Le Liban au quotidien (5) : la chute d’Assad célébrée dans la liesse !

Après plus de 50 ans de dictature où des milliers d’opposants étaient détenus dans des coditions atroces (voir ci dessus), le pouvoir des el-Assad s’est effondré en Syrie officiellement à l’aube de dimanche matin. Au Liban, pays meurtri par les exactions du régime syrien, la nouvelle a été accueillie avec une joie immense teintée du souvenir douloureux des victimes. Témoignages et réactions.

« Les Assad, un demi-siècle de despotisme »

La fin d’un règne de terreur

Même si elle était prévisible, la chute de 50 ans de dictature du régime des el-Assad, père et fils, s’est tellement précipitée que l’on a eu du mal à y croire. Beaucoup pensaient que Damas serait négociée sur la table des pourparlers. Les Libanais se sont réveillés à l’aube de dimanche avec la meilleure nouvelle jamais espérée : la fin de la tyrannie, de père en fils, qui n’a eu de cesse de meurtrir le pays du Cèdre. Comme une chape de plomb qui s’est envolée, 50 ans de peur se sont évanouis.

Au fur et à mesure que les rebelles libéraient les villes, des prisonniers, dont des Libanais retenus depuis des décennies, ont été retrouvés. Les familles des disparus ont toutes repris espoir. Des photos avec avis de recherche ont inondé les réseaux sociaux et les groupes de messagerie WhatsApp, dans l’espoir de retrouver ces disparus. Des appels poignants ont été lancés.

Les feux d’artifice ont illuminé le ciel libanais. Sunnites, chrétiens et druzes ont festoyé, les douceurs ont été distribuées et le champagne a été sabré. Tout le camp anti-Hezbollah n’a pas caché sa joie. La fête était partout, avec ce sentiment d’une justice divine enfin rendue. Du côté du Hezbollah et de ses acolytes, c’est le silence radio.

L’aviation israélienne ne cesse de survoler le Liban et frappe partout en Syrie, détruisant des dépôts d’armes qui explosent. Pour le moment, au Liban, on a oublié la guerre, et on célèbre la vie et la défaite cuisante de ce tyran honni qui se serait – aux dernières nouvelles – refugié à Moscou avec sa famille.

La chute vue par la presse libanaise

Le quotidien libanais l’Orient-Le Jour rapporte que « les rebelles menés par des islamistes radicaux ont annoncé à la télévision publique syrienne la chute du président Bachar el-Assad et la “libération” de la capitale Damas, après une offensive fulgurante qui a mis fin à plus de cinq décennies de règne de la famille Assad. »

Le journal cite également les propos du président élu américain Donald Trump, qui a affirmé sur sa plateforme Truth Social que « Bachar el-Assad “a fui” la Syrie après avoir perdu le soutien de son protecteur la Russie ». Trump ajoute : « Assad n’est plus là. Il a fui son pays. Son protecteur, la Russie, dirigée par Vladimir Poutine, ne souhaitait plus le protéger ».

L’Orient-Le Jour décrit ensuite l’atmosphère à Damas au lendemain de ces événements : « Encore sonnée par l’annonce de la “fuite” du président Bachar el-Assad, la capitale syrienne s’est réveillée avant l’aube sous contrôle rebelle. Des scènes de liesse ont également eu lieu à Homs, prise par les rebelles quelques heures avant la capitale syrienne. »

De son côté, le média Ici Beyrouth souligne que « la chute de Bachar el-Assad marque la fin de 54 ans du règne dictatorial et sanglant de la famille Assad, assoiffée de sang, d’argent et de pouvoir ». Il appelle à se souvenir « de ces Libanais assassinés pour leurs convictions souverainistes et leur patriotisme depuis 1970 par le régime syrien », année où « Hafez el-Assad prend le pouvoir ».

Ici Beyrouth fait également état d’un appel du comité des familles des kidnappés et disparus au Liban « à la suite de la libération de détenus libanais en Syrie ». Selon le média, le comité demande au gouvernement « d’agir sans délai » et poursuit « avec une détermination renouvelée » sa lutte « pour obtenir des réponses, estimant que la souffrance liée à la disparition de leurs proches doit constituer une priorité nationale ».

Les Libanais témoignent 
De nombreux témoignages ont afflué au Liban suite à la chute du régime Assad en Syrie. « Pour moi, le nom Assad évoque le jour le plus traumatisant de ma vie, c’est-à-dire le 13 octobre 1990, quand l’armée syrienne a envahi la totalité du Liban », confie l’un d’eux. Mais ce nom rappelle aussi « l’un des plus beaux jours de ma vie, quand en 2005, après l’assassinat de feu le Premier ministre Rafic Hariri, (commis par Assad et des membres du Hezbollah, ne l’oublions pas), l’armée syrienne a quitté le Liban. »

Un autre s’interroge : « Je ne sais pas si les rebelles qui ont fait chuter ce régime sont à craindre ou non, mais instinctivement, je me dis que pour ce beau pays qu’est la Syrie, cela ne peut être que pour le mieux de s’être débarrassé de cette ordure de Bachar el-Assad. »

Le choc des images a frappé les téléspectateurs de plein fouet : « À l’aube, les programmes libanais ont brutalement été coupés pour laisser place à une annonce aussi incroyable qu’inattendue sur la télévision d’État syrienne. En lettres capitales, le message proclamait la “Victoire de la grande révolution et la chute du régime criminel d’Assad”. Ces mots tant espérés ont soudain envahi les écrans, figeant le temps et marquant les esprits à jamais. »

D’autres résument le destin du dictateur déchu en des termes crus :
« Quand on n’a vécu que comme un lion aussi féroce que prédateur, on ne mérite que de finir par être pris comme un rat… »

La violence du régime n’est pas oubliée : « C’est l’un des régimes les plus criminels au monde, qui a massacré des centaines de milliers de personnes et en a fait disparaître des dizaines de milliers d’autres. Un régime qui a gazé sa propre population, lui a balancé des barils d’explosifs, a emprisonné et torturé jusqu’à la mort des milliers de personnes. Un régime qui n’a pas hésité à flamber son pays afin de se maintenir au pouvoir. »

Enfin, un dernier témoignage rapporte l’émotion à Beyrouth. « Dimanche soir, après les bombardements, le ciel de Beyrouth s’est illuminé de feux d’artifice pour célébrer la chute tant attendue de Bachar el-Assad. Son régime laisse derrière lui un bilan effroyable : 300 000 morts, sans compter les innombrables prisonniers syriens et libanais, ainsi que l’assassinat d’une quinzaine des plus éminentes personnalités libanaises entre 2005 et 2007. L’émotion était palpable jusqu’au journal télévisé, où toute l’équipe a sabré le champagne dans un moment poignant, chargé à la fois de soulagement et du souvenir douloureux des victimes de cette sombre période.