait dans un environnement d’insécurité en Irak, de guerre en Afghanistan, de crise au Moyen-Orient et de récession économique globale. Vladimir Poutine, qui voyait la démographie russe s’effondrait[xi].   ne pouvait voir sa nation qu’en grand.

Autant de menaces qui éclairent le conflit en Ukraine, qui voit ce monde bipolaire vivre ses derniers vestiges. 

 

[i] https://business-cool.com/entreprises/conseil/classement-meilleurs-cabinets-conseil/

[ii] Il s’agit notamment de lFondation Soros et de la Freedom House, une ONG dont les fonds proviennent majoritairement du Département d’État des États-Unis

[iii] Henry Kissinger : A World Restored: Metternich, Castlereagh, and the Problems of Peace, 1812-1822

[iv] Dans le domaine des relations internationales, le terme de smart power ou la puissance intelligente fait référence à la combinaison des stratégies de soft power et de hard power.Il est défini par le Center for Strategic and International Studies comme « une approche qui souligne la nécessité d’une armée forte, mais aussi d’alliances, de partenariats et d’institutions à tous les niveaux pour étendre l’influence américaine et établir la légitimité du pouvoir américain. »

[v] https://www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2012-1-page-16.htm

Dans le prochain volet de cette série sur « le onde multipolaire », Mondafrique publie un article sur « ces barbares qui bougent encore »

 

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JNIM/Al-Qaida : les prémices d’un divorce  https://mondafrique.com/a-la-une/jnim-al-qaida-les-premices-dun-divorce/ Wed, 09 Jul 2025 06:21:08 +0000 https://mondafrique.com/?p=136645   Une série de signes d’évolution, que porte une rumeur persistante à l’été 2025, prêtent, à l’enseigne Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (JNIM), l’initiative de se désaffilier de la maison-mère Alqaïda, dont le commandement fonctionne, minima. Abdel Nasser Ould Ethmane Elyessa* L’organisation perd de sa centralité organisationnelle, depuis l’élimination de l’Égyptien Ayman Mohammed Rabie […]

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Une série de signes d’évolution, que porte une rumeur persistante à l’été 2025, prêtent, à l’enseigne Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (JNIM), l’initiative de se désaffilier de la maison-mère Alqaïda, dont le commandement fonctionne, minima.

Abdel Nasser Ould Ethmane Elyessa*

L’organisation perd de sa centralité organisationnelle, depuis l’élimination de l’Égyptien Ayman Mohammed Rabie al-Zawahiri, le dernier grand collaborateur de Ben Laden. Une frappe de drone américain contre son domicile, le 31 juillet 2022 à Kaboul, aura eu raison de sa singulière longévité si l’on se souvient qu’il participait, en 1979, à l’assassinat du Président Anouar Sadate. À l’inverse, les deux Maliens leaders du Gsim, Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa, disposent, ensemble d’une audience solide auprès des Katibas. Leur prestige se renforce en 2025, marge de manœuvre qui leur confère l’aptitude à changer de cap, nouer des alliances, conclure des accords impliquant des entités impies, égarées voire hostiles à l’évènement d’une cité de Dieu sur terre.

  1. Le désaveu en douceur pourrait reconduire les modalités du cas syrien, cependant à l’avantage du JNIM car les interférences extérieures demeurent de conséquence limitée au Sahel, en comparaison du même processus dans l’Orient arabe. D’expérience, la fission-sécession précitée augure d’une volonté d’exercer le pouvoir en dehors des chemins de l’utopie, donc d’obtenir la légitimité internationale. Les Talibans afghans, partenaires stratégiques d’Alqaïda, tentent d’y parvenir mais le succès de l’essai tarde, notamment à cause de la surenchère avec la coalition rivale, l’Etat islamique. Daesh criminalise la moindre velléité de respecter les droits minimaux de la personne et s’acharne à persécuter les hérétiques, les athées, les polythéistes et surtout les Chiites. Néanmoins, au Sahel, la réalité du rapport de forces éloigne la perspective de tuerie fratricide entre les deux principales obédiences de l’Islam. Les partisans de l’imam Ali, cousin, gendre et 4èmesuccesseur du Prophète, appartiennent à une minorité plutôt en posture défensive, comme le rappellent ses tribulations, quelquefois sanglantes, au Nigeria.
  2. En Syrie, Hayat Tahrir al-Sham (HTS), ex-Front al-Nosra, une branche syrienne d’Al-Qaïda, s’est détachée de sa matrice, à partir de 2016. La dissociation, menée sans polémiques ni affrontements, poursuivait l’objectif de privilégier une insurrection limitée à un pays, d’où la révocation du jihad global, la renonciation aux prises d’otages étrangers et l’abrogation des attentats kamikazes commis par les femmes. Le JNIM engage, désormais, la quête de l’acceptabilité diplomatique. 
  3. Si le JNIM confirme l’acte de séparation, les décideurs politiques, la presse et les chercheurs en sciences sociales se trouveraient dans l’obligation de reconnaître le passage à un niveau significatif de réduction de la violence, indice d’un retour (certes laborieux) à la paix du vainqueur, sous les auspices de la théocratie. Le monde assisterait, alors, à l’éclosion d’une AES de trois projets de Califat, distincts quant à leur mise en œuvre. Par-delà le degré de collusion doctrinale et le potentiel de coopération, la perspective de chacun renvoie à l’exercice national de l’autorité, sur l’espace antérieurement reconnu. Le principe de continuité de l’Etat consolide la contrainte, pour les jihadistes, de devoir gouverner, le Sahel, en vertu de la nécessité, bien à l’abri du pathos et des pièges du lyrisme. Ensuite, ils se confronteront au défi de leurs propres limites en matière de technocratie et de gestion domestique, avant de subir les assauts des franchises atomisées de Daesh. Chez les islamistes, se manifeste toujours plus extrême que soi. Ils s’entretuent au motif de vétilles, de billevesées et d’apories mais jamais ne se lassent. Chaque génération inocule le venin à la suivante. Au bout de leur effort renouvelé, scintille la promesse du Firdaus, le sommet du Paradis. Le JNIM ne sera qu’une séquence brève dans le temps long du fanatisme.

