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Les relations entre Alger et Washington sont meilleures qu’on ne le pense

La dégradation  des relations de l’Algérie avec son ancienne puissance coloniale, la France, a ouvert une opportunité pour les Affaires Étrangères algériennes de revoir ses alliances internationales. Depuis la fin du mois de juillet et la lettre du président français au Roi du Maroc, Mohammed VI, qui s’alignait sur les positions de Rabat sur le Sahara, la communication entre Alger et Washington a rarement été aussi confiante. Au grand dam de la France qui est en train de perdre, avec cette hostilité affichée à son partenaire algérien, un de ses derniers points d’appui dans cette région du monde.
 

La nomination en 2022 d’une ambassadrice américaine prestigieuse, Elisabeth Moore Aubin (59 ans) était une preuve de plus que l’Algérie a toujours été une alliée privilégiée des Etats-Unis dans le Nord de l’Afrique malgré la posture tiers mondiste du pouvoir algérien et les liens de ce dernier avec la Russie et l’Iran. La diplomate américaine qui rejoindra le Cameroun deux ans plus tard aura été, entre autres, conseillère en gestion de l’ambassade des États-Unis à Tel Aviv en Israël, officier de gestion de la mission américaine auprès de l’OTAN, assistante spéciale en charge de la coordination des opérations diplomatiques en Irak et en Afghanistan, et chargée d’affaires de l’Ambassade américaine au Canada. Elizabeth Moore Aubin a également été officier de quart au centre des opérations du département d’État, un service qui fournit aux décideurs de haut niveau des alertes et des briefings sur les événements mondiaux affectant les intérêts américains à l’étranger. Du lourd! Ce curriculum à lui seul témoigne de l’importance pour le département d’État américain des liens avec l’Algérie

Autre signe qui ne trompe pas, le colonel Remili, attaché militaire à Washington sous le règne de l’ex Président Bouteflija, avait été nommé à la tète des services extérieurs lorsque le général Gaïd Salah était devenu l’homme fort du pays. Alors que tous les hauts gradés proches de ce dernier ont été mis pied ou emprisonnés après le décès de ce dernier en décembre 1999, le colonel Remili, devenu général, a survécu à la terrible purge de ces années là. Ce militaire influent est à nouveau en charge des dossiers américano-algériens, protégé par l’importance que le pouvoir algérien, quel qu’il soit, attache à ses relations avec les États Unis, er cela déja sous Boumedienne, qui avait toujours maintenu une ligne directe, encore que discrète, avec la Maison Blanche.

Lors de son audition devant le sénat le 9 Juin 2021, Aubin avait déclaré que ses principales priorités en Algérie seraient de renforcer la coopération en matière de sécurité pour lutter contre le terrorisme et promouvoir la stabilité régionale, d’élargir les opportunités d’investissement pour les entreprises américaines afin d’avantager économiquement le peuple américain et enfin plaider pour de nécessaires réformes politiques et économiques dans le but de favoriser la stabilité de l’Algérie dans une économie post-COVID. »Je soutiendrai les entreprises américaines qui souhaitent s’associer à des entreprises algériennes pour le développement de ce stratégique secteur énergétique, au bénéfice des deux parties, avait-elle promis devant la commission de sénateurs ».

L’Ambassadrice, qui parle le français et l’italien, avait évoqué la lutte menée par l’Algérie contre l’extrémisme violent dans les années 1990 et avait félicité le pays pour le maintien de la stabilité grâce à des efforts rigoureux de lutte contre le terrorisme.

Les Américains sont toujours parvenus à jouer jeu égal entre Alger et Rabat- ce qui n’est hélas pas le cas d’Emmanuel Macron
 
C’est grâce notamment à l’aide des Etats-Unis que l’Algérie et le Maroc sont parvenus, ces derniers mois, à éviter un affrontement militaire majeur ces derniers mois, même si le danger demeure. Au Sahara occidental, à force de tâtonnements, les deux parties semblent s’être accordées sur certaines règles du jeu liées à leurs obligations en matière de droit international) visant à protéger les civils et à préserver le rôle de la mission de l’ONU sur le terrain.ce statu quo précaire pourrait être menacé par plusieurs facteurs de risque, notamment les appels lancés par les activistes du Front Polisario en faveur d’une action plus agressive contre le Maroc, la course aux armements entre Alger et Rabat, les surenchères des mises en cause sur Internet. 
 
