Le président Ouattara promet de prendre la parole le 18 juin 2024 devant les deux chambres du parlement ivoirien. A un moment où ses partisans le pressent de briguer un quatrième mandat interdit par la Constitution et où les partisans de Gbagbo réclament une loi d’amnistie qui rendrait l’ancien président de nouveau éligible.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Après que son parti eût supervisé des hommages nationaux bien quadrillés pour l’inviter à se porter candidat à un quatrième mandat, Alassane Ouattara est maintenant forcé de prendre la parole. Et le président a choisi de le faire le 18 juin prochain devant les deux chambres parlementaires réunies en congrès à Yamoussoukro. Ce choix, un tantinet curieux en raison de son inéligibilité à un quatrième mandat, rappelle aux Ivoiriens le discours d’adieu du président prononcé à quelques mois de la présidentielle de 2020 avant de revenir sur sa promesse de ne pas être candidat en raison de la mort de son Premier ministre, Amadou Coulibaly, son successeur désigné.
Comme ces derniers mois, le président Ouattara s’était également fait prier en 2020 par son parti et plusieurs catégories sociales avant de faire droit à leur demande en briguant un troisième mandat qui a officiellement causé la mort de plus de 80 personnes et blessé 300 autres. Mais malgré ce risque et l’obstacle de la loi, le parti présidentiel jure qu’Alassane Ouattara est leur candidat naturel et qu’il gagnera le scrutin présidentiel au premier tour en raison des succès qui ont accompagné son dernier mandat. Les raisons de craindre que les mêmes causes ne produisent les mêmes effets existent pourtant. D’autant plus clairement que l’opposition menée par le Parti des peuples africains (PPA-CI) commence à se mobiliser contre l’inéligibilité de Laurent Gbagbo. L’ancien président s’apprête dès la semaine prochaine à mobiliser ses troupes, parce qu’il ne reconnaît pas sa condamnation à 20 ans de prison par contumace, à un moment où il était jugé par la Cour pénale internationale qui l’a blanchi et libéré. Même Pascal Affi N’guessan qui a désormais des relations exécrables avec Gbagbo a admis que l’Etat ivoirien ne peut pas faire comme si ce procès suivi en mondiovision ne comptait pas pour ne pas en reconnaître les effets juridiques.
Cela dit, Alassane Ouattara pourrait bien surprendre tout le monde. C’est d’ailleurs ce que croit un des leaders locaux du parti présidentiel à Gagnoa. Le fait qu’il veuille s’adresser aux deux parlements réunis en congrès incline sérieusement à envisager cette hypothèse, croit-il savoir. La saisine du congrès permettrait par exemple de clôturer rapidement ce dossier pour envisager les élections à venir dans un climat de paix. Notre source assure aussi que le président va régler les autres problèmes politiques, principalement la question de la Commission électorale indépendante (CEI) qui continue de cristalliser les critiques de l’opposition parce qu’« il n’a rien à craindre et qu’il a confiance aux Ivoiriens qui savent ce qu’il a accompli ».
En contrepartie, Alassane Ouattara devrait se déclarer ultérieurement candidat à la prochaine élection présidentielle et il serait « dans ce cas malséant de le lui déconseiller » alors même qu’il aurait rendu éligible son pire adversaire, pronostique la même source.