Même si le président Michel Aoun a évoqué l’hypothèse d’une « action extérieure, avec un missile ou une bombe », la piste de défaillances locales dans l’explosion qui est survenue à Beyrouch reste privilégiée.
Les responsables des douanes et du port de Beyrouth font partie des premiers suspects. Parmi les 25 personnes faisant l’objet de poursuites, dont 19 sont déjà en détention préventive, figurent le directeur des douanes, Badri Daher, son prédécesseur, Chafic Merhi, et le directeur général du port de Beyrouth, Hassan Koraytem.
Il s’agira d’établir les conditions d’entrée de cette cargaison dangereuse sur le territoire libanais. Le service des douanes a-t-il délivré une autorisation en bonne et due forme ? Ou le nitrate d’ammonium a-t-il été introduit dans le port de Beyrouth en graissant quelques pattes ?
Le directeur des douanes Badri Daher, dont le service est sous la tutelle du ministère des Finances, a déclaré au quotidien L’Orient-Le Jour avoir alerté la justice « à six reprises, entre 2014 et jusqu’à récemment » sur la nécessité de réexporter cette cargaison dangereuse. Quant à la question de l’explosion en elle-même, Badri Daher pointe du doigt les autorités du port de Beyrouth en évoquant des « travaux de rénovation ».
De son côté, le directeur du port, Hassan Koraytem, dont l’infrastructure dépend du ministère des Travaux publics et des Transports, a déclaré sur la chaîne LBCI que le nitrate d’ammonium était stocké dans un hangar sous le contrôle d’un représentant de la justice.
Grand déballage.
Les enquêteurs devront donc démêler les fils des responsabilités dans des services relevant de trois ministères différents : Finances, Travaux publics et Transports, Justice. Les premières escarmouches entre les premiers suspects laissent planer la possibilité d’un grand déballage qui mettrait au jour les ravages de décennies de corruption au plus haut niveau.
Ces soupçons de corruption généralisée suscitent l’indignation des Libanais, qui ont appelé les bailleurs de fonds internationaux à ne surtout pas faire transiter l’aide humanitaire par le gouvernement libanais. En visite à Beyrouth la semaine dernière, le secrétaire d’État adjoint américain pour les Affaires politiques, David Hale, a quant à lui appelé à un « moment de vérité » dans lequel « toutes les personnes au pouvoir assument d’une façon ou d’une autre des responsabilités ».