Autant d’effets perturbateurs d’un équilibre instable entre Rabat et Alger qui ont mermis aux Américains d’avancer leurs pions et de se rapprocher de l’Algérie. Les administrations de Biden et de Trump ont montré sur ce dossier une même volonté d’apaisement.
 

Que faire face à l’AES?

 
Comble de l’ironie, l’Algérie, la France et les Etats Unis d’Amérique, se trouvent conjointement dans un profond désarroi face au pays de l’alliance des Etats du Sahel (AES), qui regroupe le Mali, le Niger et le Burkina. La France a quitté ses positions militaires au Mali au profit des forces de l’Africa Corps, anciennement Groupe Wagner Russe. Les forces aériennes américaines étaient contraint de quitter leur base des Drones d’Agadez au nord du Niger. Quant à l’Algérie, fustigeait par les militaires maliens au pouvoir par un coup de force, perd son statut de médiateur entre ces derniers et les forces rebelles Touareg de l’Azawad.
 
Ce revirement géostratégique régional redistribue les rôles des trois protagonistes qui se trouvaient à l’écart de la gestion de la région sahélo sahélienne sans s’avouer vaincus pour autant. La reconnaissance de la marocanité du Sahara occidental par la France pousse l’Algérie à un rapprochement avec les Etats Unis. Lesquels cherchaient un ancrage territorial et un partenariat avec un des pays clés de la région.
 

Des pourparlers Alger/Washington

Certes la Russie reste le principal allié militaire de l’Algérie. Mais, les derniers évènements survenus à la frontière algéro malienne ; a mis à mal la relation entre la Russie et l’Algérie. Les opérations conjointes, armée malienne et des éléments de l’ex groupe Wagner, dans la région de l’Azawad a été perçue par Alger comme entrave à ce qu’elle considère comme sa profondeur stratégique.

Or dès la fin de l’année 2023, les pourparlers ont été entamés entre les hauts responsables des deux parties à travers des visites et des négociations sur un projet de partenariat dans le domaine de la sécurité en méditerranée occidentale et au Sahel. L’année 2024 a marqué un développement considérable par l’entente des deux parties sur la base d’un mémorandum d’accord renforçant leur coopération militaire affectant plusieurs domaines en matière de défense.

Un système de communication sécurisé américain entre différentes régions militaires et leurs unités afférentes a été testé par l’armée algérienne prélude à des manœuvres conjointes dans les domaines de la marine, où le pays a développé des capacités de défense appréciables de ses forces en méditerranée occidentale, mais aussi une collaboration profonde dans la lutte antiterroriste, trafic de drogue.

Biden et Trump, la continuité

 
Fin décembre, l’accord était ficelé entre les deux parties et n’attendait que de l’officialiser par une signature des hauts responsables des deux parties. Il est conçu sur la base de mutualisation des expériences et des moyens dans le but de renforcer la sécurité régionale à travers une coordination en matière de renseignement, de formation cyclique permettant d’élaborer des stratégies communes dans le domaine de la cybersécurité, lutte antiterroriste, contre le trafic humain, et le trafic de drogue.
 
Bien que l’accord ait été mis sur pied par l’administration Biden, la nouvelle équipe a marqué un silence complice. Le gouverneur de la Floride, et fraichement nommé au département d’état aux affaires étrangères, n’a pas fustigeait l’Algérie qui a augmenté son budget militaire à hauteur de 25 milliards de dollars.  Alors qu’en 2023, sénateur de Floride, il avait exhorté son gouvernement à sanctionner l’Algérie en vertu de la loi CAATSA « Countiring America’s Adversaries Through Sanctions Act ». La nouvelle administration Trumps entame son mandat usant d’un pragmatisme assumé.
 
