Les États-Unis relancent, sous couvert de l’ONU, les négociations sur le dossier du Sahara. Depuis quelques mois la diplomatie américaine s’active pour obtenir des avancées pour une solution politique sur un conflit vieux de près d’un demi-siècle.
Abderrahmane El Maghribi
C’est le SG de l’ONU, Antonio Guterres, qui a été sollicité par l’administration Biden pour organiser une conférence avec les protagonistes du dossier (Algérie, Maroc au premier chef ainsi que l’Espagne, la France, les USA et la Russie).
À ce stade, selon nos informations, l’Algérie, précisément le Président Abdelmajid Tebboune, a donné son accord pour une première rencontre. Le Maroc réserve sa réponse.
L’année 2024 est chargée en rdv électoraux : présidentiels en Algérie et aux USA. Il est peu probable qu’une solution politique émerge au cours de cette année, en revanche la reprise des négociations seraient portées au crédit de l’actuel locataire de la Maison Blanche et du Palais d’El Mouradia à Alger.
La normalisation Israël/Maroc gelée
Alger, soutien indéfectible des Sahraouis du Front Polisario, a déjà reçu Joshua Harris, vice- secrétaire d’état américain pour le Proche-Orient en septembre 203, pour la deuxième fois en moins de trois mois. L’administration ambitionne de relancer les négociations sur le Sahara et sortir du statu quo.
Selon le secrétariat d’État, le diplomate américain s’est ensuite rendu à Rabat pour trouver « une solution pérenne et honorable sans plus tarder » à ce conflit. Washington semble vouloir relancer ses efforts après la guerre à Gaza pour défendre les accords d’Abraham. Dans ce cadre : le Maroc avait normalisé ses relations avec Israël après la reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental par les États-Unis de l’ex-président Donald Trump. Mais depuis octobre 2023, début de la guerre à Gaza, le processus de normalisation est quasiment gelé.
Les États-Unis veulent démontrer que, malgré la tragédie en Palestine ; ils n’ont pas détourné le regard du Maghreb. Ils ont aussi tiré la leçon de ce qui se passe au Proche-Orient et des conséquences, pour leurs intérêts stratégiques, d’un conflit non réglé.
Cette visite a un sens : elle montre que malgré les accords d’Abraham signés en 2020, les États-Unis en reviennent aux Nations Unies et remettent le dossier du Sahara sur la table, sans renoncer aux accords d’Abraham. L’administration américaine cherche à prendre des initiatives sur plusieurs dossiers internationaux (Palestine, Sahara ou Arménie), pour y favoriser des solutions politiques négociées avec les principaux protagonistes. Cela avant l’élection présidentielle américaine prévue en novembre 2024, à laquelle l’actuel président Joe Biden est candidat, tout comme son rival Donald Trump.
La Russie présente au Maghreb
Le Maroc, dont le plan d’autonomie pour le Sahara a reçu le soutien de 80 pays, diversifie ses partenariats étrangers, compte tenu d’un sentiment croissant de scepticisme régional quant à la fiabilité de Washington et de Paris. Il met en évidence les nouveaux investissements de la Chine au Maroc, notamment dans l’industrie automobile des voitures électriques, ainsi que le protocole d’accord sur la coopération nucléaire civile entre le Maroc et la Russie en 2022.
De son côté, l’Algérie entretient un partenariat sécuritaire et stratégique approfondi avec Moscou, ainsi qu’un plan de coopération stratégique global avec la Chine pour les cinq prochaines années.
La remise en cause de l’ordre international, guerre en Ukraine et à Gaza, issu de la seconde guerre mondiale, bouscule les intérêts américains. La Méditerranée reste un enjeu sécuritaire, énergétique et politique majeur. Washington tente d’imposer un nouveau tempo et garder son avantage stratégique lorsque les équilibres mondiaux seront renégociés.
C’est dans ce contexte que le Sahara devient une préoccupation américaine, le Maroc a été le premier au monde à reconnaitre l’indépendance des États-Unis, une profondeur historique et une alliance à laquelle Joe Biden ne semble pas prêt à renoncer.