Le lanceur d’alerte William Noun interrogé par la Sécurité de l’État

William Noun, porte-parole de l’un des groupes représentant les proches des victimes de l’explosion au port de Beyrouth, a été libéré samedi après-midi par la Sécurité de l’Etat, à la demande de l’avocat général près la cour d’appel de Beyrouth Zaher Hamadé, a indiqué l’agence nationale d’information (ANI, officielle). Il était détenu depuis vendredi dans le cadre d’une enquête sur des propos qu’il avait tenus jeudi soir lors d’un programme télévisé. M. Noun aurait été libéré sous caution d’élection de domicile.

William Noun a été interpellé par la Sécurité de l’État (voir l’article ci dessous sur l’appareil sécuritaire). Il est détenu au poste de ce service à Ramlet el-Baïda où des proches des victimes de l’explosion au port de Beyrouth, des activistes et des députés de l’opposition se mobilisent en solidarité avec lui.

Le mandat aurait été délivré par l’avocat général près le parquet d’appel de Beyrouth, le juge Zaher Hamadé, pour avoir lancé des pierres et brisé des vitres du Palais de Justice lors du sit-in qu’ont observé mardi des proches des victimes de l’explosion. Mais il n’est pas clair quand le mandat en question a été émis, sachant que William Noun avait été invité, vendredi, à se rendre au poste de la Sécurité de l’État pour ce qu’il pensait être des échanges informels, a rapporté sa fiancée.

Les victimes de l’explosion dans le collimateur

Un timing d’autant plus douteux qu’il avait déjà été convoqué par la police judiciaire, avec douze autres proches des victimes du 4 août 2020, pour être interrogé lundi prochain sur les dégâts occasionnés lors du sit-in devant le palais de Justice.

L’avocat de l’activiste a dénoncé « un piège tendu » à William Noun et demandé que « les autorités judiciaires soient justes ».iPrésents devant le poste de la Sécurité de l’État, le député Melhem Khalaf (contestation) et huit autres parlementaires ont annoncé qu’ils camperont sur place jusqu’à la remise en liberté du jeune activiste. Salim el-Sayegh, qui figure au nombre de ces députés, a assuré qu’il n’y avait aucun mandat d’arrêt contre William Noun et que le document avait été délivré une fois le jeune homme interpellé. M. Sayegh a, en outre, mis en garde contre « des mesures judiciaires qui seraient envisagées pour maintenir William Noun en détention jusqu’à lundi ».

M. Sayegh a appelé la population à « se mobiliser contre cette répression ». Un appel similaire a été lancé par plusieurs députés de l’opposition, dont le candidat à la présidentielle Michel Moawad, ainsi que Mark Daou et Razi el-Hajj. M. Moawad a dénoncé « des pratiques d’intimidation auxquelles la justice du pouvoir a recours », reprochant à celle-ci de « convoquer les parents des victimes de l’explosion au port pour interrogatoire à la place des personnes poursuivies dans le cadre de l’enquête ».

L’infiltration de l’appareil sécuritaire libanais par le Hezbollah

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)