Dans une interview accordée au journal USA today business, l’ambassadeur d’Algérie à Washington et ancien ministre des affaires étrangères, Sabri Boukadoum, confirme le renforcement des relations de l’Algérie avec les USA. La visite du chef de l’Africom le 22 janvier à Alger, le général Michael Langley, n’était qu’une étape dans une coopération entre les deux paysqui tend à dépasser le secteur habituel ; l’énergie et la défense, le domaine agricole et les investissements dans divers secteurs.
La volonté d’Alger d’aller plus loin dans la coopération avec les américains, en diversifiant le partenariat aux secteurs économiques et commerciaux, est un choix stratégique face à une Europe qui reste réticente à investir en Algérie, un pays perçu à Paris ou à Bonn comme un simple importateur de produits manufacturés. Hormis l’Italie qui prévoit un large projet d’investissement, « le plan MATTEI pour l’Afrique » initié par gouvernement d’extrème droite de madame Meloni et qui devrait favoriser la culture du blé dans les régions semi désertique. Dans ce but, l’Algérie, deuxième importateur en Afrique après l’Égypte,. a concédé 36000 hectares à l‘Italie .
Dans son entretien avec la presse américaine, l’ancien ministre des affaires étrangères redéfinit les priorités sécuritaires, économiques, commerciales, singulièrement de diversion de l’investissement dans des secteurs promoteurs telle que l’énergie renouvelable, l’hydrogène comme carburant d’avenir, et des terres rares dont le pays dispose d’une large part de réserve mondiale.
Coté américain, l’Algérie offre des opportunités géostratégiques. De part sa position géographique comme pays pivot au Maghreb et porte d’entrée en Afrique, les administrations, Biden comme Trump, n’ont pas changé de cap. Si les compagnies américaines dominent dans le domaine de l’énergie (pétrole et gaz), les ambitions de Washington est d’élever, dans un futur proche l’Algérie, du rang de partenaire à celui d’allié en accélérant la coopération dans le domaine sécuritaire au Sahel dont la progression de l’Africa Corps Russe inquiète Washington. En effet, la coordination dans le cadre de la sécurité régionale à travers le partage du renseignement, de formation aux nouvelles innovations dans le domaine de la cybersécurité, la lutte anti terroriste, le trafic humain et de la drogue, reste sur la table de négociation. Il n’en demeure pas moins que d’autre secteur de coopération sont encore à l’étude.
On vit actuellement la concrétisation d’une politique de rapprochement, entamée déjà, en 2018, dont l’actuelle ambassadrice a joué un rôle prépondérant. Il suffit de réécouter son audition au sénat américain, le 09 juin 2022, pour se rendre compte de l’accomplissement de cette politique élargie aux divers domaine y compris l’exploration des ressources énergétiques offshore, était dans les plans initiaux.
Un partenariat diplomatique solide
L’Algérie est membre non permanent du conseil de sécurité de l’ONU pour l’année 2024-2025, une aubaine pour sa diplomatie très active sur des dossiers sensibles tel que celui du cessez le feu à Gaza, ou l’arrêt de la guerre au Soudan et au RDC (République démocratique du Congo). Promouvoir des perspectives de paix et de stabilité sur le continent Africain relève des priorité de la diplomatie algérienne dont les étoiles sont alignées de manière équilibrée.
C’est sur le continent africain que la diplomatie algérienne doit faire preuve d’efficacité d’autant qu’elle vient de rafler un siège de la vice présidence de la commission africaine. Contrairement aux administrations précédentes, celle de Trump y voit ce partenariat avec l’Alger comme une opportunité de s’implanter afin d’imposer un équilibre à l’influence Russe, Chinoise, et Turque et indienne.
Sur ce sujet l’ancien ministre des affaires étrangères explique la position de son pays en disant que « Le monde évolue rapidement, mais en ce qui concerne l’Algérie, nous continuerons à dialoguer avec la nouvelle administration américaine. Des appels ont déjà eu lieu entre le nouveau secrétaire d’État américain, Marco Rubio, et notre ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf. J’ai eu de multiples discussions avec la nouvelle administration sur la coopération actuelle et future. Nous restons ouverts et optimistes. Notre objectif est de renforcer les relations bilatérales et de contribuer à la sécurité mondiale. »
Un partenariat sécuritaire
Mondafrique a consacré un long article au développement de la coopération sécuritaire avec l’accord signé avec l’Africom le 22 janvier 2024. Dans l’interview de l’ancien ministre des affaires étrangères et actuel ambassadeur à Washington, ce volet constitue l’axe central dans la coopération. Il le résume ainsi, « Nous avons récemment signé un protocole d’accord avec le ministère américain de la Défense par l’intermédiaire de sa branche africaine, l’AFRICOM. Cet accord ouvre de nouvelles perspectives de coopération. Nous entretenions déjà une forte collaboration, notamment dans les opérations de recherche et de sauvetage et dans le partage de renseignements, mais notre partenariat s’étend également à la sécurité au Sahel. ».
