Les Présidents de la République français qui se sont succédés au pouvoir sous la Veme République avaient tous coutume de peser au trébuchet leurs relations avec le Maroc et l’Algérie, les deux frères ennemis du Maghreb. Qu’il s’agisse de Mitterrand, Chirac, Sarkozy ou Hollande, tous ont tenté de préserver des relations apaisées aussi bien avec les militaires algériens qu’avec le Royaume chérifien. Ce qui supposait quelques contorsions diplomatiques sur le dossier délicat du Sahara occidental
Cette démarche équilibrée n’est plus de saison. L’adepte du « en même temps » qu’est Emmanuel Macron a, cette fois, choisi son camp et privilégié, depuis son arrivée au pouvoir, les relations confiantes qu’il entend nouer avec le président Tebboune, en faisant l’impasse sur le rôle de figurant que joue ce dernier dans le dispositif institutionnel algérien, Au détriment de ses liens avec le Palais Royal, où certains dénoncent, depuis plusieurs années, une véritable arrogance française., même si le Président français a cri bon d’envoyer pour rétablir la une communication entre les deux pays son nouveau ministre des Affaires Etrangères, Stéphane Séjourné, dit « Dej », son ancien conseiller politique au ministère de l’économie qu’il considère toujours comme un simple collaborateur
L’axe Paris-Alger
L’annonce d’un voyage officiel en France du chef d’état algérien au printemps n’a pu que renforcer le sentiment d’un deux poids deux mesures. La visite à Paris, le lundi 23 janvier, du chef d’état major algérien, le général Chengriha, annonçant quelques achats d’armement et préparant la venue de son Président, est une première dans les relations franco-algériennes. Autant d’annonces protocolaires spectaculaires qui témoignent de l’état d’esprit d’Emmanuel Macron à l’égard du régime algérien qui n’a jamais été rappelé à l’ordre pour la répression brutale infligée aux mobilisations populaires du Hirak.
On connait les raisons qui incitent le Président français à renforcer les relations bilatérales avec l’Algérie: la sécurisation de l’approvisionnement en gaz dans cette période de tension; la possibilité d’une coopération avec l’allié algérien au Sahel, cette Afrique sub saharienne où on assiste au rejet de la France et à un rapprochement clair des juntes militaires avec l’Algérie; la volonté constante enfin de pacifier les relations mémorielles avec l’immigration algérienne.
Et tant pis si la relation franco-marocaine souffre de cette préférence algérienne et d’une politique restrictive de visas pour l’ensemble de la population marocaine, y compris au sein de de la classe moyenne éduquée et francophone.
Des lourds contentieux
Sans s’avancer beaucoup, il y a fort à parier que le voyage d’Emmanuel Macron au Maroc, annoncé à plusieurs reprises et toujours reporté, n’est pas pour demain. D’autant que de nouvelles incompréhensions se sont ajoutées à des contentieux plus anciens.
Ces dernières années, une sévère guerre des services met à mal les relations entre les deux pays Des centaines de courriels et de documents confidentiels de la diplomatie marocaine et du service de renseignements extérieurs (Direction générale d’études de documentation) ont été diffusés sur Twitter, voici quelques années, par un profil anonyme qui se faisait appeler « Chris Coleman ». Or, d’après les sources de Mondafrique, on sait désormais qui se cachait derrière cet anonymat : la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), les services secrets français.
On comprend que dans ces conditions les relations se soient refroidies entre les deux pays, tant la divulgation de ces courriers classés secret Défense n’est pas un procédé habituel entre deux pays traditionnellement alliés.
L’affaire Pegasus, ce logiciel israélien performant qui aurait été utilisé, selon la presse française, par les services marocains, y compris pour écouter le Président français, n’a guère amélioré le climat entre les deux capitales. Emmanuel Macron n’a jamais démenti ces allégations. Plus généralement, le rapprochement entre le Royaume chérifien et la droite israélienne a provoqué une irritation profonde des français qui perdent de fait le rôle d’interlocuteur privilégié du Maroc
La guerre en Ukraine enfin qui a vu les Marocains adopter des positions très conciliantes à’égard de la Russie n’a guère amélioré le climat diplomatique entre les deux pays..