*Abdel Nasser Ould Ethmane Elyessa, universitaire, chercheur en enjeux civils du terrorisme, est associé à Timbuktu Institute. 

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La montée spectaculaire du djihadisme au coeur du Sahel https://mondafrique.com/decryptage/la-montee-spectaculaire-du-djihadisme-au-coeur-du-sahel/ Fri, 04 Jul 2025 03:07:36 +0000 https://mondafrique.com/?p=136490 La région des trois frontières Mali–Mauritanie–Sénégal, longtemps perçue comme relativement stable, constate le site « The conversation », qui nous autorise à reprendre son texte, fait désormais face à une montée inquiétante des menaces sécuritaires liées à l’expansion du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM ou JNIM), affilié à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Plus précisément, les […]

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La région des trois frontières Mali–Mauritanie–Sénégal, longtemps perçue comme relativement stable, constate le site « The conversation », qui nous autorise à reprendre son texte, fait désormais face à une montée inquiétante des menaces sécuritaires liées à l’expansion du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM ou JNIM), affilié à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Plus précisément, les régions de Kayes et Nioro du Sahel dans l’Ouest du Mali sont devenues les nouveaux points d’ancrage d’une stratégie insidieuse menée par le JNIM, visant à étendre son influence vers l’Ouest.

Le sujet est régulièrement évoqué dans la presse. Cette menace djihadiste a fait l’objet d’un récent rapport du Timbuktu Institute consacré à la zone des trois frontières du Mali, de la Mauritanie et du Sénégal.

Profitant de l’absence de l’État, des tensions communautaires historiques, ainsi que de la vulnérabilité socio-économique des populations locales, le JNIM a réussi à s’implanter en profondeur dans la région. Les attaques ciblées, les prêches idéologiques, le prélèvement forcé de la Zakat (impôt islamique), et les assassinats sélectifs marquent cette nouvelle phase d’infiltration.

Cette dynamique n’est pas sans conséquences. Elle fragilise davantage les tissus sociaux, affaiblit les économies locales et menace d’entraîner une régionalisation du conflit, notamment vers la Mauritanie et le Sénégal.

En tant que chercheurs ayant étudié les dynamiques sécuritaires dans le Sahel, nous analysons ici les mécanismes d’implantation du JNIM dans cette zone et les implications sécuritaires régionales qui en découlent. Nous formulons également des pistes de réponse adaptées.


À lire aussi : Financement du terrorisme : quatre manières dont les djihadistes gagnent de l’argent en Afrique de l’Ouest

Commencez votre journée avec des articles basés sur des faits.


Une menace croissante

Face à la pression militaire exercée sur ses bastions traditionnels dans le Nord et Centre du Mali, le JNIM adopte une stratégie de contournement par l’Ouest en s’implantant progressivement dans les régions de Kayes et de Nioro. Le groupe tisse des liens avec certaines communautés locales. Cette dynamique constitue une menace directe pour l’ensemble de la zone des trois frontières Mali–Mauritanie–Sénégal, historiquement épargnée mais désormais exposée à un risque croissant d’extension du terrorisme.

 
Soldat de l’armée marchant dans un défilé vêtu d’un uniforme de camouflage et d’un écusson avec drapeau national aux couleurs vert, jaune et rouge. ChiccoDodiFC via Getty Images

Approche communautaire et implantation discrète

Le JNIM, fidèle à sa stratégie d’expansion, adapte ses méthodes et ses objectifs en fonction des réalités socio-culturelles locales. Le groupe privilégie une approche communautaire visant à faciliter son enracinement et à obtenir l’adhésion volontaire de sympathisants, y compris de nouveaux membres issus des communautés locales.

Le JNIM exploite habilement les tensions existantes entre la population locale et les autorités étatiques, souvent perçues comme corrompues et éloignées des préoccupations des citoyens. À titre d’illustration, lors de l’attaque contre le commissariat de Yélimané (localité frontalière avec la Mauritanie) en 2024, le porte-parole du JNIM a tenu un discours en soninké, l’une des langues les plus parlées dans la région.

Ce discours visait à justifier l’attaque en présentant le groupe comme un défenseur des opprimés, dénonçant l’injustice, la corruption et l’inefficacité des autorités locales étatiques.

Exploitation des vulnérabilités structurelles

L’expansion du JNIM dans l’Ouest du Mali repose en grande partie sur l’exploitation habile des vulnérabilités structurelles, dans le but de viser le poumon aurifère du pays.

Premièrement, l’insuffisance des dispositifs des forces de défense et de sécurité, a créé un vide institutionnel que le JNIM exploite pour renforcer sa légitimité auprès des populations. Par exemple, dans le cercle de Yelimané, il n’existe aucune base militaire pour assurer le contrôle de la zone.

Deuxièmement, la pauvreté chronique et la dépendance économique vis-à-vis de la diaspora aggravent cette situation. Les transferts de fonds, bien que cruciaux pour les ménages, ne suffisent pas à bâtir une résilience économique locale durable.

Troisièmement, il y a les tensions intercommunautaires historiques et récentes liées à l’esclavage par ascendance – une situation où le statut d’ »esclave » se transmet automatiquement de génération en génération – et la violence qui en résulte, perpétrée par des supposés « nobles » ou « maîtres » contre des personnes nées en situation d’esclavage dans la région. Elles fragilisent encore davantage le tissu social de toute la zone de trois frontières (Mali-Mauritanie-Sénégal).

Ces fractures sociales sont instrumentalisées par le JNIM pour renforcer ses liens avec certaines communautés.

