Le 5 octobre, s’est ouvert le procès pour « incitation à la haine raciale » et « appel au meurtre » de Naima Salhi, présidente islamiste du petit Parti de l’équité et de la proclamation( PEP) qui, depuis le début du Hirak et pour le compte de l’ancien patron de l’armée algérienne, Gaïd Salah, décédé fin 2019, livrait une guerre idéologique contre les kabyles francophones, assimilés aux « zouaves », ce contingent militaire de l’armée coloniale.
En réponse au Hirak qui, depuis 2019, revendique « un État civil et démocratique » sur la base du congrès réformiste et démocratique de la Soummam du mois d’aout 1956, le pouvoir algérien, sous l’égide du général Gaïd Salah, véritable patron du pays après le départ de l’ex Président Bouteflika, avait inventé le slogan de la « Badissia Novembaria ». « Badissia » est une référence à Ben Badis, le fondateur en 1931 du mouvement progressiste des Oulemas (ou docteurs de la loi); « Novembaria » renvoie aux fondateurs du FLN, le1er novembre 1954,.
À travers cette trouvaille conceptuelle aux relents xénophobes, les élites militaires tentaient alors de combattre la contestation, plus de soixante ans après l’Indépendance, en tentant une improbable alliance entre l’idéologie réformiste des Oulémas et l’approche militaire des fondateurs du parti unique. Le message, le voici: les militaires dominent le pouvoir algérien, certes, mais au nom de l’Islam
Ce slogan de « Badissia Novembaria », porté au pinacle par l’équipe de Gaid Salah, étaient repris relais par des médias aux ordres du régime et par les réseaux sociaux. Tous désignaient la Kabylie, à l’avant garde du Hirak, comme la source de tous les problèmes que traversait le pays. Au nom, on l’aura compris, d’une idéologie à la fois nationaliste, islamiste et étatique. Or cette page là est tournée, le slogan « Badissia Novembaria » n’est plus d’actualité.
Changement de cap
Le pouvoir actuel préfère verrouiller la contestation par la seule répression, loin des approches idéologiques, en qualifiant les contestataires de sécessionnistes et de partisans du MAK, le Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie. On en revient aux idées simples des années noires où l’ennemi est le terrorisme, et rien d’autre, incarné par les indépendantistes du MAK et les islamistes, loin des controverses idéologiques qui divisent la société algérienne entre kabyles et non kabyles ou entre arabophones et francophones. Il ne faut pas oublier que les hauts cadres de l’ex DRS (services secrets) qui derrière le général Toufik ont dirigé l’Algérie depuis 1990 et jusqu’en 2015, sont souvent des francophones et des kabyles
Le système procède toujours au sacrifice de ses éléments positionnés à la périphérie du pouvoir, le plus souvent les plus visibles tout en préservant certains acteurs en vue de les recycler. Certes, plus de 28 vidéos témoignent de la virulence des attaques de Naima Salhi. Mais, elle n’était pas la seule à mener cette croisade aux limites de la xénophobie
Nourdinne Khettal, Oussama Ouahid, Lakhdar Benkoula, et le colonel Ali qui ont été les principaux protagonistes de cette doctrine n’ont jamais été inquiétés ni poursuivis. Les deux premiers sont recyclés dans le journalisme, le troisième est redevenu ce qu’il était, un bouquiniste à Besançon, en France. Quant au dernier, lui aussi vit France.
mais ne s’exprimu plusD’autres hommes politiques, qui ont déversé leur fiel sur les kabyles sur les plateaux de télévision, n’ont pas été non plus inquiétés.
La Kabylie, l’épine dans le pied
La région a toujours été à l’avant-garde des revendications démocratiques comme elle a toujours fait les frais des luttes intestines au sein du pouvoir politico-militaire. Des maquis FFS de 1963 juste après l’indépendance, au printemps berbère du 20 avril 1980 et à l’assassinat du chanteur Mâatoub.
Le procès de la choriste de la « badisia novembaria », Naima Salhi, n’est qu’une trompe l’œil visant à afficher une réforme à travers l’application de la loi relative à la lutte contre la « discrimination » et « le discours de la haine » adoptée en avril 2020 promise par le président Tebboune.
La population Kabyle n’est pas pour autant ménagée, elle, est toujours dans le viseur des services de sécurité. La région est quadrillée par un dispositif sécuritaire visible pour tous. Comment une région qui a offert plus de 11 colonels à la guerre de libération soit ainsi stigmatisée et surveillée ? Le colloque intitulé « zéro kabyle » tenu en août 2019 dans les hauteurs de Mostaganem, et sous la protection des gendarmes, reste dans les mémoires. Les éléments épargnés, cités plus haut, peuvent être réactivés à tout instant pour reprendre le flambeau de leur guerre contre « un État civil et démocratique ».
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Mehri, l’ex secrétaire du Baath FLN avait bien synthètisé la farce atuelle dans un lapsus révélateur, avait déclaré ceci: » c’est De Gaulle qui nous a imposé l’arabisation ». Ce qui fit le lit à l’islamisme, unique sous jacent culturel de cet arabilamisme, l’empire islamique de Napoléon, qui lui même n y croyait pas, mais les adèptes, comme toujours assument comme identité le choix des meneurs, suiveurs finisent dans le piège, une règle de l’histoire.
Paradoxalement, dans l’Hexagone les « patriotes » qui veulent s’en défaire de l’islamisme devraient en vouloir à Napoléon et De Gaulle.
Morale, le boomerang revient toujours à la case départ.
Les militaires ont détruit l’Algérie que la France leur avait légué clé en main. La Kabylie est la dernière citadelle à abattre pour la junte militaire algérienne, héritière de la colonisation. Et ce, pour asseoir définitivement son pouvoir sur ce pays riche et immense. Tout ceci avec la bénédiction d’Allah le grand. D’une main la kalachnikov et de l’autre le Coran. Deux terribles armes.