Au Sénégal, le président Bassirou Diomaye Faye a dissous l’Assemblée nationale le jeudi 12 septembre en accusant la majorité parlementaire de promouvoir le culte du blocage.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Avec sa voix fluette caractéristique mais le ton moins bien amène que d’habitude, le président Bassirou Diomaye Faye a expliqué les raisons pour lesquelles il a décidé de dissoudre l’Assemblée nationale de son pays le jeudi 12 septembre pour appeler les Sénégalais à des élections législatives anticipées le 17 novembre prochain.
Alors que la dissolution était devenue depuis plusieurs semaines un secret de polichinelle, le Premier ministre Ousmane Sonko s’étant résolu à ne pas se présenter devant le parlement pour sa déclaration de politique générale, le président Bassirou Diomaye Faye a néanmoins fustigé l’hostilité supposément ouverte de la majorité parlementaire qu’il a accusé de faire la promotion « du culte du blocage ».
« J’en ai donc conclu que le gage d’une collaboration franche avec la majorité parlementaire dans le seul intérêt du peuple sénégalais était une illusion, celle-ci ayant décidé de se détourner du peuple pour promouvoir le culte du blocage et ainsi entraver la mise en œuvre du projet sur lequel j’ai été élu », a continué le président.
Rupture systémique
Contrairement à son habitude, l’essentiel du discours de Bassirou Diomaye Faye été une succession d’accusations et d’attaques en règle contre l’ancien régime dont les députés constituent le gros du contingent parlementaire. Le président les accuse de se mettre en travers du « choix de la rupture et de la transformation systémique » qu’il a représenté lors des élections présidentielles qu’il a remportées « dans un contexte de recul de nos droits fondamentaux les plus élémentaires ».
Il menace aussi les tenants de l’ancien régime « qui ont occasionné des dérapages volontairement cachés dans la gestion des finances publiques avec une évolution incontrôlée de la masse salariale, de la dette et des intérêts de la dette, une non-maîtrise des subventions, un dérapage dans les tirages sur les ressources extérieures ».
Il met enfin en demeure tous ceux qui rament « à contre-courant de la volonté du peuple sénégalais » alors que ceux-ci ont fait honneur de leur sang aux institutions nationales « lors de nombreuses luttes pour notre démocratie ». En effet pour le président sénégalais, le fait que la majorité parlementaire refuse de tenir le débat budgétaire en violation de l’article 56 de la loi organique et rejette le projet de loi constitutionnel visant à supprimer le Haut conseil des collectivités territoriales et le Conseil économique, social et environnemental dans le but de rationaliser les dépenses publiques constitue un casus belli.
Arbitrage électoral
Cet ultime crime de lèse-majesté vient s’ajouter à l’usurpation de ses prérogatives constitutionnelles à travers la fixation d’une date pour la déclaration de politique générale par la majorité parlementaire, en violation flagrante de l’article 84 de la Constitution et de l’article 97 de la loi organique portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
« Voilà pourquoi en vertu de l’article 87 de la constitution et après avoir consulté le conseil constitutionnel sur la bonne date, je dissous l’Assemblée nationale », a conclu Bassirou Diomaye Faye qui attend désormais l’arbitrage électoral des sénégalais.