Enfin, la porosité des frontières et l’économie criminelle transfrontalière facilitent la circulation des combattants, des armes et des ressources. Le JNIM s’appuie sur des réseaux établis de contrebande et de trafic de bétail pour financer ses opérations, comme l’a confirmé l’étude du Timbuktu Institute.

En tant que chercheurs, nous avons pu observer que, bien avant l’arrivée du JNIM dans la région, une économie criminelle existait déjà, notamment à travers le vol de bétail. Cependant, depuis l’implantation du groupe, cette situation s’est aggravée. Les membres du JNIM effectuent désormais des passages réguliers dans les villages pour racketter les populations sous prétexte de collecter la zakat. Cette exploitation permet au JNIM de consolider son influence locale, tout en préparant son expansion vers les pays voisins.

Ainsi, les stratégies d’implantation du JNIM dans les régions, bien que localisées, révèlent une dynamique d’expansion plus large dont les répercussions dépassent les frontières maliennes.

Menaces pour le Sénégal et la Mauritanie

L’expansion du JNIM dans l’Ouest du Mali constitue une menace transfrontalière croissante pour le Sénégal et la Mauritanie. Cette dynamique est favorisée par plusieurs facteurs structurels et opérationnels.

Carte du Mali. Wikimedia Commons.
  • La porosité des frontières entre les trois pays et les réseaux criminels transnationaux

Ces frontières sont historiquement poreuses et mal surveillées. Le JNIM exploite ces passages pour faciliter le déplacement de ses combattants, le transfert d’armes et le financement de ses activités à travers le trafic de bétail et d’autres ressources naturelles.

Ces réseaux économiques clandestins sont bien ancrés et permettent au groupe d’étendre son influence sans confrontation directe avec les forces de sécurité locales.

  • La stratégie d’encerclement et de désenclavement des zones frontalières

Selon les spécialistes de la zone de trois frontières, le JNIM adopte une stratégie à deux volets : encercler Bamako et établir des bases avancées proches des frontières sénégalaise et mauritanienne. Cette approche vise à couper les axes logistiques vers la capitale malienne tout en préparant une expansion progressive vers les pays côtiers. L’augmentation des attaques dans la région de Kayes, multipliée par sept entre 2021 et 2025, en est une illustration directe.

  • L’infiltration idéologique et la fragilité des périphéries sénégalaise et mauritanienne

Le JNIM cherche à exploiter les tensions sociales et les fragilités économiques des zones frontalières, en particulier dans l’Est du Sénégal (Bakel, Kédougou, Tambacounda) et le Sud de la Mauritanie (régions du Hodh el Gharbi et du Guidimakha).

  • Les risques d’actions armées et de déstabilisation économique

Selon nos observations, même si le JNIM n’a pas encore établi de base permanente dans les régions de Kayes et de Nioro, ni dans les pays voisins, il utiliserait ces territoires comme zones de repli logistique et pour mener des activités économiques illicites.

L’enlèvement du leader religeux Thierno Amadou Hady Tall en décembre 2024, près de Nioro, a marqué une étape majeure dans cette stratégie de déstabilisation. Il a créé un choc dans la sous-région et montré la capacité du groupe à perturber l’équilibre social et religieux local.

Que faire ?

Face à cette situation, nous recommandons :

1 – le renforcement de la coopération sécuritaire transfrontalière

Il est impératif de mettre en place des mécanismes de coopération renforcés entre le Mali, le Sénégal et la Mauritanie pour surveiller efficacement les zones frontalières.

2- la réactivation de la présence de l’État et l’amélioration des infrastructures de base

Les postes de sécurité existants devraient être renforcés et de nouveaux créés dans les zones sensibles.

3 – la promotion d’alternatives économiques pour les jeunes

Face au chômage massif et à l’absence de perspectives, il est crucial de lancer des programmes de développement économique ciblés pour les jeunes.

4 – l’implication des leaders communautaires et religieux

Il est nécessaire de renforcer leur implication dans la prévention de l’extrémisme violent, en intégrant les leaders traditionnels et religieux dans les stratégies de sensibilisation et de déradicalisation. il faut aussi de promouvoir la cohésion sociale en réconciliant les communautés affectées par les tensions interethniques.

5 – la lutte contre le financement du terrorisme et les économies criminelles

Il est urgent de renforcer la surveillance des circuits économiques informels exploités par les groupes terroristes, notamment le trafic de bétail, de bois et de produits illicites.

En définitive, la dynamique d’expansion du JNIM dans la zone des trois frontières Mali–Mauritanie–Sénégal représente un risque majeur pour la stabilité de la région. Si la réponse à cette menace ne combine pas, de manière cohérente, des mesures sécuritaires renforcées et des actions de développement durable, les fragilités existantes continueront d’être exploitées par les groupes armés.

Seule une approche concertée, mobilisant les États, les acteurs communautaires et les partenaires internationaux, permettra de contenir cette menace et de rétablir durablement la sécurité et la cohésion sociale dans cette région stratégique.

Mahamadou A. Traoré a contribué à la rédaction de cet article.

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Les contrats suspects de l’hôpital de Benghazi initiés sous Sarkozy https://mondafrique.com/confidentiels/les-contrats-suspects-de-lhopital-de-benghazi-inities-sous-sarkozy/ Mon, 30 Jun 2025 06:51:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=136281 La libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien en 2007 en Libye a donné lieu à une autre affaire pas très claire portant sur la modernisation de l’hôpital de Benghazi pour 30 millions d’euros. L’Agence française de développement (AFD) est mise en cause pour « favoritisme ».  Par Ian Hamel Tout le monde a gardé en […]

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La libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien en 2007 en Libye a donné lieu à une autre affaire pas très claire portant sur la modernisation de l’hôpital de Benghazi pour 30 millions d’euros. L’Agence française de développement (AFD) est mise en cause pour « favoritisme ». 