La stabilité dans la région sahélo sahélienne est indissociable à la sécurité et au développement dans la région. Les États unis soutiennent l’accord du Gazoduc transsaharien, TSGP trans-Saharan Gas-Pipeline) signé à Alger le 11 février 2025. L’accélération de la réalisation de projet de plus de 4000 kilomètres est un atout pour le développement des pays de l’AES.
Les perspectives énergétiques
Les américains sont présents dans le secteur depuis six décennies. Ils tendent à améliorer les moyens technologiques d’extraction et de traitement du pétrole et du gaz dont l’Algérie perd une partie. A travers la maîtrise technique, les compagnies américaines inscrivent leur présence dans la durée tout en diversifiant l’activité d’exploration des ressources en Offshore. Les américains, déjà leader mondial dans l’énergie, veulent se positionner comme un acteur incontournable dans l’approvisionnement du marché européen en faisant d’Alger un hub énergétique à travers le pipeline Abuja , Niamey, Alger.
« Sur le plan économique, les investissements américains en Algérie sont en hausse, notamment dans le secteur de l’énergie. Les États-Unis sont un partenaire clé du secteur énergétique algérien depuis plus de 60 ans, et nous assistons aujourd’hui à une diversification au-delà du secteur de l’énergie, vers des secteurs tels que l’agriculture et les énergies renouvelables. » disait l’ambassadeur algérien à Washington.
L’administration Trump se lance dans une politique d’investissement soutenue dans le pays, une politique d’anticipation sciemment orchestrée contre la présence de concurrents Chinois ou indien, allemand dans le domaine de développement des énergies non fossiles. A ce sujet, l’ambassadeur note qu’ « Au-delà des énergies fossiles, l’Algérie se développe dans les énergies renouvelables. Avec 330 jours de soleil par an, le Sahara offre un potentiel important en énergie solaire. Nous investissons également dans l’hydrogène comme carburant du futur et explorons l’extraction de minéraux de terres rares. », L’ambassadeur tend à rassurer les partenaires de son pays sur la fiabilité des engagements tenus en rappelant que « L’Algérie a toujours respecté ses engagements en matière de sécurité énergétique. Même dans les périodes difficiles, nous n’avons jamais manqué à nos engagements en matière d’approvisionnement auprès de nos partenaires. Alors que la demande énergétique algérienne augmente, nous restons déterminés à fournir des ressources fiables et durables à l’Europe et au-delà. »
L’incitation à l’investissement
Le pays a toujours compté sur l’investissement interne dans son système de développement. La méfiance de l’investissement étranger repose sur une culture politique du choix socialiste comme stratégie de développement après l’indépendance avec des plans quinquennales. Le monde d’hier a laissé place à une nouvelle politique économique qui s’appuie sur l’apport des capitaux engagés sur des projets de développement. Le recours à une politique d’investissement est une nouveauté dans le pays , elle exige l’accompagnement du secteur bancaire dans les projets de développement.
Dans soin interview, l’ambassadeur algérien joue au commercial qui séduit ses clients en les incitant à prendre des parts dans une une entreprise usant d’arguments persuasifs. « «L’Algérie est une terre d’opportunités en raison de son immense territoire : c’est le plus grand pays d’Afrique, du monde arabe et de la région méditerranéenne. Nous disposons d’une population jeune, de ressources naturelles abondantes et d’un large éventail d’opportunités d’investissement.» affirme l’ambassadeur.
A ce titre, la nouvelle politique d’investissement étranger doit sortir du secteur des hydrocarbures. L’ambassadeur présente une panoplie de secteur dont des opportunités peuvent se concrétiser. « l’investissement Outre les secteurs de l’énergie et de l’agriculture, le secteur minier offre d’importantes opportunités d’investissement, notamment dans le Sahara et le nord de l’Algérie. De nombreux investisseurs influents et fortunés manifestent leur intérêt pour le pays. »