Le Tribunal spécial des Nations unies pour le Liban (TSL) a condamné jeudi deux membres présumés du Hezbollah à plusieurs peines d’emprisonnement à la perpétuité pour leur implication dans l’attentat qui a coûté la vie à l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri, le 14 février 2005. Hussein Oneissi et Hassan Habib Merhi avaient été condamnés en appel, en mars 2022, dans cette affaire.
« La Chambre d’appel a condamné à l’unanimité Hassan Merhi et Hussein Oneissi à l’emprisonnement à perpétuité, la peine la plus sévère prévue par le Statut et le Règlement, pour chacun des crimes dont ils ont été déclarés coupables et a ordonné que ces peines soient confondues », peut-on lire sur le compte Twitter du TSL, juste après l’énoncé des peines par la juge Ivana Hrdličková. La confusion de peines consiste, en présence de deux peines en concours et poursuivies séparément, à faire absorber la plus faible, par la plus forte, totalement ou partiellement, de sorte que les peines soient exécutées simultanément, dans la limite de la peine la plus forte.
Les deux hommes avaient « pleinement conscience que le projet d’attentat en plein cœur de Beyrouth tuerait Rafic Hariri » et d’autres personnes, a soulevé la juge Ivana Hrdlickova. Ils ont agi avec préméditation et se sont rendus coupables de crimes d’une « gravité extrême » et « particulièrement odieux » qui ont « plongé le peuple libanais dans un état de terreur », a-t-elle ajouté.
« Le temps de l’impunité est révolu »
Dans un tweet, Saad Hariri, fils de Rafic Hariri et également ancien Premier ministre libanais qui a suspendu cette année sa participation à la vie politique, a souligné que ces peines étaient « les plus claires pour condamner le Hezbollah comme étant responsable de l’organisation et de la mise en œuvre du crime ». Il a estimé que le parti chiite « ne peut pas échapper à sa responsabilité de livrer les condamnés afin que leurs peines soient appliquées ». Le frère aîné de Saad Hariri, l’homme d’affaires Baha’ Hariri, a également commenté ce dernier acte du TSL, renouvelant « sa confiance » envers le tribunal. « Nous nous rapprochons de la justice, ce qui doit nous pousser, nous Libanais, à plus de solidarité afin de préserver la souveraineté et la stabilité du pays, a-t-il ajouté dans un communiqué. Le temps de l’impunité est révolu ».
A l’issue du procès en première instance, le tribunal avait condamné Salim Ayache en 2020 mais avait estimé qu’il n’y avait pas assez de preuves pour condamner les autres accusés, Assad Sabra, Hussein Oneissi et Hassan Habib Merhi. L’accusation avait fait appel des acquittements des deux derniers. C’est dans le cadre de cet appel que Hussein Oneissi et Hassan Habib Merhi ont notamment été reconnus coupables de complot en vue de commettre un acte de terrorisme et de complicité d’homicide intentionnel. Le dossier montre un nombre important d’échanges avec différents téléphones portables utilisés par les condamnés dans les heures qui ont suivi l’assassinat de M. Hariri.
Entre 600 millions et 1 milliard de dollars
Les trois condamnés sont toujours en fuite, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah ayant refusé de les remettre au tribunal. Le TSL a averti qu’il fermerait ses portes sous peu en raison d’un manque de fonds. Un autre procès contre Salim Ayache pour une série d’attaques contre plusieurs hommes politiques a été annulé, faute de liquidités. Depuis son ouverture en 2009 après une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, le coût du TSL, chargé de juger les personnes accusées de l’attentat, est estimé entre 600 millions et 1 milliard de dollars.
Le prononcé de la peine contre MM. Oneissi et Merhi pourrait bien marquer le tomber de rideau pour la juridiction, qui siège près de La Haye, aux Pays-Bas. Menacé de disparition faute de financement, le TSL devrait fermer ses portes à l’issue de ce procès. Un autre procès contre Salim Ayache pour une série d’attaques contre plusieurs hommes politiques a été annulé, faute de liquidités.
Rafic Hariri, qui fut le Premier ministre libanais jusqu’à sa démission en octobre 2004, a été tué le 14 février 2005, lorsqu’un kamikaze a fait sauter une camionnette remplie d’explosifs au passage de son convoi blindé à Beyrouth, tuant 21 autres personnes et faisant 226 blessés. L’attaque a déclenché des manifestations qui ont entraîné le départ de la Syrie du Liban après un déploiement militaire de 29 ans. Après le départ de l’armée syrienne, le courant hostile à Damas, emmené par Saad Hariri, avait raflé les législatives de 2005 et de 2009.
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