Le pouvoir libanais désarmé face aux provocations israéliennes

Alors que le nouveau gouvernement libanais tente de consolider son pouvoir, Israël renforce sa présence militaire au Liban en demandant une prolongation de son déploiement jusqu’au 28 février, une requête refusée par Beyrouth. Les survols intensifs de la capitale et l’implantation de nouvelles bases militaires israéliennes accentuent les tensions, plaçant le pays face à un risque imminent de confrontation. Sous la pression internationale et face au risque de reprise des hostilités, le pays traverse une phase critique.

 Le Liban traverse une période de turbulences majeures depuis la formation du gouvernement dirigé par Nawaf Salam, qui a tenu sa première réunion le 11 février 2025. Attendu depuis plus de deux ans, ce cabinet hérite d’une situation explosive, à savoir une sécurité précaire au sud, des réformes économiques vitales et une reconstruction après un conflit dévastateur avec Israël.

Composé de 24 ministres, le gouvernement Salam réduit l’emprise du Hezbollah sur les institutions étatiques. Pour la première fois depuis 2008, il ne dispose pas du « tiers de blocage », une arme utilisée par le passé pour paralyser les décisions gouvernementales. Ce changement pourrait permettre une gouvernance plus efficace, à condition de surmonter les tensions internes et externes.

Le principal défi reste l’application du cessez-le-feu avec Israël et la gestion de la pression internationale sur le Hezbollah. Washington, par la voix de Morgan Ortagus, insiste sur son désarmement total, alors que le mouvement chiite refuse toute reddition de ses infrastructures militaires au sud du Litani. Pris entre stabilité nationale et exigences étrangères, Nawaf Salam doit jongler avec une équation politique délicate.

Fracas supersonique israélien 

Le premier test majeur du gouvernement a été le rejet de la demande israélienne de prolonger sa présence militaire dans certaines zones du sud jusqu’au 28 février. Beyrouth a répliqué en proposant le déploiement de la FINUL (Force Internationales des Nations Unies) et de l’armée libanaise sur cinq points stratégiques, préservant ainsi sa souveraineté tout en garantissant un cadre de sécurité.

Israël, refusant tout retrait immédiat, prétexte des impératifs de sécurité et craint que le Hezbollah ne renforce ses positions. Ce bras de fer illustre la fragilité de l’accord de cessez-le-feu et le spectre d’une escalade militaire imminente.

Le 12 février, la tension a atteint son paroxysme lorsque des avions israéliens ont franchi le mur du son au-dessus de Beyrouth. Deux détonations assourdissantes ont secoué la capitale en début de soirée, provoquant une vague de panique et rappelant la politique d’intimidation systématique de Tel-Aviv. Tout au long de la soirée, des chasseurs israéliens ont multiplié les survols à basse altitude, accompagnés de drones omniprésents, accentuant la pression psychologique sur la population.

En multipliant les incursions aériennes et les actes de provocation, Israël teste la réaction du Hezbollah, qui, sous pression internationale, évite toute escalade directe. Mais ces manœuvres renforcent le risque d’embrasement et compliquent la tâche du gouvernement, qui tente de préserver un cessez-le-feu déjà fragilisé.

En parallèle, Israël a commencé la construction de cinq bases militaires temporaires en territoire libanais, selon la chaîne hébraïque Kan. Ces sites, destinés à abriter plusieurs centaines de soldats, indiquent une stratégie d’occupation prolongée sous couvert de « sécurisation ». Cette violation flagrante du cessez-le-feu met la FINUL dans une situation inconfortable : comment concilier volonté israélienne et respect de la souveraineté libanaise ?

Pris en étau entre la pression militaire israélienne et l’influence persistante du Hezbollah, le gouvernement Salam joue une partie équilibriste à haut risque. Sa capacité à affirmer l’autorité de l’État tout en évitant une guerre ouverte avec Israël sera le test ultime de sa légitimité.

L’aéroport de Beyrouth dans le viseur

Un post publié tard dans la soirée du 12 février sur X par Avichay Adraee, porte-parole de l’armée israélienne, n’augure rien de bon concernant la situation de l’aéroport international de Beyrouth. En affirmant que « le Corps des Gardiens de la Révolution islamique (Force Al-Qods) et le Hezbollah exploitent l’aéroport pour faire passer des fonds destinés à l’armement », et en insistant sur le fait que « l’armée israélienne ne permettra pas que le Hezbollah se réarme et utilisera tous les moyens en sa possession », Israël envoie un message clair qui pourrait précéder une escalade militaire. Ce type de déclaration, surtout diffusée en soirée, s’inscrit souvent dans une stratégie de préparation de l’opinion publique avant une action ciblée, qu’elle soit politique, diplomatique ou militaire.

À l’heure où la tension reste vive au sud du Liban et où les discussions sur le cessez-le-feu sont déjà fragiles, cette mise en accusation publique de l’aéroport de Beyrouth soulève de sérieuses inquiétudes quant à une éventuelle intervention israélienne sur ce site stratégique.