L’affaire Amira Bouraoui révèle des profonds contentieux entre Paris et Alger

Amira Bouraoui, one of the most prominent if not the best-known figure of "Hirak", is greeted upon her release from prison on July 2, 2020, outside the Kolea Prison near the city of Tipasa, 70km west of the capital Algiers. (Photo by RYAD KRAMDI / AFP)

L’affaire de la fuite de Tunis d’Amira Bouraoui, aidée par les services français, a provoqué une véritable déflagration dans les relations entre Paris et Alger. Les services de sécurité algériens ont subi un double camouflet. De la part des Français qui ont rapatrié l’opposante algérienne  en France et de la part du pouvoir tunisien qui a laissé faire, alors qu’il paraissait sous l’influence totale de l’Algérie. 

Tout juste avant l’embarquement d’Amira Bouraoui de Tunis vers Lyon sous protection des services consulaires français, une équipe de barbouzes algériens avait déjà été mise en place en Tunisie pour opérer le rapatriement de l’opposante vers Alger.

Le général Djebbar Mhenna, le tout puissant patron des services extérieurs algériens, pensait réitérer le coup d’éclat du kidnapping de à Tunis l’ancien policier et militant favorable au mouvement indépendantiste kabyle (MAK), Slimane Bouhafs. Réfugié politique  disposant d’un statut auu haut-commissariat aux réfugiés (HCR) dûment acquis par les autorités tunisiennes, cet opposant avait été enlevé en plein Tunis sans que les autorités interviennent

Premier acte:  les frontières fermées

Les représailles ont commencé, jeudi 9 février, lorsque le poste frontière algéro-tunisien de Bebouche a été fermé pour les tunisiens désirant rentrer en Alger. Plus de 200 véhicules ont été bloqués et leurs affaires fouillées avec minutie. Les réseaux sociaux tunisiens ont réagi nombreux à cette décision arbitraire qui menaçait les nombreux échanges informels entre les deux pays, un marché noir dont vit une grande partie de la jeunesse pauvre de la Tunisie de l’intérieur.

Le blocage des frontières n’a été stoppé que sur intervention du Président de la république algérienne .

Deuxième acte: l’embarras de Kaïs Saied 

 

Quant à Kais Saied, il obtient, le même jour, la démission de son ministre des Affaires Etrangères présenté comme le coupable de l’inertie tunisienne face à l’action des Français. Une façon pour Kaïs Saïed de retrouver la confiance d’Alger, son principal soutien international désormais.

Troisième acte: la famille perquisitionnée

La sœur et la soeur d’Amira Bouraoui
 La mère et la sœur d’Amira Bouraoui ont été arrêtées à Alger samedi en fin de journée par la gendarmerie d’El Achour.  Les pandores ont débarqué au domicile familial, situé à Oued Erromane, où sa mère, Khadidja, et sa sœur Wafa ont subi une perquisition musclée.

Jeudi dans l’après-midi, deux éléments des services ont rendu visite au domicile de la famille intimidant les membres en les traitant de « félons au service des « ennemis du pays ».

Pourquoi tant d’hostilité contre une opposante laïque, fille et nièce de hauts gradés dans l’armée et les services? En quoi l’engagement passé dans le mouvement hostile au cinquième mandat de l’ex Président Bouteflika, un combat qui était aussi celui d’une parti des services secrets algériens fidèles au général Toufik, en fait une ennemie publique numéro un?

L’opposante et militante des Droits de l´homme faisait l’éloge du général Mohamed LAMARI, patron de l’armée pendant les années noires (1992-1998) .  » Lamari disait à ses hommes, je veux des têtes des terroristes sur on bureau. Et, il avait raison…. »

On sait que le pouvoir algérien, vent debout contre le islamistes du mouvement « Rachad »et conytr les séparatistes du MAK, tous qualifiés de « terroristes », sait généralement trouver des passerelles vers les opposant(e)s comme Amira Bouraoui, nourri(e)s dans le sérail, hostiles aux islamistes  et capables de compromis avec le pouvoir militaire comme on le voit dans le Post ci dessus, où elle tresse des lauriers au général Lamari, qui fut le brutal chef d’état major durant les années noires (1992-1998).

La réaction violente des Algériens contre la France pourrait s’explique par d’autres raisons que la seule arrivée de cette opposante anti islamiste en France.

