C’est peu de dire que la Tunisie n’aura pas été une priorité dans l’agenda international surchargé qui est celui d’Emmanuel Macron.
Ce n’est guère un mystère. Le chef d’état français n’avait pas de tendresse particulière pour le président tunisien, Beji Caïd Essebsi, « ce vieillard de 92 ans », disait-il en privé. Entre le jeune président français qui prétend dessiner la carte du monde au pas de charge et le vieux routier de la politique tunisienne, qui, entre deux séances de dialyse, gèrait son pays comme une épicerie familiale, l’entente paraissait impossible.
Le prisme libyen
C’est le destin de la Tunisie de passer toujours après l’Algérie et le Maroc. Certes, durant la parenthèse du printemps arabe, le modèle tunisien fut au coeur de l’actualité internationale et les gouvernements de Nicolas Sarkozy firent un effort notoire, 350 millions d’euros de dons et de prêts, pour aider la jeune démocratie tunisienne. Mais l’euphorie est retombée et les dirigeants tunisiens ont le sentiment d’être négligés à nouveau, alors qu’ils paient aujourd’hui la lourde facture économique et sécuritaire d’une transition semée d’embuches. La Tunisie a plus besoin que jamais de l’aide de leurs amis français et la France semble lointaine.
Quand aujourd’hui les occidentaux regardent vers la Tunisie, c’est pour tenter de gérer, au mieux, le brulant dossier libyen. La proximité historique entre la Tunisie et la Libye, la présence sur le sol tunisien de nombreux réfugiés libyens, dont des intermédiaires influents, la complémentarité économique entre les deux pays expliquent que Tunis soit incontournable pour toute tentative de médiation à Tripoli. Ce n’est pas un hasard si ces derniers mois, les services français ont trouvé en Tunisie des relais utiles pour faire avancer l’offre de médiation qu’Emmanuel Macron tente entre les protagonistes de la crise libyenne, notamment pour rapprocher les forces islamistes de la région de Misrata et l’entourage du général Haftar. Sans marges de manoeuvre budgétaires et privé de toute affinité particulière pour le pays du jasmin, Emmanuel Macron est condamné à distribuer quelque bonnes paroles à une Tunisie hantée par le spectre de l’ancien dictateur, le présidentBen Ali. Ces quelques bonnes paroles pèsent peu face aux immenses difficultés que rencontre l’actuelle transition démocratique
Poivre d’Arvor, une erreur de casting
Ce n’est pas l’ambassadeur, un diplomate dénué de toute culture politique qui va plaider utilement la cause de la Tunisie. Nommé à Tunis par François Hollande à la demande de sa compagne, l’actrice Julie Gayet, le diplomate est surtout connu à Tunis pour les fêtes nombreuses qu’il donne dans sa résidence de Lamarsa au mépris parfois des règles de sécurité. Ses innombrables apparitions sur les réseaux sociaux et ses projets matrimoniaux vite abandonnés sont jugées totalement déplacées dans une Tunisie livrée aux incertitudes politiques et économiques.
Ce diplomate très « people » devenu la star de Facebook n’a pas que des amis en Tunisie où beaucoup de dirigeants politiques ont été heurtés par ses apparitions incessantes. La bonne société tunisienne, sous ses apparences hospitalières, reste très à cheval sur les codes et usages de la culture citadine.
En dehors de sa vie mondaine, Olivier Poivre d’Arvor s’est fait connaitre par des positions fermes sur les migrations et par un soutien massif et public au chef de gouvernement, Youssef Chahed. C’est peu.
Au quai d’Orsay, la cote de l’ambassadeur est au plus bas. Pourtant le soutien de l’Elysée, qui pourtant n’a pas hésité à changer de nombreux titulaires de postes diplomatiques, lui est resté acquis pour des raisons mal indentifiées