Accusé de viols et de contrainte sexuelle, Tariq Ramadan a été acquitté en mai 2023. Le procureur et la partie plaignante ayant fait appel du jugement, le prédicateur fait face depuis lundi 27 mai à un nouveau procès à Genève. L’audience doit durer jusqu’au mercredi 29 mai 2024.
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La plaignante, surnommée “Brigitte“, âgée de 58 ans, mère de cinq ans, et Tariq Ramadan, 61 ans, le musulman le plus médiatisé dans le monde francophone, tiennent sur un point unique le même discours : leurs vies ont été détruites.
La première, pour avoir subi une nuit d’horreur, du 28 au 29 octobre 2008, dans une chambre d’hôtel de la cité de Calvin. « Il m’a violé, il m’a tapé, il m’a insulté. Son attitude est incompréhensible. On ne se connaissait pas. On n’était pas en conflit », lâche-telle en essuyant ses larmes.
« Depuis six ans [date de la plainte de “Brigitte“] ma vie a été détruite. Je suis un homme absolument innocent de tout ce qui m’est reproché, accusé de viol par une femme éconduite », dénonce de son côté Tariq Ramadan, l’ancien professeur à Oxford au Royaume-Uni.
Retraite anticipée
Atteint depuis 2014 d’une sclérose en plaque, Tariq Ramadan a été contraint de prendre une retraite anticipée. Au tribunal, il raconte que sa maladie s’est brutalement aggravée durant sa détention en 2018 à Paris, suite à d’autres plaintes pour viols. Depuis, le stress, provoqué par les procédures judiciaires, en Suisse comme en France, continue de détériorer sa santé, notamment sur le plan de la mémoire.
La première journée d’audience n’a pas porté sur ce qui se serait passé dans cette chambre d’hôtel à Genève, il y a plus de quinze ans. « J’ai rencontré mon mari en 2009 et la première chose que je lui ai dit, c’est ce que m’a fait Tariq Ramadan, déclare la plaignante en pleurant, j’ai subi l’horreur et mes enfants ont une vie détruite ». Au drame de cette nuit d’octobre 2008 s’ajoute les menaces, y compris de mort, qu’elle ne cesserait de subir depuis le dépôt de sa plainte en 2018. Elle ajoute qu’elle n’a jamais été protégée par la justice.
L’accusation de « complot »
Dans son livre Devoir de vérité, paru en 2019, Tariq Ramadan met gravement en cause son accusatrice. « Des individus l’auraient poussée à agir ainsi contre une importante rétribution, comme cela semble avoir aussi été le cas avec Mounia Rabbouj [une autre accusatrice française du prédicateur] », écrit-il en page 165. Face à cette accusation, Brigitte a déposé plainte pour calomnie contre Tariq Ramadan dès 2019. Une plainte toujours « suspendue » par le ministère public.
Lors du procès en première instance en 2023, le prédicateur affirmait qu’il était victime d’un « complot » sinon d’un « traquenard ». A présent, il parle de gros sous : « La question de pose : l’argent d’où vient-il ? Qui demande quoi ? Qui paye quoi ? », interroge-t-il.
Mardi, Tariq Ramadan sera confronté au chercheur Stéphane Lathion, spécialiste de l’intégration des musulmans en Suisse, et auteur de Islam et Musulmans en Europe. La transformation d’une présence. Ancien ami de l’accusé, il dénonce publiquement depuis quelques années les mensonges et les manipulations de l’ancien professeur de français dans un collège de Genève.