Le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, dont l’influence morale et politique s’étend au delà de la communauté chrétienne, a affirmé, dimanche 22 mai dans son homélie dominicale, que certaines factions cherchent à « torpiller le résultat des élections législatives ». Un avertissement qui vise clairmentle Hezbollah qui a perdu, avec ses alliés chrétiens fidèles du président Aoun, la majorité au sein du Parlement libnais
Commentant dans son homélie le bilan des élections législatives, le patriarche maronite a souligné que ce scrutin a débouché sur « un nouveau climat national qui a donné aux citoyens un brin d’espoir pour la réalisation d’un changement positif susceptible d’inciter la communauté internationale et les instances arabes à aider le Liban sérieusement, et non pas symboliquement, de manière à le sortir du marasme économique et de surmonter sa crise existentielle ». Le patriarche maronite prenait ainsi acte de la perte de dix sièges du CPL, le mouvement fidèle au Président Aoun et qui aura été, ces dernières années, un allié constant du Hezbollah.
Un Patriarche cash !
Une des raisons pour lesquelles le Patriarche maronite a conservé un vrai magistère au Liban est qu’il n’a jamais insulté l’avenir, en ménageant des passerelles vers les autres communautés, y compris le mouvement pro iranien Hezbollah. S’il hausse le ton aujourd’hui, c’est que la situation née du scrutin du 15 ami est très tendue pour deux raisons au moins: l’ampleur de la crise économique qui prive un bon nombre de Libanais de l’essentiel, médicaments, fuel et farine; le choc provoqué par les résultats des législatives qui voit le bloc chiite perdre l’hégémonie qui était la sienne. D’où le risque réel de provocations ciblées et de possible embrasement.
« Ce qui nous a surpris et étonné, a ajouté le patriarche, c’est qu’au lendemain de la publication des résultats, des secousses sécuritaires se sont produites, sans compter que la crise de l’essence a réapparu, le pain a manqué, de même que les médicaments, les prix ont augmenté, la spéculation contre la livre libanaise a repris, alors que c’est le contraire qui aurait dû se produire ».Le cardinal Raï met clairement en garde contre la tentation « de court-circuiter la volonté populaire »
Le patriarche maronite avait reçu, samedi, une délégation venue lui demander d’intervenir afin d’obtenir la libération de l’activiste Tony Khoury, arrêté en pleine nuit il y a plus de deux semaines à son domicile par des agents du tribunal militaire (1) pour avoir tagué sur une affiche électorale du Parti syrien national social (PSNS) l’inscription « Bachir (le président Bachir Gemayel) est vivant en nous ». Or le PSNS, d’inspiration d’extrème droite et proche de Damas, est un allié fidèle du Hezbollah. Quant à Bachir Gemayel, assassiné alors qu’il était à la tète de l’État, avait toujours affiché des positions nationalistes hostiles à la Syrie.
En dénonçant le caractère inique de cette arrestation « motivée par des considérations politiques et partisanes », le patriarche Raï sort clairement de sa prudence légendaire eT prenD clairement parti pour la démocratie contre la violence qu’incarnent aujourd’hui les milices armées du Hezbollah
« Nous sommes peinés de relever que le slogan Bachir est vivant en nous est devenu un crime, a déclaré le cardinal Raï en s’adressant au député Nadim Gemayel qui accompagnait la délégation populaire. Si le président Bachir Gemayel n’avait pas été assassiné, nous n’aurions pas atteint cette situation et nous n’aurions pas vécu à l’ombre de cette République à laquelle nous sommes parvenus », a souligné le patriarche maronite.
(1) Le Hezbollah possède de certains relais au sein de la justice militaire libanaise qui n’a e justice que le nom