Par Ian Hamel

Tout le monde a gardé en mémoire l’affaire des infirmières bulgares et du médecin palestinien, accusés par Mouammar Kadhafi d’avoir inoculé le virus du sida à des enfants. Des innocents emprisonnés et torturés depuis 1999. Leur libération obtenue par Nicolas Sarkozy en 2007 contenait une clause peu connue : la prise en charge par la France de la rénovation de l’hôpital universitaire de Benghazi, construit dans les années 1980, mais qui n’avait jamais ouvert.     

L’Agence française du développement (AFD) reçoit alors une dotation exceptionnelle de presque 30 millions d’euros (exactement 29 831 287 euros) en 2008. Le problème, c’est que le marché est attribué à la société Ideal Medical Products Engineering (IMPE), dirigé par Olivier Carli, sans mise en concurrence. De quoi susciter la curiosité de la justice française. D’autant qu’une autre société Denos Health Management « remporte le contrat de gestion hospitalière. Derrière plusieurs sociétés-écrans se cache en fait une holding, elle-même détenue par M. Carli ». écrit Le Monde en novembre 2016 (1).

Un assassinat en Libye en 2014

Le quotidien parisien révèle également que cette entreprise IMPE aurait été imposée par Boris Boillon, lui-même conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Élysée. Par ailleurs, durant l’été 2017, la revue Sang-Froid, consacrée au monde judiciaire, évoquait la mort du Français Patrice Réal, 49 ans, chargé de la sécurité d’IMPE, assassiné à Benghazi le 2 mars 2014 (2). Dans ce dossier, le parquet national financier (PNF) s’est aussi intéressé à Claude Guéant et à Ziad Takieddine. Mais depuis il semblait ne plus rien se passer. L’enquête prenait la poussière dans un palais de justice.

C’est le site Gotham City, spécialisé dans « l’actualité des affaires par les sources judiciaires », qui remet au goût du jour le dossier en annonçant que Jean-Michel Severino, l’ancien directeur général de l’Agence française de développement  et l’AFD elle-même se retrouvent devant la 32ème chambre correctionnelle du tribunal de Paris pour être jugés pour favoritisme, et Olivier Carli, pour recel de favoritisme (3). 17 ans après les faits. 

  • Joan Tilouine et Simon Piel, « Une enquête préliminaire ouverte sur l’hôpital libyen de Benghazi », 3 novembre 2016.
  • « Sur les traces de Patrice Réal ».
  • « Hôpital de Benghazi : l’Agence française de développement et son ex-DG bientôt jugés pour favoritisme », 19 juin 2025.

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Cameroun, un débat politique abstrait, déconnecté, illusoire https://mondafrique.com/decryptage/cameroun-un-debat-politique-abstrait-deconnecte-illusoire/ Thu, 26 Jun 2025 10:20:55 +0000 https://mondafrique.com/?p=136176 Dans toute démocratie vivante, le forum public n’est pas simplement un espace où chacun peut parler : c’est un écosystème dans lequel les idées circulent, s’affrontent, se nuancent, se raffinent. Encore faut-il que cet espace soit structuré par des conditions qualitatives qui en assurent la densité intellectuelle, l’ouverture argumentative et l’utilité civique. Or, le Cameroun, […]

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Dans toute démocratie vivante, le forum public n’est pas simplement un espace où chacun peut parler : c’est un écosystème dans lequel les idées circulent, s’affrontent, se nuancent, se raffinent. Encore faut-il que cet espace soit structuré par des conditions qualitatives qui en assurent la densité intellectuelle, l’ouverture argumentative et l’utilité civique. Or, le Cameroun, malgré ses institutions formellement républicaines, reste largement dépourvu de ces critères qui font la valeur démocratique d’un forum public.

Pascal Kouoh Mbongo, juriste, historien 

Le premier déficit majeur est celui d’une presse d’élite indépendante et analytique. La majorité des médias, publics ou privés, fonctionne selon des logiques d’allégeance politique ou de sensationnalisme commercial. L’enquête rigoureuse, l’analyse critique, le journalisme d’idées ou le journalisme d’investigation y sont rares. Très peu de supports permettent au citoyen de se former une opinion éclairée à partir de données, de perspectives divergentes ou d’explications pédagogiques sur les enjeux collectifs.

L’absence d’une présence active et reconnue des intellectuels dans la sphère publique saute également aux yeux. Les universitaires, chercheurs, écrivains ou penseurs critiques sont souvent marginalisés, instrumentalisés ou autocensurés. Peu d’ouvrages d’idées circulent largement ; peu d’essais politiques nourrissent les débats ; peu d’universitaires occupent des places de référents publics. Le livre, outil fondamental de la pensée lente, de la mise en perspective et de la résistance intellectuelle, n’a pas de centralité dans l’imaginaire politique camerounais.

Ce faux bon sens populaire

Ce qui asphyxie le forum public au Cameroun, c’est la prééminence culturelle de la parole proverbiale. En effet, dans la tradition orale dominante au Cameroun, le proverbe ou la sentence (proverbiale ou non) n’est pas un tremplin vers la réflexion, mais une clôture du sens. Il impose, il scelle, il disqualifie le doute.

Des formules comme « Quand le vieux parle, l’enfant se tait » « Une femme doit rester à sa place » « Le Camerounais a besoin de savoir qui il est » « Tu critiques mais toi tu as déjà fait quoi » « Le Cameroun c’est le Cameroun » « Le Cameroun est une Afrique en miniature » « Quand Yaoundé respire, le Cameroun vit… » sont autant de désarmements intellectuels. Le proverbe ou la sentence ne débat pas : il (elle) établit-rétablit un ordre. Ce type de parole instaure une communication hiérarchique, corrective, performative. On ne parle pas pour chercher ou explorer, mais pour remettre l’autre à sa place, affirmer une norme, imposer une posture sociale.

