Le monde arabe ne confond pas Hamas avec Daech

Sa majesté la reine Rania de Jordanie est palestinienne. Elle est apparue, en ce mardi 25 octobre, sur l’écran de la chaîne de télévision américaine CNN pour y déplorer le «double standard d’appréciation » du monde occidental  sur la question du mouvement Hamas et de son affrontement avec Israël.

Un article de Joelle Hazard

Joelle Hazard, l’auteure de l’article, dans les ruines de Gaza …il ya vingtans

Pour la monarque, les réactions occidentales négatives devant les bombardements israéliens de la Bande de Gaza ne sont pas à la hauteur de la réprobation faite dans le monde entier des massacres perpétrés par le Hamas en Israël ; l’intense émotion suscitée en Israël et partout ailleurs par l’odieuse prise d’otages, parmi lesquels figurent des personnes âgées et des enfants, n’est pas équilibrée par la condamnation qui devrait pourtant être faite des tirs israéliens – faits parfois à l’aveugle – sur des centaines de milliers de femmes et d’enfants parqués dans la prison à ciel ouvert qu’est GAZA.

La reine redoute surtout que l’opération terrestre annoncée par le Premier ministre Netanyahou ne soit fatale à la survie même de la Bande de Gaza et de ses deux millions de pauvres hères. Son époux plaide pour un cessez-le-feu : il a expressément demandé au président français d’intervenir auprès des Israéliens pour qu’ils renoncent à cette escalade de la mort, d’autant plus que la crainte est grande en Jordanie d’avoir à revivre l’arrivée de millions de réfugiés supplémentaires auxquels l’Égypte refuse, pour sa part, tout asile.

Lors de sa conférence de presse du Caire, le président Macron a affirmé que la France ne pratiquait pas les doubles standards sur le droit international… et que toutes les vies se valaient sans hiérarchie, que toutes les victimes méritaient « notre compassion ». Dont acte.

En revanche, la proposition qu’il a faite d’une coalition régionale et internationale contre le Hamas qui serait calquée sur le format utilisé en Irak et en Syrie pour lutter contre Daech ne passe absolument pas !  Aucun pays arabe ne peut ni ne pourrait accepter un tel ciblage, sous peine d’intifada interminables. Pour « la  rue arabe » et pour tous les Palestiniens, même les plus modérés, le Hamas n’est pas Daech ! Et ils ont raison.

Quel est l’Agenda du président français ?

Le Hamas est bien entendu un mouvement ultra intégriste issu des Frères Musulmans, avec une branche armée et ses commandos de fédayins qui pratiquent des attaques « terroristes », de même que la plupart des mouvements de résistance ou de libération à travers le monde ont pu le faire : tels le  FLN, l’IRA, l’ANC, la SWAPO, le MPLA, classés comme organisations terroristes.

L’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) en tout premier lieu a été un mouvement de résistance armée très actif, certes avec ses factions  comme le FATAH d’Arafat et ses milices armées comme les Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa, le FPLP et le FDLP,  pendant 24 ans, jusqu’à ce que l’OLP, en 1988, reconnaisse enfin le droit d’Israël à vivre « en paix et en sécurité » et renonce totalement au terrorisme, en devenant le partenaire palestinien des négociations pour régler le conflit dit israélo-palestinien.

en 2007, le mouvement du HAMAS, inspiré de la mouvance dite des Frères Musulmans et dissident de l’OLP, s’empare, au terme d’une semaine d’affrontements meurtriers avec le Fatah, du pouvoir dans la Bande de Gaza

Les pourparlers ont malheureusement traîné en longueur, jusqu’à ce que, en 2007, le mouvement du HAMAS, inspiré de la mouvance dite des Frères Musulmans et dissident de l’OLP, s’empare, au terme d’une semaine d’affrontements meurtriers avec le Fatah, du pouvoir dans la Bande de Gaza – une enclave de 40 kilomètres de long et de 12 kilomètres de large surpeuplée le long de la Mer. En un an, la lutte fratricide entre les deux factions palestiniennes fera 600 morts. La Bande de Gaza va subir alors un véritable blocus de la part de l’état d’Israël qui l’entoure et va même jusqu’à lui refuser -sauf à quelques pêcheurs sur de minables rafiots – le libre accès à la Mer Méditerranée qui la borde et dont le sous-sol côtier est donné pour abriter des réserves non négligeables de Gaz.

