Gabon, l’opposition prépare déja la Présidentielle de 2025

De Gauche à droite : Brice Oligui Nguema, Alain Claude Bilié Bi Nzé, Pierre Claver Maganga Moussavou et Albert Ondo Ossa. Montage : Mondafrique.

Près d’un an avant les élections présidentielles au Gabon, auxquelles Brice Oligui Nguema va se porter candidat pour tenter de légitimer sa place à la tête du pays, l’opposition au chef de l’État gabonais s’interroge sur le choix d’un candidat. 

« Le chef, c’est moi » – à Tchibanga le 12 juillet 2024, dans le sud du pays, lors d’une étape de sa « tournée républicaine », Brice Oligui Nguema affirme son leadership. Brice Oligui Nguema se voit déjà à la tête du Gabon à l’issue de la transition, qui est censée prendre fin dans un peu plus d’un an. L’homme a pris le pouvoir à l’issue d’un coup d’État mené par « sa » Garde, la Garde Républicaine forte de plus de 3000 hommes qui avait contribué il y a peu à imposer le règne des Bongo à régner sur le Gabon.

Brice Oligui Nguema, qui détient en réalité les pleins pouvoirs au Gabon, sait qu’il ne peut faire l’économie d’une élection présidentielle pluraliste (même de façade) au cours de laquelle il doit affronter d’autres candidats. Plusieurs candidats pourraient briguer la Présidence dans un peu plus d’un an.

Alain Claude Bilie Bi Nzé, l’adversaire déclaré

S’il ne s’est pas encore formellement déclaré, Alain Claude Bilie Bi Nzé, le dernier Premier ministre d’Ali Bongo, est sans doute le principal adversaire politique de Brice Oligui Nguema. Il a d’ailleurs répondu aux nombreuses critiques de l’ancien Premier ministre, qui s’est interrogé sur la responsabilité des militaires dans les répressions sanglantes qui ont entaché le régime d’Ali Bongo.

Alain Claude Bilie Bi Nzé, ancien syndicaliste étudiant ayant connu la répression, mais ayant aussi travaillé, selon André Mba Obame, pour la Direction Générale de la Documentation et de l’Émigration-Immigration (DGDI- Police gabonaise), a un parcours militant et politique particulièrement étoffé. Rompu à la politique qu’il a pratiquée de militant au plus haut niveau, Alain Claude Bilie Bi Nzé est un communicant particulièrement redoutable qui ne craint pas les débats politiques, y compris les plus houleux.

L’ancien Premier ministre, qui connaît très bien l’appareil d’État, a commencé à soigner de plus en plus son image et à prendre des contacts, notamment à Paris…

Albert Ondo Ossa, le vainqueur de 2023

Albert Ondo Ossa est certainement celui qui a été le plus floué par le coup d’État du 30 août 2023. L’universitaire brillant, ancien syndicaliste de l’Université de Libreville, qui avait miraculeusement échappé à une tentative d’assassinat en 2012, est sans conteste le vainqueur dans les urnes de l’élection présidentielle du 27 août 2023. Bien qu’il n’ait pas été déclaré officiellement vainqueur et que le coup d’État du 30 août, qu’il a qualifié au début de « révolution de palais », l’ait écarté du fauteuil présidentiel, « Le Professeur », comme on l’appelle, s’est déclaré « Président élu » et n’écarte pas de se représenter à l’élection présidentielle à venir. Son caractère, son expérience politique, mais surtout ses compétences d’économiste que personne ne conteste au Gabon, en font encore un homme qui compte. Seul bémol, Albert Ondo Ossa ne dispose pas de formation politique et n’a pas mis à profit le temps de la transition pour se doter d’une structure politique qui lui est propre.

Mais au vu de la reconfiguration de l’échiquier politique gabonais, Albert Ondo Ossa, qui a manifestement pris ses distances avec le chef de l’État gabonais, pourrait encore rééditer sa victoire de 2023.

Pierre Claver Maganga Moussavou, la meilleure offre?

De tous ceux qui ne font pas mystère de leurs ambitions présidentielles, Pierre Claver Maganga Moussavou est sans doute celui qui a la meilleure expérience de l’exercice (il a participé, à l’exception d’une seule, à toutes les élections présidentielles pluralistes au Gabon) et l’offre politique la plus aboutie. Son projet politique, qu’il appelle « La provincialisation », qui est une décentralisation très aboutie, a été mûri et s’oppose naturellement au clientélisme assumé par Brice Oligui Nguema, qu’il a lui-même calqué sur Omar Bongo et qu’Omar Bongo avait brocardé lui-même à la fin de sa vie…

Outre une base politique évidente, l’homme qui est arrivé, selon les résultats officiels en 2023, à la troisième place et qui a été Vice-Président du Gabon, dispose d’un parti actif et qui se rajeunit. Pierre Claver Maganga Moussavou pourrait bien cette fois-ci faire la différence.

D’autres adversaires en perspective

Mais si, à ce jour, ces trois personnes seront – sauf événement particulier – candidats donc adversaires d’un Brice Oligui Nguema qui est déjà en campagne (et qui a déjà repris à son compte le culte de la personnalité cher à… Omar Bongo !), nul doute que d’autres personnalités politiques vont se déclarer candidats.

Plusieurs éléments dont nous disposons nous permettent d’affirmer à ce jour qu’au moins deux personnes du gouvernement gabonais actuel se préparent à se porter candidats à la présidence de la République du Gabon.

C’est certainement à eux que Brice Oligui Nguema (très bien renseigné) s’est adressé en des termes clairs le 12 juillet dernier à Tchibanga : « si on a des points de vue divergents, il faut prendre votre route ».

Quant à l’élection présidentielle à venir nul doute que Brice Oligui Nguema en sera déclaré vainqueur. Lecteur de Machiavel, Brice Oligui Nguema  a vu sa « Garde Républicaine » imposer les Bongos père et fils tant de fois au pouvoir par les armes veillant ainsi à l’application de cette citation de Joseph Staline : « Ce qui compte ce n’est pas le vote, c’est comment on compte le vote ».