En Côte d’Ivoire, une guerre fratricide continue au PDCI-RDA. Après la mort, le 1er août dernier, de son président, la direction intérimaire du parti tente en coulisses d’organiser en bon ordre la succession d’Henri Konan Bédié pour éviter une crise profonde, voire un possible éclatement de la première formation politique ivoirienne, fondée en 1946 par Félix Houphouët Boigny, premier du pays. A un mois du Congrès, trois candidats se disputent encore le fauteuil du chef, le banquier Tidjane Thiam, perçu comme « le candidat d’Emmanuel Macron », Maurice Kakou Guikahué, n°2 du PDCI et le n°3, Noël Akossy Bendjo.
Ancien maire de la commune du Plateau, agglomération d’Abidjan, Noël Akossi Banjo est un fin politique qui s’était vu attribuer le titre honorifique de « meilleur maire d’Afrique », répond aux questions de Mondafrique et en dit plus sur son positionnement par rapport à son principal rival, Tidjane Thiam
Un entretien avec Norbert Navarro
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Mondafrique : Vous êtes candidat à la présidence du PDCI-RDA. Pour quelles raisons les militants de votre parti devraient-ils porter leur choix sur vous pour succéder à feu, Henri Konan Bédié ? Pourquoi vous plutôt qu’un autre candidat ?
Noël Akossy Bendjo : Depuis 1990, cela fait 33 ans que je milite. De part mon parcours professionnel et surtout politique, les militants du PDCI-RDA savent que j’ai toujours fait preuve de constance, de fidélité et de loyauté. Ils connaissent mon esprit de sacrifice pour l’intérêt de mon parti et de mon pays. Je suis un réformateur, ce qui est en phase avec la volonté des militants de voir l’avènement d’un changement. J’ai toujours parlé de changement de logiciel. Dans mon esprit il s’agissait tout simplement de réorganiser er de redynamiser le parti pour lui donne une chance de revenir au pouvoir d’Etat. De plus, j’ai un projet ambitieux en sept points pour donner les moyens au parti de gagner la prochaine élection présidentielle de 2025.
Mondafrique : Vous avez été condamné à vingt ans de prison par la justice ivoirienne et vous n’avez pas été amnistié. N’est-ca pas un obstacle à votre candidature ? :
NAB : Je ne suis pas le seul dans ce cas. Le président Gbagbo et Charles Blé Goudé ont été condamnés et dirigent leurs partis respectifs. Il faut dire que nous sommes dans une phase de réconciliation et de décrispation. Je devrais donc bénéficier de la même bienveillance que celle dont bénéficient ces deux leaders, d’autant plus qu’il s’agit d’une condamnation à l’issue d’un procès politique qui a fait l’objet d’une déclaration du PDCI-RDA dans laquelle mon parti ne reconnaissait pas cette condamnation. Je vous parlais à l’instant de mon esprit de sacrifice que les militants du PDCI connaissent. J’ai été condamné pour avoir été fidèle à mon parti. Ma condamnation m’empêche aujourd’hui d’être candidat à la présidence de la République, mais pas à la présidence du PDCI-RDA.
Mondafrique : Tidjane Thiam est également candidat à la présidence du PDCI-RDA. A en croire les statuts du parti, même s’il s’en défend, il ne remplit pas les conditions nécessaires pour être candidat à ce poste. Quelle est votre position sur cette controverse ? :
NAB : Je pense que Tidjane Thiam aura à justifier de dix années de présence au Bureau politique, comme tous les candidats. Et la commission électorale du parti aura la responsabilité de déterminer la validité de sa candidature. Il ne m’appartient pas de le faire à sa place.
Mondafrique : Quel est donc votre message à Tidjane Thiam ? :
NAB : C’est un brillant cadre dont le parti et le pays ont besoin, au même titre que d’autres cadres. Il appartiendra au PDCI, au vue de toutes les compétences, de former une équipe capable de relever le défi du retour au pouvoir d’Etat en 2025. Pour ma part, compte tenu du court laps de temps dont on dispose avant les échéances de 2025, je ne souhaite pas le cumul : président du parti – candidat.
Mondafrique : A un mois du Congrès [16 décembre], on assiste à une vraie guerre des clans. Le PDCI ne va-t-il pas en sortir affaibli ? :
NAB : Il est normal qu’à la veille d’un congrès électif, il y ait des ambitions qui s’expriment à travers des clans. Mais comme le PDCI a su s’organiser pour assurer l’intérim du président Bédié, la sagesse habitera l’ensemble des candidats pour qu’au soir du 16 décembre, le PDCI sorte avec un seul président autour duquel tous les militants se mobiliseront pour un renouveau du parti.
Mondafrique : Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo avaient scellé une alliance entre le PDCI-RDA et le PPA-CI. Faut-il la maintenir ? :
NAB : Concernant l’élection présidentielle, compte tenu de la configuration de l’électorat ivoirien, dans un scrutin à deux tours, il est impossible de gagner au premier. Le PDCI devra donc opérer une alliance pour espérer gagner la présidentielle au second tour. Ces importantes questions d’alliance devraient être débattues au prochain congrès ordinaire du PDCI.
Voilà une excellente proposition de refuser le cumul « Présidence du Parti ; candidature à la présidence de la République en 2025 ». Que tous les autres candidats à la présidence du Parti se positionnent immédiatement sur cette proposition : cela clarifierait grandement l’enjeu actuel !