Au Mali, des présumés combattants de la Katiba Macina, affiliée au Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (Gsim-Alqaïda), ont ciblé la famille du Chérif de Nioro, un des chefs religieux les plus respectés du Mali. Le 3 septembre 2025, à la mi-journée, 2 véhicules circulant sur l’axe Bema-Diongomané (cercle de Diéma), sont immobilisés et emportés par leurs ravisseurs. Les assaillants ont enlevé les hommes valides, environ une vingtaine, qui se trouvaient à bord des voitures puis abandonné, sur la route, le reste des passagers. Quelques femmes y figurent.
Un article de « Veille sahélienne », un site partenaire de Mondafrique
Les engins civils à 4 roues sont la propriété du chef soufi Mohamed Ould Hamahoullah, alias Cheikh Bouyé Haïdara, autrement appelé Chérif de Nioro, du nom de son fief près de la frontière avec la Mauritanie. La plupart des victimes de l’incident appartiennent à sa parentèle proche. Ils descendent de Cheikh Ahmedou Hamahoullah, le marabout doté de pouvoirs mystiques, que vénèrent, toujours, des générations de milliers de disciples, disséminés au sud du Sahara.
A cause d’un conflit sanglant entre tribus maures de l’actuel Est de la Mauritanie, au terme duquel l’administration coloniale exécute deux de ses fils en novembre 1941, les gouverneurs du Soudan français imputent au marabout l’instigation des troubles et l’exilent loin de son Sahel natal. Ainsi sera-t-il balloté du Sénégal, à l’Algérie, en passant par la Côte d’Ivoire, le Gabon…avant la résidence surveillée, à Montluçon, gros centre de rétention des insoumis de l’Empire. Il y périt, de causes controversées, en 1943.
La famille dont le prestige s’étend à toute l’Afrique de l’Ouest, compte de fervents adeptes, en particulier parmi les Soninkoh du Sahel. Certains attendent le retour messianique de leur guide, auréolé de baraka.
Son descendant et successeur, Cheikh Boyé Haïdara, prolonge le legs spirituel de la Tijania et soutient la laïcité de l’Etat au Mali. Ses rapports avec la junte demeurent empreints d’une prudente neutralité. Jusqu’ici, il refusait les offres de protection rapprochée, de la part de la Mauritanie et de son pays et refusait de se mettre à dos la mouvance jihadiste.
Tous les critères sociopolitiques du moment en font un dissident à l’insurrection islamiste mais une agression visant sa personne déclencherait le déchaînement d’une violence débridée où le Gsim, prétendant à l’exercice du pouvoir, n’aurait aucun intérêt. Les Maures, les Peulhs et les Touaregs du Mali se considèrent objet de persécutions spécifiques de la part des mercenaires russes de Wagner, devenu Africa Corps.
Cependant, l’évènement du jour laisse entrevoir la perspective d’un blocus autour de Nioro. Comme une manière d’en prendre acte, le Gouverneur de la région signait, le 28 août 2025, une décision interdisant, aux étrangers, la transhumance de bétail sur l’espace de son administration. La mesure relève, selon le communiqué joint, des “besoins d’opérations militaires”.