La première plainte pour viol contre Tariq Ramadan remonte à octobre 2017. Grâce à une armée d’avocats, le prédicateur a réussi à gagner sept ans, multipliant recours sur recours. Mais aujourd’hui, la cour de cassation a rejeté son dernier pourvoi. Il sera jugé en 2025 par la cour criminelle de Paris pour viol aggravé et viols sur trois femmes.
Ian Hamel
Ce n’est pas encore le bout de la route pour le petit-fils d’Hassan al-Banna, le fondateur des Frères musulmans. La date du procès, vraisemblablement dans le premier semestre de 2025, n’a pas encore été fixée. S’il est condamné, Tariq Ramadan ira en appel, puis en cassation. Ensuite, il interpellera la Cour de justice de l’Union européenne. Néanmoins, la Cour de cassation lui a infligé un très lourd revers mercredi 9 octobre en rejetant son pourvoi. Il demandait rien moins qu’un non-lieu général. A l’audience de mercredi, le conseiller rapporteur comme l’avocat général ont prôné la non-admission de ce pourvoi, une procédure qui permet d’écarter rapidement les recours non sérieux ou irrecevables.
Le 27 juin 2024, la cour d’appel de Paris a ordonné un procès pour un viol aggravé sur une femme et deux viols sur deux autres femmes, entre 2009 et 2016. Pour les magistrats, c’est la violence qui est principalement mises en avant dans les différents récits des victimes. Ils estiment que cette violence, dans les rapports sexuels, « dépassaient ce qu’une femme pouvait raisonnement accepter ». Tariq Ramadan ne se contenterait pas de les violer, il les tabasserait, les insulterait, les menacerait. Toutes décrivent un homme à la bouche tordue et aux yeux exorbités. Ce renvoi devant la justice française est un coup très dur pour l’auteur du « Génie de l’islam », un mois à peine avec près sa condamnation en appel en Suisse pour viol à trois ans de prison, dont un an ferme.
L’éternelle thèse du complot
Incarcéré pendant neuf mois en 2018, le prédicateur a réussi, grâce à une dizaine d’avocats en France, et trois en Suisse, à repousser les échéances, prétextant par exemple qu’un psychiatre ne pouvait pas être neutre vis-à-vis de lui, car juif… Pendant toutes ces années, l’ancien enseignant à l’université d’Oxford, n’a jamais cessé de crier son innocence, affirmant qu’il serait la victime d’un odieux complot, financé par les Émirats arabes unis. Dans son ouvrage, « Devoir de vérité », paru le 11 septembre 2019, non seulement il affirme que « les éléments du dossier prouvent clairement qu’il n’y a jamais eu de viols et que les plaignantes ont menti » (page 149), mais que, concernant la plaignante suisse, par exemple, « des individus l’auraient poussée à agir ainsi contre une importante rétribution ».
Or, ces accusations se sont avérées si peu crédibles que la Chambre pénale d’appel et de révision de Genève souligne que « le piège » évoqué en première instance par Tariq Ramadan, « n’est d’ailleurs plus plaidé par le défense au stade de l’appel. A juste titre. Rien à la procédure ne vient asseoir une telle machination ». Malgré tout, sur des sites complotistes ou favorables à l’islam radical, le prédicateur a continué en septembre dernier à dénoncer une machination dont il serait victime. Et sur les réseaux sociaux, ses accusatrices sont quotidiennement insultées et menacées de mort.