Ce qui frappe, c’est que même ceux qui sont passés par une année de philosophie en Terminale – censée éveiller à l’esprit critique, au questionnement des évidences – semblent n’en avoir rien retenu. Comme si cette parenthèse réflexive avait été aussitôt refermée, niée, dissoute dans une structure mentale plus profonde, façonnée par la tradition, l’autorité, la religiosité, le poids des aînés. Comme si le geste critique appris en classe restait abstrait, formel, sans prise sur le monde vécu. Comme si le retour à la « vraie vie » (la famille, le village, les réseaux sociaux, la religion) imposait à nouveau l’impératif du proverbe ou de la sentence.

L’absence de conversation sociale sur les sujets de l’épreuve de philosophie au baccalauréat est d’ailleurs très frappante : les journaux et les médias audiovisuels n’ont par exemple pas conçu de convier des professeurs de philosophie, des auteurs, des personnalités, à faire connaître les réflexions que leur avaient inspiré les sujets d’un point d vue intellectuel ou du point de vue de leur consonance avec les affaires publiques.

Je ne suis certes pas en train de dire que les Camerounais sont « incapables » d’une intellectualité dialogique et d’une pensée critique. J’essaie seulement de comprendre comment une structure culturelle profondément enracinée – la parole proverbiale ou sentencieuse – vient neutraliser les instruments de la pensée analytique et critique avant même qu’ils n’aient pu prendre racine. C’est une forme de « réflexe discursif » : on ne parle pas pour chercher ou explorer, on parle pour affirmer, corriger, remettre à leur place les autres. Le discours devient performatif, hiérarchique, normatif.

La religion au coeur

La religiosité généralisée de la société camerounaise contemporaine renforce cette emprise du discours proverbial ou sentencieux. Les prises de position politiques, sociales ou morales sont fréquemment justifiées par des références religieuses. Cette fusion entre foi et discours public – qui fait par exemple fi de ce que les discussions théologiques relèvent de la sphère religieuse et donc du privé de coreligionnaires – empêche le développement d’un langage commun fondé sur la raison publique, la négociation des désaccords et l’universalisation des arguments.

Cette logique de la parole qui clôture trouve un écho puissant dans les « églises du réveil », en pleine expansion. Le discours du pasteur ou du prophète fonctionne exactement comme le proverbe : un énoncé de vérité fermé, incontestable, souvent menaçant. Le doute y est un péché ; la contradiction, une insubordination. Ces églises structurent l’univers discursif d’une large partie de la population en diffusant une pensée binaire (le bien/le mal, la foi/le doute) et des certitudes morales faciles. Ces églises ont par ailleurs une culture du miracle, de l’émotion et du témoignage individuel peu compatibles avec les exigences intellectuelles de la citoyenneté. L’expérience religieuse y est souvent très émotionnelle. Les « preuves » de vérité sont subjectives (guérisons, révélations, rêves, témoignages). Cette prédominance de l’émotion sur la raison crée un rapport au monde basé sur l’intuition, la foi aveugle, et l’expérience personnelle sacralisée. Cela laisse d’autant moins de place à une analyse hypothétiquement rationnelle des causes sociales ou politiques des problèmes que, dans la perspective religieuse, la misère s’explique par un manque de foi, l’injustice se veut une épreuve divine et la réussite une bénédiction personnelle.

Les conditions d’un débat réel

Inventer un véritable forum public au Cameroun suppose donc un basculement culturel profond. Il ne suffit pas de garantir la liberté d’expression au sens formel : il faut créer les conditions de la parole analytique et critique. Cela passe par …

a) la consolidation d’une presse libre, exigeante, pédagogique

b) la revalorisation des intellectuels comme penseurs publics, non comme relais techniques du pouvoir

c) la promotion de l’essai, du débat argumenté, des revues de pensée

d) la formation à l’analyse, au doute, à la lenteur dans l’éducation et les médias

e) la déconstruction progressive du réflexe proverbial ou sentencieux et de l’autoritarisme religieux dans l’espace civique.

Il ne s’agit pas de rejeter les traditions ni la spiritualité, mais de rendre à la parole sa fonction exploratoire, libératrice, dialogique. Le Cameroun ne manque ni d’intelligence, ni de talent, ni de voix singulières. Ce qui lui manque, c’est un espace public qui accueille, valorise et structure ces voix dans un horizon de vérité partagée, et non de répétition conformiste.

Après avoir scruté pendant plus d’un an le débat public camerounais, à travers les médias locaux mais aussi ceux qualifiés d’« africains », une évidence s’impose : le Cameroun ne pourra refonder son espace public qu’en s’émancipant des rhétoriques, discours et projections panafricanistes contemporains de toutes factures.

Le Cameroun, s’il veut sortir de l’anémie intellectuelle qui affecte son débat public, doit se doter de son propre forum public, au regard des critères analysés dans ce texte. L’urgence n’est pas de  « penser africain », mais de penser depuis le Cameroun, pour le Cameroun, en s’arrachant aux slogans et aux dérivatifs discursifs qui masquent l’absence de pensée structurée et de projet civique national.

 

 

 

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Boualem Sansal devant la cour d’appel: le verbatim de l’audience https://mondafrique.com/a-la-une/boualem-sansal-devant-la-cour-dappel-le-verbatim-de-laudience/ Wed, 25 Jun 2025 06:55:29 +0000 https://mondafrique.com/?p=136129 Alger, 24 juin 2025. À 9h25, la présidente de la cour d’Alger, Naïma Dahmani, fait son entrée dans la salle d’audience, accompagnée de ses deux assesseurs. À 9h30 précises, elle appelle à la barre l’écrivain Boualem Sansal, vêtu d’un pantalon et d’un tee-shirt gris, les cheveux soigneusement coupés. L’homme de lettres, entouré d’une dizaine de gendarmes […]

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Alger, 24 juin 2025. À 9h25, la présidente de la cour d’Alger, Naïma Dahmani, fait son entrée dans la salle d’audience, accompagnée de ses deux assesseurs. À 9h30 précises, elle appelle à la barre l’écrivain Boualem Sansal, vêtu d’un pantalon et d’un tee-shirt gris, les cheveux soigneusement coupés. L’homme de lettres, entouré d’une dizaine de gendarmes d’élite et de policiers, comparaît seul : il a choisi d’assurer lui-même sa défense.

