Faure Gnassimbé, le Président du Togo, a été reçu vendredi à Abidjan par son homologue ivoirien, Alassane Ouattara, pour tenter d’esquisser des solutions dans le bras de fer qui oppose les trois membres de l’Alliance des Etats du Sahel avec les organisations régionales. Le Togolais a été désigné comme médiateur auprès du Niger par la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Cette visite du président togolais en Cote d’ivoire semble dessiner une légère percée après plus de six mois de blocage total. Alassane Ouattara, qui fait partie des faucons de la CEDEAO, a remercié son homologue pour son travail de facilitation en vue de « nous aider à trouver une solution pour le Niger», et il a conclu son très bref propos en affirmant que «l’Afrique de l’Ouest est un bloc où les choses se sont toujours très bien passées jusqu’à présent. Et nous devons tout faire pour que ça continue.»
Faure Gnassimbé lui a succédé plus longuement au micro. Il a qualifié la discussion de «difficile, parce que les problèmes le sont.»«Notre région n’a jamais connu de telles épreuves. Le problème du terrorisme qui nous affecte tous car quand un pays est affecté, l’ensemble de la communauté est affectée. Et un problème qui dure», a-t-il dit.
Le terrorisme a fait son apparition dans la région au début des années 2000 et il a déstabilisé gravement le Mali à partir de 2012, puis ses voisins du Niger et du Burkina Faso. Ces trois pays ont décidé de s’organiser au sein de l’Alliance des Etats du Sahel, créée en septembre dernier pour affronter ensemble leurs problèmes communs, les groupes armés terroristes d’une part et les organisations régionales d’autre part. Ces dernières exigent le retour des trois pays dirigés par des juntes à l’ordre constitutionnel.
Le Niger subit depuis plus de six mois des sanctions inédites de l’organisation contre un de ses membres : fermeture totale des frontières et gel total de ses avoirs financiers à la banque centrale ouest-africaine et dans les banques commerciales de la région. La CEDEAO a même menacé le Niger d’une intervention militaire pour rétablir le Président Mohamed Bazoum dans son fauteuil.
La nécessité de réexaminer les sanctions
«Nous avons des Etats, un pays qui est sous sanction, d’autres qui sont suspendus et qui font encore face à des difficultés qu’ils connaissaient déjà. Donc nous sommes préoccupés, le Président Ouattara et moi-même, de la situation humanitaire dans les différents pays», a poursuivi Faure.
Alassane Ouattara et lui-même se sont «interrogés sur la nécessité, peut-être, de réexaminer ou de réévaluer notre stratégie de gestion et de règlement de ces crises-là», a-t-il dit, semblant dessiner une issue. «Nous sommes préoccupés également par la décision prise par nos frères de quitter la CEDEAO et nous croyons qu’un dialogue est toujours possible.»
Le Niger, le Burkina Faso et le Mali ont annoncé leur départ de la CEDEAO et menacent de faire de même avec l’Union économique et monétaire d’Afrique de l’Ouest.
Evoquant le sort du Président Bazoum, retenu prisonnier dans sa résidence à l’intérieur du Palais présidentiel depuis le 26 juillet, il a estimé que les deux situations étaient tristes, «l’un qui est en otage et d’autres populations qui souffrent». «Mais cela ne règle pas le problème. Quel sens ont les sanctions que nous prenons? Comment faire pour dépasser cela, parce que le statu quo, l’immobilisme que nous connaissons aujourd’hui n’est plus possible», a-t-il martelé.
«Il ne s’agit pas de dire que telle partie a raison, une autre partie a tort. Il s’agit d’avoir un espace régional qui retrouve la paix, qui retrouve la sécurité et des populations qui vaquent librement à leurs occupations.»
L’immobilisme des deux organisations a radicalisé le Mali, le Burkina Faso et le Niger qui se sont tournés vers des acteurs à l’extérieur de l’espace régional, en particulier la Russie, pour desserrer l’étau. Le Président togolais a conclu sur « une note d’espoir » : « un rendez-vous dans les prochaines semaines pour essayer de trouver une solution.»