Sur son compte X, le post de l’ancien ministre des eaux et forêts de Gbagbo, Lazare Koffi Koffi, qui a rallié le parti de Simone Gbagbo depuis sa création, a répondu en deux petits mots à l’appel à l’union lancé, dimanche 14 juillet 2024, par l’ex-président à tous ceux qui ne veulent plus d’Alassane Ouattara au pouvoir en 2025.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
« Trop tard », le post publié sur X quelques heures après l’appel de Laurent Gbagbo à l’union de tous ceux qui ne veulent plus voir le gouvernement d’Alassane Ouattara au pouvoir en 2025, était assez laconique et imprécis. Malgré tout, il a pu totaliser plusieurs centaines de commentaires sur ledit réseau, une dizaine de partages, et plusieurs quotidiens ivoiriens l’ont repris à leur une du lundi. Le concerné n’a jamais précisé à qui il répondait, mais des centaines d’internautes et la presse nationale l’ont analysé comme une réponse à l’appel à l’union de l’opposition lancé le 14 juillet à Bonoua par Laurent Gbagbo.
L’ancien président y avait conjuré tous ceux qui en ont assez du régime du président Alassane Ouattara à le rejoindre pour lui barrer la route pour un quatrième mandat. « J’ouvre mes bras à tous ceux qui veulent un rassemblement clair, politique, sain pour battre ce gouvernement. J’ouvre les bras, et je les attends », avait dit Gbagbo, sous un préau aménagé pour lui et sa suite.
De prime abord, le meeting de Bonoua avait paru problématique, vu qu’il n’avait pas été précédé d’une réconciliation a minima avec l’ex-première dame dont c’est la ville natale. Ensuite des tensions avaient été constatées lors de la préparation. Pour des jeunes du village, Gbagbo pouvait venir à Bonoua mais pas avec sa nouvelle épouse, Nadiany Bamba, dont cette visite constituait une nouvelle apothéose. La nouvelle égérie de l’ex-président avait en effet, sans le vouloir sans doute, provoqué les malheurs de Simone Gbagbo un jour du 17 juin 2021. Le retour de l’ex-président Gbagbo en Côte d’Ivoire qui s’est déroulé devant les caméras du monde entier en raison de son acquittement par la Cour pénale internationale qui l’avait blanchi de ses charges, avait en effet réservé une petite surprise. Le concerné était en effet rentré aux bras de sa maîtresse alors que son divorce n’avait pas encore été prononcé.
Des divisions irréconciliables
Depuis cette date, des divisions irréconciliables sont apparues au sein du parti. Cela rendait nécessaire l’implication de l’ex-première dame mais tout est finalement rentré dans l’ordre grâce à la médiation du Roi, Venance Miessan Kacou. En revanche, les réactions à l’appel à l’union formulé lors du discours de Gbagbo ont été mitigées. Sur le réseau X, les débats ont parfois été houleux entre les partisans de l’union et ceux qui ne croient plus en la sincérité de l’ex-président. Il y a en effet quatre mois, Laurent Gbagbo avait surpris son monde en affirmant que son rôle n’est pas d’unir la gauche de son pays mais de conduire son parti au pouvoir. Il avait aussi largement sabordé les bases de son ancienne coalition politique en rentrant au pays, accusant son ancien premier ministre, Affi N’guessan, de tenter de lui confisquer le parti d’alors, le Front populaire ivoirien (FPI) créé avec plusieurs de ses camarades dans les années 80, avant d’excommunier son ex-épouse, obligée de se caser en prenant la tête du Mouvement des générations capables (MGC). Mais Gbagbo snobait surtout son ancien compagnon de route, Blé Goudé, chef des jeunes patriotes durant sa présidence, qu’il refusait de recevoir en dépit des prévenances de celui-ci.
Un anti-union nommé
Du côté des partis politiques, seule la présidente de l’Union pour la république et la démocratie (URD) de l’ancienne ministre Danièle Boni-Claverie a souhaité que l’appel de l’ancien président soit entendu par tous mais aussi qu’il sache tendre la main. En revanche, ni le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), le parti le plus important de l’opposition, ni le MGC et le FPI n’ont pour l’heure commenté le discours de Gbagbo. Pendant ce temps, le Parti des peuples africains (PPA-CI) ne relâche pas la pression. Mardi, Laurent Gbagbo a publié un communiqué dans lequel il désigne comme « interlocuteur unique de toutes les personnes qui souhaiteraient le rejoindre dans ce combat » son Président-exécutif, Sébastien Dano Djédjé, ancien ministre de la réconciliation nationale et un antiunioniste assumé. Sa nomination montre que Laurent Gbagbo ne songe pas vraiment réunifier son camp et encore moins discuter des conditions politiques d’un regroupement avec ses anciens camarades dont certains exigent comme conditions préalables des explications de l’ex-président sur les positions qu’il a prises autrefois à leur encontre.
Mais il y a surtout ceux qui n’oublient pas qu’il y a quatre mois, l’ancien président avait dit qu’il ne voulait pas d’union. Et qu’en réalité, sa stratégie serait de saborder les plateformes d’union en cours. Dont celle qui réunit depuis plusieurs semaines autour de son ex-épouse et son parti politique, le Mouvement des générations capables (MGC), les principaux partis politiques de la Côte d’Ivoire. Qui entendent, dans les jours à venir, faire pression sur le gouvernement pour l’obliger à engager le débat sur la réforme électorale, le principal dénominateur commun.