« Vous m’écoutez ? », lui lance la présidente en arabe. « Oui, mais je vais vous répondre en français », rétorque Sansal. La magistrate accepte : elle posera ses questions en arabe, il pourra répondre dans la langue de son choix.

Dès l’ouverture, la présidente rappelle à l’écrivain les faits qui lui sont reprochés : certaines de ses publications et déclarations jugées hostiles à l’Algérie. « Qu’avez-vous à dire ? », lui demande-t-elle. Sansal répond sans détour : « Je n’ai rien à dire. Je suis un homme libre. Je parle à tout le monde, et je parle en France, pas en Algérie. Je suis français et toutes mes déclarations ont été faites en France. »

La juge évoque alors une interview donnée au journal d’extrême droite Frontières, dans laquelle Sansal aurait tenu des propos controversés sur les frontières de l’Algérie, en particulier dans l’ouest du pays. « J’ai simplement dit que les frontières actuelles ont été tracées par les Français, qu’elles sont héritées de la colonisation. Et j’ai rappelé que l’Union africaine a confirmé l’intangibilité de ces frontières après les indépendances. »

La présidente revient ensuite sur des échanges entre Sansal et l’ancien ambassadeur de France à Alger, Xavier Driencourt, ainsi qu’avec l’ex-ministre français Hubert Védrine. Elle cite notamment une phrase de l’écrivain : « Nous avons le pétrole et Chengriha. » Sansal se défend : « Ce sont des discussions privées, parfois sur le ton de la plaisanterie. Je ne vois pas ce qu’il y a de dangereux. »

Interrogé sur ses relations avec le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK), considéré comme une organisation terroriste par Alger, l’écrivain répond : « Je parle avec tout le monde. »

Puis vient une question inattendue : « Avez-vous déjà visité Israël ? » — « Oui, en 2012 », répond-il. « Dans quel cadre ? » — « J’étais invité à la fois par l’OLP et par les autorités israéliennes », précise-t-il.

À la question de la juge s’il est convaincu par ses propos et déclarations, Sansal répond calmement : « Oui, j’en suis convaincu. Mais on peut aussi changer d’avis dans la vie. » La présidente l’interroge enfin sur ses romans, qu’elle juge trop orientés vers la critique politique. « Pourquoi ne pas parler de littérature ou de culture, mais que de politique intérieure  ? », demande-t-elle. L’auteur reste silencieux.

Après seulement dix minutes de débats, le procureur prend la parole pour son réquisitoire. Il rappelle que Boualem Sansal est né, a grandi, étudié, travaillé et été soigné en Algérie, mais « n’a jamais été reconnaissant envers son pays », selon lui. Il requiert dix ans de prison ferme et une amende d’un million de dinars.

9h46 ; invité à prononcer le mot de la fin, Boualem Sansal conclut :
« On fait le procès de la littérature. Cela n’a pas de sens. La Constitution algérienne garantit la liberté de conscience, la liberté d’expression et d’opinion. Et pourtant, je me retrouve aujourd’hui devant vous. »

Le verdict est attendu le 1er juillet 2025.

L’écrivain algérien avait été condamné à cinq ans de prison ferme et à une amende de 500 000 dinars le 27 mars 2025, notamment pour « atteinte à l’unité nationale » par le tribunal correctionnel de Dar El Beida d’Alger.

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Elon Musk à la tète de Starlink investit sur l’Afrique https://mondafrique.com/decryptage/elon-musk-a-la-tete-de-starlink-mise-sur-lafrique/ Mon, 23 Jun 2025 02:25:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=135978 En dépit de nombreux défis de sécurité au Sahel, certains gouvernements et des acteurs de l’industrie aérospatiale multiplient des initiatives pour l’essor d’un astrocapitalisme à l’Africaine en cédant aux demandes d’Elon Musk alors qu’il étaient jusqu’ici réticents au déploiement de Starlink, le groupe dirigé par l’ancien complice de Donald Trump.  Une chronique du docteur Qemal […]

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En dépit de nombreux défis de sécurité au Sahel, certains gouvernements et des acteurs de l’industrie aérospatiale multiplient des initiatives pour l’essor d’un astrocapitalisme à l’Africaine en cédant aux demandes d’Elon Musk alors qu’il étaient jusqu’ici réticents au déploiement de Starlink, le groupe dirigé par l’ancien complice de Donald Trump. 

Une chronique du docteur Qemal Affagnon, responsable Afrique de l’Ouest de l’ONG de défense des droits numériques, Internet Sans Frontières. Expert électoral, l’auteur a observé des scrutins électoraux en RDC, en Afrique du Sud, au Mozambique et en Russie.

Depuis le retour de Donald Trump à Maison Blanche, les bouleversements provoqués par sa réélection pèsent sur l’industrie spatiale africaine. Constructeur de fusées, de voitures électriques, milliardaire atypique et volontiers provocateur, Elon Musk qui a mis la main sur l’influent réseau social Twitter en 2022, est de plus en plus présent sur un marché africain en plein essor, notamment grâce à son service d’accès à Internet par satellite.

