La CEMAC, à bout de souffle

Créée en 1994 et instituant une union monétaire entre six pays membres qui partagent le franc CFA, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) a du plomb dans l’aile. 

Le 30 juillet dernier, le sommet de la CEMAC qui s’est tenu en Guinée équatoriale, sous la houlette du chef de l’Etat Teodoro Obiang qui préside l’organisation a mis en lumière les nombreuses déficiences dont souffre l’organisation depuis plusieurs années.

Plusieurs facteurs concourent à la perte d’influence de l’organisation. La chute du prix du baril de pétrole a d’abord cassé la croissance moyenne des États pétroliers membres de l’institution. De près de 5 % en 2014, elle chute à 1,5 % en 2016. Les budgets nationaux sont également profondément affectés par les dépenses liées aux élections présidentielles où les billets de banque aiguillonnent les bulletins de vote. L’ effort de guerre contre Boko Haram et les mouvements rebelles contribuent également aux coupes sombres des dépenses sociales et à la cure d’austérité des services publics.

Dysfonctionnements

La CEMAC est par ailleurs la victime collatérale des luttes intestines que se livrent entre eux ses Etats membres. Alors que le chef de l’Etat tchadien, Idriss Déby, président en exercice de l’Union africaine, se fait une fierté du lancement du passeport africain, il ferme sa frontière avec la Centrafrique. La libre circulation des personnes, inscrite dans le traité constitutif de la CEMAC, n’est par ailleurs pas en vigueur en Guinée Équatoriale et au Gabon où le visa est exigé. Les échanges commerciaux sont toujours aussi problématiques et la création d’une compagnie aérienne commune, « Air CEMAC », est à l’étude depuis des années. Enfin, l’accord de partenariat économique avec l’Union européenne est en panne depuis une décennie alors que le Cameroun a pris la liberté de le signer tout seul.

Les importants dysfonctionnements financiers tels que les scandales des placements Madoff de la Banque de Developpement des États d’Afrique Centrale (BEAC) ou la gestion calamiteuse du Camerounais Antoine Ntsimi à la présidence de la Commission de la CEMAC, sont immédiatement étouffés par le turn over des nominations qui bénéficie aux protégés des chefs de l’État. Les présidences tournantes favorisent l’impunité tandis que la France pratique la politique de l’autruche.

Le dernier Sommet de Malabo, avec son lot de nominations, a permis d’actualiser ce jeu. Il a aussi fourni l’occasion à Teodoro Obiang, en poste depuis 1979, de faire part de son courroux à Idriss Déby pour l’échec de son candidat à la présidence de la Commision de l’Union africaine. De même, si le président guinéen a adressé ses félicitations au nouveau président centrafricain Faustin-Archange Touadera pour son élection sans bavures et plaidé pour une aide accrue à son pays, il lui a aussi enjoint de ne pas engager de poursuites contre l’ex présidente de la transition Catherine Samba-Panza décriée pour sa mauvaise gouvernance. Il est vrai que sa fille, Christelle Sappot, ambassadrice de Centrafrique à Malabo, est proche du pouvoir Equato-Guinéen.