La marine sénégalaise a annoncé samedi dernier avoir intercepté 202 migrants la veille, soit quelques jours seulement après le naufrage survenu, début juillet, au large de la Mauritanie voisine qui a causé la mort de quatre-vingt-dix personnes.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Une tragédie qui n’est pas près de s’arrêter. Samedi 20 juillet, la marine sénégalaise a annoncé avoir intercepté une embarcation qui transportait 202 personnes le vendredi 19, dont cinq femmes et un mineur. L’opération s’est déroulée dans la localité de Lompoul, connue pour être une zone de pêche dans le nord du Sénégal. Les 202 occupants ont été remis à la Direction de l’information et des Relations publiques des Armées (Dirpa), le même jour.
Cette nouvelle interception d’un bateau chargé d’immigrés survient quelques semaines après le drame migratoire de début juillet qui s’est localisé au large de la Mauritanie. Près de 90 candidats à l’immigration avaient péri dans la mer lorsque leur navire a chaviré. L’embarcation était partie de la Gambie vers le Sénégal avec 170 passagers à bord, a affirmé l’agence de presse officielle de la Mauritanie citant des survivants.
Après ce drame, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko avait appelé les jeunes à cesser de lier leur destin à l’Europe. « Je lance encore un appel à la jeunesse : votre solution ne se trouve pas dans les pirogues », avait-il dit alors qu’il se trouvait à Saint-Louis, dans le Nord du pays, devant des centaines de jeunes. « L’avenir du monde est en Afrique, et vous devez en être conscients, vous les jeunes. Le seul continent qui a encore une marge de progression et de croissance importante, c’est l’Afrique », avait-il ajouté.
5 000 morts depuis début 2024
Mais la jeunesse africaine ne croit plus ses élites puisque la plupart n’hésitent pas à prendre la route de l’Atlantique dans l’espoir de sortir de la pauvreté. Début juin, la marine sénégalaise avait également intercepté 200 personnes en mer en une journée. Tandis que pour le seul mois de mai, ce chiffre a atteint 500 migrants.
Cette route de l’Atlantique vers les Canaries est pourtant dangereuse à cause des courants très forts et parce que les migrants flottent avec des bateaux tantôt surchargés, tantôt en mauvais état ou manquant d’eau potable. Les passeurs clandestins s’aventurent sur cette voie en raison du renforcement de la surveillance en Méditerranée. Plus de 5.000 personnes sont déjà mortes depuis 5 mois en tentant de rejoindre l’Espagne par la mer, soit 33 morts par jour, a indiqué une ONG espagnole du nom de Caminando Fronteras.
Les candidats s’élancent des côtes sénégalaises, mauritaniennes ou gambiennes et embarquent sur des pirogues ou autres embarcations précaires, complètement inadaptées à des traversées aussi dangereuses. Car il faut 5 jours de navigation pour parcourir les 1.500 kilomètres qui séparent les côtes sénégalaises des Canaries, le plus souvent dans des conditions décrites par des survivants comme terribles. Les migrants sont en effet laissés à la merci de la faim et la soif, du soleil, et de toutes sortes d’avaries.
En 2023, le nombre de migrants ayant débarqué aux Canaries a plus que doublé en un an pour atteindre le chiffre record de 39.910, selon les estimations du gouvernement espagnol. D’ailleurs, depuis le 1er janvier 2024, un peu plus de 19.000 personnes sont arrivées dans l’archipel, un chiffre en hausse de 167% par rapport à l’année dernière sur la même période.
Pour décourager ces départs, la Marine sénégalaise multiplie les interceptions de pirogues au large de ses côtes. Cette semaine, une pirogue transportant 74 candidats à l’émigration a été interceptée. Parmi ses passagers, il y avait 20 enfants. Mais sur l’ensemble du mois de juin, ce sont un peu plus de 470 personnes qui ont été interceptées par les patrouilleurs de la marine sénégalaise au terme de quatre opérations.