Cette flambée des prix que veut ignorer le pouvoir ivoirien

Les Ivoiriens ont encore été invités, ce mercredi 15 novembre consacré à la paix, à aller visiter le 4è pont, dit Alassane Ouattara, de nouveau fermé à la circulation pour être visité. Histoire d’oublier l’inflation qui plombe le pouvoir d’achat de la population. 

A Abidjan, les jours fériés ont tous la même saveur, puisque le gouvernement ferme toujours, à ces occasions, le pont à hauban d’1,2 km reliant la commune de Cocody à celle du Plateau. Baptisé du nom d’Alassane Ouattara, ce pont qui justifierait aux yeux du président ivoirien qu’on lui accorde un quatrième mandat totalement anticonstitutionnel, constitue la plus grande fierté du régime. Qui n’hésite jamais, à chaque jour férié, d’y inviter à la promenade et au tourisme des populations dont le quotidien est plutôt marqué par la forte inflation des prix des denrées alimentaires et des biens de consommation.

Signe, d’ailleurs, de ce monde d’écart qui sépare le gouvernement des couches les plus défavorisées, le président du comité d’organisation de la Coupe d’Afrique des nations, François Amichia, a poussé un gros coup de gueule, le 2 novembre dernier, contre les supporters des Eléphants qui viennent au stade avec des maillots orange achetés à bas-prix dans les échoppes des quartiers pauvres du pays. « Pas de maillot orange d’Adjamé au stade », a-t-il tonné, lors du lancement de l’opération « un ivoirien, un maillot ».

Ce maillot « homologué » n’est pourtant pas à la portée de l’ivoirien moyen puisqu’il coûte 60.000 Fcfa dans les boutiques luxueuses du pays, soit un peu moins du smig qui est, depuis un an environ, de 75.000 Fcfa. Alors que ce décret est rarement appliqué, en raison de la domination de l’économie informelle, et que les salaires des fonctionnaires continuent de stagner depuis des années, le gouvernement assiste impuissant à la montée des prix des denrées alimentaires, quand ce n’est pas lui-même qui encourage cet état de fait comme ce fut le cas lors de la crise des datas dans le pays.

Depuis quelques semaines, en effet, le prix du sucre connaît une hausse inédite, puisqu’il se négocie à 1200 Fcfa sur les marchés ivoiriens. La rareté de cette denrée alimentaire largement prisée par les ménages n’a pourtant pas fait l’objet d’un communiqué officiel du gouvernement. Qui reste aussi silencieux sur l’augmentation du prix de l’huile. Par exemple, Le Dinor bon marché- 1 litre-, coûte maintenant 1,200 Fcfa chez le détaillant, contre 750 F autrefois, tandis que le prix minimum d’un litre d’huile de qualité supérieure sur les marchés est de 2500 Fcfa.

Abidjan fait également face à la flambée des prix du lait en poudre qui se négocie à 6000 Fcfa le kilogramme, contre 3.000 Fcfa il y a peu, là où le kilogramme de viande sans os qui se vendait à 1.500 f cfa pendant la crise politique est allégrement passé à 3.500 Fcfa contre 2000 Fcfa, il y a peu. Le renchérissement des prix de la viande sur les marchés ivoiriens est une conséquence de la démultiplication des taxes à l’importation du bétail des Etats frontaliers du nord du pays, et d’une série de surcouts occasionnés à la fois par diverses taxes intermédiaires et la corruption active des autorités du District qui gèrent l’abattoir d’Abidjan.

Quant au prix du kilogramme de la farine, il est passé de 350 Fcfa pendant la crise politique des années 2000, à 500 Fcfa, au début des années Ouattara, et à 800 F cfa aujourd’hui. D’ailleurs, au regard du dernier accord de prêt passé entre le gouvernement ivoirien et le FMI, on devrait assister à une nouvelle explosion des prix dans les prochains mois, le gouvernement ayant accepté de ne plus subventionner les coûts de n’importe quel produit qui lui paraîtrait nécessaire, et d’élargir l’assiette des impôts à d’autres secteurs d’activités, à défaut d’augmenter le prix de la TVA qui le mettrait en danger de mort.