Chirac et Hariri, les meilleurs amis du monde

Il y a vingt ans, l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri était assassiné à Beyrouth. ?Notre site libanais partenaire « Ici Beyrouth » revient sur la relation particulière qu’entretenait ce pilier de la politique libanaise avec la France, notamment avec l’ancien président Jacques Chirac.

16 février 2005. Jacques Chirac atterrit avec son épouse Bernadette à l’aéroport de Beyrouth pour rendre hommage à l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri, tué dans un attentat deux jours plus tôt.

À sa descente d’avion, lors d’une allocution prononcée sur le tarmac de l’aéroport, Jacques Chirac dénonçait alors un “crime abominable, que l’on aurait pu croire d’un autre temps”. “Je suis venu aujourd’hui à Beyrouth pour rendre hommage à un homme qui était mon ami et qui était également un grand démocrate, un homme d’État”, avait ajouté le président français.

Jacques Chirac était d’ailleurs le seul chef d’État occidental à se rendre aux obsèques de Rafic Hariri.

La France à l’origine du TSL

L’amitié, forte, entre les deux hommes datait d’une vingtaine d’années. Ils se sont rencontrés dans les années 1980. Jacques Chirac était alors maire de Paris et Rafic Hariri un entrepreneur milliardaire qui a fait fortune dans le BTP en Arabie saoudite.

Quelques années plus tard, les deux amis ont accédé à leurs plus hautes fonctions: Rafic Hariri, une première fois Premier ministre libanais en 1992, et Jacques Chirac, président de la République en 1995. Le soutien de Jacques Chirac à Rafic Hariri s’est notamment traduit par l’organisation d’une conférence à Paris en 2001 pour aider le Liban sur les plans financier et économique.

Sous la présidence de Jacques Chirac, la position de la France à l’égard de la Syrie a connu un tournant majeur. En septembre 2004, la France, qui tolérait jusque-là la mainmise syrienne sur le Liban, a fait voter, avec les États-Unis, une résolution des Nations unies demandant, implicitement, le retrait définitif des 14.000 soldats syriens présents au Liban. Après l’assassinat de Rafic Hariri, la France a gelé les contacts de haut niveau avec la Syrie, qui niait toute implication dans l’attentat contre l’ancien Premier ministre libanais. 

Selon des propos tenus par son ancienne ministre de la Défense, Michelle Alliot-Marie, Jacques Chirac “était convaincu que ce sont le Hezbollah et le régime syrien qui ont assassiné” Rafic Hariri le 14 février 2005.

La France est également à l’origine de la création du Tribunal spécial des Nations unies pour le Liban (TSL), juridiction internationale créée en mai 2007 et active de 2009 à 2023, dont l’objectif était de juger les personnes responsables de l’attentat ayant entraîné la mort de Rafic Hariri. Ce tribunal a “tenu une procédure par contumace et a déclaré trois individus (…) coupables en relation avec l’attaque du 14 février 2005 et les a condamnés à cinq peines concurrentes de réclusion à perpétuité”.

Jusque dans la mort

Malgré la disparition de Rafic Hariri, Jacques Chirac a continué d’entretenir des relations étroites avec la famille Hariri jusqu’à la fin de son mandat en 2007. Il a notamment reçu Saad Hariri, l’un de ses fils – et futur Premier ministre – à l’Élysée, le 10 mai 2007 – son dernier geste diplomatique comme chef de l’État.

Le 16 mai 2007, Jacques Chirac cédait sa place à Nicolas Sarkozy, élu président de la République dix jours plus tôt. Lorsque Jacques Chirac a quitté le palais de l’Élysée, il s’est installé dans un appartement prêté provisoirement par la famille Hariri situé quai Voltaire, à Paris. L’ancien chef de l’État français y a vécu plusieurs années après la fin de son mandat.

La relation entre les familles Chirac et Hariri est telle qu’au lendemain de la mort de l’ancien président français en septembre 2019, Saad Hariri, très ému, avait salué la mémoire de Jacques Chirac. “J’ai senti une grande tristesse”, celle que “j’ai sentie quand j’ai perdu mon père”, avait alors déclaré le Premier ministre libanais, évoquant Jacques Chirac comme “un ami de mon père, un frère de mon père. Ils avaient une profonde relation. C’est un géant politique qui est parti de notre monde.”

Saad Hariri était également présent, en même temps que plusieurs autres personnalités et chefs d’État, aux obsèques de l’ancien président français. Le Liban avait par ailleurs observé une journée de deuil national le 30 septembre 2019 en mémoire de l’ancien chef de l’État français.