Comptant à son actif 61 satellites lancés par 17 Etats africains, l’industrie spatiale africaine affiche une dynamique encourageante qui s’articule autour de l’observation de la Terre, du positionnement, de la navigation, et la connectivité Internet au nombre des marchés qui dominent ce secteur. Le développement des capacités spatiales africaines repose sur des partenariats avec des nations disposant de technologies avancées.

ll n’y a pas très longtemps, le Maroc, l’Egypte et l’Afrique du Sud, faisaient partie des rares puissances continentales à disposer d’un satellite de reconnaissance militaire.  Le Royaume marocain avait conclu en 2013, un contrat avec la France. Dans le plus grand secret, le contrat avait coûté au royaume chérifien la bagatelle de 500 millions d’euros au moment où François Hollande était au pouvoir. Avec ce satellite, le Maroc disposait d’un avantage décisif qui lui permettait de tout savoir des positions de l’armée algérienne et de celles des insurgés sahraouis au Sahara occidental. Grâce à cet outil, le royaume chérifien disposait aussi de précieuses informations sur l’Espagne qui est le seul pays européen à encore disposer de territoires en Afrique, notamment les enclaves de Ceuta et Melilla en territoire marocain (1).  

Comme l’Afrique n’investit que 7,7 milliards de dollars dans l’espace, les plus grandes entreprises spatiales mondiales jouent également un rôle important afin que le continent se dote d’applications spatiales dans les domaines de l’agriculture, de la gestion des ressources en eau, de la prévision des catastrophes, de la planification urbaine, mais aussi dans le secteur de la fourniture Internet.

Elon Musk offensif au Bénin  

Déjà disponible au Bénin depuis novembre 2023, le groupe Starlink d’Elon Musk cherche à renforcer sa présence, au regard des défis sécuritaires qui persistent, notamment dans le nord du pays. Avec les autorités béninoises,  il a été question d’explorer des opportunités de collaboration stratégique autour du renforcement de la surveillance des frontières. Ces derniers mois , les  assauts contre l’armée béninoise se sont intensifiés dans le nord du pays qui paie le prix fort d’une politique sécuritaire défaillante. Au mois de février, le ministre de l’Économie et des Finances du Bénin, Romuald Wadagni, indiquait avoir eu des échanges avec une délégation de Starlink afin d’explorer des opportunités de collaboration stratégique.

Pour sa part, Airtel Africa a annoncé la signature d’un accord de partenariat avec la société américaine SpaceX, pour l’intégration des services Internet satellitaires, Starlink à son offre data. À travers cet accord, la branche africaine de la filiale africaine du groupe indien Bharti Airtel pourra faire du backhauling cellulaire.

Il s’agit d’une méthode visant à relier les antennes-relais au réseau principal via le satellite. Pour cet opérateur télécom, cette manœuvre permettra de proposer du haut débit, aussi bien en zones urbaines que rurales, ce qui permettra de séduire davantage de consommateurs mobiles avec une qualité de service renforcée.

Au Bénin, plusieurs organisations de défense des droits humains appellent à une révision du Code du numérique (2). Or, à travers l’action qu’il vient d’intenter en justice, Musk estime que le gouvernement n’a pas à dicter les limites du débat public et dénonce une ingérence politique dans la gestion des contenus en ligne. Le milliardaire fera tout pour bloquer la mise en œuvre de lois visant à réguler les plateformes en ligne. 

Un partenariat avec Air France

Avec ses 6 700 satellites situés à 550 km d’altitude, Starlink vient également de nouer un partenariat avec Air France. Ce service sera accessible à tous les clients, sans frais supplémentaires, via un simple compte Flying Blue, le programme de fidélité gratuit d’Air France. En misant sur Starlink, Air France s’aligne sur d’autres compagnies aériennes déjà séduites par la solution de SpaceX, à l’instar de United, Qatar Airways ou encore Air New Zealand. Pour sa part, Air Canada a opté pour un partenariat avec Eutelsat, afin de proposer une connexion via la constellation OneWeb à ses passagers.

En Afrique, ce partenariat entre Air France et Starlink, représente une véritable aubaine, car Air France maintient une présence significative sur le continent, malgré certains défis géopolitiques et la concurrence d’autres compagnies aériennes. De fait, à travers ce partenariat, Starlink et Air France vont sans doute se lancer dans une véritable lutte au couteau afin d’explorer un minerai nouveau à savoir les données personnelles des passagers du transport aérien.

Une soif insatiable de contrats

Depuis une vingtaine d’années, les origines du succès de Musk sont connues. L’entrepreneur profite d’importantes commandes et de crédits d’impôt de la part des Etats locaux et du gouvernement fédéral américain. Dans les années 2000, il mène de front deux projets que sont la voiture électrique et la conquête de l’espace. Avec des services déjà déployés dans 18 pays africains, Starlink, le fournisseur de connectivité par satellite en orbite basse, prévoit d’étendre son empreinte à 20 nouveaux marchés en 2025 et cinq supplémentaires en 2026. 

Cependant, ces chiffres cachent de nombreux enjeux économiques, technologiques et géopolitiques qui méritent une analyse approfondie. Au Niger et au Bénin par exemple, les autorités ont signé un accord avec le même fournisseur qu’est Starlink dans le but d’améliorer la couverture Internet. Depuis, les tensions ne cessent de grimper entre les deux voisins pendant que Starlink continue de tisser tranquillement sa toile alors que dans le même temps, qu’on assiste à des sorties médiatiques controversées entre le Bénin et ses voisins limitrophes. Les accusations fusent de toute part qui dénoncent des complots sécuritaires, alors que que les incidents se multiplient au nord du Bénin.

Sur le plan International, le rouleau compresseur Musk rencontre aussi des critiques . En Italie par exemple, la fourniture d’un système de communication élaboré par Musk pour le compte des autorités et des forces armées en Méditerranée, rencontre les critiques des partis d’opposition de Giorgia Meloni.

Dans ce contexte trouble et incertain, Musk continue toutefois d’avancer ses pions. Au Mali par exemple, les autorités du pays avaient déploré dans un premier temps, l’utilisation des kits Starlink par des groupes armés. L’importation et la commercialisation des équipements Starlink sont toutefois de nouveau autorisées dans le pays, le temps de mettre en place un cadre réglementaire et une plateforme d’enregistrement et d’identification de l’ensemble des utilisateurs sur le territoire malien.

