Le sort du patron du renseignement militaire algérien, Mahrez Djeribi

Le patron de la DCSA algérienne, le général Mahrez Djeribi, avait été brutalement écarté de ses fonctions samedi dernier après la fuite en Espagne du général el Djinn, ex chef du contre espionnage, que ses hommes étaient chargés de surveiller. Or le même est apparu à nouveau quatre jours plus tard, soit mercredi dernier, alors que le chef d’état major, le général Chengriha, s’était déplacé dans la cinquième région militaire pour se féliciter d’une opération anti terroriste victorieuse. On découvre l’ancien bras droit du chef des armées, la mine renfrognée, le deuxième à partir de la gauche et très en retrait derrière le patron de région, le général-Major Noureddine Hambli, alors qu’un chef du renseignement aurait du se tenir, selon la tradition militaire, au plus près de Chengriha. 

Mahrez Djeribi était-il contraint, ce jour là, de faire de la figuration pour montrer à l’opinion algérienne que l’armée est soudée, les terroristes arrêtés et l’Algérie gouvernée au de là de l’affaire el Djinn? Ou bien le général major, promu en juillet dernier (!), est-il rétabli dans ses fonctions après avoir été disculpé de toute déloyauté dans les soutiens dont a bénéficié le général el Djinn dans ses complots contre l’État-Major, dans son évasion spectaculaire et dans son départ clandestin vers l’Espagne?

C’est à n’y rien comprendre pour qui cherche à suivre les innombrables mouvements, démissions et emprisonnement qui, ces derniers mois, secouent le haut commandement algérien, « colonne vertébrale » du régime, delon le mot de Boumedienne, et certes le garant de la sécurité du pays, mais qui est, il faut l’admettre, bien mal en point.

À la suite d’une opération anti-terroriste ayant conduit à la neutralisation de six terroristes dans la région de Tlidjene (Tébessa), le Général d’Armée Saïd Chanegriha, chef d’état-major de l’Armée Nationale Populaire (ANP) s’est rendu sur place ce mercredi. Au-delà des félicitations adressées aux militaires, le déplacement avait pour objectif central d’appeler à une vigilance renforcée et à une poursuite implacable de la lutte contre les résidus du terrorisme. Le patron de l’armée algérienne était accompagné du Général-Major Noureddine Hambli, commandant de la 5e région militaire, pais aussi par le chef du renseignement militaire qu’on disait plus prche de la porte que de l’augmentation après le cataclysme que furen l’évasion du général el Djinn et son arrivée clandestine en Espagne. 

 

Autre surprise, le général Chengriha recevait, la veille de sa tournée dans la 5eme région militaire, le ministre russe délégué au ministère de la Défense. Or en une pareille occasion, le chef des armées était entouré de ses plus proches collaborateurs à l’exception du général Mahrez Djeribi, qui n’avait pas été convoqué. Ce qui semblait confirmer son éviction. Du moins jusqu’au lendemain où Mahrez Jribi refait surface à Tebessa comme on l’a vu!

Le rapport de l’ex patron de la DCSA

Mahrez Jribi, le plus à droite sur l’image

D’autres raisons peuvent expliquer ce refroidissement des relations entre le cher d’état-major, le général Chengrha et son fidèle second, le général major Mahrez Djeribi. Sur recommandation de l’État major général, les services de l’ex chef de la DCSA, avait produit au début de l’été un rapport détaillé sur l’état des unités opérationnelles face au contexte de nombreuses crises régionales et au sentiment d’encerclement d’une partie du pouvoir algérien. 

Le patron de l’institution militaire cherchait à se rassurer. Or dans son rapport, celui qui était encore chef de la sécurité de l’armée décrit un moral des troupes en berne, y compris chez les hauts gradés, et le sentiment de peur qui gangrène l’institution militaire traumatisée par le précédent syrien d’un écroulement des forces armées. Mahrez Jribi préconise d’offrir aux officiers supérieurs emprisonnés une sortie honorable alors que certains souffrent de pathologies chroniques, que d’autres ne sont pas jugés après des mois d’instruction et que deux ou trois généraux, dont l’ancien chef de la deuxième région militaire, sont morts brutalement dans la sinistre prison de Blida.

Malheur aux porteurs de mauvaises nouvelles, fussent-ils animés par un fort sentiment de patriotisme, celui de nombreux cadres intermédiaires au sein de l’institution militaire algérienne

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)