Sénégal, la bataille incertaine des élections législatives anticipées

L’analyste politique, Hamidou Anne, pense que la dissolution du parlement sénégalais est désormais une certitude après le revers subi samedi dernier par le président Diomaye Faye. En revanche, il n’est pas certain que le parti au pouvoir rafle la mise lors des élections législatives anticipées qui vont suivre dans la foulée.

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

Le Sénégal s’achemine donc vers des élections législatives anticipées. Le rejet du projet de loi sur la suppression du Haut conseil des collectivités territoriales et du Conseil économique, social et environnemental voulu par Bassirou Diomaye Faye a en effet mis le gouvernement devant cette réalité implacable, croit savoir Hamidou Anne, analyste politique sénégalais qui répondait aux questions de Voa Afrique, le mardi 3 septembre dernier.

Pour lui, la « bataille de la dissolution ira jusqu’à son terme (parce que) tout le monde est convaincu que le président de la République va dissoudre le parlement quand celui-ci aura deux ans, soit le 12 septembre prochain ».

A sa charge, l’opposition paie sa stratégie de ne pas donner le quitus au chef du gouvernement parce qu’il avait refusé de « faire sa déclaration de politique générale » devant la représentation nationale. « L’opposition et une partie significative de la population et de la société civile ont estimé que c’était un manque de respect au parlement et à ses députés. En réponse, l’opposition a refusé de voter le projet de loi et a posé un acte de défiance en déposant une motion de censure ».

60 à 90 jours de campagne

Les dés étant désormais jetés, un décret présidentiel devrait normalement intervenir le 13 septembre prochain pour dissoudrel’Assemblée nationale et convoquer le corps électoral à des élections législatives anticipées. Le gouvernement a entre 60 et 90 jours pour les organiser, c’est-à-dire « à partir de la mi-novembre jusqu’à la mi-décembre », précise Hamidou Anne.

Cette dissolution aura des conséquences sur le vote du budget et sur le système de sélection des candidats. Car « depuis 2018, le code électoral a introduit des parrainages », explique Hamidou Anne. En revanche, sur le plan politique, le pays n’a rien à rien à craindre. « Le Sénégal, est une démocratie majeure qui a montré, le 24 mars dernier, sa solidité et son ancrage », assure-t-il. Quant au prochain rapport de forces au sein du parlement, Hamidou Anne tempère l’euphorie des partisans du nouveau régime. Pour lui, « Rien n’est joué d’avance et bien malin qui dira celui qui va remporter les élections » à venir. La bataille sera d’autant rude que toutes « les forces en présence se préparent (en conséquence). Et personne ne peut dire qu’une élection est jouée d’avance au Sénégal ».

Les Sénégalais divisés

Évidemment les seuls arbitres de cette bataille serontles Sénégalais eux-mêmes. Et, pour l’heure, ils sont divisés entre ceux qui considèrent la suppression desdites institutions comme une mesure « nécessaire de rationalisation des ressources publiques » et ceux pour qui la réduction de certains salaires dans des administrations publiques ou la suppression d’agences, d’ambassades ou de consulats à cet égard relèvent d’actes règlementaires qui n’avaient pas besoin d’être votées par l’Assemblée nationale.

A titre personnel, l’analyste sénégalais pense que Bassirou Diomaye Faye veut dissoudre le Haut conseil des collectivités territoriales et le Conseil économique, social et environnemental parce qu’il n’y a pas de militants. « Je considère que c’est un prétexte parce que le régime n’a pas ses militants dans ces deux instances et une fois supprimées, elles seront remises en selle parce qu’elles ont été supprimées en 2000 et 2010 et, chaque fois, elles ont été remises en place parce qu’il y a une clientèle politique. »