Moyeké Mint Abdallahi – épouse de Mohamed Zein El Abidine Cheikh Ahmed, le patron des patrons- a été auditionnée par la brigade de répression des crimes économiques et financiers ce mercredi 25 août, cela dans le cadre de l’enquête judiciaire sur les crimes économiques et financiers perpétrés sous le règne de Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de l’Etat mauritanien de 2008 à 2019.
Zeïne El abidine Ould Ahmed Mahmoud débuta sa brillante carrière au début des années 90 comme gérant de la « Buvette » de Radio Mauritanie. Dans la foulée, ce Rastignac créait le « Centre de Société Informatique » (CDI), spécialisé dans la commercialisation des produits bureautiques (ordinateurs, imprimantes, scanners). Son produit phare aura été la vente de cartouches à encre pour photocopieurs, dont la plupart recyclées. Ce qui lui permet de mettre un pied dans les portes des ministères et autres organismes publics et de se faire connaitre.
La meilleure prise de l’ancien gérant de buvette aura été Yahya Hademine. Cadre de la SNIM, la puissante société étatique qui gère la richesse en fer du pays, ce dernier sera nommé successivement ministre de l’Equipement, puis Premier Ministre. Cette réussite foudroyante, il la doit à un vrai savoir faire. Lorsqu’il gérait la société ATTM, la filiale transport de la SNIM, il faisait appel systématiquement aux discrètes sociétés de transitaires que le président Aziz possède en sous main et qui arrondissent depuis toujours ses fins de mois. »Yahya Hademine était autant un agent de renseignement du pouvoir qu’un cadre supérieur », explique un ancien collègue de la SNIM.
Avec le parrainage d’un connaisseur comme le Premier ministre, Zeîne Abidine était à bonne école, immédiatement pistonné auprès de plusieurs administrations nationales. Notre ami Zeine Abidine devient un des principaux fournisseurs de l’Agence chargée du projet de mise en place de l’Etat Civil (Fournitures, gestion et exploitation du dispositif…). Les professionnels du secteur protestent, les fournisseurs agréés également, mais la caravane de l’ami Zeine Abidine continue à progresser..
Des appétits sans limites
Zeïne Abidine, avait bénéficié également des largesses de certaines sociétés minières étrangères, dont Kinros. C’est lui qui fournit du matériel informatique au site minier de Door.
Après les mines, les grands chantiers. Afin de parachever ses ambitions, ce boulimique crée l’entreprise BIS-TP de Génie Civil et de Travaux Publics. Peu importe que Zeine Abidine n’aie aucune référence dans le secteur. Son entreprise qui n’est même pas affiliée à l’Organisation Patronale, rafle tous les marchés, avec la bénédiction des commissions techniques et les complicités des Départements de tutelle: adduction d’eau potable, route Kiffa-Kankossa, construction des nouveaux batiments de l’Université de Nouakchott, grand Marché de Nouakchott; et tout dernièrement, la construction du nouveau palais du Congrès, pour la coquette somme de plus de 14 milliards d’Ouguiyas mauritaniens. Que l’actuel palais du Congrès reste vide tout le long de l’année, importe peu.
Quand le bâtiment va, tout va….
Foudres présidentielles
Lors d’un Conseil des Ministres voici deux ans, l’ex Président Aziz lui même s’étonnait des accaparements extravagants des marchés attribués à BIS-TP. « Rien n’avance, les chantiers sont en panne, ce n’est pas possible », protestait le chef de l’Etat. Autant de passe droits en effet qui valaient à Aziz quelques salves bien ciblées des patrons mauritaniens dépossédés. L’ordre était donné que cette hégémonie s’arrête immédiatement. Le ministre de l’équipement bloquait un nouveau marché que le vorace Zeine Abidine s’apprêtait à rafler.
La réaction fut immédiate. Soutenu par son « parrain », le Premier Ministre, Zeïne Abidine sollicitait l’audience du Président Aziz. Les deux hommes trouvent rapidement un terrain d’accord, sur un principe simple: « Fifty-fifty ». On partage les profits dans les multiples marchés obtenus de gré à gré. Oubliés les engagements du président Aziz qui lors d’un discours à Nouadhibou, avait pourtant promis que le système de passation des marchés par entente directe n’aurait plus lieu.
Au palmarès de Zeine Abidine, on peut citer notamment une société spécialisée dans la production de Tuyaux, nécessaires à tout projet d’adduction d’Eau Potable, est créée.
Des soupçons de blanchiment
Plus récemment, l’ami Zeine Abidine pourrait bien servir de prête-nom au chef de l’Etat au sein de la Banque Mauritanienne d’Investissement (BMI) qui a reçu son agrément le 31 mars 2016 et dont il détient officiellement 40% du capital. Cette banque chargée des basses oeuvres de l’Etat est parvenue à trouver des correspondants à l’étranger: la British Arabe Commercial Bank (BACB) à Londres et l’Union de Banques Arabes et Françaises à Paris.