UNESCO, un documentaire pour la réhabilitation du vaudou

Photo: Olivier Thibaud.
L’ambassadeur du Bénin auprès de l’UNESCO s’est associé à Karine Dellière, une Française initiée au Vaudou, pour présenter en première à l’UNESCO cette religion originelle du peuple africain

Le vaudou, vodou, ou vodoun, ou encore voodoo. C’est le fondement culturel des peuples issus par migrations successives du Togo ; les Aja (dont les Fons, les Gouns, les Ewe… et dans une certaine mesure les Yoruba…) peuples qui constituent un élément important des populations au sud des États du Golfe du Bénin (Bénin, Togo, Ghana, Nigéria…).

Le vaudou est né de la rencontre des cultes traditionnels des dieux yorubas et des divinités fon et ewe, lors de la création puis l’expansion du royaume Fon d’Abomey aux XVIIe et XVIIIe siècles. Le culte vaudou compte environ 50 millions de pratiquants dans le monde.

Karine Delliere, So Ava voodoo lake, 2022.

Karine Dellière, une économiste européenne initiée au Vaudou

Le film est réalisé par Karine Dellière, docteur en économie, initiée au Vaudou. Elle rencontre la culture du Vaudou au Bénin au cours d’une mission avec l’ONG Électriciens sans frontières sur les bords du lac Sô-Ava. Elle séjourne au Bénin une dizaine d’années. Elle porte après 20 ans le titre de « Tangninon », conseillère du roi Toygbe Zola. Ce dernier lui a permis de filmer les cérémonies et la vie quotidienne de ces populations vivant au bord du lac. « Ce documentaire de vingt six minutes n’est pas un mode d’emploi du Vaudou mais bien une petite porte par laquelle on entrerait sur le lac en abandonnant notre vision occidentale pour goûter à une culture différente régie par le Vaudou comme philosophie universelle, » précise Karine Delliere.

Ce film a été commandé à Karine Delliere par le roi Toygbe Zola, conscient que sa culture était en danger.  Il voulait qu’on défende cette culture, et qu’on aille dans une logique de réconciliation avec les diasporas qui sont parties du Bénin pendant la période de l’esclavage, au Brésil, à Cuba ou à Haïti. C’est pourquoi il était important pour la réalisatrice d’offrir une vision globale du vaudou.

Karine Delliere raconte qu’elle avait été fort frappée lors du discours d’investiture du président Patrice Talon qui a affirmé qu’il était temps d’être fier de cette culture du vaudou. C’est pourquoi, elle a désiré présenté le vaudou comme un humanisme global loin des caricatures véhiculées par le cinéma d’Hollywood. Vaudou signifie « être bien avec », avec l’invisible, mais aussi avec le visible et les êtres autour de vous. Ce qui est fondamental, c’est de ne pas se laisser enfermer par un mot, le vaudou, mais de s’intéresser à une culture qui est faite d’amour et de paix. C’est une vision de l’équilibre entre les humains, les animaux, la nature, les divinités et les ancêtres.

La ville de Sô-Ava est une cité située sur les rives du lac Nokoué, dans le sud du Bénin. Ce documentaire laisse la parole aux habitants qui pratiquent le vaudou originel depuis plusieurs siècles. Le film s’éloigne des clichés habituels sur le Vaudou (rites de possessions, poupées avec des épingles, sorcellerie) pour présenter une tradition séculaire pour privilégier des entretiens avec des pêcheurs, le roi Toygbe Zola, des femmes, de la gardienne spirituelle du roi (la Tangninon) qui présente le vaudou au quotidien.

Présentation du film par le Président Patrice Talon à l’UNESCO à Paris

Le président de la République du Bénin, Patrice Talon est intervenu avant la projection du film à l’UNESCO le 8 septembre dernier: « Nous n’avons pas l’intention de faire la promotion de la religion Vodou mais nous devons reconnaître que nous avons une histoire, une origine. Nous venons de quelque part ! Nous devons reconnaître l’identification de ce qui fait l’histoire de notre continent. Les touristes vont dans le monde entier pour visiter des mosquées, des temples. Cela ne veut pas dire que ces touristes vont pratiquer la spiritualité liée à ces cultures mais la curiosité les pousse sur ce chemin. L’Afrique doit savoir vendre sa culture sans complexe et elle a beau être chrétienne, musulmane, parfois même bouddhiste, elle n’en reste pas moins de culture Vodou ».

L’ambassadeur du Bénin auprès de l’UNESCO, Eusèbe Agbangla, après la projection à présenter à nouveau le projet global d’ouverture de quatre musées, dont le musée du Vaudou à Porto-Novo, dont nous avons parlé dernièrement dans Mondafrique.

Voir, l’Interview de Karine Delliere sur TV5 Monde.