Consulter le rapport d’Amnesty International sur la Mauritanie
L’esclavage a officiellement été aboli en 1981 en Mauritanie, mais jusqu’à 43.000 personnes y étaient encore réduites en esclavage en 2016, soit environ 1% de la population totale, selon le rapport citant des estimations d’organisations antiesclavagistes internationales.
Malgré des progrès juridiques, notamment l’adoption en août 2015 d’une nouvelle loi faisant de l’esclavage un « crime contre l’humanité », réprimé par des peines allant jusqu’à 20 ans de prison, contre cinq à dix ans auparavant, la situation n’a pas avancé dans les faits, selon Amnesty.
« Les lois n’ont pas été mises en oeuvre ni appliquées de manière adéquate », a déploré Alioune Tine, directeur de l’ONG pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale lors d’une conférence de presse de présentation du rapport, estimant qu’elles n’avaient eu « aucune incidence sur la vie des gens ».
Selon François Patuel, chercheur à Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest, « les autorités sont dans le déni et s’en prennent à ceux qui vont contre le discours officiel ».
Une autre ONG de défense des droits de l’Homme, Human Rights Watch, avait également constaté, dans un rapport publié en février, que les défenseurs des droits de l’Homme faisaient face à des « mesures répressives lorsqu’ils soulèvent les questions sociales les plus sensibles du pays », dont la « discrimination ethnique et de caste » et « l’esclavage ».
Selon Amnesty, depuis la réélection du président Mohamed Ould Abdel Aziz en juin 2014 et à un an de la prochaine présidentielle, les militants qui dénoncent la discrimination et l’esclavage s’exposent à « tout un arsenal de mesures répressives ».
D’après les informations de l’ONG, « plus de 168 défenseurs des droits humains » ont été arrêtés arbitrairement et « 17 d’entre eux au moins » ont été torturés ou soumis à d’autres mauvais traitements ces cinq dernières années.
« Ils m’ont attaché les mains et bandé les yeux. Je ne voyais pas où ils m’emmenaient. Quand nous sommes arrivés, un officier a dit : +Bienvenue à Guantanamo+ Avant l’interrogatoire, un garde m’a dit: +Dis-leur ce qu’ils veulent entendre. Tu sais que nous avons les moyens de te faire parler+ », a raconté Amadou Tijane Diop, un militant antiesclavagiste arrêté en 2016, cité dans le rapport.
Amnesty International reproche également au pouvoir d’avoir interdit ou dispersé de nombreuses manifestations pacifiques, souvent avec un usage excessif de la force.
« Les autorités doivent cesser cette attaque contre les défenseurs des droits humains et prendre des mesures concrètes et efficaces pour mettre fin à l’esclavage et à la discrimination », insiste Amnesty, qui réclame la libération de tous les militants emprisonnés.
La video :