Trump et Musk, l’éloignement

Entre temps, le président américain appuie sur l’accélérateur dans les négociations commerciales partout dans le monde, y compris en Afrique. À titre d’exemple, la récente instauration par l’administration Trump d’un tarif douanier minimum de 10 % sur les importations provenant de l’Afrique subsaharienne qui marque la fin, de facto, de l’AGOA. Cette décision n’a pas manqué de susciter plusieurs sorties au vitriol à l’encontre du nouveau locataire de la Maison-Blanche.

En plus du nouveau tarif douanier, c’est désormais plus de la moitié du continent qui pourrait être frappée par des mesures d’interdictions de voyage aux États-Unis.

Dans le même ordre d’idées, Trump a également annulé un décret adopté par Joe Biden en 2023, qui encadre le secteur de l’intelligence artificielle sur le plan international.

Autant d’initiatives du président américain qui ne servent pas nécessairement les ambitions africaines d’Elon Musk tant les images des deux hommes restent associées. 

 

(1) Il s’agit de deux villes de garnison au nord du Maroc, auxquelles s’ajoute un chapelet d’îles et de pignons rocheux collés à la rive marocaine

(2) Dans le cadre de l’Examen Périodique Universel, l’auteur de l’article milite en faveur de la révision du texte de la loi portant Code du Numérique au Bénin.

 

 

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La cohabitation entre l’armée tunisienne et Kaïs Saïed https://mondafrique.com/decryptage/la-cohabitation-entre-larmee-tunisienne-et-kais-saied/ Tue, 17 Jun 2025 05:44:10 +0000 https://mondafrique.com/?p=135715 La complicité manifeste de l’armée dans le coup d’état de Kaïs Saïed, le 25 juillet 2021, qui bloquait l’accès du siège de l’assemblée des représentants des peuples et des soldats, a chasssé l’aura de l’institution militaire À la fin de l’ère de Ben Ali, le président tunisen entre 1987 et 2011, l’armée semblait ne pas […]

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La complicité manifeste de l’armée dans le coup d’état de Kaïs Saïed, le 25 juillet 2021, qui bloquait l’accès du siège de l’assemblée des représentants des peuples et des soldats, a chasssé l’aura de l’institution militaire

À la fin de l’ère de Ben Ali, le président tunisen entre 1987 et 2011, l’armée semblait ne pas appartenir aux appareils sécuritaires réprimant ceux qui osaient défier le pouvoir comme ce fut le cas lors de la révolte du bassin minier en 2008 ou lors de la révolution de 2011. Cette armée républicaine cultivait une forme de neutalité teintée de légutimisme. qui n’a pas fait le choix de soutenir le dictateur sans pour autant s’emparer du pouvoir. Le ministère de l’intérieur, la véritable assise du général Ben Ali, était en charge du sale boulot.

Or l’armée tunisienne est redevenue une armée arabe classique, interventionniste et répressive comme comme c’est le cas  en Egypte, soupçonnée d’appuyer Kais Said dans son coup d’état et l’Algérie dont Kais Said est devenu l’obligé. L’armée n’a jamais été aussi impliquée dans l’exercice du pouvoir mêle si des sources d’information prétendent que Kais  Said a voulu effectué un remaniement pour les plus hauts gradés de l’armée. La fermeté exceptionnelle dont a fait preuve le tribunal administratif, soutenu par une partie du haut commandement, dans le contentieux des candidature de la dernière Présidentielles, expliquent ce bras de fer. Une médiation algérienne aurait calmé le jeu.

Le partenariat entre Kais Said et l’armée vient de loin. L’ancien premier ministre Kamel Madouri et l’actuelle première ministre Sara Zaafrani, la nouvelle Régente de Carthage, on suivi les cours de l’académie politique de l’armée. Kais Said le premier n’est pas avare de discours élogieux envers l’armée. La simple restauration de la piscine extérieure du Belvédère à Tunis par les militaires est présentée comme une prouesse technique historique. Le développement du pays devrait beaucoup, d’après la Présidence, àla supervision de l’armée des projets civils. Les généraux se sont vus confier les prérogatives de « l’Office de Regime Maatoug pour le développement du sud et du Sahara ».

Autre nouveauté, la restauration du service militaire obligatoire pour les jeunes tunisiens.

Trois scénarios possibles

L’armée est la seule institution capable de s’emparer du pouvoir par la force. L’article 109 de la constitution de 2022 dispose : « En cas de vacance de la Présidence de la République pour cause de décès, de démission, d’empêchement absolu ou pour toute autre cause, le Président de la Cour constitutionnelle est alors immédiatement investi provisoirement des fonctions de Président de l’Etat pour une période allant de quarante-cinq jours au moins à quatre-vingt-dix jours au plus. ». seul souci, la  cour  Constitutionnelle n’a été pas constituée. L’armée reste le seul l’arbitre.

Les généraux qui prétendent être légalistes, franchiront-ils le Rubicon pour imposer un régime à l’égyptienne? Ou sera-t-elle tentée de contrôler le pouvoir derrière le rideau comme cela fut longtemps le cas du régime turc?

Un troisième scénario serait que l’armée renoue avec son rôle patriotique  de rempart pour la démocratie et appuie la résurrection d’une nouvelle période de transition démocratique, malgré la désertification de l’espace public orchestrée méthodologiquement par Kais Said qui sera juste  une parenthèse ou une exception.

Circulez, il n’y a rien à voir

L’opacité et la collégialité du processus de sa prise de décision rendent difficiles le moindre pronostic. La Tunisie ne possède pas un commandant des armées mais un conseil supérieur. L’armée tunisienne n’a pas  les moyens de contrôler l’économie ni même de suveiller la vie publique. La vulnérabilité financière serait aussi un obstacle de taille pour cette armée qui dépend de l’aide étrangère notamment américaine.

La situation pomotique de la Tunnisie, sans être verrouillée, est proprement boquée faute d’alternative crédible.

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