A trois jours de l’élection présidentielle dans une Côte d’Ivoire tendue comme un arc, l’ ex-président Laurent Gbagbo a donné une longue interview au journaliste Alain Foka. La forme comme le fond de cet entretien ont décontenancé plus d’un Ivoirien. Décryptage.
Correspondance Abidjan
Laurent Gbagbo, le grand absent de la campagne présidentielle ivoirienne
Depuis plusieurs jours, la rumeur bruissait : Gbagbo va parler. Et les militants de l’opposition comme ses adversaires de pronostiquer le jour et l’heure où le « chef » prendrait la parole. Finalement, au beau milieu de l’après-midi du 22 octobre, la vidéo a commencé à circuler sur les réseaux sociaux. Tout le monde attendait un message court, incisif avec des mots d’ordre clairs, ils ont eu droit à un entretien de 58 mn avec le journaliste Alain Foka, dans lequel le chef du PPA-CI revisite longuement son passé de président et ressasse de vieilles antiennes.
Souriant, détendu, presque désinvolte, alors qu’à la veille de ce scrutin majeur, les tensions sont palpables, Laurent Gbagbo, au grand désarroi de ses militants, a même évoqué, sa prochaine retraite. Etait-ce vraiment le moment ?
« Ce n’est pas une élection, c’est un putsch civil »
Il a fallu attendre la 17ᵉ minute pour entendre sa première phrase forte : « Ce n’est pas une élection, c’est un putsch civil », a-t-il martelé à plusieurs reprises, avant d’évoquer un « braquage électoral ». Enfin, à la 43ᵉ minute, l’ancien président entre dans le vif du sujet
« Je ne donne pas l’ordre aux gens d’aller voter », affirme-t-il.
Le journaliste Alain Foka le relance:
- « Est-ce que vous leur donnez l’ordre de descendre dans la rue ?
- « Ceux qui sont dans la rue, je les soutiens. Ceux qui manifestent contre ce braquage électoral, je suis avec eux. » « Ceux qui sont dans la rue, je les soutiens, ça il faut qu’il n’y ait même pas l’ombre d’un doute pour ceux qui manifestent contre ce braquage, mais……
- « vous ne les appelez pas à descendre dans la rue ?
- « Non, mais ceux qui descendent dans la rue pour protester contre cette manière d’envisager des élections, je les soutiens. je suis avec eux. »
« Ambiguité stratégique »
Deux raisons expliquent cette « ambigüité stratégique ». D’une part, l’ex-président est marqué par ses années de prison à la Cour Pénale internationale, il évite soigneusement tout propos pouvant être interprété comme un appel à la violence. D’autre part, les arrestations des militants de l’opposition se multiplient, officiellement selon le procureur il y en aurait eu plus de 700 mais le chiffre est sans doute, comme le dit d’ailleurs Laurent Gbagbo dans cet entretien plus près des 1000. Il est un des seuls leaders de l’opposition à vivre encore dans son domicile d’Abidjan et risque à tout moment soit une incarcération soit l’encerclement de sa maison par des forces de l’ordre. Tidjane THiam est resté à Paris, son vice président Akossi Benjo à pris la poudre d’escampette, un autre cadre du PPA-CI Damana Pickass a fuit le pays également ; idem pour l’activiste Pulchérie Gbalet qui harangue ses compatriotes depuis l’extérieur.
En réalité, sous ses faux airs détendus, il est apparu les yeux cernés, fatigué, amaigri. Le vieux lion livre son dernier combat.
Cet ancien de RFI, Alain Foka, devenu un propagandiste anti blanc