En dépit de sa violence identitaire et de ses références aux pires enrégimentements islamistes, le Hamas constituait un parti national palestinien et non un mouvement globalisé voulant imposer par le jihad la loi coranique sur le monde.  La cohabitation du mouvement avec la population de l’enclave s’est banalisée avec le temps. Faute d’alternative crédible, les habitants de Gaza  ont accepté leurs nouveaux chefs et les ont même tant bien que mal démocratiquement adoubés pour survivre à leur enfermement de plus en plus sévère.

Quand il n’y a eu plus rien à espérer ni plus personne à croire, que restait-il d’autre à des centaines de milliers de réfugiés que le recours à Dieu !  Le Fatah glorieux du temps d’Arafat, celui qui avait été capable d’entériner des accords de paix, de reconnaitre l’État d’Israël, s’était entre temps littéralement  suicidé.  Débauche d’affairistes, corruption, batailles de pouvoir, petits arrangements avaient eu raison d’un pouvoir sans leadership capable. Yasser Arafat était mort et le Fatah – le mouvement palestinien de référence – était en déliquescence. Israël en profitait pour s’étendre en grignotant l’espace vital initialement dévolu à la future Palestine par le moyen d’implantations sauvages.

L’objectif déclaré du Hamas – dont la montée en puissance à Gaza,  aidée par l’argent du Qatar et répondait en sous-mains aux visées politiques d’Israël – était de prendre le contrôle de la totalité de la future Palestine.  Le rejet de plus en plus unanime par l’ensemble des Palestiniens d’un Fatah discrédité en Cisjordanie – une débâcle illustrée par le spectacle affligeant de son chef Mahmoud Abbas – devait lui faciliter la tâche. Mais le sort en a voulu autrement : le Hamas n’a pas voulu attendre ! La colonisation de l’espace initialement promis à la future Palestine prenait des proportions telles que ses dirigeants voulurent probablement forcer le sort par un coup de force suicidaire.

Il n’y a aucune solution militaire à ce drame. Seule une désescalade réciproque, après un cessez-le-feu le plus proche possible, pourrait encore éviter les risques énormes d’un conflit régional qui ferait le lit des Américains. Tout le monde a compris que leurs porte-avions ne sont pas là pour protéger Israël contre les Gazaouis mais bien parce que la Marine russe est à Tartous et que son aviation est à Hmeimim, dans la Syrie d’à-côté.

L’agenda du président français vient de ce qu’il est conscient de l’énorme danger et de la grande délicatesse de la situation. La France n’a plus dans la région que quelque six-cents soldats instructeurs en Irak : sa proposition n’a pu tromper personne et cette piqure de morphine aura voulu faire réfléchir en donnant un coup de pied dans une fourmilière insensée, soulignant ainsi les responsabilités de chacun pour éviter à tout prix le déclenchement d’une grande opération terrestre à Gaza, qui serait de la folie.

 

2 Commentaires

  1. Cher Denis : allez lire les articles de Gideon Levy ,un brillant journaliste juif pour vous eclairer et vous depoussierer un peu les yeux.
    l’injustice ne mene que vers les catastrophes et la violence engendra la violence!!!
    Amicalement votre

  2. Comment ne pas retenir le côté terroriste extrême du Hamas ? Avoir tuer des enfants, des bébés, tuer des parents devant ses parents, violer, arracher les fœtus des ventres de leur mère, ce serait simplement de la résistance ? Votre texte perd toute crédibilité. J’ai au départ bienveillant mais j’arrête là la lecture.

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