Face à la pandémie du coronavirus, les trois pays du Magreb (Tunisie, Algérie, Maroc) se rapprochent peu à peu du confinement total. Mais sans jamais utiliser ce terme. Emmanuel Macron aurait-il fait école?
Chacun des trois régimes maghrébins rivalise d’ingéniosité pour ne pas utiliser le terme de « confinement » et lui trouver un homonyme.
Ains le Maroc qui compte ce vendredi 20 mars, 74 cas positifs et 3 décès enregistrés. a décidé le 19 mars 2020 de passer au palier supérieur en limitant les déplacements dans les lieux et places publics, désormais conditionnés par la nécessité absolue d’aller faire des courses ou de se soigner ou de rejoindre le travail. Le Royaume chérifien en a appelé aux autorités locales et aux forces publiques, Sûreté Nationale et Gendarmerie Royale, pour f aire respecter ces mesures. Et bien ce Maroc parle de “l’isolement sanitaire”.
La lutte contre la pandémie
En Tunisie, le président de la République qui a décrété un couvre-feu sur tout le territoire avant d’opter graduellement pour un confinement généralisé n’utilise jamais le terme honni, trop associé aux désastres que subissent les pays de l’autre rive méditerranéenne, l’Italie, la France et l’Espagne. La Tunisie officielle préfère la formule générique “Lutte contre la pandémie“. En ce vendredi 20 mars la Tunisie enregistre son premier décès dû au nouveau coronavirus. Il s’agit d’une septuagénaire de la région de Sousse, rentrée lundi d’un voyage à l’étranger. Le pays comptait officiellement jeudi soir 39 personnes infectées.
Entre la Tunisie et le Maroc, l’Algérie qui a considérablement limité les possibilités de transports à l’intérieur comme à l’extérieur du pays appelle les gens à rester chez eux pour « Lutter le coronavirus ». Selon le dernier bilan du ministère de la Santé, publié ce vendredi 20 mars, le nombre de cas confirmés de Coronavirus en Algérie est de 90 personnes, avec 10 décès et 32 patients guéris.
Le virus plus fort que le Hirak
Par ailleurs, pour la première fois depuis le 22 février, Alger et les autres villes du pays n’ont pas vibrés aux cris des manifestants du Hirak, le mouvement populaire appelant au changement du système. Ce vendredi 20 mars, les rues étaient calmes et silencieuses.
Aujourd’hui à Tunis, Alger ou Rabat, les mosquées sont vides, et l’appel à la prière du muezzin se termine désormais par un appel à faire la prière dans les maisons.
Si le mot « confinement » est banni c’est pour éloigner le malheur qui lui est associé. Désormais les touristes européens et les maghrébins de la diaspora ne sont pas bien vus, c’est le moins que l’on puisse dire. Ils sont accusés d’avoir ramené avec eux le virus.
Les Français mal venus
Le témoignage de Christophe, 23 ans, marseillais ayant décidé de voyager 3 mois au Maroc en attendant de retrouver son job saisonnier de plagiste, est édifiant. Quand il arrive le 15 janvier tout va pour le mieux, il est reçu comme un prince, en tant que touriste et jeune français soucieux d’apprendre les cultures marocaines.
Au fur et à mesure que les mauvais nouvelles arrivaient des hôpitaux italiens et français, le comportement a changé: « Il y a deux semaines, plus personne ne voulait s’assoir avec moi dans les cafés. Et la semaine dernière à Rabat, les voisins m’insulter quand je disais bonjour, sans doute pour que je quitte au plus vite l’appartement que j’avais loué ».
Pour l’anecdote Christophe est toujours au Maroc, d’abord parce que n’ayant pas la possibilité de payer 1000 euros à Air France pour changer la date de son retour prévu le 14 avril, ensuite maintenant pvrcequ’il n’y a plus de vols.
La bonne nouvelle c’est que le jeune marseillais a trouvé un point de chute à Essaouira pour se confiner. Dans la maison d’un ami peintre français… bloqué, lui, en France, à cause de la suspension des vols dus à la pandémie !
Il faut rappeler et saluer au passage l’attitude des marocains résidents en Italie qui ont lancé, via les réseaux sociaux, un appel pour que les touristes italiens bloqués au Maroc puisse être hébergés dans leurs maisons marocaines
Algérie, les immigrés montrés du doigt
Contrairement au Maroc et à la Tunisie, l’Algérie n’est pas un pays touristique. Du coup ce sont les bi-nationaux ou les familles des immigrés qui sont pointés du doigt par les locaux. Situation qui fait dire à Saïd, restaurateur à Paris qui a préféré retrouver sa mère malade dans son village Kabyle et se confiner avec elle, que « Les Algériens sont en ce moment racistes envers les immigrés un peu comme les français l’ont été un temps avec les chinois au début de la crise du Coronavirus. Ca leur passera vite, hélas » .
Les autorités officielles se gardent bien d’afficher un quelconque ostracisme envers les Algériens de la diaspora, l’heure est à la solidarité et au rapatriement des algériens qui veulent revenir au pays. Mais comme pour rassurer l’opinion publique, les mises en quarantaines de ces personnes arrivant après moult mésaventures sont soigneusement médiatisées. Les centres de mise en quarantaine sont des hôtels étatiques réquisitionnés pour isoler les suspects venus de là-bas.
Les beaux restes de la gestion étatique en Algérie aura permit au moins d’ouvrir rapidement des chambres de confinement et d’observation dans des hôtels menacés de fermeture : Matares (à Tipaza), Renaissance et Zianides (à Tlemcen), Hocine et Al Khayem ( à Constantine), AZ, Al-Mountazah et Al-Mansour Palace ( à Mostaganem) et Oasis (à Alger).