Quatrième acte : l’embrasement diplomatique

La récente visite du chef d’état-major, le général Said Chengriha à Paris n’a pas aplani les contentieux entre Paris et Alger

Sur le plan diplomatique, l’affaire est prise en effet très au sérieux puisque l’ambassadeur d’Algérie à Paris est convoqué pour consultation à Alger. Si le différent né à Tunis prend une telle ampleur, c’est que la relation entre Paris et Alger n’était pas au beau fixe. La récente visite du chef d’état-major, le général Said Chengriha à Paris, la première d’un patron de l’armée depuis une vingtaine d’années s’est relativement mal passée.

Le Président français, Emmanuel Macron, qui privilégie depuis toujours un axe fort entre la France et l’Algérie, y compris au détriment du Maroc, a toujours soigné ses relations avec le président Tebboune qui doit venir en visite officielle à Paris ce printemps. Mais la Présidence française sait bien que le pouvoir réel en Algérie appartient d’abord à l’institution militaire. Tout a été fait, du coté français,  pour recevoir avec les honneurs le général Chengriha. Emmanuel Macron lui même l’a reçu à l’Élysée, sans autoriser, pour autant la moindre caméra ou photo. Ce qui fut fort mal vécu, dit-on, par le patron de l’armée algérienne.

Il y a plus grave sur le fond des dossiers. Les conditions d’une coopération au Sahel voulue par Paris  butte sur les conditions clairement redites par le général Chengriha. Les militaires algériens ne reviendront pas sur leur alliance privilégiée avec la Russie, même s’ils ont accepté, cet automne, d’annuler des manoeuvres militaires communes avec l’armée de Poutine. Deuxième ultimatum, les services algériens exigent que Paris livre certains opposants de la diaspora qui, via les réseaux sociaux, animent un foyer très actif d’opposition au régime.  Une liste a été proposée par les services algériens. Après tout, à l’époque de la lune de miel entre Alger et Madrid, les Espagnols avaient accepté d’extrader deux militaires et lanceurs d’alerte Mohammed Abdellah et Mohammed Benazzouz Benhalima

Seulement voila, le coeur de l’État français refuse, contrairement à l’Espagne, de franchir certaines lignes rouges. Ce n’est pas un hasard si les barbouzes français, mis en cause dans les communiqués algériens, ont facilité la fuite de  l’opposante algérienne de Tunis à Lyon.

Le régime algérien, de l’autoritarisme à la dictature

.https://mondafrique.com/le-regime-algerien-de-lautoritarisme-a-la-dictature/ 

 

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5 Commentaires

  1. Je ne vois rien d’autre que la recomposition du couple France-Arabie. Le couple est de type bruyant, mais en dernier ressort très soudé. Que cette dame se soit sauvée de la possible prison qui se prospectait, cela est naturel, par contre si les services de faffache l’auraient aidée, cela pose des questions. La première est pourquoi donc le prêtre Kabyle expulsé depuis la Tunisie vers l’Algérie n’avait pas été aidé ? La deuxième est à lier à la capacité de sortir du pays, la question est : il y a des opposants qui meurent même en exile, Mecili en est un exemple, et d’autres qui peuvent transcender les « murs en béton », d’où la question suivante, serait-il vrai que chaque groupement de « militaire aurait sa logistique »?!
    En attendant, je dirais que les opposants Kabyles en France devraient s’en aller ailleurs, parce que le compromis entre alger et paris sera toujours facturé à la kabylie.

  2. James c’est un petit peu plus compliqué que ca. Les luttes de clans en Algerie le père de cette femme est militaire elle meme a prit parti pour un clan en l’occurrence celui de LAMARI. Vous croyez sérieusement a ce que vous racontez.

  3. Docteur Amira Bouraoui est la personne algérienne la plus plus patriotique qui aime son pays. En effet, on apprend qu’elle avait acquis la nationalité française par mariage depuis 2007 et qu’elle a choisit de vivre et d’élever ses enfants en Algérie alors qu’elle aurait pu vivre à Paris et travailler dans les plus grands CHU parisiens… Chapeau Docteur !

  4. Ahurissant !
    Même ben laden n’aurait pas fait tout ce tapage si l’une de ses femmes avait fui à la capitale Islamabad demander refuge á l’ambassade de France.
    C’est une mére Française, par mariage mixte, qui voulait voir son fils Français vivant á Paris, et ce á partir d’un autre pays.

  5. Ceci augure-il une nouvelle guerre civile en Algérie avec ses longues « listes du GIA » et des attentats en France? La paix est-elle impossible entre l’Algérie et la France qui ont tout pour réussir une entente?

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