Le silence observé, de la nouvelle administration républicaine entrée en fonction le 20 janvier à la maison blanche, en dit long sur la nature de la nouvelle relation avec l’Algérie. Ce pays cherche à se diversifier dans le secteur des hydrocarbures, comme le prouve l’accord entre Chevron north africa Ventures LTD, dans l’exploration des ressources énergétiques offshore.
 

Sept pays frontaliers !

L’Algérie partage ses frontières avec sept pays, qui tous à l’exception de la Tunisie et de la Mauritanie, sont ouvertement hostiles à l’Algérie. comme le Maroc, le Mali ou les forces du Maréchal Haftar en Libye. Comme jamais dans l’histoire du pays, l’armée algérienne aspire à renforcer ses capacités de contrôle aux frontières à travers la modernisation de ses équipements de surveillance aérienne et terrestre.  Lors de sa visite en Turquie le 15 et 16 mais 2022, le président algérien a plaidé auprès de son homologue turc pour une l’acquisition de Drones Bayratkar TB2 qui ont fait leur preuve en Libye et en Azerbaïdjan. La proposition a essuyé refus catégorique du fait du contrat passé avec le Maroc en 2021 pour l’acquisition de 13 drones avec une mention d’exclusivité sur l’ensemble du marché maghrébin.

L’Algérie souhaite, à travers sa coopération avec les Etats Unis, développer la technologie du Drone de reconnaissance et de surveillance et de collecte de renseignement. Bien que son aviation dispose en grand nombre d’appareil de combat et de chasse, il n’en demeure pas moins que sur l’usage de la technologie des drones occasionne un retard qu’il faut combler.
 
Avec le premier budget militaire sur le continent, et les accords de coopération, aussi bien avec les Etats unis ou le partenaire stratégique traditionnel la Russie, l’Algérie affichent les ambitions régionales sans complexe.

« Il ne nous échappe pas, qu’à l’occasion de la prise de fonction du 47ème président de votre pays, de vous présenter, à vous et au peuple américain ami, nos sincères félicitations. Ainsi, nous aspirons à renforcer nos coopérations bilatérales dans différents domaines et des secteurs, y compris ce qui inclut la défense et la sécurité » telle était l’allocution du chef d’Etat major et ministre délégué auprès du ministère de la défense lors de la signature de l’accord de coopération avec le général Michael Langley, chef de l’Africom à Alger le 22 janvier passé.
L’ambassade US à Alger a mis « l’accent sur les perspectives communes » en remerciant « l’Algérie pour son soutien et sa participation aux exercices militaires régionales ». Quant au général de l’Africom, il souligne « le rôle de l’Algérie dans la région. Les deux pays continueront à travailler ensemble pour assurer une sécurité régionale globale et trouver des solutions constructives aux problèmes » déclare le chef de l’Africom.

À petits pas !!!

 
La coopération dans le domaine de la sécurité et de défense des américains en Algérie n’est pas nouvelle. L’amère expérience de la jointe venture algéro américain dans le domaine de l’énergie et de défense, BRC, a laissé des traces au sein de l’ANP. Sa dissolution fracassante a provoqué une onde de choc au sein de la Sonatrach mais aussi au sein des services de sécurité. Les stigmates de cette affaire, où s’entremêlent pétrole, armement, service de sécurité ne sont pas tout à fait effacés.
La démarche actuelle est prudente. Le projet d’exploration offshore est piloté, coté algérien, l’agence nationale pour la valorisation des ressources hydrocarbures « AL NAFT » pas par la direction centrale de Sonatrach comme à l’époque de Chakib Khellil. Ce projet est totalement séparé de la coopération défense et sécurité comme fut le cas avec BRC, très liée à Halliburton et ses filiales dans le domaine de l’armement et du pétrole.