Les familles des deux otages français tués il y a neuf ans au Niger sont venus, mardi 7 janvier, honorer leurs fils à Niamey, sans que les autorités française n’apportent de réponses à leurs légitimes questions
Pèlerinage, hommage, quête. Il y avait de tout ça dans le voyage au Niger des parents des deux jeunes Français tués le 8 janvier 2011 près de la frontière malienne, Vincent Delory et Antoine de Léocour, 25 ans tous les deux.
A l’occasion du 9e anniversaire de leur enlèvement, mardi, l’ambassadeur de France au Niger Alexandre Garcia a dévoilé une plaque commémorative et remis aux familles la médaille de victimes du terrorisme, dans le cadre d’une cérémonie privée. Le consul de France qui avait réceptionné les corps des deux hommes il y a neuf ans était présent. Ainsi que l’avocat de la famille Delory et le directeur général de l’Association française des victimes du terrorisme, Guillaume Denoix de Saint-Marc.
Des questions sans réponse taraudent toujours les deux familles : qui a donné l’ordre d’intervention contre les preneurs d’otage? Pourquoi, alors que la France négociait au même moment contre de l’argent la libération des otages d’Areva ? Et surtout, si cette décision n’avait pas été prise, est-ce qu’Antoine et Vincent seraient toujours vivants ?
Des autorités françaises absentes
Vincent Delory venait d’arriver à Niamey par le vol régulier d’Air France, pour le mariage d’ Antoine de Leocour, lorsqu’il a été enlevé le soir même avec son ami d’enfance, dans le centre ville de la capitale du Niger, par des hommes de main de Moktar Bel Moktar. Pris en chasse par l’armée nigérienne sur le chemin du Mali, les terroristes ont été rattrapés au matin par des hélicoptères français. L’assaut a coûté la vie aux deux otages français, à trois gendarmes nigériens et à quatre terroristes.
Depuis lors, les familles ont demandé la levée du secret défense, ce qui a été partiellement accordé, pour comprendre exactement pourquoi leurs enfants étaient morts. L’implication de l’armée française dans le dénouement tragique de la prise d’otage a créé une tension particulière autour de leur dossier, qui s’est traduite par une certaine gêne. « Dans toutes les commémorations, les attentats où il y a eu beaucoup de victimes, tous les ans on en parle à la télé, il y a des commémorations officielles. Mais nous, on se réunit chaque année au cimetière, entre nous. Il n’y a jamais un membre du gouvernement, jamais un officiel », explique Jacqueline Delory, la maman de Vincent. « Quand on pose des questions, c’est secret défense, et dans ce qu’on nous dit, il y a beaucoup de mensonges.».
Toutes les nuits depuis neuf ans
C’est pourquoi la cérémonie de mardi a été la bienvenue. « Ca nous a fait du bien, on a été bien accueillis, bien orientés. On va rentrer en France avec quelques réponses.» Pour les Delory, c’était le premier voyage au Niger : « je devais aller voir là où mon fils était passé du paradis à l’enfer », déclare Jacqueline..
Son mari Gilles, qui revoit en pensée l’enlèvement de son fils toutes les nuits depuis neuf ans, a été heureux de rencontrer des personnes qui étaient à sa table le soir de l’enlèvement, qui ont pu lui raconter. « On a pu discuter avec eux, on s’est fait une idée. Ca nous a permis d’avancer un peu. »
La sœur aînée d’Antoine de Léocour, Anne-Sophie, n’était jamais venue non plus au Niger. Son frère y avait vécu et préparait son mariage avec une jeune fille nigérienne. « Ca nous apaise d’avoir des réponses, de rencontrer des gens qui nous écoutent, de pouvoir relancer un peu le dossier.»