L’ONU dénonce les cas de détention inhumaine en Centrafrique

Les Nations Unies ont publié le 18 juillet 2024 un rapport accablant sur les conditions de détention en République centrafricaine.

Une chronique de Thierry Simbi

Ce rapport documenté par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) pointe les détentions illégales et/ou arbitraires, les mauvaises conditions de détention ainsi que les cas de torture qui se sont multipliés au cours de l’année 2023 en Centrafrique.

Arrestations et détentions illégales et/ou arbitraires.

Le rapport souligne qu’en 2023, les arrestations et détentions illégales et/ou arbitraires ont affecté au total 1 521 victimes. La MINUSCA a constaté une situation persistante et inquiétante d’arrestations et détentions illégales alors qu’aucun texte juridique national ne l’autorise. À la fin de l’année 2023, la majorité des détenus (1749 individus au total) étaient des personnes en attente de jugement, et dès lors, présumés innocents en vertu de la loi.

La MINUSCA a documenté les cas de personnes en détention provisoire depuis près de six années, sans avoir été présentés à un magistrat, en violation flagrante du droit à un procès équitable.

Au Camp de Roux, un établissement pénitentiaire situé à Bangui, la MINUSCA a documenté de manière régulière en 2023 la situation préoccupante de personnes privées de liberté illégalement depuis plusieurs années, notamment de deux personnes détenues depuis plus de six ans en vertu d’une simple ordonnance d’incarcération dont la validité ne peut dépasser cinq jours, et sans n’avoir jamais rencontré de magistrat. Ces derniers ont subi des mauvais traitements en détention, de telle sorte que certains développent des troubles mentaux.

Cas de torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants, travaux forcés illégaux en détention.

Ce rapport de l’ONU montre que des milliers détenus sont incarcérés dans des conditions inhumaines, entassées dans des prisons surpeuplées où l’accès à la nourriture, à l’eau et aux soins de santé défaillants, ce qui occasionne une malnutrition généralisée ainsi que la propagation de maladies au sein de la population de détenus. En outre, la MINUSCA a documenté 125 victimes de torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants en détention rien que sur l’année 2023, lesquels ont occasionné dans certains le décès pur et simple du détenu. Le rapport souligne aussi de nombreux cas de travail forcé illégal en détention conjugué à d’autres violations des droits de l’homme…

Grève de la faim entamée par certains détenus politiques symptomatiques de ces dérives.

La publication de ce rapport intervient dans un contexte de grève de la faim entamée à la prison politique du camp de Roux à Bangui depuis le 17 juillet 2024 par quatre détenus qui symbolise le fait qu’à Bangui la justice est instrumentalisée à des fins politiques. Ainsi, le député d’opposition Dominique Yandocka, le belgo-portugais Joseph Figueira et ainsi que les Franco-Algériens Osmani Samir Antonio et Bensalem Hacade dénoncent avec la dernière énergie du désespoir leur arrestation, leurs conditions de détention ainsi que le fait de ne pas pouvoir bénéficier à un procès équitable. Leur détention perçue par de nombreux observateurs comme une manipulation orchestrée par l’exécutif et les éléments du groupe paramilitaire russe Wagner illustre les dérives d’un régime régulièrement accusé de réprimer l’opposition et de bafouer les libertés fondamentales en République Centrafricaine.